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Code civil du Québec
 DISPOSITION PRÉLIMINAIRE
[Expand]LIVRE PREMIER : DES PERSONNES
[Expand]LIVRE DEUXIÈME : DE LA FAMILLE
[Expand]LIVRE TROISIÈME : DES SUCCESSIONS
[Expand]LIVRE QUATRIÈME : DES BIENS
[Collapse]LIVRE CINQUIÈME : DES OBLIGATIONS
 [Collapse]TITRE PREMIER : DES OBLIGATIONS EN GÉNÉRAL
  [Expand]CHAPITRE I - DISPOSITIONS GÉNÉRALES
  [Expand]CHAPITRE II - DU CONTRAT
  [Expand]CHAPITRE III - DE LA RESPONSABILITÉ CIVILE
  [Expand]CHAPITRE IV - DE CERTAINES AUTRES SOURCES DE L’OBLIGATION
  [Collapse]CHAPITRE V - DES MODALITÉS DE L’OBLIGATION
   [Expand]SECTION I - DE L’OBLIGATION À MODALITÉ SIMPLE
   [Collapse]SECTION II - DE L’OBLIGATION À MODALITÉ COMPLEXE
    [Collapse]§1. De l’obligation à plusieurs sujets
     [Expand]I - De l’obligation conjointe, divisible et indivisible
     [Collapse]II - De l’obligation solidaire
      [Collapse]1 - De la solidarité entre les débiteurs
        a. 1523
        a. 1524
        a. 1525
        a. 1526
        a. 1527
        a. 1528
        a. 1529
        a. 1530
        a. 1531
        a. 1532
        a. 1533
        a. 1534
        a. 1535
        a. 1536
        a. 1537
        a. 1538
        a. 1539
        a. 1540
      [Expand]2 - De la solidarité entre les créanciers
    [Expand]§2. De l’obligation à plusieurs objets
  [Expand]CHAPITRE VI - DE L’EXÉCUTION DE L’OBLIGATION
  [Expand]CHAPITRE VII - DE LA TRANSMISSION ET DES MUTATIONS DE L’OBLIGATION
  [Expand]CHAPITRE VIII - DE L’EXTINCTION DE L’OBLIGATION
  [Expand]CHAPITRE IX - DE LA RESTITUTION DES PRESTATIONS
 [Expand]TITRE DEUXIÈME : DES CONTRATS NOMMÉS
[Expand]LIVRE SIXIÈME : DES PRIORITÉS ET DES HYPOTHÈQUES
[Expand]LIVRE SEPTIÈME : DE LA PREUVE
[Expand]LIVRE HUITIÈME : DE LA PRESCRIPTION
[Expand]LIVRE NEUVIÈME : DE LA PUBLICITÉ DES DROITS
[Expand]LIVRE DIXIÈME : DU DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ
 DISPOSITIONS FINALES
 
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Article 1527

 
Code civil du Québec, RLRQ, c. CCQ-1991
 
Livre CINQUIÈME : DES OBLIGATIONS \ Titre PREMIER : DES OBLIGATIONS EN GÉNÉRAL \ Chapitre CINQUIÈME - DES MODALITÉS DE L’OBLIGATION \ Section II - DE L’OBLIGATION À MODALITÉ COMPLEXE \ 1. De l’obligation à plusieurs sujets \ II - De l’obligation solidaire \ 1 - De la solidarité entre les débiteurs
 
 

À jour au 8 juin 2024
Article 1527
Lorsque l’exécution en nature d’une obligation devient impossible par la faute ou pendant la demeure de l’un ou de plusieurs des débiteurs solidaires, les autres codébiteurs ne sont pas déchargés de l’obligation d’en payer l’équivalent au créancier, mais ils ne sont pas tenus des dommages-intérêts additionnels qui pourraient lui être dus.
Le créancier ne peut réclamer des dommages-intérêts additionnels qu’aux codébiteurs par la faute desquels l’obligation est devenue impossible à exécuter et qu’à ceux qui étaient alors en demeure de l’exécuter.
1991, c. 64, a. 1527
Article 1527
Where specific performance of an obligation has become impossible through the fault of one or more of the solidary debtors, or at a time when one or more of the solidary debtors are in default, the other co-debtors are not discharged from their obligation to make an equivalent payment to the creditor, but they are not liable for additional damages which may be owed to him.
The creditor may not claim additional damages except from those co-debtors through whose fault the obligation became impossible to perform, and from those who were then in default for failing to perform it.
1991, c. 64, s. 1527; I.N. 2014-05-01; I.N. 2015-11-01

Annotations
Code civil du Québec annoté (2023) par Jean-Louis Baudouin et Yvon Renaud (mise à jour no. 7)Information
FermerExtraits de : Baudouin, Jean-Louis et Renaud, Yvon, Code civil du Québec annoté, 26e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2023 (version intégrale dans eDOCTRINE).

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Les obligations (2024), vol. 2, par Vincent KarimInformation
FermerExtraits de : Karim, Vincent, Les obligations, vol. 2, 6e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2024 (version intégrale dans eDOCTRINE).

La recherche en jurisprudence est à jour au 1er mars 2024.
ANNOTATIONS
1. Sources

750. Cet article reprend les principes antérieurement prévus à l’article 1109 C.c.B.-C., en ce qui concerne l’application des principes relatifs à l’impossibilité d’exécution en nature d’une obligation qui survient par la faute d’un débiteur, ou pendant qu’il est en demeure de l’exécuter. Aucune modification de fond n’a été apportée à ce principe, contrairement aux propositions de l’Office de révision du Code civil856 qui, dans le but de préserver les intérêts du créancier lors de l’inexécution fautive de l’un des débiteurs, étendait la responsabilité solidaire à tous les codébiteurs, et ce, même si ces derniers n’avaient commis aucune faute ou n’étaient pas en demeure de s’exécuter. Ainsi, seules des modifications de forme ont été apportées à ce principe qui reste, pour l’essentiel, conforme au droit antérieur.

2. Responsabilité pour l’inexécution de l’obligation
A. Principe et nature

751. Cet article prescrit que l’exécution en nature d’une obligation qui devient impossible par la faute ou pendant la demeure de l’un ou de plusieurs des débiteurs solidaires ne décharge pas les autres de leur responsabilité pour son exécution. Ces derniers ne peuvent cependant être tenus responsables pour les dommages-intérêts additionnels qui pourraient être dus au créancier. Ces dommages-intérêts ne peuvent être dus que par celui ou ceux qui ont commis la faute ou qui étaient alors en demeure d’exécuter l’obligation.

752. Les dommages-intérêts additionnels mentionnés à cet article peuvent s’ajouter à la valeur de la prestation inexécutée. Cette valeur concerne le coût de l’acquisition de la chose alors que les dommages-intérêts additionnels représentent les pertes ou les gains manqués que le créancier subit en raison de l’inexécution de l’obligation. On fait ainsi une distinction avec les dommages-intérêts qui pourraient être réclamés et pouvant éventuellement s’y ajouter857.

753. Quant aux effets de la mise en demeure à l’égard des autres codébiteurs, les articles 1599, 1600 et 1693 C.c.Q. complètent cette disposition. Ainsi, l’article 1599 al. 1 C.c.Q. précise que « la demande extrajudiciaire par laquelle le créancier met l’un des débiteurs solidaires en demeure vaut à l’égard des autres débiteurs ». Par conséquent, on peut se demander si l’application de l’article 1527 C.c.Q. ne devient pas aléatoire dès lors qu’une demande extrajudiciaire est adressée à l’un des codébiteurs, puisque tous les débiteurs solidaires sont alors censés être en demeure, et peuvent ainsi être tenus aux dommages-intérêts additionnels pouvant s’ajouter à la valeur de la chose. En raison des termes utilisés par le législateur au sein de cet article, nous croyons que cette disposition ne permet au créancier de réclamer des dommages-intérêts additionnels qu’à celui ou à ceux des débiteurs qui avaient été personnellement constitués en demeure. En effet, s’il n’en était pas ainsi, le débiteur fautif ou celui mis personnellement en demeure aggraverait la situation des autres. Or, l’idée de représentation mutuelle ne peut pas s’appliquer en cas de faute commise par l’un des codébiteurs solidaires, ni nuire aux débiteurs qui n’ont pas commis de faute ou qui n’ont pas été mis personnellement en demeure. À titre d’illustration, on peut citer le cas du mandataire qui utilise à son profit l’information qu’il obtient ou encore le bien ou la somme d’argent qu’il est chargé de recevoir ou d’administrer. L’article 2160 C.c.Q. prévoit également qu’un mandant ne peut être tenu responsable envers le tiers des actes du mandataire qui vont au-delà des limites de son mandat. Dans le même ordre d’idées, l’article 1516 C.c.Q. dispose que la déchéance du terme encourue par l’un des débiteurs solidaires est inopposable aux autres codébiteurs. À l’instar de ces deux dispositions, l’article 1527 C.c.Q. veut que la faute de l’un des codébiteurs solidaires ne puisse aggraver la situation ni la responsabilité des autres envers le créancier.

754. Dans le cas d’une vente, l’acheteur peut être obligé, suite à la perte du bien causée par la faute de l’un des vendeurs, de payer un prix supplémentaire pour se procurer le même bien. Ce prix supplémentaire, constituant des dommages-intérêts additionnels au sens de l’article 1527 C.c.Q., ne peut être réclamé qu’au vendeur fautif ou à celui qui a effectivement reçu la mise en demeure. Il en est de même lorsque cet acheteur est un professionnel ou artisan qui a acheté un bien pour exercer sa profession ou exécuter des contrats conclus avec des tiers. La perte ou le gain manqué, ainsi que les pénalités qu’il a dû payer (car il a été lui-même empêché d’exécuter ses propres obligations envers ses contractants) en raison de l’inexécution de l’obligation solidaire par les vendeurs, constituent des dommages-intérêts additionnels ne pouvant être réclamés qu’au vendeur fautif ou à celui qui a effectivement reçu la mise en demeure. Par analogie, ce raisonnement peut s’appliquer aux dommages-intérêts additionnels prévus dans une clause contractuelle découlant d’un contrat de prêt. Cette clause, qui est maintenant valable selon le dernier alinéa de l’article 1617 C.c.Q., peut s’appliquer seulement au codébiteur solidaire qui a reçu effectivement la mise en demeure, ou à celui qui est l’unique responsable de la perte de la somme d’argent destinée à acquitter la dette solidaire. En d’autres termes, les autres codébiteurs solidaires n’ayant pas reçu la mise en demeure du créancier et n’étant pas responsables du défaut de paiement peuvent invoquer l’article 1527 C.c.Q. en défense, afin de se soustraire au paiement des dommages-intérêts additionnels prévus au contrat.

1) Recours entre les codébiteurs

755. Le codébiteur solidaire qui s’est vu obligé de payer au créancier l’indemnité pour l’inexécution de l’obligation ou la perte du bien faisant l’objet de l’obligation, dispose de deux recours contre ses codébiteurs. Le premier recours, le recours subrogatoire, permet d’agir contre ces derniers pour réclamer à chacun sa part dans le montant de l’indemnité en conformité avec l’article 1536 C.c.Q. et, ce, sans égards à la responsabilité de l’un ou de l’autre pour l’inexécution de l’obligation. Le deuxième recours s’exécute selon l’article 1537 al. 2 C.c.Q. contre le codébiteur qui par sa faute a causé la perte du bien ou a empêché l’exécution de l’obligation858. Dans ce dernier cas, il s’agit d’un recours récursoire qui permet au codébiteur ayant payé au créancier le montant de l’indemnité de réclamer à son codébiteur fautif la totalité de ce montant.

a) Distinction entre le recours subrogatoire et le recours récursoire

756. Ainsi, il importe de faire la distinction entre le recours subrogatoire et le recours récursoire. Le recours subrogatoire s’exerce de plein droit, compte tenu des dispositions des articles 1536 et 1656(3) C.c.Q. qui prévoient le droit du codébiteur solidaire ayant acquitté la dette ou l’indemnité accordée par la Cour de réclamer par subrogation la part de son codébiteur dans le montant payé. Par contre, le recours récursoire est fondé sur la responsabilité d’un codébiteur solidaire ou d’un codéfendeur ayant été condamné par la Cour à payer solidairement avec d’autres codéfendeurs le montant de l’indemnité accordé au demandeur. Ainsi, le codébiteur solidaire ou le codéfendeur condamné solidairement avec son codéfendeur peut réclamer soit le montant total de la dette payée ou de l’indemnité accordée, ou encore, une partie de celles-ci s’il considère que son codébiteur est responsable de l’inexécution de l’obligation solidaire ou que son codéfendeur est le responsable principal de l’obligation de réparation en raison de sa faute.

757. Une distinction s’impose également au niveau des points de départ des délais de prescription entre le recours subrogatoire et le recours récursoire. Dans le premier cas et lorsqu’il y a une solidarité parfaite, l’article 1529 C.c.Q. prévoit le droit du codébiteur poursuivi par le créancier à faire intervenir son codébiteur solidaire par une action en intervention forcée et s’il s’agit d’une caution, le débiteur principal tenu à l’exécution de l’obligation envers le créancier. Dans ce cas, le point de départ pour le délai de prescription doit être la date de la notification de l’action par le demandeur. Par contre, dans le cas d’un recours récursoire qui constitue en fait une action en responsabilité pour faute, le point de départ du défendeur sera la date où le jugement rendu devient définitif. Dans le cas d’un recours en garantie, le demandeur en garantie peut toujours invoquer l’impossibilité de fait d’agir, ce qui empêche le cours du délai contre lui selon l’article 2904 C.c.Q.859.

758. Il importe cependant de noter que les deux recours, subrogatoire et récursoire, ne peuvent être exercés ensemble puisque le débiteur ayant compensé le créancier sera enrichi injustement s’il réclame à la fois le montant total de son codébiteur fautif et aux autres codébiteurs leur part respective. Il doit donc choisir entre ces deux recours selon son intérêt. Il peut toutefois exercer son recours subrogatoire contre tous ses codébiteurs et exercer en même temps un recours récursoire contre celui qui est responsable de l’inexécution de l’obligation à condition de limiter sa réclamation dans le cadre de ce dernier recours à sa propre part qu’il devait en principe assumer en l’absence d’une responsabilité pour l’inexécution de l’obligation conformément à l’article 1536 C.c.Q. Ce recours récursoire peut aussi être exercé par tous les autres codébiteurs et réclamer chacun du codébiteur fautif la part qu’il a payé au codébiteur subrogé.

759. Quant au codébiteur ayant dû payer des dommages-intérêts additionnels au créancier conformément à l’article 1527 C.c.Q. en raison du simple fait qu’il a reçu personnellement la mise en demeure adressée par ce dernier, il dispose seulement d’un recours récursoire contre le codébiteur qui par sa faute a rendu impossible l’exécution en nature de l’obligation.

b) Moyens de défenses pour les codébiteurs

760. Aussi, il nous semble qu’un jugement prononcé contre l’un des débiteurs solidaires ne doit pas avoir autorité de chose jugée à l’égard des autres débiteurs, à moins que ces derniers ne soient intervenus au litige ou n’aient été mis en cause ou appelés en garantie. Le débiteur solidaire qui n’a pas été impliqué dans le litige peut se trouver face à deux situations. Dans le premier cas, le créancier n’a pas réussi à faire exécuter le jugement qu’il a obtenu contre le débiteur solidaire. Dans ce cas, ce jugement ne lie pas les autres débiteurs. Le créancier peut toujours intenter une nouvelle action contre les débiteurs ou l’un d’entre eux. Il doit alors faire sa preuve contre eux sans pouvoir bénéficier de son jugement. Les débiteurs peuvent alors opposer à sa nouvelle demande tous les moyens communs et personnels conformément à l’article 1530 C.c.Q.

761. Dans le cas où le créancier réussit à exécuter le jugement rendu contre le codébiteur condamné, celui-ci peut réclamer à ses codébiteurs leur part dans la dette. Dans ce cas, chacun des débiteurs peut, en vertu de l’article 1539 C.c.Q., soulever à l’encontre du débiteur les moyens communs que ce dernier n’a pas opposés au créancier tels, la nullité du contrat, la prescription, ou la remise de dette, par exemple, même en l’absence de mauvaise foi de sa part. Chacun des codébiteurs peut également lui opposer les moyens qui lui sont personnels tel que la compensation, la remise partielle de dette, la confusion, etc.

762. Notons également l’application de l’article 1600 al. 2 C.c.Q. selon lequel le débiteur « répond aussi, à compter de la demeure, de toute perte qui résulte d’une force majeure, à moins qu’il ne soit alors libéré ». Le débiteur est libéré « lorsque le créancier n’aurait pu, de toute façon, bénéficier de l’exécution de l’obligation en raison de cette force majeure ; à moins que, dans l’un et l’autre des cas, le débiteur ne soit expressément chargé des cas de force majeure »860. Un débiteur solidaire peut, par stipulation expresse, être chargé des cas de force majeure. Également, par stipulation expresse, le débiteur peut se décharger de la responsabilité prévue à l’article 1527 C.c.Q., tant pour les dommages-intérêts additionnels que pour le prix de la chose, puisque cet article n’est pas d’ordre public.

763. Le législateur n’a pas repris les exceptions des articles 1128 et 1130 C.c.B.-C. ayant trait à la divisibilité de l’obligation pour les héritiers. L’omission ne permet pas de conclure à une volonté du législateur d’étendre à l’indivisibilité la règle prévue pour la solidarité à l’article 1527 C.c.Q.861. Cependant, le législateur n’a voulu produire cette règle qu’en matière de clause pénale862. Ainsi, le créancier n’est pas en mesure de réclamer la totalité de la clause pénale de l’un ou l’autre des codébiteurs indivisibles, alors que cette clause a été l’objet d’une convention. Il ne peut, a priori, réclamer à l’un des codébiteurs indivisibles la totalité des dommages-intérêts résultant de l’inexécution d’une obligation en nature qu’elle soit indivisible de par sa nature ou par stipulation.

B. Perte survenant après la demeure

764. Le deuxième alinéa de l’article 1527 C.c.Q. s’applique également lorsque l’un des codébiteurs solidaires reçoit une mise en demeure d’exécuter son obligation et que la perte survient par la suite. Si la perte est causée par la force majeure alors que le débiteur n’a pas exécuté son obligation avant l’expiration du délai prévu dans la mise en demeure, le codébiteur solidaire l’ayant reçu sera le seul responsable envers le créancier pour les dommages-intérêts additionnels que celui-ci peut réclamer. Les intérêts sur la somme due, au taux convenu ou au taux légal, ainsi que l’indemnité additionnelle, ne peuvent être considérés comme dommages-intérêts additionnels au sens de l’article 1527 C.c.Q. Que l’obligation soit pécuniaire ou en nature, le créancier peut réclamer à l’un ou à l’autre des codébiteurs solidaires, et même à ceux qui ne sont pas responsables de la perte ou de l’inexécution, les intérêts selon l’article 1617 C.c.Q. et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. sur le montant de la créance ou sur le montant accordé à titre d’indemnité compensatoire.

C. Limitation de la représentation mutuelle

765. Par ailleurs, dans l’hypothèse où le codébiteur poursuivi se défend mal ou ne se défend pas, cette notion de représentation mutuelle peut soulever certaines difficultés. C’est pourquoi il est normal de limiter ce pouvoir de représentation. Les actes accomplis par le créancier à l’égard de l’un des codébiteurs visant la protection de ses droits, doivent valoir à l’encontre des autres codébiteurs. Par contre, ces derniers ne doivent pas subir les conséquences des actes accomplis par l’un d’eux et qui peuvent avoir pour effet d’aggraver leur responsabilité ou d’augmenter la dette. Le respect des droits des codébiteurs solidaires exige que la théorie du mandat mutuel ne reçoive pas son application lorsque l’acte accompli par l’un d’eux n’est pas dans leur intérêt. C’est le cas lorsqu’un débiteur solidaire renonce à la prescription ou conclut avec le créancier une transaction désavantageuse. De tels actes ne sont pas opposables aux autres codébiteurs863.

766. À titre d’exemple, un acheteur pourrait s’adresser uniquement à son vendeur professionnel pour obtenir paiement à la suite de la découverte d’un vice caché affectant le bien vendu, et ce, malgré le fait que ce dernier a une obligation solidaire avec le fabriquant d’honorer la garantie légale relative à la qualité du bien864. Le vendeur professionnel ne pourrait pas, en principe, opposer à l’acheteur avec succès le bénéfice de division, étant solidairement tenu responsable avec le fabriquant d’honorer cette garantie865. Cependant, un engagement contractuel pris par le fabricant de remplacer le bien défectueux par un bien neuf ne peut obliger le vendeur professionnel à un tel remplacement, car il ne peut être tenu à cet engagement souscrit subséquemment par le fabricant qui lui est préjudiciable. Néanmoins, un tel engagement ne peut l’exonérer de toute responsabilité envers son acheteur et il demeure tout de même tenu d’honorer à son égard la garantie légale relative à la qualité du bien. L’exécution de celle-ci est soumise au régime général de la mise en œuvre du droit à l’exécution de l’obligation, soit à l’application des articles 1601 et suivants C.c.Q.866.

767. Enfin, notons que le débiteur qui n’étant pas responsable par sa faute de l’inexécution de l’obligation se voit obligé de payer au créancier la valeur de la chose ou des dommages-intérêts additionnels puisqu’il a valablement été constitué en demeure par le créancier, dispose du recours récursoire contre le codébiteur responsable de la perte ou qui a rendu l’exécution de l’obligation impossible. Par exemple, le vendeur professionnel poursuivi par l’acheteur en raison d’un vice caché affectant le bien vendu aurait un recours récursoire contre son fabricant, lorsque ce dernier avait évité de lui faire part du fait que le bien en question avait été conçu selon une nouvelle conception ou avait tout simplement omis de l’informer des problèmes antérieurement rencontrés avec les biens fabriqués selon cette conception. Il importe aussi de préciser que le recours sera possible même en l’absence d’une preuve à l’effet que le vendeur aurait tout de même procédé à la vente s’il avait été au courant de ces problèmes éventuels867.


Notes de bas de page

856. O.R.C.C., art. 160.

857. MINISTÈRE DE LA JUSTICE, art. 1527.

858. Pour la distinction entre ces deux recours, voir nos commentaires sur l’article 1536 C.c.Q.

859. Gendron c. Bourassa Chevrolet Buick GMC ltée, AZ-51453659, 2017 QCCS 5869.

860. Art. 1693 C.c.Q.

861. J.-L. BAUDOUIN, Les obligations, 4e éd., Montréal, Éditions Yvon Blais, 1993, n° 889, p. 504.

862. Art. 1624 C.c.Q.

863. Dessau inc. c. G. Mitchell Chauffage et climatisation cie ltée, AZ-51292059, J.E. 2016-1104, 2016EXP-1994, 2016 QCCS 2438.

864. Article 1730 C.c.Q.

865. Article 1528 C.c.Q.

866. Dessau inc. c. G. Mitchell Chauffage et climatisation cie ltée, AZ-51292059, J.E. 2016-1104, 2016EXP-1994, 2016 QCCS 2438.

867. Ibid.

Wilson et Lafleur

La diffusion de l'ouvrage Les obligations, vol. 2 de Vincent Karim, et publié par Wilson et Lafleur, est rendue possible grâce à une licence accordée au CAIJ par Wilson et Lafleur.

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Législation citée (Québec et CSC)  
Lancer une requête de législation citée, pour l'article, en
 
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Concordances  
 
 
  • Code civil du Bas Canada : art. 1109
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Commentaires du ministre de la Justice  
 
Article 1527 (LQ 1991, c. 64)
Lorsque l'exécution en nature d'une obligation devient impossible par la faute ou pendant la demeure de l'un ou de plusieurs des débiteurs solidaires, les autres codébiteurs ne sont pas déchargés de l'obligation d'en payer l'équivalent au créancier, mais ils ne sont pas tenus des dommages-intérêts additionnels qui pourraient lui. être dus.

Le créancier ne peut réclamer des dommages-intérêts additionnels codébiteurs par la faute desquels l'obligation est devenue impossible à exécuter et qu'à ceux qui étaient alors en demeure de l'exécuter.
Article 1527 (SQ 1991, c. 64)
Where specific performance of an obligation has become impossible through the fault of one or more of the solidary debtors, or after he or they have been put in default, the other co-debtors are not released from their obligation to make an equivalent payment to the creditor, but they are not liable for additional damages which may be owed to him.

The creditor may not claim additional damages except from those co-debtors through whose fault the obligation became impossible to perform, and from those who were then in default.
Sources
C.C.B.C. : article 1109
O.R.C.C. : L. V, article 160
Commentaires

Cet article reproduit, sous une forme différente, les règles particulières de l'article 1109 C.C.B.C. concernant l'application, en présence de débiteurs solidaires, des principes relatifs à l'impossibilité d'exécution en nature d'une obligation qui survient par la faute d'un débiteur ou pendant qu'il est en demeure de l'exécuter. Il n'a pas été jugé opportun d'apporter une modification de fond au droit antérieur.


Les dommages-intérêts additionnels dont fait état le présent article, sont ceux qui s'ajoutent éventuellement au montant représentant la valeur de la prestation inexécutée, valeur que l'article 1109 C.C.B.C. indiquait comme étant le prix de la chose, par opposition aux autres dommages-intérêts qui peuvent s'y ajouter.


Extrait de : Ministère de la Justice, Commentaires du ministre de la Justice - Le Code civil du Québec , t. 1, Québec, Les Publications du Québec, 1993.
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Débats parlementaires et positions  
 
 

1.  Code civil du Québec, LQ 1991, c. 64, a. 1527

 
Référence à la présentation : Projet de loi 125, 1re sess, 34e lég, Québec, 1990, a. 1525.
 
Étude détaillée dans le Journal des débats :
 
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Les lois du Québec sont reproduites avec l'autorisation de l'Éditeur officiel du Québec.
Les Code civil du Bas Canada et Code civil du Québec (1980) sont reproduits avec l'autorisation de Wilson et Lafleur.