Art. 2102. L’entrepreneur ou le
prestataire de services est tenu, avant la conclusion du contrat, de fournir
au client, dans la mesure où les circonstances le permettent, toute
information utile relativement à la nature de la tâche qu’il s’engage à
effectuer ainsi qu’aux biens et au temps nécessaires à cette fin.
|
|
Art. 2102. Before the contract is entered into, the
contractor or the provider of services is bound to provide the client, as far
as circumstances permit, with any useful information concerning the nature of
the task which he undertakes to perform and the property and time required
for that task.
|
P.L. 125
2090. À moins
que le contrat n’ait été conclu en considération de ses qualités personnelles
ou que cela ne soit incompatible avec la nature même du contrat, l’entrepreneur
ou le prestataire de services peut s’adjoindre un tiers pour l’exécuter; il conserve néanmoins la direction et la
responsabilité de l’exécution.
[Page
275]
C.c.Q. : art. 6, 7, 1375, 1416 suiv., 1457 suiv., 2104, 2107, 2108, 2117.
L.Q. :
Code de déontologie des architectes, RLRQ, c.
A-21, r. 3.
Code de déontologie des avocats, RLRQ, c. B-1, r. 1.
Code de déontologie des comptables
agréés, RLRQ, 1981, c. C-48, r. 2.
Code de déontologie des ingénieurs, RLRQ, c. I-9, r. 3.
Code de déontologie des médecins, RLRQ, c. M-9.
Code de déontologie des membres de l’Ordre
des urbanistes du Québec, Décret 917-99 du 18 août 1999, (1999) 131 G.O.
II, 2984.
Code de déontologie des notaires, RLRQ, c. N-2, r. 3.
Code de déontologie professionnelle, Association du Barreau canadien, Ottawa, 1988.
Code des professions, RLRQ, c. C-26.
Loi sur le Barreau, RLRQ, c. B-1.
Loi sur le courtage immobilier, RLRQ, c. C-73.
Loi sur les architectes, RLRQ, c. A-21.
Loi sur les ingénieurs, RLRQ, c. I-19.
Loi sur le notariat, RLRQ, c. N-2.
Loi sur les valeurs mobilières, RLRQ, c. V-1.1.
1. Introduction
731. L’article 2102 C.c.Q. qui s’inscrit dans un mouvement de
rééquilibrage du droit civil, codifie l’enseignement
jurisprudentiel et doctrinal tel que
développé au fil des ans en matière de l’obligation de renseignement. Bien que
le législateur ait codifié dans le chapitre qui traite des obligations en
général (à l’art. 1375 C.c.Q.) l’obligation
de bonne foi, il a cru opportun de consacrer une disposition spécifique à l’article
2102 C.c.Q. prévoyant l’obligation
de l’entrepreneur et du
[Page 276]
prestataire de
services de renseigner adéquatement leur client. Cette obligation se justifie par le fait que le client, qui se retrouve
souvent dans une position informationnelle vulnérable,
n’est pas en mesure de faire face à ces professionnels spécialisés et
expérimentés et de négocier avec eux en toute connaissance de cause.
732. Cet article impose donc à l’entrepreneur et au prestataire de services
une obligation de renseignement, à savoir informer le client de toutes
questions relatives à la nature des tâches qu’ils s’engagent à effectuer, aux
matériaux qu’ils prévoient utiliser et au temps nécessaire à la réalisation de
l’ouvrage ou à la fourniture du service. Il importe de
rappeler que cette obligation existait même avant l’adoption du Code civil
du Québec dans certaines règles générales
et dans diverses normes légales et règlementaires,
et avait été imposée ponctuellement à certains entrepreneurs et prestataires de
services par les tribunaux.
733. L’article 2102 C.c.Q.
innove cependant en ce qu’il formalise un devoir de renseignement applicable à
tous les entrepreneurs et prestataires de services. Il importe toutefois de
rappeler que l’obligation de l’entrepreneur ou du prestataire de services de
renseigner ne libère en rien le client de son obligation de se renseigner
lui-même et de s’intéresser à son affaire lorsqu’il pourra avoir accès à ces
informations.
[Page 277]
2. L’obligation
d’information et ses corollaires
734. Pour que la conclusion du contrat se réalise avec objectivité et
transparence, chacune des parties doit adopter, dès le début des négociations,
une attitude et une conduite conformes aux exigences de la bonne foi.
Les règles relatives à la bonne foi, de l’article 1375 C.c.Q., et au devoir d’information,
de l’article 2102 C.c.Q., revêtent
une importance particulière dans le domaine des contrats d’entreprise et de
prestation de services.
A. L’obligation de renseignement de l’entrepreneur
ou du prestataire de services : fondements
735. Afin de donner un consentement valable, le client doit être en mesure
de conclure le contrat d’entreprise ou de services en toute connaissance de
cause, de façon libre et éclairée. C’est ce qui explique
la nature protectrice et précontractuelle du devoir d’information
de l’article 2102 C.c.Q. Il s’agit,
en fait, d’une obligation de renseignement ayant pour objet la divulgation des
informations pertinentes relatives aux risques inhérents à l’exécution de l’ouvrage,
à la nature des tâches et des
biens, à la qualité et au
coût des matériaux, au temps nécessaire
[Page 278]
pour l’exécution des
travaux et au coût de cette
exécution. À moins d’indications
contraires telles qu’une clause d’exonération portant sur une question qui n’est
pas d’ordre public, ce devoir de renseigner s’étend à tout travail qui découle
de la nature du contrat.
736. Afin de remplir son obligation de renseignement avant la conclusion du
contrat, l’entrepreneur ou le prestataire de services doit fournir à son client
une estimation qui fait mention de tous les frais prévisibles par rapport aux
matériaux et au temps requis pour exécuter les travaux.
L’omission d’agir ainsi pourrait constituer un manquement à son obligation de renseignement
justifiant selon la gravité de ce manquement ou du préjudice qui en résulte l’imposition
d’une sanction appropriée pouvant être la nullité du contrat, une diminution du
prix ou un refus d’accorder une somme d’argent à titre du prix supplémentaire.
737. Par ailleurs, l’entrepreneur ou le prestataire de services doit
renseigner le client en toute objectivité sur tout problème ou difficulté qu’il
pourra rencontrer lors de l’exécution du contrat envisagé, et ce, même avant sa
conclusion. Le défaut de fournir au client des renseignements concernant une
difficulté qui a été connue lors de la conclusion du contrat peut constituer
une faute civile. Même lorsque ce défaut ne constitue pas une faute civile, il
pourra être sanctionné par une diminution des honoraires ou du prix des services qu’il a rendus si l’erreur
commise a un effet négatif sur la qualité des services rendus. Il en est ainsi
lorsqu’un arbitre fait défaut de divulguer des renseignements qui ont mené plus
tard à sa récusation et que son défaut d’agir a eu un impact négatif sur le
processus d’arbitrage. Le client qui a retenu ses services pourra alors avoir
droit à une diminution des honoraires qu’il lui doit pour les services rendus
avant sa récusation. Le client doit cependant faire la preuve de l’existence d’un
lien de causalité entre le défaut de
[Page 279]
divulguer les
renseignements pertinents et la
diminution de la valeur des services fournis.
738. Il importe de mentionner que cette obligation incombe à l’entrepreneur
et au prestataire de services tout au long de la relation contractuelle avec le
client. Il s’agit, en fait, d’une
obligation continue qui doit être remplie dès la phase précontractuelle et
durant l’exécution des travaux ou des prestations de services, notamment
lorsque des modifications sont apportées aux travaux prévus initialement au
contrat et que ces modifications étaient imprévisibles lors des négociations.
Ainsi, lorsque l’entrepreneur doit effectuer des travaux additionnels qui n’étaient
pas prévisibles lors de conclusion du contrat, il doit fournir à son client
toute information nécessaire afin d’obtenir son approbation de façon libre et
éclairée quant aux travaux suggérés et à leur coût, notamment en lui
fournissant une estimation détaillée concernant ces travaux. En d’autres
termes, le client doit être bien informé du coût additionnel relatif à l’achat
de nouveaux matériaux ou à la main-d’œuvre nécessaire pour compléter les
travaux additionnels et ce, avant même que
l’entrepreneur débute l’exécution de ces travaux.
739. Dans certains cas, l’obligation de l’entrepreneur ou du prestataire de
services ne se limite pas à une obligation d’information mais peut devenir, en
cours d’exécution du contrat, une obligation de coopération, de transparence
et de loyauté, voire un devoir de conseil. Il importe cependant de distinguer l’obligation
de conseil de l’obligation d’information qui en tant qu’obligation
de moyens sera remplie par la communication au client des renseignements
pertinents alors que dans le cas du devoir de conseil, l’entrepreneur ou le
prestataire de services doit s’assurer que les informations transmises ont été
bien saisies par le
[Page 280]
client et qu’il peut s’en servir pour prendre la décision qui lui convient.
Dans certains cas, le devoir de conseil impose à l’entrepreneur et au
prestataire de services l’obligation de mettre en garde le client contre tout
problème pouvant surgir au cours de l’exécution du contrat.
740. L’obligation de renseigner de l’entrepreneur ou du prestataire de
services prend fin là où l’obligation de se renseigner du client débute.
À titre d’illustration, un client qui omet de suivre les instructions prévues
dans le manuel du fabricant pourra difficilement attribuer la responsabilité
pour les dommages subis à l’installateur de l’équipement en invoquant que
celui-ci a fait défaut de l’informer sur la marche à suivre lorsqu’il fait l’utilisation
de l’appareil en question.
741. Enfin, l’entrepreneur est tenu à d’autres obligations, notamment celle
d’agir dans le meilleur intérêt de son client. Il doit ainsi considérer les
intérêts particuliers de ce dernier et prendre ses décisions concernant la
méthode d’exécution et les biens à incorporer dans l’ouvrage en toute
conformité avec la loi et les stipulations du contrat. Ainsi, il doit se
conformer aux usages et règles de l’art applicables dans l’industrie en
question selon leur dernière évolution.
B. L’obligation de renseignement du
client
742. Le respect de l’obligation de renseignement qui découle de l’article 2102 C.c.Q. et de la bonne foi (art. 1375 C.c.Q.), s’illustre, entre autres, par une
coopération et une étroite collaboration devant être omniprésente non seulement
lors de la négociation et de la conclusion du contrat,
mais aussi, durant son exécution. Il s’agit d’une
obligation
[Page 281]
générale de bonne foi qui s’impose à tout contractant dès la
conclusion du contrat et jusqu’à son
extinction.
743. L’obligation
prévue à l’article 2102 C.c.Q. est
unilatérale. L’article ne vise que l’entrepreneur ou le prestataire de services
et ne mentionne aucune obligation corrélative du client. Celui-ci a, toutefois, une obligation de se renseigner
qui découle de l’article 1375
C.c.Q. En effet, tout client a le devoir général qu’a tout créancier de
se renseigner en regard de la théorie de l’acceptation des risques. Ce devoir général de prudence et de diligence oblige le
client à chercher à en savoir davantage sur tout ce qui intéresse son affaire.
744. L’obligation
de renseigner de l’article 2102 C.c.Q. peut aussi revêtir la forme d’une obligation de ne pas faire forçant
ainsi le client à ne pas donner de fausses indications à l’entrepreneur ou au prestataire de services. Dans le cas contraire, le client
engage sa responsabilité pour les risques que ce dernier n’a pas pu évaluer en
toute connaissance des faits. Cette obligation de
renseigner adéquatement doit être remplie par le client sans égard au type de
contrat proposé. Elle prend cependant toute son importance en matière de contrat
à forfait. Ainsi, lorsque les documents d’appel d’offres contiennent des
informations erronées, il peut arriver que l’entrepreneur n’évalue pas
correctement les coûts des travaux et les risques associés au chantier. Dans ce
cas, le client en tant que donneur d’ouvrage doit être tenu responsable des
coûts supplémentaires encourus par l’entrepreneur, et ce, même en
[Page 282]
présence d’un contrat à forfait.
Bien que ce type de contrat comporte des risques inhérents, ces
risques doivent être acceptés par l’entrepreneur ou le prestataire de services en
toute connaissance des faits pertinents à leur évaluation et de manière éclairée. Le donneur d’ouvrage ne peut même invoquer sa bonne foi pour justifier son
omission de fournir certaines informations à l’entrepreneur ou au prestataire
de services lorsque ce manquement a dénaturé l’acceptation des risques par ce
dernier.
745. Dans Walsh & Brais Inc. c. Montréal (Communauté urbaine),
la Cour d’appel a conclu que le maître de l’ouvrage ne peut se libérer de
son obligation de renseignement en invoquant une clause d’exonération de
responsabilité. La jurisprudence et la doctrine considèrent que l’obligation de
renseignement, découlant de la règle de bonne foi, est d’ordre public.
Ainsi, le maître de l’ouvrage qui procède par appel d’offres doit, pour remplir
son obligation de renseignement, indiquer dans son cahier des charges les
informations qui lui ont été fournies par l’expert ayant fait, à sa demande,
une étude relative à l’ouvrage envisagé. Cette obligation de renseignement du
maître d’ouvrage est une obligation positive et sans réserve.
746. À titre d’illustration,
il doit indiquer les informations relatives à la nature du sol, pour ainsi permettre aux entrepreneurs de faire un
choix judicieux, concernant notamment la machinerie à utiliser. Si le maître de
l’ouvrage ne renseigne pas correctement l’entrepreneur quant aux conditions du
sol, il sera responsable du paiement des coûts des travaux supplémentaires qui
découlent du changement de la méthode d’excavation en cours des travaux.
747. Cette
obligation de renseigner devient encore plus importante lorsque le maître de l’ouvrage
a une expertise supérieure, par exemple, dans la géologie du sol en question.
Il faut cependant préciser
[Page 283]
que l’entrepreneur a
également une obligation de prendre connaissance des documents et études qui
lui sont fournis, puisque l’obligation de renseigner ne vise pas l’information
que ce dernier peut obtenir en se comportant avec diligence.
748. La plupart des
sanctions à l’inexécution de l’obligation de renseignement tirent leur source
de recours en dommages-intérêts. C’est la voie privilégiée que la Cour d’appel
a adoptée dans l’affaire Walsh & Brais Inc. c. Montréal
(Communauté urbaine). Dans cette
affaire, il fallait déterminer si un manquement à l’obligation de renseignement
à l’étape du processus de soumission constituait un motif de nullité du
contrat. La Cour a dû déterminer si le défaut portait sur un élément essentiel
pouvant ainsi justifier la nullité du contrat. En l’espèce, elle a accordé des
dommages-intérêts et a refusé la nullité du contrat recherchée par l’appelante,
sans toutefois exclure la possibilité de sanctionner par la nullité le défaut
de renseignement lorsqu’il est assimilable à un dol ayant vicié le
consentement.
749. Dans l’affaire
Banque de Montréal c. Bail Ltée, la
Cour suprême a reconnu qu’un sous-traitant qui est un tiers vis-à-vis du maître
de l’ouvrage peut invoquer en sa faveur un manquement de ce dernier à son
obligation de renseigner l’entrepreneur, dans la mesure où le maître de l’ouvrage
a failli aux normes de comportement d’une personne raisonnable. Ainsi, dans le
cas où le donneur d’ouvrage n’aurait pas transmis à l’entrepreneur toutes les
informations lui permettant d’avoir une vue d’ensemble de la situation, le
sous-traitant qui en subirait un préjudice, ayant un contrat avec l’entrepreneur
et étant donc un tiers vis-à-vis du donneur d’ouvrage, pourrait se retourner
vers ce dernier et le poursuivre directement sur la base d’une action en
responsabilité extracontractuelle.
C. L’obligation de renseignement de l’entrepreneur
envers le sous-traitant
750. L’obligation
de renseigner de l’article 2102 C.c.Q. trouve aussi son application lorsque l’entrepreneur
fait affaire avec un sous-traitant. Il doit
fournir à ce dernier toutes les informations pertinentes et nécessaires avant
la conclusion du contrat, notamment celles relatives à la nature et à la bonne
exécution des travaux, tel que le stipule le contrat intervenu entre lui et le
maître de l’ouvrage. Il doit
[Page 284]
également transmettre au sous-traitant tout document lui permettant d’évaluer la nature et l’étendue
des travaux, tel que l’étude de faisabilité, les
cahiers de charge, les plans et devis. Lorsque l’entrepreneur omet de
transmettre certains documents et qu’ultérieurement cette omission entraîne une augmentation des coûts des travaux, le sous-traitant pourra lui réclamer
une compensation pour toute perte engendrée
par une telle omission.
751. Rappelons
toutefois qu’à l’instar du maître de l’ouvrage,
le sous-traitant a lui aussi une obligation corrélative de se renseigner lui-même et de renseigner l’entrepreneur sur tout développement.
Ainsi, si le sous-traitant néglige
d’obtenir en temps utile certaines informations nécessaires à l’exécution des travaux ou de l’ouvrage,
il ne pourra réclamer à l’entrepreneur
ni au maître de l’ouvrage les
sommes qui lui sont dues suite à l’exécution des travaux si ces derniers ne sont pas exécutés
conformément aux demandes du maître
de l’ouvrage. Il est vrai que l’article 2102 C.c.Q. ne
fait pas directement référence à l’obligation
du sous-traitant de se renseigner, mais cette obligation découle
de la règle de bonne foi qui impose à tout contractant l’obligation de se renseigner.
Cette obligation demeure pertinente pour le tribunal
qui devra la prendre en considération lors de l’évaluation de
la question relative à l’exécution de l’obligation de renseigner par l’entrepreneur ou le maître de l’ouvrage à l’égard
du sous-traitant.
D. Portée
et étendue de l’obligation d’information
752. Il faut se référer à la doctrine et à la jurisprudence afin de
connaître l’étendue de l’obligation de renseignement.
L’intensité de celle-ci peut être également déterminée en tenant compte,
notamment
[Page 285]
du type de contrat en cause,
de la personnalité et de l’expertise des contractants,
de la connaissance réelle ou présumée du client,
de l’importance de cette information, des conditions ayant entouré la négociation
contractuelle, de l’impossibilité du cocontractant ou de son sous-traitant de
se renseigner lui-même, de sa confiance légitime en son entrepreneur ou le
prestataire de services et de l’ensemble de la situation reliée au contenu du
contrat. Cela étant dit, dans
le même type de contrat, l’étendue de l’obligation de renseignement de l’entrepreneur
ou du prestataire de services peut varier en fonction de la personnalité du
client, du degré de sa connaissance en la matière et de la complexité des prestations
à fournir ou de l’ouvrage à réaliser.
753. Il est
difficile d’établir avec précision la portée et l’étendue de l’obligation en
matière contractuelle puisque chaque cas constitue un cas d’espèce. La
détermination et l’évaluation relatives au remplacement de l’obligation de
renseignement exigent l’application de critères à la fois objectifs et
subjectifs. En effet, certaines informations sont communes au même type de
contrat, de sorte que le prestataire de services ou l’entrepreneur est tenu à
communiquer ces informations à ses clients. L’évaluation de l’accomplissement
de cette obligation exige l’application d’un critère objectif, soit le critère
d’un professionnel prudent, diligent et raisonnable qui doit connaître l’importance
de ces informations pour
[Page 286]
son cocontractant. Dans
certains cas, l’application de ces critères objectifs peut être insuffisante
pour évaluer si l’obligation de renseignement a été bien remplie. Le tribunal
peut procéder dans ces cas à l’application d’un critère subjectif, qui doit
tenir compte du besoin du client par rapport à la complexité du dossier et des
questions pouvant être soulevées à l’occasion de l’exécution du contrat.
754. Il importe
cependant de noter que compte tenu de certaines particularités et
spécifications de l’ouvrage faisant l’objet du contrat intervenu entre les
parties, l’entrepreneur ou le prestataire de services peut être tenu à une
obligation de vérifier ou d’effectuer des recherches sur les informations
fournies par le client afin de s’assurer de leur exactitude et le cas échéant,
de rectifier ces informations compte tenu des circonstances particulières du
contrat. Il peut cependant être dispensé de faire ces vérifications lorsque le
maître de l’ouvrage avait bénéficié des services de professionnels compétents
et qui lui ont fourni des conseils pertinents à son projet ou lorsqu’ils ont
préalablement procédé à des études de faisabilité portant sur l’ouvrage envisagé.
Par contre, lorsque le maître d’ouvrage possède une expertise encore plus
poussée que l’entrepreneur dans le domaine en question, il peut être
inacceptable d’obliger ce dernier à vérifier toutes les informations fournies
par le maître d’ouvrage ou à refaire le travail qu’il a accompli lui-même ou
par l’entremise de ses experts.
755. Il appartient
aux parties de préciser dans leur contrat l’étendue de leurs obligations
réciproques ainsi que les risques assumés par chacune d’elles. En l’absence de
ces précisions, le tribunal ne peut refaire la rédaction du contrat pour
redéfinir l’étendue et l’importance de l’allocation des risques, tel qu’ils ont
été définis et répartis par les parties lors de la formation et de la
conclusion du contrat. Cependant, le tribunal peut vérifier si tous les
renseignements significatifs et pertinents ont été divulgués par l’une des
parties à l’autre afin de s’assurer que celle-ci avait accepté certains risques
en toute connaissance de chose. Dans ses démarches, le tribunal doit éviter l’ajout
de risques inattendus et ainsi respecter la volonté contractuelle de chacune d’elles.
[Page 287]