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Code civil du Québec
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  [Expand]CHAPITRE II - DU CONTRAT
  [Expand]CHAPITRE III - DE LA RESPONSABILITÉ CIVILE
  [Expand]CHAPITRE IV - DE CERTAINES AUTRES SOURCES DE L’OBLIGATION
  [Collapse]CHAPITRE V - DES MODALITÉS DE L’OBLIGATION
   [Collapse]SECTION I - DE L’OBLIGATION À MODALITÉ SIMPLE
    [Expand]§1. De l’obligation conditionnelle
    [Collapse]§2. De l’obligation à terme
      a. 1508
      a. 1509
      a. 1510
      a. 1511
      a. 1512
      a. 1513
      a. 1514
      a. 1515
      a. 1516
      a. 1517
   [Expand]SECTION II - DE L’OBLIGATION À MODALITÉ COMPLEXE
  [Expand]CHAPITRE VI - DE L’EXÉCUTION DE L’OBLIGATION
  [Expand]CHAPITRE VII - DE LA TRANSMISSION ET DES MUTATIONS DE L’OBLIGATION
  [Expand]CHAPITRE VIII - DE L’EXTINCTION DE L’OBLIGATION
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 DISPOSITIONS FINALES
 
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Article 1512

 
Code civil du Québec, RLRQ, c. CCQ-1991
 
Livre CINQUIÈME : DES OBLIGATIONS \ Titre PREMIER : DES OBLIGATIONS EN GÉNÉRAL \ Chapitre CINQUIÈME - DES MODALITÉS DE L’OBLIGATION \ Section I - DE L’OBLIGATION À MODALITÉ SIMPLE \ 2. De l’obligation à terme
 
 

À jour au 8 juin 2024
Article 1512
Lorsque les parties ont convenu de retarder la détermination du terme ou de laisser à l’une d’elles le soin de le déterminer et qu’à l’expiration d’un délai raisonnable, elles n’y ont point encore procédé, le tribunal peut, à la demande de l’une d’elles, fixer ce terme en tenant compte de la nature de l’obligation, de la situation des parties et de toute circonstance appropriée.
Le tribunal peut aussi fixer ce terme lorsqu’il est de la nature de l’obligation qu’elle soit à terme et qu’il n’y a pas de convention par laquelle on puisse le déterminer.
1991, c. 64, a. 1512
Article 1512
Where the parties have agreed to delay the determination of the term or to leave it to one of them to make such determination and where, after a reasonable time, no term has been determined, the court may, upon the application of one of the parties, fix the term according to the nature of the obligation, the situation of the parties and any appropriate circumstances.
The court may also fix the term where a term is required by the nature of the obligation and there is no agreement as to how it may be determined.
1991, c. 64, s. 1512; 2016, c. 4, s. 186

Annotations
Code civil du Québec annoté (2023) par Jean-Louis Baudouin et Yvon Renaud (mise à jour no. 7)Information
FermerExtraits de : Baudouin, Jean-Louis et Renaud, Yvon, Code civil du Québec annoté, 26e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2023 (version intégrale dans eDOCTRINE).

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Les obligations (2024), vol. 2, par Vincent KarimInformation
FermerExtraits de : Karim, Vincent, Les obligations, vol. 2, 6e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2024 (version intégrale dans eDOCTRINE).

La recherche en jurisprudence est à jour au 1er mars 2024.
ANNOTATIONS
1. Généralités

358. Cet article codifie les enseignements de la doctrine383 et de la jurisprudence384 relativement à la grande latitude conférée aux tribunaux afin que ces derniers puissent fixer un terme, lorsque celui-ci n’a pas été déterminé par les parties contractantes. Il s’agit d’une règle de droit qui couvre des situations où la date de l’exécution de l’obligation n’est pas fixée, mais où les parties, bien conscientes que l’obligation est à terme, se limitent à mentionner les circonstances de son exécution. C’est le cas, par exemple, lorsqu’on prévoit que le débiteur sera tenu à l’exécution lors de la survenance d’un événement quelconque tel que la vente de son bien ou lorsqu’il commencera à travailler. Dans ce cas, bien que le terme quant à l’exigibilité de l’obligation ne soit pas fixé avec précision, il sera cependant déterminable par l’arrivée de l’événement prévu par les parties.

359. Sous l’ancien régime, l’article 1783 C.c.B.-C., au chapitre du contrat de prêt, permettait au juge de déterminer le terme eu égard aux circonstances. L’article 1512 C.c.Q. reprend cette règle, mais la généralise à toutes les obligations à terme.

2. Les parties conviennent de retarder le terme

360. Il peut arriver que les parties contractent une obligation et conviennent de retarder la détermination de la date de son exigibilité ou laissent à l’une d’elles la responsabilité de déterminer cette date. Or, lorsque le moment de déterminer le terme survient, il s’avère parfois que les parties ne sont pas en mesure de s’entendre ou que la partie qui avait l’obligation de déterminer le terme omette ou néglige de le faire. Afin de régler cette impasse, le tribunal peut, à la demande de l’une des parties, intervenir et fixer ce terme en dégageant l’intention réelle des parties au moyen de certains critères tels, la nature de l’obligation, la situation des parties et toutes autres circonstances pertinentes et ce, afin d’éviter qu’une créance ne reste à jamais exigible385.

361. À titre d’exemple, dans le cas d’un contrat de vente d’une résidence prévoyant que le vendeur y demeure tout en payant une indemnité à l’acheteur jusqu’à ce que ce dernier ait vendu sa propre résidence, le tribunal pourra dans la mesure où la vente de la maison ne survient pas dans un délai raisonnable, fixer un terme à l’obligation du vendeur d’occuper la maison vendue386. Il en serait de même dans le cas d’une promesse d’achat dont l’obligation du promettant-acheteur, de finaliser la vente, est à terme sans toutefois fixer la date de son échéance. Dans un tel cas, bien que le promettant-acheteur soit tenu de donner suite à sa promesse et de conclure la vente387, le promettant-vendeur ne pourrait lui reprocher son refus de conclure la vente, tant et aussi longtemps qu’il n’a pas renoncé au bénéfice du terme ou que le tribunal n’a pas, conformément à l’article 1512 C.c.Q., déterminé son échéance. Cependant, le tribunal pourrait tenir le promettant-acheteur responsable des dommages subis par le promettant-vendeur lorsque la preuve révèle que sa conduite était empreinte de mauvaise foi et ce, même si les faits établis sont insuffisants pour conclure à sa faute en refusant de finaliser la transaction388.

362. En raison de la situation financière du débiteur, le créancier peut dans certains cas, se montrer conciliant envers ce dernier afin de l’aider à traverser cette période difficile, surtout lorsqu’il est de son intérêt de le faire. Les circonstances ayant entouré la collaboration entre les deux parties notamment leurs conduite et comportement relatifs à l’exigibilité de l’obligation, peuvent être des indices significatifs permettant de conclure à l’existence d’une part, d’une obligation à terme indéterminé et d’autre part, d’une reconnaissance de dette par le débiteur, ce qui interrompt la prescription. Dans ce cas, le terme peut correspondre au jour où le créancier, après avoir donné à son débiteur un délai raisonnable, met celui-ci en demeure de lui rembourser la somme prévue au contrat de prêt389. Le créancier doit cependant agir avec prudence et exiger à son débiteur de renoncer à la prescription avant de lui accorder un délai de grâce.

363. Il importe de ne pas confondre la règle prévue à l’article 1510 C.c.Q. avec celle de l’article 1512 C.c.Q. Chacune de ces deux règles s’applique à des situations complètement différentes. Ainsi, la première règle permet au tribunal de déclarer l’obligation exigible lorsque la date d’échéance était déterminable mais l’événement dont elle dépend ne peut plus avoir lieu. Il s’agit d’un événement futur mais son arrivée dépend des circonstances qui ne relèvent pas de la volonté des parties. Si, plus tard, ces circonstances rendent l’arrivée du terme impossible, il y a lieu de déclarer l’obligation échue.

364. La certitude ou l’incertitude du terme de l’obligation peut être appréciée selon un critère subjectif afin de tenir compte de l’intention des parties. Il en est ainsi de l’obligation de l’employé de rembourser son prêt lorsque son revenu atteint un montant fixé à l’avance par les parties. Si le débiteur quitte son emploi, cette cessation rend évident le fait que l’employé ne pourra pas atteindre le montant fixé par les parties comme un événement certain pour l’arrivée de l’échéance. À moins d’une preuve contraire, le tribunal peut considérer que le terme est arrivé compte tenu du fait que l’événement ne se produira pas dans un laps de temps prévisible390. Il en est de même aussi lorsqu’une compagnie s’engage à rembourser sa dette une fois qu’elle a obtenu un financement avec l’aide d’une autre compagnie ou tierce personne. Si cette dernière personne cesse ses activités, il devient évident que le financement ne sera pas obtenu, ce qui permet par conséquent de considérer l’obligation de la compagnie immédiatement exigible conformément à l’article 1510 C.c.Q.391.

365. Quant à elle, la règle prévue à l’article 1512 C.c.Q. s’applique lorsque les parties ont convenu de retarder la détermination du terme ou de laisser à l’une d’elles le soin de le déterminer. À défaut par les parties de convenir postérieurement de la date ou lorsque la partie chargée de la déterminer refuse de le faire dans un délai raisonnable, le créancier peut alors s’adresser au tribunal pour que celui-ci exerce ses discrétions et ainsi déterminer le terme à la place des parties. Le tribunal ne peut toutefois fixer le terme seulement par l’exercice de sa discrétion, puisque celle-ci doit être exercée en prenant en considération les critères établis au premier alinéa de l’article 1512 C.c.Q., notamment la nature de l’obligation à être exécutée, les situations des parties et les conséquences pouvant résulter pour chacune d’elles en attendant la date qu’il fixe pour l’exécution de l’obligation392.

366. La différence entre la règle de l’article 1510 C.c.Q. et celle de l’article 1512 C.c.Q. consiste dans le fait que la première s’applique lorsque l’événement duquel dépend l’arrivée du terme ne se produira plus en raison des circonstances qui ne relèvent de la volonté des parties. La deuxième règle s’applique lorsque l’une des parties manque volontairement à son obligation de déterminer le terme alors qu’elle s’est chargée de le faire ou s’est engagée à collaborer avec l’autre partie à le déterminer selon leur entente.

367. Également, en plus de fixer un terme à la demande des parties, le tribunal peut déterminer l’exigibilité de l’obligation lorsqu’il est de la nature de l’obligation qu’elle soit à terme et qu’il n’y a pas de convention par laquelle on puisse la déterminer393. Notons aussi que le terme peut être déterminé par le tribunal lorsque le débiteur prévoit dans la convention qu’il paiera « quand il le pourra » ou « quand il en aura les moyens »394 ou encore lorsque les parties conviennent que le débiteur devra procéder au remboursement du prêt « lorsque sa situation financière le permettra »395. Cet engagement constitue une véritable obligation à terme et non une obligation purement potestative396 puisqu’un remboursement est un événement certain plutôt qu’incertain. Il en est de même lorsque l’on retrouve l’expression « à la convenance des parties » dans la convention liant les parties397.

368. Un terme pourra donc être fixé par le tribunal lorsque les parties ont convenu que la dette sera exigible dès qu’il sera possible pour le débiteur de la rembourser. Il peut à titre d’exemple, fixer comme date de remboursement du prêt la date de la vente de l’immeuble du débiteur, car par cette vente, celui-ci sera dans une situation financière lui permettant de procéder à ce remboursement. Ce ne serait alors qu’à partir de la date de la vente que le délai de prescription extinctive commencerait à courir contre le créancier et non pas à partir du moment où le prêt a été consenti398 ni de la date du jugement ayant fixé le terme.

369. Après un certain temps de la naissance de l’obligation du débiteur, alors que son exécution dépend de la survenance d’une situation particulière, le créancier qui ne peut plus l’attendre peut demander au tribunal de fixer un terme précis. Plusieurs circonstances pourront dans ce cas, être prises en considération pour déterminer s’il convient de fixer un terme, notamment l’âge avancé du créancier, la période sur laquelle le prêt a été consenti et le délai déjà écoulé, ainsi que l’endettement du créancier, lesquels constituent aussi des facteurs permettant de déterminer le terme399. L’échéance peut donc être fixée par le tribunal en tenant compte d’un déséquilibre résultant de l’entente des parties qui permet au créancier d’être exigeant ou bien au débiteur de profiter de la situation pour retarder indûment l’exécution de son obligation.

3. Terme résultant de la nature de l’obligation

370. Contrairement au prêt d’argent sur demande où la prescription commence à courir à partir de la date de conclusion du contrat, dans le cas d’un prêt à terme, le point de départ du délai de prescription sera la date de l’arrivée du terme fixé par les parties. Rappelons que le terme suspend l’exigibilité de l’obligation et que le créancier ne peut forcer son débiteur au paiement à moins qu’il ne soit désigné comme étant le seul bénéficiaire du terme. Il va de soi que dans le cas où le terme n’est pas fixé, la créance n’est pas exigible, et donc que la prescription extinctive ne court qu’à compter de l’expiration du terme fixé postérieurement400.

371. Il peut paraître étrange pour des parties de conclure un contrat de prêt d’argent sans déterminer un taux d’intérêt ni un terme de remboursement. Cette situation peut se produire lorsqu’il s’agit d’un cas d’urgence ou même tout simplement lorsqu’il existe un lien de confiance entre les parties, qui décident de reporter à une date postérieure la détermination de la date de remboursement ainsi que le taux d’intérêt à payer par l’emprunteur401.

372. Lorsqu’il est de la nature de l’obligation qu’elle soit à terme et que les parties n’ont pas déterminé ce terme dans leur entente, la disposition de l’article 1512 C.c.Q. trouve son application. Le deuxième alinéa de cet article permet au tribunal de fixer un terme lorsqu’il est de la nature de l’obligation qu’elle soit à terme et que la convention liant les parties ne contient aucune clause permettant de le déterminer.

373. Deux conditions sont toutefois requises pour que le tribunal puisse intervenir et fixer la date de l’exigibilité de l’obligation. D’abord, il faut que l’obligation soit, de par sa nature, une obligation à terme, telle l’obligation de rembourser un prêt d’argent (art. 2314 C.c.Q.), et ensuite qu’il y ait absence d’un terme convenu entre les parties relativement à l’exécution de l’obligation402.

374. À défaut de remplir l’une ou l’autre de ces deux conditions, le tribunal doit refuser d’intervenir. C’est le cas, ainsi, lorsqu’on prévoit dans un contrat de prêt que l’emprunteur doit rembourser son prêt au moyen de versements raisonnables quand il travaillera. Dans ce cas, il y a une convention qui détermine le terme et le tribunal ne peut pas intervenir pour modifier la convention et fixer un autre terme403.

375. Le tribunal peut cependant intervenir et fixer une date pour l’exigibilité de l’obligation, lorsque cette date est incertaine et que son arrivée dépend en partie de la volonté du débiteur. Si ce dernier agit avec négligence ou de mauvaise foi dans la réalisation du terme et ne fait pas d’efforts suffisants et raisonnables pour trouver une source lui permettant d’acquitter sa dette, le tribunal peut, eu égard aux circonstances, à la situation des parties et au délai déjà écoulé, soit fixer un terme pour l’exécution de l’obligation par le débiteur, soit déclarer ce dernier déchu du bénéfice du terme conformément à l’alinéa 2 de l’article 1514 C.c.Q.

376. La raison d’être de cette règle est la nécessité de fixer le terme afin que certaines conséquences juridiques du contrat prennent effet entre les parties. Il en est ainsi notamment en ce qui concerne l’exigibilité de l’obligation et la date de départ de la prescription extinctive. Étant donné que la prescription ne commence à courir qu’à l’expiration du terme, il est normal de permettre au créancier, dans le cas où les parties ne s’entendent pas sur sa fixation, de s’adresser au tribunal et lui demander d’exercer son pouvoir en vertu de la règle de l’article 1512 C.c.Q. La prescription extinctive commence à courir lorsque la créance devient exigible. Une dette peut donc exister entre deux parties sans qu’une date ne soit fixée pour son paiement, ce qui retarde son échéance et par ce fait même empêche le délai de prescription de commencer à courir404.

377. En l’absence d’une stipulation dans le contrat qui indique directement ou indirectement que le prêt est « sur demande », ce prêt doit être considéré comme étant un prêt à terme. En effet, il n’existe aucune disposition législative permettant de conclure qu’il s’agit d’un prêt sur demande. Ainsi, dans le cas d’un prêt d’argent qui ne contient aucune mention quant à la date du remboursement, l’obligation du débiteur ne peut être considérée comme une obligation pure et simple exigible sur demande, mais plutôt comme une obligation à terme permettant à la partie concernée de requérir du tribunal, en conformité avec l’article 1512 C.c.Q., de fixer le terme. Pour ce faire, le tribunal peut tenir compte de l’importance de l’obligation, de la situation des parties et de toutes circonstances appropriées405.

378. D’ailleurs, selon l’article 2314 C.c.Q., lorsque la nature du prêt laisse croire à son remboursement, le débiteur est forcément tenu à l’obligation de l’acquitter406. L’article 1512 C.c.Q. comporte deux alinéas qui prévoient deux situations distinctes. Le premier alinéa traite du cas où les parties ont convenu qu’elles fixeront le terme du prêt postérieurement à la conclusion du contrat. Dans cette situation, lorsqu’elles ne s’entendent pas sur un terme, le tribunal peut le fixer compte tenu de la nature de l’obligation et des circonstances reliées à la situation des deux parties. Le deuxième alinéa traite du cas où les parties laissent régner le silence quant à la date de remboursement du prêt. Le tribunal peut alors intervenir pour déterminer la date de son échéance407.

379. L’article 1512 C.c.Q. confère au tribunal une large discrétion. Ce dernier peut ainsi intervenir pour fixer le terme d’une obligation prévue dans toute entente liant les parties ou même de toute obligation dont l’existence est reconnue par elles. Il en est ainsi lorsque deux parties se reconnaissent une obligation naturelle n’étant aucunement prévue de façon législative. Cette obligation, n’étant assujettie à aucun terme, doit être considérée comme une obligation à terme donnant lieu à l’application de l’article 1512 C.c.Q.

380. Lorsque les parties conviennent dans le contrat que l’exigibilité de l’obligation dépendrait de leurs moyens et de leurs besoins respectifs, le tribunal aura discrétion en vertu de l’article 1512 C.c.Q. non seulement d’imposer un terme mais également d’établir le montant de l’obligation408.

381. Il convient toutefois de souligner que l’article 1512 C.c.Q. ne permet pas au tribunal d’usurper le pouvoir de négociation d’une partie. En effet, ce dernier ne peut intervenir entre deux cocontractants dans la mesure où le processus de négociation s’avère normal, et ce, malgré l’impasse et la demande d’une des parties de fixer un terme en vertu de l’article 1512 C.c.Q. À titre d’illustration, une partie qui présente une demande pour fixer le terme de l’obligation ne peut s’attendre à une intervention de la part du tribunal si l’autre partie, refuse le terme, les modalités et les conditions déraisonnables proposés par la requérante. L’intervention du tribunal dans ce type de situation ne serait pas justifiée puisque la partie qui refuse le terme, modalités et conditions que cherche à lui imposer l’autre n’agit pas nécessairement de mauvaise foi ou abusivement en faisant une contre-proposition raisonnable ou lorsqu’elle invite cette dernière à reconsidérer sa position409.


Notes de bas de page

383. L. FARIBAULT, Traité de droit civil du Québec, n° 134, p. 102.

384. Carmerlain c. Pagé et Fils Ltée, [1958] C.S. 430 ; Passfield c. Truchon, AZ-99026222, B.E. 99BE-454 (C.S.).

385. Voir à titre d’exemple : Demers c. Caisse populaire de Gentilly, AZ-95021930, J.E. 95-2147 (C.S.) ; Domtar inc. c. Grantech inc., 2002 CanLII 63219 (QC CA), AZ-50136647, J.E. 2002-1256 (C.A.) ; Paradis c. Côté, AZ-95031248, J.E. 95-1163 (C.Q.) : Un cas où il a été décidé que l’article 1512 C.c.Q. ne s’appliquait pas ; Max Shrier & Associates Ltd. c. Stern, AZ-50455896, J.E. 2007-2221, 2007 QCCQ 11654 (C.Q.) : le tribunal conclut que le prêt était exigible sans délai et prend en considération le fait que le créancier ne faisait pas le commerce d’argent ainsi que les « usages » applicables en l’espèce.

386. Côté c. Bruneault, AZ-50660319, 2010EXP-2685, 2010 QCCS 3383, [2010] R.L. 405 (appel rejeté sur demande (C.A., 2010-10-25), 500-09-020982-104, AZ-50685188, 2010 QCCA 1967).

387. Article 1396 C.c.Q.

388. Verret c. Boisvert, AZ-51288597, J.E. 2016-1058, 2016EXP-1906, 2016 QCCS 2298.

389. Coulaud c. 3108627 Canada inc., AZ-50497042, J.E. 2008-1436, 2008 QCCQ 4852 ; Roy c. Banque Nationale du Canada, AZ-50474215, J.E. 2008-679, 2008 QCCS 575. Voir contra : Max Shrier & Associates Ltd. c. Stern, AZ-50455896, J.E. 2007-2221, 2007 QCCQ 11654 ; Comeau c. Couture, AZ-51302057, 2016EXP-2276, 2016 QCCA 1134.

390. Contra : Commission des normes du travail c. Lafrenière, 2004 CanLII 9083 (QC CQ), AZ-50229679, D.T.E. 2004T-439, J.E. 2004-900, [2004] R.J.D.T. 595 (C.Q.).

391. Patrician Diamonds Inc. c. Reflex Systems Inc., AZ-50180978, B.E. 2003BE-532 (C.S.).

392. Leblond (Succession de) c. Lettre, 2009 QCCQ 4853, AZ-50558838.

393. Voir : Demers c. Caisse populaire de Gentilly, AZ-95021930, J.E. 95-2147 (C.S.).

394. Tourangeau c. Gatowski, 2004 CanLII 31921 (QC CQ), AZ-50253943, J.E. 2004-1335 (C.Q.).

395. Boisvert c. Investissements D.M.A. inc., AZ-98036242, B.E. 98BE-537 (C.Q.) ; Droit de la famille — 161578, AZ-51301077, J.E. 2016-1259, 2016EXP-2257, 2016 QCCS 3058.

396. Voir dans ce sens : Paradis c. Côté, AZ-95031248, J.E. 95-1163 (C.Q.) ; Demers c. Caisse populaire de Gentilly, AZ-95021930, J.E. 95-2147 (C.S.) ; Lacasse c. Lacasse, 1998 CanLII 11610 (QC CS), AZ-98021351, J.E. 98-757 (C.S.) ; Droit de la famille — 161578, AZ-51301077, J.E. 2016-1259, 2016EXP-2257, 2016 QCCS 3058.

397. Mercier c. Mercier, AZ-86021518, J.E. 86-1119 (C.S.).

398. Droit de la famille — 161578, AZ-51301077, J.E. 2016-1259, 2016EXP-2257, 2016 QCCS 3058.

399. Richard c. Boucher, AZ-50985637, 2013 QCCS 3142 ; Leblond (Succession de) c. Lettre, AZ-50558838, J.E. 2009-1175, 2009 QCCQ 4853.

400. 9022-8818 Québec inc. (Magil Construction ltée) (Syndic de), 2005 QCCA 275, AZ-50300170.

401. Dionne St-Arneault c. Cannasher inc., 2023 QCCS 559, AZ-51918242.

402. Voir un cas où les deux conditions ont été remplies : Demers c. Caisse populaire de Gentilly, AZ-95021930, J.E. 95-2147 (C.S.). Voir aussi Dionne St-Arneault c. Cannasher inc., 2023 QCCS 559, AZ-51918242.

403. Voir : Paradis c. Côté, AZ-95031248, J.E. 95-1163 (C.Q.) ; Desrochers c. Bédard, 2024 QCCQ 459, AZ-52005631.

404. 9022-8818 Québec inc. (Magil Construction ltée) (Syndic de), AZ-50300170, J.E. 2005-611, 2005 QCCA 275 ; Coulaud c. 3108627 Canada inc., AZ-50497042, J.E. 2008-1436, 2008 QCCQ 4852 ; Comeau c. Couture, AZ-51302057, 2016 QCCA 1134 ; Droit de la famille — 19224, AZ-51571012, 2019EXP-772, 2019 QCCS 654, (Déclaration d’appel, 2019-03-29 (C.A.) 500-09-028210-193. Requête en rejet d’appel, 2019-04-16 (C.A.) 500-09-028210-193. Requête de bene esse pour permission d’appeler hors délai, 2019-05-02 (C.A.) 500-09-028210-193.)

405. Dionne St-Arneault c. Cannasher inc., 2023 QCCS 559, AZ-51918242.

406. Dionne St-Arneault c. Cannasher inc., 2023 QCCS 559, AZ-51918242 ; Uniprix inc. c. Gestion Gosselin et Bérubé inc., 2015 QCCA 1427, AZ-51213425, confirmée sur cet élément par la Cour suprême : Uniprix inc. c. Gestion Gosselin et Bérubé inc., 2017 CSC 43, AZ-51412992 ; 9022-8818 Québec inc. (Magil Construction ltée) (Syndic de), 2005 QCCA 275, AZ-50300170 ; Isacco (Succession de Isacco) c. Spencer, 2019 QCCS 4362, AZ-51638010 ; Ladouceur c. Giguère, 2022 QCCQ 8418, AZ-51894095 ; Labbé c. Chagnon, 2017 QCCQ 11515, AZ-51432137 ; Baker c. Blais, 2014 QCCQ 9175, AZ-51112138.

407. Uniprix inc. c. Gestion Gosselin et Bérubé inc., 2015 QCCA 1427, AZ-51213425, confirmée sur cet élément par la Cour suprême : Uniprix inc. c. Gestion Gosselin et Bérubé inc., 2017 CSC 43, AZ-51412992.

408. Ponton c. Dubé, AZ-50309643, B.E. 2005BE-462, 2005 QCCA 413 (C.A.) ; K.V. c. C.G., AZ-50292776, J.E. 2005-481, [2005] R.D.F. 251 (C.S.) ; Demers c. Demers, AZ-50290376, J.E. 2005-350 (C.Q.).

409. Côté c. Entreprises Barrette ltée, AZ-50172655, D.T.E. 2003T-520, J.E. 2003-971 (C.A.).

Wilson et Lafleur

La diffusion de l'ouvrage Les obligations, vol. 2 de Vincent Karim, et publié par Wilson et Lafleur, est rendue possible grâce à une licence accordée au CAIJ par Wilson et Lafleur.

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Législation citée (Québec et CSC)  
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Concordances  
 
 
  • Code civil du Bas Canada : art. 1783
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Commentaires du ministre de la Justice  
 
Article 1512 (LQ 1991, c. 64)
Lorsque les parties ont convenu de retarder la détermination du terme ou de laisser à l'une d'elles le soin de le déterminer et qu'à l'expiration d'un délai raisonnable, elles n'y ont point encore procédé, le tribunal peut, à la demande de l'une d'elles, fixer ce terme en tenant nature de l'obligation, de la situation des parties et de toute circonstance appropriée.

Le tribunal peut aussi fixer ce terme lorsqu'il est de la nature de l'obligation qu'elle soit à terme et qu'il n'y a pas de convention par laquelle on puisse le déterminer.
Article 1512 (SQ 1991, c. 64)
Where the parties have agreed to delay the determination of the term or to leave it to one of them to make such determination and where, after a reasonable time, no term has been determined, the court may, upon the application of one of the parties, fix the term according to the nature of the obligation, the situation of the parties and the circumstances.

The court may also fix the term where a term is required by the nature of the obligation and there is no agreement as to how it may be determined.
Sources
C.C.B.C. : article 1783
O.R.C.C. : L. V, article 136
Commentaires

Cet article, de droit nouveau, comble une lacune du Code civil du Bas Canada.


Il arrive, en effet, que les parties à une obligation conviennent, au moment où elles se lient, de retarder la détermination du moment où cette obligation sera exigible, voire de laisser à l'une d'elles le soin de déterminer ce terme. Or, il vient inévitablement un temps où le terme doit être fixé et il se peut, alors, que les parties ne s'entendent pas sur celui-ci ou que la partie qui s'était vu confier le soin de le fixer tarde à le faire : le Code civil du Bas Canada ne prévoyait aucune solution générale à cette impasse.


Le présent article, qui s'inspire de l'article 1783 C.C.B.C. relatif au prêt, corrige cette situation en permettant dans ce cas au tribunal, comme dans tous les cas où il est de l'essence d'une obligation qu'elle soit à terme sans que celui-ci n'ait été déterminé par les parties, de fixer le terme en tenant compte, entre autres circonstances appropriées, de la nature de l'obligation et de la situation des parties.


La nouvelle règle couvre, entre autres situations, celle des obligations de payer quand on le pourra ou quand on en aura les moyens, lesquelles ont été considérées par la doctrine et la jurisprudence comme étant de véritables obligations à terme, parce que constituant des engagements fermes et non conditionnels.


Extrait de : Ministère de la Justice, Commentaires du ministre de la Justice - Le Code civil du Québec , t. 1, Québec, Les Publications du Québec, 1993.
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Débats parlementaires et positions  
 
 

1.  Code civil du Québec, LQ 1991, c. 64, a. 1512

 
Référence à la présentation : Projet de loi 125, 1re sess, 34e lég, Québec, 1990, a. 1508.
 
Étude détaillée dans le Journal des débats :
 
 

2.  Loi visant à assurer une meilleure concordance entre les textes français et anglais du Code civil, LQ 2016, c. 4, a. 186

 
Référence à la présentation : Projet de loi 89, 1re sess, 41e lég, Québec, 2016, a. 186.
 
Étude détaillée dans le Journal des débats :
 
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Les lois du Québec sont reproduites avec l'autorisation de l'Éditeur officiel du Québec.
Les Code civil du Bas Canada et Code civil du Québec (1980) sont reproduits avec l'autorisation de Wilson et Lafleur.