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Charte canadienne des droits et libertés
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[Expand]LIBERTÉS FONDAMENTALES
[Expand]DROITS DÉMOCRATIQUES
[Expand]LIBERTÉ DE CIRCULATION ET D’ÉTABLISSEMENT
[Collapse]GARANTIES JURIDIQUES
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  a. 14
[Expand]DROITS À L’ÉGALITÉ
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Article 9

 
Charte canadienne des droits et libertés (partie I de la Loi constitutionnelle de 1982 constituant l'annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, c. 11)
 
GARANTIES JURIDIQUES
 
 

Article 9
Détention ou emprisonnement

Chacun a droit à la protection contre la détention ou l’emprisonnement arbitraires.

Section 9
Detention or imprisonment

Everyone has the right not to be arbitrarily detained or imprisoned.

Annotations
Alter Ego : Chartes des droits de la personnee (2022) par Henri Brun, Pierre Brun et Fannie LafontaineInformation
FermerExtraits de : Henri Brun, Pierre Brun et Fannie Lafontaine, Chartes des droits de la personne : Législation, jurisprudence et doctrine, Collection Alter Ego, 35e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2022 (version intégrale dans eDOCTRINE).
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Traité de droit criminel. Tome IV, Les garanties juridiques (2021) par Hugues ParentInformation
FermerExtraits de : Parent, Hugues, Traité de droit criminel. Tome IV, Les garanties juridiques, 2e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2021 (version intégrale dans eDOCTRINE).

Table des matières

Deuxième section : La détention à des fins d’enquête

Troisième section : La détention en matière de conduite automobile

Quatrième section : La norme des « soupçons raisonnables »

Cinquième section : L’arrestation

Sixième section : La comparution

Septième section : L’arrestation effectuée dans une maison d’habitation

Huitième section : L’enquête sur la mise en liberté de l’accusé

Conclusion

Chapitre troisième - L’article 9

302. Nous devons maintenant quitter le domaine de la vie privée, de la protection contre les fouilles, saisies et perquisitions abusives, pour entrer dans les régions de la liberté, du choix de l’individu de coopérer ou non avec les policiers. Aux termes de l’article 9 de la Charte : « chacun a le droit à la protection contre la détention ou l’emprisonnement arbitraires ». Envisagé du point de vue de l’accusé, l’article 9 vise « à protéger la liberté individuelle contre l’ingérence injustifiée de l’État1244 ». La détention, l’arrestation et, à plus forte raison, l’emprisonnement constituent donc l’ensemble des mesures visées par cette disposition. Quant à l’étendue de la protection constitutionnelle, l’article 9 interdit la détention « arbitraire » du prévenu, la suspension de son droit à la liberté qui n’est pas autorisée par la loi ou la common law1245. D’un côté, le maintien de la paix, la prévention et la répression du crime et « de l’autre, le respect de la liberté et de la dignité fondamentale des individus1246 ». La protection contre la détention ou l’emprisonnement arbitraires s’inscrit donc dans cette tension, dans cet espace où s’affrontent les intérêts de l’État et ceux de l’accusé.

303. Comme la protection contre la détention ou l’emprisonnement arbitraires suppose la présence d’une intervention policière

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à l’origine de la suspension du droit à la liberté de l’individu, c’est de ce côté que nous allons commencer notre étude de l’article 9 de la Charte. À l’examen de la définition de la détention, succédera une analyse des différentes formes de détention actuellement reconnues par la loi ou la common law.

Première section : La définition de la détention

304. Du latin detinere, qui signifie « retenir, empêcher, tenir occupé », la détention désigne « la suspension du droit à la liberté d’une personne par suite d’une contrainte physique ou psychologique considérable1247 ». La suspension du droit à la liberté d’une personne, tout d’abord, puisqu’un individu qui « n’est pas libre de partir », qui est « privé du choix de s’en aller » ou « de collaborer ou non avec la police », fait l’objet d’une détention. Ici, la perte de liberté doit être réelle pour engager la protection constitutionnelle. La personne qui est « retenue » ou simplement « retardée » n’est pas détenue au sens de l’article 91248. C’est pouquoi le policier qui s’adresse à un passant, qui parle à un témoin ou qui aborde un suspect afin de voir « ce qui se passe », n’est pas tenu d’informer l’individu de son droit à l’assistance d’un avocat1249. La détention,

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rappelons-le, exige une contrainte physique ou psychologique considérable1250. Une entrave mineure ou négligeable n’est pas suffisante à ce stade. Il en va également des interventions policières « qui ne compromettent pas sérieusement les droits des personnes interpellées1251 ». Sans être limitée à la prise de contrôle physique du suspect ou de la personne concernée, il est évident que la contrainte physique ou la menace de contrainte physique constitue la forme la plus envahissante de détention. Ici, l’État s’empare du détenu. L’emprisonnement, qui consiste à maintenir une personne contre son gré dans un lieu fermé, et l’arrestation, qui désigne le fait « de se saisir d’une personne ou de la toucher dans le but de la détenir1252 », correspondent, de toute évidence, à cette définition1253. La personne détenue se trouvant sous le pouvoir coercitif de l’État, elle doit bénéficier des droits et garanties conférés par la Charte.

305. Quant à la détention découlant d’une contrainte psychologique appréciable, celle-ci « se produit [...] (1) lorsque le plaignant est “légalement tenu de se conformer à un ordre ou à une sommation” d’un policier (c’est-à-dire en vertu de l’application régulière de la loi), ou (2) lorsque plaignant n’est pas légalement tenu d’obtempérer à un ordre ou à une sommation, “mais qu’une personne raisonnable se trouvant dans la même situation se sentirait obligée de le faire” et “conclu[rait] qu’elle n’est pas libre de

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partir”1254 ». L’ordre de fournir des échantillons d’haleine, conformément à l’ancien par. 235(1) du Code criminel, est un exemple de sommation donnant lieu à une détention. Ici, l’individu n’est pas libre de s’en aller. Il n’a pas d’autres choix que d’obtempérer à l’ordre du policier. Comme l’indique le juge Le Dain, dans R. c. Therens, « [i]l est irréaliste de dire d’une personne qui est passible d’arrestation et de poursuites pour refus d’obtempérer à une sommation faite par un agent de la paix dans l’exercice du pouvoir que lui confère la loi, qu’elle est libre de refuser d’obtempérer à cette sommation1255 ». En ce qui concerne la personne qui n’est pas légalement tenue de se conformer à un ordre ou à une sommation, la détention se produit lorsqu’une personne raisonnable placée dans la même situation que l’accusé conclurait qu’elle n’est pas libre de partir et qu’elle doit obtempérer à l’ordre ou à la sommation des policiers1256. Bien que pertinente, la perception subjective de l’accusé à l’égard de sa situation est rarement concluante1257. C’est que « l’analyse fondée sur l’art. 9 ne devrait

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pas porter principalement sur ce qui se passait dans l’esprit de l’accusé à un moment précis, mais plutôt sur la façon dont les policiers ont agi et, eu égard à l’ensemble des circonstances, sur la manière dont un tel comportement serait raisonnablement perçu1258 ». Pour déterminer si une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances aurait cru que sa liberté de choix était contrainte par la conduite des policiers, la Cour suggère de tenir compte a) des circonstances à l’origine du contact avec les policiers telles que la personne en cause a dû raisonnablement les percevoir; b) de la nature de la conduite des policiers et c) des caractéristiques ou de la situation particulière de la personne visée. Sans être exhaustive, cette liste de facteurs permet aux tribunaux de déterminer si et quand la conduite des policiers s’est transformée en détention, déclenchant ainsi la protection constitutionnelle. En effet :

« 1. La détention visée aux art. 9 et 10 de la Charte s’entend de la suspension du droit à la liberté d’une personne par suite d’une contrainte physique ou psychologique considérable. Il y a détention psychologique quand l’individu est légalement tenu d’obtempérer à une demande contraignante ou à une sommation, ou quand une personne raisonnable conclurait, compte tenu de la conduite de l’État, qu’elle n’a d’autre choix que d’obtempérer.

2. En l’absence de contrainte physique ou d’obligation légale, il peut être difficile de savoir si une personne a été mise en détention ou non. Pour déterminer si une personne raisonnable placée dans la même situation conclurait qu’elle a été privée par l’État de sa liberté de choix, le tribunal peut tenir compte, notamment, des facteurs suivants :

a) Les circonstances à l’origine du contact avec les policiers telles que la personne en cause a dû raisonnablement les percevoir : les policiers fournissaient-ils une aide générale, assuraient-ils simplement le maintien de l’ordre, menaient-ils une enquête

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générale sur un incident particulier, ou visaient-ils précisément la personne en cause dans le cadre d’une enquête ciblée ?

b) La nature de la conduite des policiers, notamment les mots employés, le recours au contact physique, le lieu de l’interaction, la présence d’autres personnes et la durée de l’interaction.

c) Les caractéristiques ou la situation particulières de la personne, selon leur pertinence, notamment son âge, sa stature, son appartenance à une minorité ou son degré de discernement1259. »

306. Les circonstances à l’origine du contact avec les policiers telles que la personne en cause a dû raisonnablement les percevoir, tout d’abord, puisqu’il est évident qu’un policier qui répond à une demande d’aide1260 ou « à une urgence médicale à la suite d’un appel au 911 ne détient pas les personnes avec qui il interagit et ce, même s’il restreint effectivement leur liberté de mouvement en prenant la direction des opérations1261 ». Cette conclusion s’applique également au policier qui est appelé à intervenir sur les lieux d’un accident1262. L’agent devant s’enquérir de la situation afin de décider comment procéder par la suite, on s’attend à ce qu’il pose des questions aux passants ou autres témoins potentiels sans procéder à leur détention1263. La simple vérification

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qui s’effectue dans le cadre d’une patrouille de routine visant à maintenir l’ordre permet également aux policiers de poser des questions générales afin de déterminer « ce qui se passe » ou si une personne est en difficulté1264. « Bien que “[b]on nombre de [contacts

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entre des policiers et des citoyens] sont plutôt anodins, [...] se limitant à une simple conversation[,] [c]es échanges [risquent toutefois de] dev[enir] plus envahissants […] lorsque la contrainte et l’interrogatoire se substituent au consentement et à la conversation”1265. » En ce qui concerne le policier qui répond à un appel relativement à un incident particulier1266 ou à la commission d’un acte criminel, on s’attend à ce que ce dernier pose des questions afin de s’enquérir de la situation. Comme l’indique le juge McIsaac, dans R. c. Suberu : « Il faut poser plusieurs questions préliminaires pour décider comment procéder par la suite. Tant que les renseignements relatifs à la perpétration possible d’une infraction criminelle et à l’identité de l’interlocuteur n’avaient pas été obtenus, j’estime qu’aucune détention ou arrestation, ni mise en garde, n’était nécessaire1267. » Des questions plus ciblées, dans le cadre d’un interrogatoire policier, peuvent amener une personne raisonnable placée dans la même situation que l’accusé à conclure qu’elle a été privée de sa liberté de choix1268. En effet, « les policiers

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menaient-ils une enquête générale sur un incident particulier, ou visaient-ils précisément la personne en cause dans le cadre d’une enquête ciblée ?1269 ». La question est importante. Bien que la présence de soupçons ne transforme pas automatiquement l’intervention en détention, les policiers sont appelés à redoubler de précautions. Ainsi, « à moins que les policiers n’informent la personne qu’elle n’est pas tenue de répondre aux questions et qu’elle est libre de partir, il se peut fort bien que la détention se

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soit cristallisée1270 ». Il en va de même lorsque le contact initial avec un témoin ou une personne d’intérêt se transforme par la suite en l’interrogatoire d’un suspect1271. Comme la nature des

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questions, la durée de l’interrogatoire1272 et l’insistance des policiers peuvent amener une personne raisonnable placée dans la même situation à conclure qu’elle n’est pas libre de partir, il serait prudent d’informer le suspect de son droit de garder le silence, de consulter un avocat et de s’en aller en tout temps. « Dans les cas où les policiers ne savent pas avec certitude si leur conduite a un effet coercitif, ils peuvent dire clairement à la personne visée qu’elle n’est pas tenue de répondre aux questions et qu’elle est libre de partir1273. » En somme, plus les questions sont ciblées, plus il est important de faire comprendre au suspect qu’il n’est pas obligé de collaborer avec les policiers et qu’il a le droit de s’en aller. La présence de « soupçons raisonnables » ou même de « motifs raisonnables de croire » n’empêche pas la tenue d’une entrevue à laquelle participe volontairement le suspect, si une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances n’aurait pas conclu

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que sa liberté de partir était contrainte par les policiers1274. Une personne, en effet, n’est pas détenue parce que les policiers ont des motifs suffisants pour la placer en détention, mais parce qu’elle est privée de sa liberté de coopérer ou non avec les policiers1275.

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307. La nature de la conduite des policiers est un second facteur dont il faut tenir compte au moment de déterminer la présence ou non d’une détention psychologique. Sur ce point, la Cour suprême est catégorique : « Pour répondre à la question de savoir s’il y a détention, il faut procéder à une évaluation réaliste de la totalité du contact tel qu’il s’est déroulé, et non à une analyse détaillée de chacun des mots prononcés et des gestes posés1276. » En effet, ce n’est pas parce qu’un policier a dit à une personne : « Attendez une minute ! Il faut que je vous parle avant que vous vous en alliez » que cette dernière est automatiquement détenue au sens de la loi. L’absence de geste pouvant entraver la liberté de l’accusé, la nature générale des questions posées et la courte durée du contact reproché peuvent amener le tribunal à conclure que la personne n’était pas détenue1277. Sans être toujours déterminants, « [l]es mots utilisés par les policiers peuvent démontrer que ces derniers prennent immédiatement le contrôle de la situation, avec leur voix forte et sévère, en donnant des commandes brusques et des ordres clairs quant au comportement exigé. Toutefois, tout cela pourrait ne pas être nécessaire pour établir la dynamique de force requise pour prouver une détention1278 ». Bien que l’utilisation d’expression telle que « Attendez une minute ! Il faut que je vous parle » ne soit pas automatiquement synonyme de détention, les policiers doivent, dans la mesure du possible, éviter de telles paroles puisqu’elles peuvent amener une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances à croire qu’elle n’est pas libre de partir et qu’elle doit obtempérer à l’ordre ou à la sommation du policier. Fréquemment utilisées lors d’un contact initial, les expressions du genre « Puis-je vous parler ? » ou « J’aimerais vous poser

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quelques questions » sont à privilégier, même si, encore une fois, « toute “cordialité” passagère doit également être mise en perspective et considérée dans le contexte des événements tels qu’ils se sont effectivement déroulés1279 ».

308. Le recours au contact physique est une autre circonstance permettant de définir la conduite générale des policiers. Si le simple fait d’effleurer l’épaule du suspect ou de poser la main sur son bras quelques secondes ne suffit pas pour conclure automatiquement à la présence d’une détention1280, il en va autrement du policier qui saisit le bras de la personne qui vient d’ignorer la demande qui lui a été faite. « Le geste de prendre le bras démontre bien qu’il y a, par ce geste, une manœuvre de détention1281. » Sans être un contact physique, il est évident que le positionnement des policiers et le fait d’activer ou non les gyrophares constituent des éléments pertinents au moment de déterminer s’il y a détention. Les policiers qui stationnent leur voiture derrière ou devant celle du conducteur pour l’empêcher de quitter1282, qui prennent une

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« position antagonique » face au suspect afin de bloquer son chemin1283 ou d’empêcher sa sortie1284, qui activent les gyrophares

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pour intercepter ou interpeller un individu1285, privent généralement l’accusé de sa liberté de circuler librement. En sens contraire, les agents qui se stationnent parallèlement et à une distance raisonnable de la voiture du suspect1286, qui s’approchent à pied du véhicule ou d’un piéton1287 pour effectuer une vérification1288 ou s’adresser tout simplement à lui1289, ne le privent pas de sa liberté de choix. Discutant de la situation juridique d’une conductrice qui

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fut abordée par des policiers qui avaient remarqué la présence de son véhicule, tard la nuit, les phares allumés et le moteur en marche dans le stationnement d’un restaurant, le juge Gosselin précise que « cette interaction s’est produite sur un terrain commercial éclairé dans un environnement non menaçant. Non seulement l’auto-patrouille n’était-elle pas immobilisée de façon à intimider la conductrice (elle était stationnée parallèlement, à 10 pieds de distance)1290 », mais les policiers n’ont rien fait pour la priver de son choix de s’en aller. D’où l’absence de détention en l’espèce.

309. Comme l’indique ce passage de la décision R. c. Spence1291, le lieu de l’interaction et le mode d’intervention peuvent avoir une incidence importante sur l’existence ou non d’une détention. Cela est particulièrement évident lorsque les policiers interviennent dans un lieu privé, comme une cour arrière ou l’entrée d’une résidence. Dans ce cas, « la nature de l’intrusion de policiers [...] sera raisonnablement perçue comme plus percutante, coercitive et menaçante que si pareil acte de l’État se produisait dans un lieu public. Les gens s’attendent à juste titre à ne pas être importunés par l’État dans leurs espaces privés. Il y a aussi, sur le plan pratique, la réalité que, lorsque les autorités prennent le contrôle d’un espace privé, comme une cour arrière ou une résidence, il n’existe souvent aucun autre endroit où se réfugier contre une autre intrusion forcée1292 ». Le lieu de l’interraction et le mode d’entrée devant être considérés, le policier qui souhaite parler à des personnes qui se trouvent dans la cour arrière d’une maison d’habitation a tout avantage à demeurer dans la rue ou de l’autre côté de la clôture, ou de s’annoncer et d’expliquer les raisons de sa présence1293.

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310. Comme plusieurs interrogatoires ont lieu au poste de police, suite à une invitation de s’y présenter, il convient de déterminer s’il s’agit ou non d’une détention1294. Pour répondre à cette question, les tribunaux ont recours aux facteurs énoncés par la Cour suprême dans l’arrêt Grant. En effet, s’agit-il d’une invitation à

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venir au poste de police ou d’un ordre plus formel de se présenter pour fins d’interrogatoire ? Le policier qui invite l’accusé à se présenter volontairement au poste de police pour discuter de l’affaire, qui informe l’individu qu’il n’est pas tenu de faire une déclaration et qu’il est libre de partir en tout temps, ne prive pas l’accusé de son choix de collaborer ou non avec les policiers1295. Il en va également du suspect qui se présente de son propre gré au poste de police pour s’expliquer, tirer les choses au clair ou dissiper les soupçons qui planent à son endroit1296. Les circonstances entourant le transport du suspect au poste de police et son interrogatoire sont également pertinentes à l’existence ou non d’une détention. Parmi les facteurs militant en faveur d’une détention, mentionnons (1) l’individu qui ne peut utiliser sa voiture et qui doit accompagner les policiers jusqu’au poste de police1297, (2) l’accusé qui est placé en cellule lors de son arrivée, (3) l’interrogatoire qui est mené dans

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une salle sécurisée la porte fermée ou barrée1298 et (4) les policiers qui refusent à l’accusé la permission de quitter le poste de police. En sens contraire, la personne qui est libre de quitter le poste de police, d’aller aux toilettes, de boire de l’eau ou de fumer une cigarette n’est généralement pas privée de sa capacité d’aller et venir, ni de choisir de collaborer ou non avec les policiers1299. Le statut de l’accusé relativement à l’enquête en cours est un autre facteur à considérer lorsqu’il s’agit de décider si la personne interrogée est détenue au sens de la Charte. Sur ce point, la jurisprudence distingue entre le « témoin » d’une infraction1300, la « personne d’intérêt » et le « suspect » d’un crime1301. Le « témoin » d’une infraction et les « personnes d’intérêts », tout d’abord, puisque le contexte de l’interrogatoire et la nature générale des questions ne permettent généralement pas de conclure à la présence

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d’une détention1302. Il en va autrement d’une personne soupçonnée d’avoir participé à la commission d’un crime1303. Comme il s’agit de questions plus ciblées s’inscrivant dans le cadre d’une enquête visant à déterminer la culpabilité de l’accusé, les policiers doivent redoubler de précautions1304. Cela est d’autant plus vrai lorsque

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l’inspecteur confronte le suspect avec des éléments de preuve, ou laisse croire à ce dernier que son enquête établit nettement sa culpabilité ou que celle-ci ne fait plus aucun doute. Dans ce cas, « les policiers devraient dire clairement à la personne visée “qu’elle n’est pas tenue de répondre aux questions et qu’elle est libre de partir, [sans quoi] il se peut fort bien que la détention se soit cristallisée”1305 ». Une mise en garde informant l’accusé qu’il peut consulter un avocat s’il le désire1306 serait également appropriée vu le danger que l’interrogatoire soit assimilé à une détention1307. Le but, rappelons-le, n’est pas d’obtenir une déclaration à tout prix, mais de conserver celles qui ont été recueillies conformément aux garanties conférées par la Charte. Il faut éviter, en effet, de franchir le rubicon. Entre le policier qui interroge un suspect pour comprendre « ce qui s’est passé » après l’avoir informé du but de son intervention et celui qui confronte l’accusé en lui posant des questions ciblées visant à clarifier ou confirmer sa participation dans la commission d’un crime1308, il y a un pas qui ne peut être franchi

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sans engager la protection constitutionnelle prévue à l’article 9 de la Charte.

311. La présence d’autres personnes constitue un autre facteur pertinent dans l’analyse de la détention, puisqu’il est évident que l’intervention qui implique plusieurs personnes qui obéissent aux ordres et commandes des policiers est de nature à laisser croire à une personne raisonnable qu’elle n’est pas libre de partir et qu’elle n’a pas le choix d’obtempérer1309. En sens contraire, la décision prise par plusieurs personnes de refuser de parler aux policiers tout en continuant leur chemin laissera présager une absence de contrainte et de détention au sens de l’article 9.

312. La durée du contact peut également nous renseigner sur la nature de l’intervention contestée, sans pour autant être déterminante quant à sa qualification juridique. Comme « un seul acte ou mot percutant peut induire une personne raisonnable à conclure qu’elle n’a plus le droit de choisir comment répondre à la situation1310 », il est difficile d’établir l’absence de détention sur la base uniquement de la courte durée du contact avec les policiers. La durée du contact n’est donc qu’un facteur parmi tant d’autres1311.

313. En plus des circonstances à l’origine du contact avec les policiers et de la nature de la conduite reprochée, les tribunaux doivent tenir compte des caractéristiques personnelles de l’accusé

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qui peuvent influer sur la perception d’une personne raisonnable placée dans la même situation. Parmi les caractéristiques pertinentes, mentionnons l’âge de l’accusé, son sexe, sa stature, son inexpérience1312, son statut social, son manque d’assurance et son degré de discernement1313. L’exemple de la jeune femme soupçonnée du meurtre de son mari, qui fut amenée dans une salle d’entrevue se trouvant dans un secteur à accès restreint après s’être présentée au poste de police, illustre bien cette situation. Comme les policiers ont fermé la porte derrière elle, qu’ils ont empêché sa mère de l’accompagner dans la salle d’interrogatoire, qu’ils lui ont dit qu’elle devait frapper à la porte si elle voulait quelque chose et qu’ils ne lui ont jamais mentionné qu’elle pouvait partir si elle le souhaitait, la cour conclut qu’une personne raisonnable, possédant comme l’accusée peu d’assurance et une capacité de discernement plutôt limitée, aurait pensé qu’elle n’avait d’autres choix que d’obtempérer aux directives des policiers. La conclusion pourrait être entièrement différente si l’accusé, loin d’être inexpérimenté, faisait preuve d’assurance et n’était pas à ses premiers contacts avec les policiers.

314. L’appartenance d’un accusé à un groupe racialisé au Canada est un facteur important au moment de déterminer s’il y a ou non détention. Les autochtones et les membres des autres minorités visibles étant plus souvent « appréhendés et appelés à répondre

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à des questions ciblées et familières, [...] l’historique des relations entre la police et les collectivités racialisées a une incidence sur les perceptions d’une personne raisonnable mise à la place de l’accusé1314 ».

Deuxième section : La détention à des fins d’enquête

315. La détention à des fins d’enquête fut reconnue par la Cour suprême dans l’arrêt R. c. Mann1315. À la suite d’une introduction par effraction dans un immeuble d’un quartier du centre-ville de Winnipeg, deux policiers, qui se trouvaient à proximité des lieux du crime, ont aperçu l’accusé qui marchait dans la rue. Comme ce dernier correspondait « en tous points » à la description du suspect, les policiers ont interpellé l’appelant, puis lui ont demandé de s’identifier. Après avoir décliné son nom et sa date de naissance, M. Mann fut soumis à une fouille par palpation au cours de laquelle l’un des agents a senti la présence d’un objet mou dans la poche avant de son gilet kangourou. Le policier ayant glissé sa main à l’intérieur de la poche, ce dernier y a trouvé un petit sac en plastique contenant de la marijuana. Des sachets en plastique, deux comprimés de Valium et une carte d’Indien furent également retrouvés dans une autre poche. Suite à la découverte de la drogue, l’accusé fut mis en état d’arrestation pour possession de marijuana en vue d’en faire le trafic, puis informé de son droit de garder le silence et d’avoir recours à l’assistance d’un avocat. S’interrogeant sur la légalité de l’intervention policière, la Cour suprême conclut à l’existence d’un pouvoir limité de détention aux fins d’enquête fondé sur le devoir général des policiers de maintenir la paix, de prévenir le crime et de protéger la vie et les biens. « Ce pouvoir, précise le Tribunal, permet aux policiers de détenir une personne à de telles fins lorsque, dans l’ensemble des circonstances, ils ont des motifs raisonnables de soupçonner l’existence d’un lien clair entre la personne en cause et une infraction criminelle récente ou

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toujours en cours1316. » En somme, « les policiers peuvent détenir une personne aux fins d’enquête s’ils ont des motifs raisonnables de soupçonner, à la lumière de toutes les circonstances, que cette personne est impliquée dans un crime donné et qu’il est nécessaire de la détenir1317 ». La croyance subjective du policier n’est pas suffisante en l’absence de faits objectivement discernables pouvant appuyer ses soupçons1318. Comme l’accusé correspondait

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étroitement à la description du suspect et qu’il se trouvait à proximité de l’infraction, peu de temps après sa commission, les policiers avaient des motifs raisonnables de soupçonner que l’individu était impliqué dans l’introduction par effraction et « qu’il devait à tout le moins faire l’objet d’une enquête plus approfondie1319 ».

316. Se pose ensuite la question de la légalité de la fouille de la personne détenue à des fins d’enquête. Sur ce point, la Cour suprême est catégorique : l’existence d’un pouvoir de fouille accessoire à une détention à des fins d’enquête repose sur le devoir général des policiers de protéger la vie et la sécurité de leurs propres agents et du public. Il ne s’agit pas d’un pouvoir automatique. Le policier doit avoir des motifs raisonnables de croire que sa sécurité ou celle d’autrui est menacée pour soumettre la personne détenue à une fouille de nature préventive. Mise de l’avant afin d’assurer la sécurité des policiers et du public, la fouille du détenu doit se limiter à une fouille par palpation. Comme l’accusé, en l’espèce, pouvait être en possession d’outils de cambriolage pouvant servir d’armes et que l’intervention s’était effectuée à une heure tardive en l’absence de personnes à proximité, les policiers avaient des motifs raisonnables de craindre pour leur sécurité. La fouille devant se limiter à ce qui est raisonnablement nécessaire pour « découvrir la présence d’armes », la décision du policier de glisser sa main dans la poche du gilet kangourou après y avoir senti la présence d’un objet mou relevait davantage de la curiosité que de la sécurité des policiers. La preuve ayant été obtenue à la suite de la violation du droit de l’individu à la vie privée, un examen de son admissibilité en vertu de l’article 24(2) devenait nécessaire dans les circonstances.

317. La distinction entre les questions préliminaires ou exploratoires visant à déterminer si une infraction a été commise et la détention privative de liberté fut abordée par la Cour suprême, dans R. c. Suberu1320. Au cours d’un voyage d’une journée les

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amenant dans différentes villes situées le long du lac Ontario, l’accusé, M. Suberu, et un complice, M. Erhirhie, ont effectué à l’aide d’une carte de crédit volée plusieurs achats de marchandises, de cartes prépayées et de chèques-cadeaux dans des magasins Wal-Mart et à la Régie des alcools de l’Ontario (LCBO). Contacté par les employés d’une succursale voisine de la LCBO où les deux suspects s’étaient procuré des chèques-cadeaux d’une valeur de 100 $, un employé de la succursale de Cobourg a interpellé M. Erhirhie, puis appelé la police, après que ce dernier ait tenté d’acheter une bouteille de bière de 3 $ avec un chèque-cadeau de 100 $. Sans connaître tous les détails de la transaction frauduleuse, l’agent Roughley, qui venait de recevoir un appel au sujet d’une personne de sexe masculin qui tentait d’utiliser une carte de crédit volée, s’est présenté à la LCBO de Cobourg. Informé par un collègue, qui se trouvait déjà sur les lieux, de la présence de deux suspects de sexe masculin dans le magasin, l’agent Roughley est entré dans la succursale et a aperçu le policer, près de la caisse enregistreuse, en train de discuter avec un employé du magasin et un client de sexe masculin, M. Erhirhie. C’est à ce moment que M. Suberu a croisé l’agent Roughley et prononcé les paroles suivantes : « C’est lui qui a fait ça, c’est pas moi, alors j’imagine que je peux partir1321. » Surpris par la déclaration de M. Suberu, l’agent Roughley l’a suivi à l’extérieur et lui a dit : « Attendez une minute ! Il faut que je vous parle avant que vous vous en alliez1322. » Après une brève conversation au cours de laquelle l’agent Roughley a questionné le suspect afin de déterminer ce qui s’était passé et pourquoi ce dernier avait tenu de tels propos, l’agent Roughley reçu, par radio, des renseignements supplémentaires concernant le numéro de plaque d’immatriculation et la description de la fourgonnette que conduisait l’homme qui s’était procuré plus tôt dans la journée des chèques-cadeaux dans une autre succursale de la LCBO. Comme la fourgonnette dans laquelle prenait place M. Suberu correspondait en tous points à celle décrite par le répartiteur radio, l’agent Roughley lui demanda une pièce d’identité et le titre de propriété de sa voiture. Ayant remarqué la présence de sacs provenant de magasins Wal-Mart et de la LCBO entre les

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sièges avant de la voiture et derrière ceux-ci, l’agent Roughley procéda à l’arrestation de M. Suberu. L’accusé ayant prétendu qu’il se trouvait en détention lorsque le policier lui a demandé d’attendre afin qu’il puisse lui parler, l’agent Roughley aurait enfreint l’al. 10b) de la Charte en omettant, dès ce moment, de l’informer de son droit à l’assistance d’un avocat. La demande d’exclusion de la preuve ayant été rejetée par le juge de première instance, l’accusé fut déclaré coupable de fraude, ce que confirma la Cour d’appel de l’Ontario. La décision ayant été portée en appel devant le plus haut tribunal du pays, la Cour suprême devait déterminer si l’accusé se trouvait en détention à la suite des paroles du policier.

318. Dans une analyse empreinte de lucidité, la Cour distingua les questions « préliminaires » ou « exploratoires », de celles privant l’accusé de sa liberté de choisir de coopérer ou non avec les policiers. En effet, les agents appelés sur les lieux d’une infraction présumée connaissent rarement tous les détails entourant les événements en question. Placés devant l’incertitude, les policiers doivent poser des questions afin de comprendre « ce qui s’est passé » et pour déterminer si la personne peut « être mêlée à l’affaire » d’une quelconque façon. C’est l’exemple du policier appelé sur les lieux d’un incendie criminel qui s’est déclaré au cours de la nuit dans une résidence universitaire. Comme le policier doit s’enquérir de la situation, on peut s’attendre à ce qu’il pose des questions aux résidents et résidentes qui se trouvent à l’extérieur de l’immeuble en flamme, sans qu’il y ait pour autant détention1323. « Avez-vous remarqué quelque chose d’inhabituel ? », « Avez-vous

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aperçu ou croisé des personnes suspectes près de l’immeuble ? », « Avez-vous senti une odeur particulière avant l’incendie ? » Voilà des questions « exploratoires » permettant au policier de comprendre ce qui s’est passé. « Même si un policier demande des renseignements ou de l’aide à un passant, celui-ci n’est pas tenu en droit d’obtempérer1324. » Il en va de même de la personne qui, dans le cadre d’une enquête exploratoire, devient l’objet des soupçons des policiers. Reprenons l’exemple de l’incendie criminel. Dans sa quête d’information, le policier demande à la seule personne qui n’est pas en chemise ou vêtements de nuit de s’identifier. Ce dernier n’étant pas un étudiant, le policier devra naturellement lui poser des questions sur les raisons de sa présence près des lieux du crime, sur ses allées et venues, etc. On ne saurait parler, à ce stade, de détention aux fins d’enquête. En effet, « [i]l se peut qu’au cours d’une enquête sur un accident ou un crime, des policiers posent, sans le savoir, des questions à une personne qui est impliquée dans l’incident et qui, par conséquent, risque de s’incriminer. Ils ne sont pas pour autant empêchés de continuer à interroger cette personne dans le cadre de leur enquête1325. L’article 9 de la Charte n’oblige pas les policiers à s’abstenir d’interagir avec les membres

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du public tant qu’ils n’ont pas de motifs précis permettant de rattacher une personne à la perpétration d’un crime. L’article 10 n’oblige pas non plus les policiers à informer d’emblée toute personne de son droit de garder le silence et d’avoir recours à l’assistance d’un avocat1326. » Le policier au cours de la conversation avec le passant détecte une odeur d’essence sur ses vêtements. L’agent lui demande alors de s’expliquer. L’individu ayant refusé et tenté de s’enfuir, le policier lui ordonne de s’arrêter. L’accusé se trouve alors en détention et doit être informé des motifs de sa détention et de son droit à l’assistance d’un avocat. La cristallisation de la détention, qui opère un renversement d’équilibre dans les rapports qui opposent le suspect à l’État, est à la fois génératrice de droits pour l’accusé et d’obligations pour le policier. Même s’il est difficile, dans certains cas, de distinguer les questions « exploratoires » ou « générales », des questions posées dans un contexte privant l’accusé de sa liberté de choix, il appartient au juge de déterminer « si la ligne de démarcation entre des questions générales et la détention a été franchie1327 ». Examinant les circonstances entourant l’intervention de l’agent Roughley, la Cour suprême apporte les précisions suivantes :

« Selon la preuve, l’agent Roughley a abordé M. Suberu dans le but d’essayer de comprendre ce qui se passait. Une infraction venait vraisemblablement d’être commise et les policiers sont arrivés sur les lieux pour enquêter. Toutefois, comme le souligne avec justesse le juge Binnie (au par. 62), il serait absurde de prétendre que l’agent Roughley devait permettre à toutes les

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personnes présentes d’exercer leur droit à l’assistance d’un avocat avant de commencer à tirer la situation au clair. Selon nous, il serait aussi déraisonnable d’exiger que, dès qu’il aborde un suspect pour tirer la situation au clair, un policier doive lui permettre d’exercer son droit à l’assistance d’un avocat1328. »

319. Comme les paroles et questions de l’agent Roughley visaient à comprendre ce qui s’était passé « plutôt que de priver M. Suberu de sa liberté1329 », qu’il n’avait posé aucun geste afin d’entraver sa liberté d’action et que le contact à l’origine de la contestation fut bref, la Cour confirma la décision du juge de première instance selon laquelle il n’y avait pas de détention au sens de la Charte.

320. Si des policiers qui répondent à un appel peuvent poser des questions « préliminaires » afin de s’enquérir de la situation et de déterminer comment procéder par la suite, qu’en est-il de ceux qui, sans avoir d’infraction précise à l’esprit, souhaitent parler à une personne afin de lui poser des questions. La présence de simples soupçons peut-elle permettre à un policier de s’adresser à une personne et de l’interroger sur sa conduite ou la nature de ses activités sans mise en détention préalable ? La question est importante. Elle fut abordée par la Cour suprême dans l’arrêt R. c. Grant1330. À la suite d’une série d’agressions, de vols et d’infractions relatives aux stupéfiants impliquant des étudiants de quatre écoles de la région de Toronto, trois patrouilleurs se trouvaient dans le secteur afin d’y surveiller les lieux et d’assurer la sécurité des élèves. Deux policiers, les agents Forde et Worrell, étaient habillés en civil au volant d’une voiture banalisée. Leur tâche consistait à visiter les différentes écoles du quartier afin de vérifier si des étrangers ou des personnes qui étudient dans une autre école s’y trouvaient. Le troisième policier, l’agent Gomes, était en uniforme dans une voiture de patrouille. Sa fonction était d’assurer une « présence policière visible dans le quartier afin de

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rassurer les élèves et de prévenir le crime pendant la pause du déjeuner des écoles secondaires1331 ». Quant à l’accusé, un jeune homme de race noire, ce dernier marchait sur le trottoir à proximité d’une école lorsqu’il attira l’attention des agents Forde et Worrell. Ayant dévisagé et suivi du regard les deux agents banalisés, l’accusé aurait nerveusement « tripoté » son blouson et son pantalon. La conduite de l’appelant ayant éveillé ses soupçons, l’agent Worrell a pensé « qu’ils devraient peut-être parler avec ce gars-là » pour voir « si M. Grant fréquentait une des écoles que son partenaire et lui devaient surveiller et, sinon, s’il se rendait quand même à l’une d’entre elles1332 ». Comme l’agent Gomes était en uniforme et se trouvait près de l’accusé, les agents Forde et Worrell lui ont suggéré d’avoir une conversation avec lui afin de s’enquérir de la situation. Après être sorti de sa voiture, l’agent Gomes a abordé M. Grant. Se tenant directement devant lui sur le trottoir, l’agent Gomes lui a demandé « ce qui se passait ». Après avoir décliné son nom et son adresse, l’appelant a de nouveau réajusté nerveusement son blouson, ce qui amena le policier à lui demander de garder ses mains devant lui. Comme l’accusé semblait très nerveux et qu’il regardait constamment autour de lui, les agents Forde et Worrell ont décidé de s’approcher des deux individus. Après s’être identifiés à l’aide de leur insigne, les deux policiers se sont placés derrière l’agent Gomes, bloquant ainsi le chemin de l’accusé. À ce moment, une brève conversation entre l’agent Gomes et l’appelant a eu lieu au cours de laquelle M. Grant a admis la possession d’une arme à feu et d’une petite quantité de cannabis. L’accusé fut aussitôt arrêté, puis fouillé conformément au pouvoir de fouille accessoire à une arrestation. Comme une arme et de la marijuana furent trouvées sur l’accusé, ce dernier fut informé de son droit à l’assistance d’un avocat, puis transporté au poste de police. L’accusé ayant été déclaré coupable d’une série d’infractions relatives aux armes à feu, ce dernier contesta la légalité de la preuve obtenue à la suite de la conversation avec les policiers. D’après la défense, la liberté de choix de l’accusé fut contrainte par la conduite des policiers. N’ayant pas de motifs raisonnables de soupçonner qu’une infraction avait eu lieu ou que M. Grant était impliqué dans la

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commission d’un crime, les déclarations menant à l’arrestation puis à la fouille de l’accusé auraient été obtenues à la suite d’une détention arbitraire au sens de l’article 9 de la Charte.

321. L’examen de l’admissibilité des éléments de preuve obtenus à la suite des déclarations incriminantes de l’accusé suppose une analyse attentive du contact initial à l’origine des questions du policier, ainsi que du déroulement subséquent de la conversation après l’arrivée des agents Forde et Worrell. Le contact initial entre la police et M. Grant a débuté lorsque l’agent Gomes s’est placé devant l’appelant pour lui poser des questions d’ordre général. Comme une série d’infractions impliquant des étudiants avait déjà été commise dans le passé, pendant la pause du déjeuner, et que l’accusé dévisageait les policiers en tripotant nerveusement son blouson et son pantalon, il était normal, dans les circonstances, pour les policiers de s’enquérir de la situation. La première partie du contact entre M. Grant et l’agent Gomes étant de nature « préliminaire » ou « exploratoire », la Cour affirme que la conduite du policier, une fois considérée dans le contexte global du contact en question, n’aurait pas amené une personne raisonnable à conclure qu’elle n’était pas libre de partir et qu’elle devait obtempérer à la demande du policier. D’où l’absence de détention à des fins d’enquête.

322. Se pose ensuite la question de la légalité du contact survenu après que les deux agents banalisés se soient placés derrière l’agent Gomes. Le rapport entre l’accusé et l’agent Gomes s’étant diamétralement transformé à la suite de l’arrivée des deux autres policiers, les questions qui visaient à l’origine à comprendre « ce qui se passait » ont cédé leur place à un interrogatoire plus ciblé visant à déterminer s’il « avait quelque chose qu’il ne devait pas avoir1333 ». Cette question ayant été posée alors que l’appelant était bel et bien « contrôlé » par les policiers, M. Grant se trouvait en détention au sens de l’article 9. La détention n’étant pas fondée sur des motifs raisonnables de soupçonner que l’accusé

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était impliqué dans un crime donné et qu’il était nécessaire de le détenir, celle-ci était arbitraire et violait l’article 9 de la Charte.

323. Si la police ne peut détenir sans soupçon raisonnable une personne sous enquête, rien ne l’empêche toutefois, dans le cadre de son devoir « de maintenir la paix, l’ordre et la sécurité publique, de prévenir et de réprimer le crime », d’aborder une personne et de lui poser des questions au sujet d’une situation qui mérite d’être éclaircie. En effet, le policier qui agit dans le cadre d’une enquête1334 ou d’un appel relativement à la commission possible d’une infraction criminelle1335 doit poser des questions afin de déterminer ce qui s’est passé. Dans la poursuite de son enquête, le policier peut s’adresser aux passants, aux témoins potentiels ainsi qu’à toute personne qui pourrait avoir été impliquée dans la commission du crime1336. « Que s’est-il passé ? », « Qui

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êtes-vous ? », « Que faites-vous ici ? » Voilà des questions préliminaires à des fins d’enquête permettant aux policiers de « décider comment procéder par la suite1337 ». La possibilité de poser des questions dans le cadre d’une enquête sur la commission d’un acte criminel fut examinée récemment par la Cour d’appel du Québec dans P.G. c. R.1338. Appelés à faire la lumière sur les causes d’une hémorragie subie par un jeune bébé qui avait été transporté à l’hôpital, des enquêteurs ont rencontré le père de l’enfant dans un petit local de l’établissement afin de s’enquérir de la situation. Ce dernier ayant été informé des raisons de leur présence ainsi que de la possibilité de quitter les lieux à tout moment, les enquêteurs ont questionné l’individu sur les événements ayant précédé l’hospitalisation du bébé. Après avoir formulé quelques hypothèses non crédibles, l’appelant a reconnu avoir « peut-être » secoué l’enfant en dormant. Les enquêteurs ayant été informés pendant la pause de la présence de sang dans l’œil de l’enfant, compatible avec la thèse du secouement, ils ont indiqué à l’appelant qu’il était soupçonné de voies de fait graves et l’ont informé de son droit de garder le silence et de consulter un avocat. Une fois la mise en garde effectuée, les policiers ont recueilli une déclaration écrite dans laquelle le suspect confirmait avoir secoué brusquement son enfant. Ce dernier a finalement été arrêté, puis accusé de voies de fait et de voies de fait graves quelques jours plus tard. Comme il soutient que ses déclarations ont été obtenues à la suite d’une violation de ses droits au silence et à l’avocat, le Tribunal devait déterminer si l’appelant était en détention au moment où il a fait ses déclarations. D’après la Cour d’appel, ce n’est pas parce qu’une personne est soupçonnée d’un crime que les policiers doivent s’abstenir de lui poser des questions. La détention, rappelle le juge Schrager, suppose la présence d’une contrainte physique ou psychologique appréciable. La maltraitance ayant été envisagée

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comme une hypothèse pouvant expliquer l’état du bébé, les policiers devaient déterminer ce qui s’était passé lors des jours précédent son hospitalisation1339. Comme il s’agissait d’une enquête générale visant à « faire la lumière sur les événements » en cause, que l’individu était libre de répondre aux questions et de quitter les lieux à sa guise, l’appelant n’était pas en détention au moment où il a admis pour la première fois avoir « peut-être » secoué l’enfant en dormant1340. En effet, « la rencontre entre des policiers et un suspect n’entraîne pas nécessairement un état de détention, et ce, même lorsqu’une personne est soupçonnée. Tout est affaire de circonstances. La présence de soupçons n’est qu’un indice

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important, mais n’est pas un facteur déterminant dans l’évaluation de la détention. L’analyse du juge ne doit ainsi pas porter uniquement sur la présence ou non de soupçons, mais doit plutôt chercher à déterminer s’il y a détention psychologique. En l’espèce, il n’est pas possible de conclure à une détention1341 ». Quant à la déclaration écrite, obtenue à la suite de la mise en garde constitutionnelle, l’individu se trouvait en détention et pouvait exercer son droit à l’avocat. Encore une fois, il faut distinguer les questions visant à recueillir des informations générales de celles ayant pour but de confirmer la participation d’un suspect dans la perpétration d’un crime. Des questions ciblées visant à établir la responsabilité d’un suspect « évident », dans des circonstances qui limitent sa liberté d’action, peuvent donc amener le tribunal à conclure que les policiers ont franchi le rubicon, et que le suspect était en détention.

324. La seconde situation vise les cas où les policiers n’agissent pas dans le cadre d’une enquête ni d’un appel, mais des pouvoirs généraux qui leur sont conférés par la loi1342. Le policier qui se livre à « une activité de patrouille routinière et de prévention générale du crime1343 » peut être appelé à enquêter de façon « plus approfondie1344 » sur une situation qui lui semble problématique. Dans la poursuite de sa « mission de maintenir la paix, l’ordre et la sécurité publique, de prévenir et de réprimer le crime1345 », le

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policier qui soupçonne la commission d’une activité illégale peut aborder un suspect sans le détenir au sens des articles 9 et 10 de la Charte1346. L’intervention du policier devant s’inscrire dans l’exercice légitime de ses fonctions, l’agent qui « a des raisons valables » de parler à une personne ne devrait pas s’abstenir d’agir en l’absence de soupçons raisonnables1347. En effet, « lorsque les policiers n’interviennent pas en réponse à un incident précis », mais dans le cadre de leur devoir général de prévenir le crime et de fournir de l’aide, ils peuvent interroger des personnes afin de s’enquérir de la situation et des actions qui seront entreprises par la suite1348. Comme l’indique la juge en chef McLachlin et la juge Charron, dans R. c. Suberu, la notion de détention « ne signifie pas que tout contact avec les policiers constitue une détention pour l’application de la Charte, même lorsqu’une personne fait l’objet d’une enquête relativement à des activités criminelles, qu’elle est interrogée ou qu’elle est retenue physiquement par son contact avec les policiers1349 ». Cette situation doit être distinguée des questions ciblées formulées dans un contexte de contrôle de la part des policiers. La détention s’étant alors cristallisée, ces questions sont interdites compte tenu de l’absence de motifs raisonnables de soupçonner et de mise en garde quant au droit d’avoir recours sans délai à l’assistance d’un avocat.

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325. Les principes énoncés dans les arrêts Mann, Suberu et Grant furent repris et développés par la Cour suprême dans R. c. Le1350. Après avoir signifié à des policiers qui recherchaient une personne précise qu’elle ne se trouvait pas dans les environs, des gardiens de sécurité d’une coopérative d’habitation ont affirmé qu’une personne reconnue pour ses activités criminelles avait été aperçue sur les lieux « quelques jours ou quelques semaines auparavant » et qu’une maison appartenant à un certain L.D. constituait un « endroit problématique », en raison de « soupçons de trafic de drogue dans la cour arrière1351 ». Les policiers ayant décidé de s’enquérir de la situation, ils remarquèrent la présence de cinq jeunes hommes dans la cour arrière de la maison de L.D. Selon la preuve, ces personnes « semblaient ne rien faire de mal. Elles étaient juste en train de bavarder1352 ». Sans s’annoncer ou tenter autrement d’engager la conversation, deux agents ont pénétré dans la cour arrière de la maison par l’ouverture de la clôture qui délimitait la propriété. Après avoir demandé aux jeunes hommes [Traduction] « ce qu’ils faisaient, qui ils étaient et si l’un d’eux habitait dans l’immeuble1353 », les policiers ont ordonné à chaque personne de s’identifier à l’aide d’une pièce d’identité. À ce moment, un troisième policier, qui patrouillait le long de la clôture, a rejoint ses collègues en sautant par-dessus la clôture de la cour arrière. Ayant noté la présence d’une personne assise sur un sofa, les mains derrière le dos, l’agent O’Toole lui a intimé l’ordre de placer ses mains devant elle. Après avoir vérifié l’identité de l’ami de l’accusé, l’attention du policier fut attirée par le fait que ce dernier, qui portait un sac en bandoulière, affichait des signes de nervosité, en plus de se comporter comme s’il désirait dissimuler quelque chose. L’agent ayant demandé à l’appelant de lui fournir une pièce d’identité, ce dernier a pris la fuite après que l’agent se soit enquis du contenu de son sac. Le suspect ayant été rapidement maitrisé, son arrestation permit la fouille du sac et la saisie d’une arme à feu chargée, en plus d’une certaine quantité d’argent comptant. Une fois au poste de police, le suspect remit aux policiers

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13 grammes de cocaïne qu’il avait en sa possession. M. Le ayant été accusé notamment de possession illégale d’une arme, de possession illégale de cocaïne en vue d’en faire le trafic et de possession illégale de produits de la criminalité, la défense demanda l’exclusion des éléments de preuve obtenus en raison de sa détention arbitraire. Cette prétention, précise la Cour, suppose la présence d’une détention au sens de la Charte, puis de l’absence de règle de droit permettant d’entreprendre une telle action.

326. La présence d’une détention au sens de la Charte, tout d’abord, puisque la protection constitutionnelle ne s’applique que lorsque l’interaction suppose « l’application de contraintes physiques ou psychologiques appréciables1354 ». La contrainte physique n’étant pas en jeu, seule la contrainte psychologique pouvait donner lieu, en l’espèce, à la privation de liberté constitutive de la détention. Sur ce point, la Cour suprême est catégorique : Les jeunes hommes n’étaient « pas légalement tenus de répondre aux questions posées par les policiers, de présenter une pièce d’identité ou de suivre les ordres reçus concernant la position de leurs mains1355 ». La Cour devait donc déterminer si une personne raisonnable, placée dans la même situation que l’appelant, aurait cru qu’elle a été privée de sa capacité de collaborer ou non avec les policiers, de demeurer sur place ou de partir, lorsque les policiers sont entrés dans la cour arrière pour ensuite s’adresser aux

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occupants. L’analyse, rappelons-le, est « principalement objective1356 ». Elle commande un examen a) des circonstances à l’origine

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du contact avec les policiers telles qu’elles ont dû raisonnablement être perçues, b) de la nature de la conduite des policiers et c) des caractéristiques ou de la situation particulière de la personne.

327. a) Les circonstances à l’origine du contact avec les policiers telles qu’elles ont dû raisonnablement être perçues : En tant qu’agents de la paix, les policiers ont le devoir de maintenir l’ordre dans la collectivité en surveillant les rues, les parcs et autres lieux fréquentés par le public. Naturellement, les policiers ne peuvent, sans raisons valables, entrer dans la cour arrière d’une propriété privée sans s’annoncer pour interroger ses occupants et leur demander de s’identifier. Puisque personne n’avait demandé l’aide des policiers, qu’aucun incident particulier n’avait été rapporté et qu’aucune plainte pour intrusion ou troubles de jouissance n’avait été déposée, les policiers ne pouvaient entrer dans la cour arrière de la résidence sans mandat, sans consentement et sans explications, afin d’interroger les occupants sur ce qu’ils étaient et ce qu’ils faisaient, puis d’exiger la production d’une pièce d’identité1357. Cette conclusion, une fois comprise, n’empêche pas le

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policier qui intervient pour assurer le maintien de l’ordre ou prêter assistance en cas de besoin, de s’approcher d’un passant dans la rue, d’expliquer les raisons de sa présence et de discuter avec lui afin d’obtenir les renseignements qu’il souhaite. Il en va également des policiers qui demeurent de l’autre côté de la clôture pour parler avec une personne qui se trouve dans sa cour arrière ou sur le terrain de sa propriété.

328. b) La nature de la conduite des policiers : Ce deuxième facteur s’ajoute aux circonstances à l’origine du contact avec les policiers pour alimenter la perception de la personne raisonnable quant à la nature de l’interaction contestée. Sur ce point, la preuve est éloquente. En plus d’être entrés sans explication, sans permission et sans autorisation légale, « les actes accomplis par les policiers à ce même moment et les mots employés immédiatement après démontrent que ces derniers exerçaient leur domination sur les personnes qui se trouvaient dans la cour arrière depuis qu’ils y étaient entrés1358 ». On parle ici de questions ciblées, de la demande de s’identifier à l’aide d’une pièce d’identité et de l’ordre donné à l’un d’eux de garder ses mains bien en vue. La proximité physique, le nombre de personnes rassemblées dans un endroit restreint, la position des policiers qui interrogent séparément les suspects en bloquant la sortie contribuent également à l’instauration d’un climat d’oppression propice à la détention. En ce qui concerne le lieu de l’interaction et le mode d’entrée privilégié, il est évident que l’entrée soudaine et sans annonce de deux policiers, tard le soir, dans la cour arrière d’une propriété privée, jumelée à l’arrivée d’un troisième agent de police qui avait fait le tour du périmètre avant de rejoindre ses collègues en sautant par-dessus la clôture, peuvent amener une personne raisonnable à croire que les policiers ont pris le « contrôle de la situation » et qu’elle ne peut s’en aller1359. Que

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l’intervention ait lieu dans un quartier réputé pour ses activités criminelles n’atténue en rien l’aspect coercitif découlant de l’intervention policière. C’est que « la réputation d’une collectivité en particulier ou la fréquence des contacts entre la police et ses résidants n’autorisent aucunement les policiers à entrer dans une résidence privée plus facilement ou de façon plus envahissante qu’ils ne le feraient dans une collectivité où les clôtures sont plus hautes ou le taux de criminalité plus bas1360 ». Loin d’atténuer la nature coercitive de l’intervention, la présence d’autres personnes sur les lieux, et plus particulièrement leur soumission aux demandes des policiers, contribue à la création d’un climat qui amènerait une personne raisonnable à croire qu’elle n’avait véritablement pas d’autres choix que d’obtempérer aux demandes des policiers1361.

329. c) Les caractéristiques ou la situation particulière de l’accusé : Comme la présence ou non d’une détention doit tenir compte des caractéristiques personnelles de l’accusé pouvant influer sur la perception d’une personne raisonnable placée dans la même situation, l’appartenance d’une personne à un groupe racialisé est un facteur pertinent dans l’équation menant à la constatation d’une détention1362. Les autochtones, les Noirs et les autres

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membres de minorités visibles étant l’objet de contrôle plus fréquents, il est évident que ce facteur doit être pris en considération par les tribunaux. En effet, « lorsque trois policiers sont entrés dans une petite cour arrière privée, tard en soirée, sans être munis d’un mandat, sans obtenir de consentement et sans s’annoncer, pour interroger cinq jeunes hommes de groupes racialisés dans une coopérative d’habitation de Toronto, les jeunes en question se seraient sentis obligés de rester sur place, de répondre aux questions et d’obtempérer1363 ». Ces facteurs, une fois considérés, amènent le Tribunal à conclure que la détention s’était cristallisée au moment où les policiers sont entrés dans la cour arrière et ont commencé à poser des questions1364.

330. La détention de l’appelant ayant été établie, il reste maintenant à déterminer sa légalité. S’agit-il d’une détention arbitraire ou autorisée par une règle de droit ? La question est importante puisqu’elle détermine en partie l’admissibilité de la preuve recueillie à la suite de l’intervention contestée. Comme les policiers avaient pour objectifs de « vérifier si les jeunes hommes étaient des intrus, de rechercher des personnes d’intérêt et de vérifier un secteur qui, leur avait-on dit, était problématique en ce qui concerne les drogues1365 », aucune loi ni aucun principe de common law

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n’autorisait la détention du suspect. S’agissant d’une détention à des fins d’enquête, les policiers n’avaient pas de motifs raisonnables de soupçonner l’existence « d’un lien clair entre la personne en cause et une infraction criminelle récente ou toujours en cours1366 ». Si les renseignements indiquant que JJ. fréquentait le secteur et que la cour arrière de la demeure était un endroit problématique pouvaient inciter les policiers à aller voir ce qui s’y passait, à surveiller les allées et venues ou à interroger les voisins, ils ne permettaient pas, en l’espèce, de détenir des personnes en l’absence de motifs raisonnables de soupçonner. D’où l’annulation des déclarations de culpabilité et l’acquittement de l’accusé.

331. Fondée uniquement sur la présence de soupçons raisonnables, la détention à des fins d’enquête doit être brève et ne pas se prolonger indûment1367. Malgré l’absence d’un délai fixe au-delà duquel la détention devient automatiquement abusive, la restriction à la liberté du suspect est soumise à des limites temporelles dont la durée varie en fonction du degré d’intrusion de la détention; de la nature de l’infraction soupçonnée; de la complexité de l’enquête; de la sécurité des policiers ou du public; de la possibilité de continuer l’enquête sans prolonger la détention du suspect; de l’absence de diligence de la part des policiers et de la disponibilité immédiate des instruments pertinents d’enquête1368.

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En effet, la durée de la détention ne peut se prolonger aussi longtemps qu’il est nécessaire pour mener à terme une enquête. Les policiers qui détiennent, par exemple, une personne soupçonnée d’être en possession de marijuana, ne peuvent la maintenir sous garde pendant plus de 1h45 pour permettre l’arrivée du chien renifleur au poste de police. D’après le juge Hoy, de la Cour d’appel de l’Ontario, « la police soupçonnait la présence de drogues dans ses bagages. L’enquête n’était pas complexe et le risque pour les policiers ou le public était faible. Si la police voulait poursuivre son enquête, elle connaissait l’adresse du suspect et pouvait recourir à d’autres méthodes sans interférer avec la liberté de l’individu1369 ». L’analyse est donc contextuelle et dépend des circonstances de l’affaire.

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Troisième section : La détention en matière de conduite automobile

332. Avant de commencer notre analyse de la détention en matière de conduite automobile, il convient, à la suite des juges Dalphond, dans R. c. Dault1370, et Gosselin, dans R. c. Spence1371, de définir les concepts d’interception et d’interpellation1372. L’interception d’un véhicule désigne l’action d’empêcher une automobile de poursuivre son chemin ou de circuler librement suite à l’ordre d’un policier. Qu’il s’agisse d’une interception effectuée dans le cadre d’un barrage routier, d’une vérification en vertu de l’article 636 CSR ou du devoir de prévenir le crime et de protéger la vie des citoyens, les policiers peuvent exiger que le conducteur d’un véhicule routier immobilise sa voiture. Le conducteur n’ayant d’autre choix que d’obtempérer à l’ordre du policier, il ne fait aucun doute que sa liberté de mouvement est contrainte par l’ordre qui lui est donné1373.

333. L’interpellation du conducteur, pour sa part, suppose que le véhicule que conduit l’accusé soit déjà immobilisé. Sur ce

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point, on distingue l’intervention policière qui s’effectue sur une base volontaire, sans contrainte ni pression, de celle qui prive le conducteur de sa capacité de mouvement. Le policier qui stationne sa voiture près de celle du conducteur, les gyrophares éteints, peut s’approcher de ce dernier pour s’enquérir des raisons de sa présence sur les lieux sans le priver de son choix de s’en aller. Il en va autrement de l’agent qui active les gyrophares et stationne son auto-patrouille derrière ou devant la voiture du suspect afin de lui bloquer le chemin. Dans ce cas, l’automobiliste perd sa liberté de circuler : il y a détention au sens de l’article 9 de la Charte. Comme le pouvoir d’intercepter un véhicule ou d’interpeller son conducteur découle de la loi (Code la sécurité routière, Code criminel, Loi de la police) ou de la common law (devoir de maintenir la paix, de prévenir le crime et de protéger la vie et les biens), c’est de ce côté que nous allons commencer notre analyse. À l’examen du pouvoir d’intercepter ou d’interpeller le conducteur d’un véhicule routier conféré par la loi ou la common law, succédera une étude du pouvoir de détenir un conducteur à des fins d’enquête et de l’interpeller sans détention ni contrainte psychologique.

Première sous-section : Le pouvoir d’intercepter ou d’interpeller le conducteur d’un véhicule routier conféré par la loi ou la common law

a) Le pouvoir d’exiger que le conducteur d’un véhicule routier immobilise son véhicule

334. La première décision concernant l’interception au hasard d’un conducteur automobile fut rendue, en 1985, dans l’arrêt R. c. Dedman1374. L’accusé circulait normalement au volant de son véhicule lorsqu’un policier lui fit signe d’arrêter à un barrage routier. Le policier n’ayant remarqué rien d’inhabituel dans sa façon de conduire, ni dans l’état de son véhicule, l’interception du

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conducteur s’inscrivait dans le cadre d’un programme d’arrêt au hasard (programme RIDE) mis en place afin de diminuer la conduite avec les facultés affaiblies. Après avoir demandé au conducteur son permis de conduire et ses papiers d’assurance, le policier décela une forte odeur d’alcool provenant de l’haleine de l’accusé. S’appuyant sur ces constatations, l’agent de police lui intima l’ordre de souffler dans l’appareil de détection approuvé (appareil de type A.L.E.R.T.). N’ayant pas réussi à fournir un échantillon suffisant à la prise d’un résultat, l’appelant fut accusé d’avoir omis ou refusé de fournir un échantillon d’haleine pour analyse sur place contrairement au par. 234.1(2) du Code criminel. S’interrogeant sur la légalité de l’interception au hasard du conducteur, la Cour suprême procéda à une analyse des pouvoirs des policiers à la lumière de l’arrêt Waterfield. D’après le juge Le Dain, l’interception au hasard d’un automobiliste dans le cadre d’un programme de vérification de la sobriété n’est prévue dans aucune disposition législative. Ce pouvoir s’inscrit dans le cadre général des devoirs imposés aux policiers de « prévenir les infractions et de protéger la vie des personnes et la propriété par la surveillance de la circulation1375 ». Comme le pouvoir d’intercepter au hasard un véhicule afin de vérifier la sobriété du conducteur est nécessaire à l’accomplissement d’un devoir de la police et qu’il est raisonnable compte tenu (1) des contraintes relativement mineures qu’il impose aux conducteurs, (2) de l’importance des objectifs poursuivis et (3) des moyens utilisés à cette fin, l’interception au hasard des véhicules pour les fins du programme RIDE ne constitue pas un usage injustifié d’un pouvoir relié à un devoir de la police.

335. Le pouvoir d’intercepter un véhicule routier au hasard en vertu d’une disposition législative fut examiné par la Cour suprême, dans R. c. Hufsky1376. Alors qu’il circulait en voiture, en direction nord, sur l’avenue Midland, l’appelant, qui conduisait jusque-là normalement, fut sommé d’arrêter son véhicule à un contrôle routier mis en place par les policiers afin de « vérifier les permis de conduire, les assurances, l’état mécanique des véhicules

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et la sobriété de leur propriétaire1377 ». Après avoir demandé le permis de conduire et une preuve d’assurance au conducteur, l’agent a noté une odeur d’alcool et une prononciation hésitante chez l’accusé. Soupçonnant la présence d’alcool dans l’organisme du conducteur, l’agent le somma de sortir du véhicule et de fournir un échantillon d’haleine au moyen de l’appareil de détection approuvé (appareil de type A.L.E.R.T.). L’appelant ayant refusé de subir l’alcootest, ce dernier fut reconnu coupable d’avoir refusé d’obtempérer à la sommation du policier. La décision ayant été confirmée en appel, l’appelant conteste la légalité de l’intervention à l’origine de la demande du policier. La disposition invoquée pour justifier l’arrêt au hasard du conducteur se trouve à l’alinéa 189a) du Code de la route de l’Ontario. Aux termes de cette disposition :

« 189a) (1) Un agent de police, dans l’exercice légitime de ses fonctions, peut exiger du conducteur d’un véhicule automobile qu’il s’arrête. Si tel est le cas, le conducteur obtempère immédiatement à la demande de l’agent identifiable à première vue comme tel.

(2) Quiconque contrevient au paragraphe (1) est coupable d’infraction et passible, sur déclaration de culpabilité, d’une amende d’au moins 100 $ et d’au plus 2 000 $ et d’un emprisonnement maximum de six mois ou de l’une de ces peines. »

336. Le conducteur ayant été sommé par les policiers d’arrêter son véhicule au barrage routier, la Cour devait déterminer si l’accusé avait été détenu au sens de l’article 9 et si sa détention était arbitraire, le cas échéant. En ce qui concerne la première question, il ne fait aucun doute que l’accusé était en détention au moment de son interception. Sa liberté d’action ayant été contrainte par la sommation ou l’ordre d’un policier, l’accusé était détenu au sens de l’article 9. Quant à la légalité de l’intervention policière, comme la disposition permettait au policier d’intercepter « au hasard » le conducteur d’un véhicule routier, cette détention fut jugée arbitraire, mais justifiée en vertu de l’article premier.

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337. Admise dans le cadre d’un programme structuré de contrôles routiers ponctuels, l’interception au hasard d’un automobiliste afin de « vérifier les permis de conduire, les assurances, l’état mécanique des véhicules et la sobriété de leur propriétaire » peut également se produire dans le cadre d’une vérification de routine, sans point de contrôle préétabli. C’est l’hypothèse étudiée par la Cour suprême dans l’arrêt R. c. Ladouceur1378. Après avoir procédé à la surveillance d’une maison dans un quartier résidentiel d’Ottawa, deux policiers ont aperçu l’appelant au volant de sa voiture. Bien que les agents n’avaient aucune raison de soupçonner que le conducteur pouvait être impliqué dans la commission d’actes criminels, les policiers ont procédé à son interpellation pour « vérifier si ses documents étaient en règle et s’il possédait un permis de conduire valide ». Le permis de l’appelant étant suspendu, ce dernier fut accusé de conduite pendant la suspension de son permis, contrairement à l’article 35 du Code de la route. S’interrogeant sur la légalité de la détention du conducteur, la Cour suprême réitère la nature arbitraire de la détention en question et sa justification au sens de l’article premier.

338. La constitutionnalité de l’alinéa 189a) du Code de la route de l’Ontario ne faisant plus aucun doute, c’est donc sans surprise que la Cour d’appel du Québec confirma, quelques années plus tard, la légalité de l’article 636 du Code de la sécurité routière1379. D’après cette disposition : « Un agent de la paix, identifiable à première vue comme tel, peut, dans le cadre des fonctions qu’il exerce en vertu du présent code, exiger que le conducteur d’un véhicule routier immobilise son véhicule. Le conducteur doit se conformer sans délai à cette exigence. » Après avoir observé l’accusé sortir au volant de sa voiture du stationnement du Château Huntingdon, des policiers ont remarqué que ce dernier avait empiété légèrement sur l’autre voie et effectué un virage un peu large. Comme les policiers souhaitaient vérifier la sobriété du conducteur, mais ne possédaient aucun motif pour l’arrêter, ils procédèrent à l’interception du véhicule de l’appelant en vertu de

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l’article 636 CSR. Après avoir vérifié le permis de conduire et les papiers d’enregistrement de la voiture, les policiers ont décelé une odeur d’alcool provenant de l’haleine de l’accusé. Les agents ayant ordonné au conducteur de souffler dans l’appareil de détection approuvé, ce dernier échoua le test et fut arrêté pour conduite avec les facultés affaiblies et conduite avec un taux d’alcool supérieur à la limite permise. L’acquittement de l’accusé ayant été confirmé par un juge de la Cour supérieure, la Cour d’appel du Québec renversa la décision et déclara l’individu coupable de conduite avec un taux d’alcool supérieur à la limite permise. D’après le juge Steinberg, qui s’exprimait alors au nom de la Cour d’appel, l’article 636 CSR est tellement similaire à l’alinéa 189a) du Code de la route de l’Ontario que la décision de la Cour suprême dans R. c. Ladouceur s’appliquait également à la présente affaire.

339. Comme nous le savons, l’article 636 CSR permet à un policier d’intercepter au hasard le conducteur d’un véhicule routier afin de « vérifier la sobriété et l’état de conduire du conducteur, la validité de son permis de conduire, les immatriculations, les assurances ainsi que l’état mécanique du véhicule1380 ».

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L’article 636 CSR n’exige aucun motif autre que ceux relatifs à la conduite automobile1381. « Pour imager cette possibilité, les policiers peuvent décider d’intercepter tous les véhicules, un véhicule sur cinq, seulement les rouges ou encore seulement les véhicules construits en Amérique, en somme, n’importe lesquels en autant que le but de l’interception est l’un des trois exposés précédemment1382. » Le policier qui est informé par une intervenante en milieu scolaire qu’un individu vient souvent chercher ses enfants en état d’ébriété peut procéder à l’interception du conducteur pour vérifier sa sobriété1383. Il en va également des policiers qui observent un individu effectuer une manœuvre d’évitement dans un secteur industriel et commercial peu éclairé1384; circuler très lentement à une heure tardive1385, ou procéder à un demi-tour et se diriger en direction opposée après avoir été aperçu à la sortie d’un bar1386. Comme l’interception, dans chaque cas, visait à

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vérifier la sobriété du conducteur, la validité des documents requis ou l’état du véhicule1387, aucun autre motif n’était exigé dans les circonstances. La détention permise en vertu de l’article 636 CSR doit être brève, en l’absence de motifs justifiant une détention plus prolongée. Les policiers qui interceptent un automobiliste conformément à cette disposition peuvent vérifier la validité des documents requis à l’aide des renseignements contenus dans leur ordinateur de bord. Ils peuvent également procéder à une inspection visuelle de l’intérieur du véhicule afin d’assurer leur sécurité et poser des questions se rapportant à la conduite automobile1388. La présence d’un examen plus approfondi de l’habitacle de la voiture ou de questions ne touchant pas la sécurité routière se situe inéluctablement en dehors du cadre des fonctions qu’ils exercent en vertu du présent code, et ne serait pas justifiée aux termes de

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l’article 636 CSR1389. Sans nécessairement être reliées à la raison de l’interception, des questions concernant les allées et venues (d’où venez-vous ?, où allez-vous ?) peuvent donc être posées afin de vérifier la sobriété du conducteur ou son état de fatigue1390.

340. Compte tenu de son caractère exorbitant1391, le pouvoir conféré à l’article 636 CSR doit être strictement contrôlé et « scrupuleusement limité aux situations qui répondent à sa raison d’être fondamentale1392 » : la sécurité routière. « Les programmes d’interpellation au hasard ne doivent pas en effet permettre d’effectuer une enquête générale dénuée de tout fondement ou une fouille abusive1393. » D’où l’illégalité de l’interception (1) d’un conducteur

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effectuée dans le but de vérifier les raisons de sa présence à une heure tardive dans un quartier résidentiel en construction où l’on avait rapporté plusieurs vols d’outils et de matériaux1394; (2) d’un individu qui avait éveillé les soupçons des policiers alors qu’il circulait lentement dans un secteur où il y avait beaucoup de vols par effraction1395 et (3) d’un conducteur qui semblait suspect en raison du fait qu’il regardait souvent ses miroirs et effectuait plusieurs virages1396. Le pouvoir d’interpellation prévu à l’article 636 CSR ne doit pas être utilisé à des fins obliques, mais conformément au Code de la sécurité routière1397. Il ne s’agit pas d’un pouvoir général d’enquête ni d’une autorisation pouvant être détournée par les policiers afin de satisfaire leur curiosité1398, renforcer leurs préjugés1399 ou enquêter sur la commission d’actes criminels « qui

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ne relèvent pas de la conduite sécuritaire d’un véhicule automobile1400 ». Encore une fois, il doit y avoir un lien rationnel entre

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l’interception du véhicule et la sécurité routière1401. Une détention fondée uniquement sur l’apparence physique de l’individu, son habillement ou sa race est arbitraire et contraire à l’article 9 de la Charte1402. C’est donc l’intention du policier, considérée à la lumière des circonstances de l’affaire, qui compte1403. Est-ce que l’interception a été effectuée dans la poursuite d’un objectif légitime se rapportant à la sécurité routière ou en raison de vagues soupçons concernant la commission possible d’actes criminels autres que la conduite avec les facultés affaiblies ? La question est importante puisqu’elle détermine la légalité de l’intervention

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policière et les constatations qui en découlent. Enfin, mentionnons que ce n’est pas parce que des policiers soupçonnent un automobiliste d’être impliqué dans la production de cannabis, qu’ils ne peuvent procéder à son interception pour une infraction au Code de la sécurité routière (p. ex. : pare-brise fissuré). Si, en ce faisant les policiers acquièrent les motifs raisonnables nécessaires à son arrestation, celle-ci sera légale1404.

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b) Le pouvoir d’interpeller le conducteur d’un véhicule routier immobilisé sur la voie publique

341. Un agent de la paix peut, dans le cadre des fonctions qu’il exerce en vertu du CSR, interpeller le conducteur d’un véhicule routier immobilisé le long d’un chemin public. En effet, l’automobiliste est-il en état d’ébriété ? Éprouve-t-il des problèmes de santé ? Ou des ennuis mécaniques ? Il s’agit là de questions se rapportant à la sécurité du conducteur et des autres usagers de la route. L’interpellation du conducteur étant permise dans ces circonstances, le policier pourra actionner les gyrophares et s’enquérir de la situation faisant l’objet de l’intervention. En d’autres termes, si l’agent de la paix peut, dans l’exercice de ses fonctions prévues au CSR, demander l’arrêt au hasard d’un véhicule routier, il peut, a fortiori, procéder dans le même but à l’égard d’un conducteur dont la voiture est déjà immobilisée le long d’un chemin public.

342. L’article 636 CSR s’applique également au conducteur qui circule ou qui est garé dans le stationnement d’un commerce ou d’un immeuble ouvert au public1405. Pour s’en convaincre, citons la décision R. c. Thibeault1406 dans laquelle deux policiers

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ont procédé à l’interpellation d’un conducteur qui était assis au volant d’une automobile garée dans le stationnement du bar « La Boulathèque » à Rimouski. Comme le conducteur se trouvait à proximité d’un débit de boisson peu avant la fermeture et qu’il avait éteint les lumières de sa voiture à la suite du passage des policiers, ces derniers ont procédé à l’interpellation du conducteur pour « vérifier sa sobriété » et « sa présence sur les lieux1407 ». La vérification de la sobriété étant un objectif valable d’interception au sens du Code de la sécurité routière, celle-ci pouvait, en l’espèce, fonder l’intervention des policiers1408. En ce qui concerne la décision de s’enquérir des raisons de sa présence sur les lieux (Qu’est-ce qu’il faisait là ? Est-ce qu’il arrivait ou partait ? etc.), celle-ci ne relève pas de la sécurité routière, mais s’inscrit dans l’exercice légitime du devoir général des policiers « de maintenir la paix, l’ordre et la sécurité publique, de prévenir la commission d’infraction et d’assurer la sécurité du public ». Ce devoir, comme nous le verrons un peu plus loin, permet aux policiers d’intervenir auprès du conducteur, sans le détenir toutefois en l’absence de soupçons raisonnables.

c) Le pouvoir d’interpeller le conducteur d’un véhicule routier qui se trouve sur un terrain privé

343. L’article 636 CSR peut-il s’appliquer lorsque le véhicule qui circulait sur la voie publique s’immobilise par la suite dans la cour d’un terrain privé ? La réponse est oui, selon la Cour

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d’appel dans Harvey c. R.1409. Après avoir remarqué la présence d’un véhicule circulant tard le soir sur une route de campagne où l’on avait rapporté la commission de plusieurs vols dans des propriétés, les policiers ont aperçu la conductrice entrer dans la cour d’une résidence privée quelques mètres avant de les croiser. Croyant que la conductrice tentait de les éviter, les policiers ont fait demi-tour et immobilisé leur véhicule derrière celui de l’appelante. Constatant la présence de personnes sur le perron de la maison où l’accusée s’était garée, les policiers décident alors de rebrousser chemin. Au moment de quitter les lieux, les agents observent l’accusée sortir de son véhicule. Comme les policiers sont intrigués par la lenteur de ses gestes, ils interpellent la conductrice afin de vérifier son permis de conduire et son certificat d’immatriculation. Constatant une odeur d’alcool et des signes apparents d’ébriété, les policiers demandent à l’accusée de souffler dans l’appareil de détection approuvée. La conductrice ayant échoué le test, elle fut accusée d’avoir conduit un véhicule à moteur avec les facultés affaiblies et de conduite avec un taux d’alcool supérieur à la limite permise. Après avoir rappelé le pouvoir des policiers d’enquêter lorsque leurs soupçons sont éveillés par la présence d’un véhicule circulant, tard la nuit, dans un secteur où plusieurs vols furent rapportés1410, la Cour affirme que « les policiers ont le droit de vérifier, lorsqu’une personne circule avec un véhicule sur les chemins publics, si elle est titulaire d’un permis de conduire et d’un certificat d’immatriculation (articles 35 et 95 CSR). Le fait que l’appelante venait de garer son véhicule dans une entrée privée n’affecte pas le droit du policier de vérifier ses papiers alors qu’il

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la voit en sortir1411 ». Cette approche est conforme à l’esprit de l’article 636 CSR. S’il faut condamner le comportement d’un « policier qui, a posteriori, se drape dans les dispositions de l’art. 636 CSR pour justifier ses agissements1412 », rien ne l’empêche d’interpeller l’automobiliste qui se trouve sur un terrain privé, après avoir été observée au volant de sa voiture sur le chemin public.

344. Quant à l’interpellation effectuée dans l’entrée d’une résidence privée à la suite de constatations faites entièrement sur un terrain privé alors que la voiture ne s’est pas engagée sur la voie publique, nous croyons que l’article 636 CSR n’est d’aucun recours. Cette situation fut étudiée par le juge Vanchestein, dans R. c. Gasse1413. Après avoir aperçu l’accusé reculer brusquement avec sa voiture dans l’entrée d’une propriété privée et en descendre tout aussi rapidement, des policiers ont procédé à l’interpellation du conducteur et d’une autre personne qui se trouvait sur les lieux. Constatant la présence de symptômes d’ébriété et d’une forte odeur d’alcool, le constable Hamelin demanda à l’accusé de souffler dans l’appareil de détection approuvé. Ce dernier ayant échoué le test, il fut mis en état d’arrestation pour conduite avec capacités

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affaiblies et avec un taux d’alcoolémie supérieur à la limite permise. Comme les policiers ont actionné leurs gyrophares et bloqué l’entrée de la cour avec leur voiture, l’accusé était en détention au moment de la constatation des symptômes d’ébriété. Cette détention ne pouvant être justifiée qu’en vertu de l’article 636 CSR ou du pouvoir de détention à des fins d’enquête, le tribunal devait se demander si le pouvoir prévu à l’article 636 CSR pouvait s’appliquer lorsque les faits menant à l’interpellation du conducteur avaient été entièrement observés alors que le véhicule se trouvait déjà immobilisé sur un terrain privé ? La réponse est non. Les policiers ne pouvaient se prévaloir d’un tel pouvoir dans les circonstances. Leur attention ayant été attirée par le recul rapide de la voiture et la sortie en trombe du requérant, ils auraient pu, dans le cadre de leur devoir de maintenir la paix et de prévenir le crime, s’approcher des deux personnes tout simplement pour voir ce qui se passait, sans priver le requérant de sa liberté d’aller et venir. La détention s’étant cristallisée au moment de leur intervention, celle-ci devenait arbitraire, faute de soupçons raisonnables.

Deuxième sous-section : Le pouvoir de détenir un conducteur à des fins d’enquête

a) Le pouvoir de détenir aux fins d’enquête un conducteur circulant ou stationné sur le chemin public

345. Un policier peut intercepter à des fins d’enquête une voiture circulant sur le chemin public s’il possède des motifs raisonnables de soupçonner que le conducteur est impliqué dans un crime donné et qu’il est nécessaire de le détenir. Cette situation fut examinée par le juge Beauséjour dans R. c. Lemay1414. Alors qu’ils

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patrouillaient en voiture sur le boulevard de l’Industrie à Joliette, deux policiers ont remarqué la présence d’un véhicule stationné sous un viaduc, le long d’un accotement situé dans un rond-point adjacent à la cour d’une quincaillerie Patrick Morin. Comme plusieurs vols de matériaux de construction avaient été rapportés au cours des trois dernières années dans ce commerce, que le rond-point en question était souvent utilisé par les voleurs afin de cacher leurs camions entre le viaduc et la clôture du commerce, qu’il s’agissait d’un véhicule utilitaire sport comportant une grande capacité de chargement, que la camionnette se trouvait tard la nuit à quelques mètres de la clôture donnant accès à la cour du commerce et que la conductrice avait quitté l’accotement pour s’engager dans la voie publique au moment de l’arrivée des policiers, ces derniers décidèrent de procéder à l’interception du véhicule. Sachant qu’une femme avait participé au dernier vol perpétré à la quincaillerie Patrick Morin, l’attention des policiers fut attirée rapidement par la présence d’un gros coffre situé à l’avant de la valise. La conductrice ayant dissipé les soupçons des policiers à l’égard du contenu du coffre, ces derniers décelèrent une odeur d’alcool provenant de son haleine. Possédant des motifs raisonnables de soupçonner que l’accusée avait consommé de l’alcool, les policiers demandèrent à la requérante de souffler dans l’appareil de détection approuvé. Accusée de conduite avec les facultés affaiblies et de conduite avec un taux d’alcool supérieur à la limite permise, la défense contesta la légalité de la détention initiale. D’après le juge Beauséjour, l’interception du véhicule de l’accusée n’avait rien à voir avec les pouvoirs prévus à l’article 636 CSR. S’agissant d’une détention aux fins d’enquête, les policiers devaient posséder des motifs raisonnables de soupçonner que la conductrice était impliquée dans un crime donné et qu’il était nécessaire de la détenir.

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Comme la croyance des policiers voulant que la conductrice pouvait être impliquée dans la commission d’un crime s’appuyait sur la présence de facteurs objectivement vérifiables, tels que la fréquence des infractions rapportées dans ce commerce au cours des trois dernières années, l’endroit utilisé par les voleurs, l’heure de l’interception, le type de véhicule conduit par l’accusée et son départ au moment de l’arrivée des policiers, la détention de la conductrice était justifiée dans les circonstances1415. En ce qui concerne la détention qui repose sur une intuition ou de simples soupçons, celle-ci est arbitraire et contraire à l’article 9 de la Charte1416.

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b) Le pouvoir de détenir aux fins d’enquête un conducteur se trouvant dans le stationnement d’un commerce ou d’un autre bâtiment ouvert au public

346. Si les policiers peuvent détenir un conducteur circulant ou stationné le long d’un chemin public lorsqu’ils « ont des motifs raisonnables de soupçonner l’existence d’un lien clair entre la personne en cause et une infraction criminelle récente ou toujours en cours1417 », il en va également du conducteur qui se trouve dans le stationnement d’un commerce ou d’un autre édifice ouvert au public. Dans R. c. Morissette1418, la juge Aubry confirme la légalité de la détention du conducteur d’un véhicule routier immobilisé tard la nuit, les phares allumés, à côté de la pompe à essence d’un dépanneur Couche-tard fermé depuis deux ou trois heures. Plusieurs introductions par effraction et vols de cigarettes ayant été rapportés dans les dépanneurs de la région, les policiers ont activé les gyrophares et interpellé le conducteur afin d’enquêter sur les raisons de sa présence sur les lieux en question. L’interpellation du conducteur ayant mené à la constatation des symptômes d’ébriété à l’origine des accusations de conduite avec les facultés affaiblies et de conduite avec un taux d’alcool supérieur à la limite permise, sa détention était fondée sur le devoir général des policiers de prévenir le crime et, plus précisément, sur la présence de soupçons raisonnables justifiant l’intervention des policiers. Cette décision n’est pas sans analogie avec celle rendue par la juge Gilbert, dans R. c. Lelièvre1419. Alors qu’ils patrouillaient dans le secteur de Beauport, des policiers aperçoivent deux voitures, le moteur en marche et les phares allumés, garées très près l’une de l’autre dans le stationnement d’un édifice d’Hydro-Québec. Comme il s’agit d’un samedi soir, que le bâtiment est fermé la fin de semaine et qu’il n’y a pas d’autres véhicules dans le stationnement, les policiers s’approchent, les phares éteints, à près de 2 ou 3 mètres des véhicules suspects. Constatant que les vitres des voitures sont

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embuées, les policiers activent leurs gyrophares. Ayant sommé les trois personnes se trouvant dans la voiture de l’accusé de s’identifier, un des policiers aperçoit, à l’aide de sa lampe de poche, du cannabis caché sous un cendrier, dans le porte gobelet du conducteur. L’autre policier ayant détecté une odeur de cannabis fraîchement coupé, l’agent procéda à l’arrestation de l’accusé et des 2 passagers pour possession de cannabis. Comme les soupçons des policiers s’étaient transformés en soupçons raisonnables à l’approche de la voiture et que la drogue était apparente aux yeux de l’agent, l’arrestation de l’accusé pour trafic de cannabis et de possession dans le but d’en faire le trafic était fondée dans les circonstances.

c) Le pouvoir de détenir aux fins d’enquête un conducteur se trouvant sur un terrain privé

347. Le pouvoir de détenir aux fins d’enquête un conducteur se trouvant sur un terrain privé, puise sa source dans la décision de la Cour d’appel du Québec, dans R. c. Cotnoir1420. Vers 1 h 30 du matin, des agents de la Sûreté du Québec, qui patrouillaient dans la municipalité d’Évain, ont remarqué la présence inhabituelle d’une camionnette, le moteur en marche, dans le stationnement d’une résidence privée. L’agent Bélanger ayant aperçu, sans en avertir sa collègue, un individu assis à la place du conducteur la tête penchée vers l’arrière, le policier songea à revenir sur les lieux, une fois sa ronde terminée, afin de s’enquérir de l’état de santé du conducteur. Une fois la résidence dépassée, l’agent Gougeon constata également, dans son rétroviseur, la présence d’un individu à l’intérieur de la camionnette. Croyant qu’il s’agissait d’un voleur, l’agent Gougeon stationna sa voiture derrière celle du suspect, descendit de l’auto-patrouille, puis s’approcha de la camionnette dans laquelle elle découvrit l’accusé endormi. L’agent Gougeon ayant cogné à la fenêtre du véhicule afin de réveiller le conducteur, la policière décela une forte odeur d’alcool provenant de l’habitacle

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de la voiture. Après avoir appris qu’il s’agissait du propriétaire de la camionnette et de la résidence, l’agent Gougeon constata plusieurs signes d’ébriété en vertu desquels elle somma l’accusé de se soumettre à un test de dépistage d’alcool. Mis en état d’arrestation après avoir échoué le test, l’accusé contesta la légalité de l’intervention à l’origine des constatations des policiers. D’après le juge Pidgeon, les agents Gougeon et Bélanger agissaient dans le cadre des devoirs imposés par la loi et la common law : la première souhaitant prévenir le crime après avoir surpris un voleur en flagrant délit et le second à protéger la vie des citoyens en prêtant assistance à une personne qui pouvait avoir subi un malaise1421. Après avoir déterminé que les policiers agissaient dans l’exercice légitime de leurs fonctions, la Cour estima que « les soupçons de l’agent Gougeon étaient suffisamment sérieux1422 » pour fonder son intervention dans les circonstances. Même si nous croyons que les soupçons de l’agent Gougeon n’étaient pas suffisamment étayés par la preuve pour être raisonnables, la décision de la Cour d’appel, dans R. c. Cotnoir, doit être interprétée comme permettant aux policiers de détenir un individu stationné dans sa voiture sur un terrain privé, lorsqu’ils ont des motifs raisonnables de soupçonner qu’il est impliqué dans la commission d’un crime et qu’il est nécessaire de le détenir1423. En l’absence de tels soupçons raisonnables,

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les policiers ne peuvent procéder à la détention du conducteur pour fins d’enquête, mais peuvent procéder à des vérifications de routine1424.

348. L’arrêt de la Cour d’appel dans R. c. Bilodeau confirme le pouvoir des policiers de détenir aux fins d’enquête un conducteur qui s’immobilise dans l’entrée d’une résidence privée1425. Alors qu’ils patrouillaient au cours de la nuit dans un secteur résidentiel d’un petit village, des policiers ont remarqué la présence d’une camionnette qui circulait à très basse vitesse, les lumières des freins s’allumant et s’éteignant « comme si les passagers à bord regardaient les maisons ou cherchaient une adresse quelconque1426 ». Le véhicule étant entré dans la cour d’une maison privée à l’approche des policiers, ces derniers ont vérifié si l’adresse de la demeure correspondait au véhicule en question. La demande au Centre de renseignements policiers du Québec (CRPQ) révéla que le suspect habitait dans un autre village. Deux minutes plus tard, le conducteur remit le moteur de sa voiture en marche, recula, puis s’engagea en direction sud sur la rue Bilodeau. Les policiers s’étant approchés pour l’intercepter, le conducteur s’immobilisa, encore une fois, dans l’entrée d’une résidence privée. Craignant la possibilité d’une introduction par effraction, les policiers procédèrent à l’interpellation du suspect, puis constatèrent la présence d’une forte odeur d’alcool. Discutant de la légalité de l’intervention ayant

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permis la constatation des symptômes d’ébriété, la Cour d’appel confirma le pouvoir des policiers de détenir le conducteur à des fins d’enquête. Ainsi, puisque la voiture roulait à faible vitesse en freinant à plusieurs reprises, que le conducteur avait immobilisé son véhicule, les phares éteints, dans l’entrée d’une maison dont l’adresse ne correspondait pas à la sienne, qu’il s’était arrêté de nouveau dans l’entrée d’une autre résidence à l’approche des policiers, ces derniers étaient justifiés d’intervenir « pour éviter une tentative d’introduction par effraction dans une résidence au cours de la nuit1427 ». La détention étant fondée sur la présence de motifs raisonnables de soupçonner, celle-ci ne contrevenait pas à l’article 9 de la Charte.

349. Le pouvoir d’interpeller le conducteur d’une automobile dans l’entrée d’une résidence privée fut réitéré dernièrement par la Cour d’appel dans l’arrêt Pelland c. R.1428. Après avoir reçu du répartiteur radio des renseignements précis provenant d’une personne qui avait appelé au 911 pour signaler que l’accusé conduisait son véhicule en état d’ébriété, des policiers se sont rendus à l’adresse du suspect. Le véhicule n’étant pas sur place à leur arrivée, les policiers ont aperçu quelques instants plus tard le jeep Patriot vert du suspect se diriger vers eux, pour se garer dans l’entrée de sa résidence. Les policiers ayant procédé à son interpellation, le suspect fut accusé d’avoir conduit une automobile alors que sa capacité de conduire était affaiblie par l’effet de l’alcool et d’avoir conduit une automobile alors que son alcoolémie dépassait la limite légale. L’accusé ayant été acquitté en première instance, l’appel de la décision fut accueilli par le juge Boucher, de la Cour supérieure. D’après ce dernier, les policiers pouvaient détenir le conducteur, car ils avaient des motifs raisonnables de soupçonner que l’intimé « était lié à une infraction criminelle récente ou en cours1429 ». L’accusé ayant contesté cette décision devant la Cour d’appel du Québec, le Tribunal devait déterminer notamment si l’intervention policière était illégale parce qu’elle avait eu lieu sur

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un terrain privé. Encore une fois, la Cour est catégorique : « le fait qu’un véhicule passe de la voie publique à un terrain privé ne transforme pas ce dernier en un refuge contre l’intervention des policiers1430 ». Que le conducteur circulant sur la voie publique s’immobilise chez lui, chez des amis ou à un autre endroit qui ne correspond pas à son adresse importe peu1431. « Lorsque des motifs légitimes, au sens de la jurisprudence, sous-tendent leur intervention, les policiers peuvent intervenir comme en l’espèce1432. »

Troisième sous-section : Le pouvoir d’interpellation sans détention d’un conducteur

a) Le pouvoir d’interpeller (sans détention) le conducteur d’un véhicule immobilisé sur un chemin public ou dans le stationnement d’un commerce ou d’un édifice ouvert au public

350. L’interpellation sans détention du conducteur d’une automobile garée en bordure d’un chemin public ou dans le stationnement d’un commerce ou d’un édifice ouvert au public, fut abordée par la Cour d’appel, dans R. c. Dault1433. Le 14 décembre 2003, peu après minuit, deux policiers en auto-patrouille pénètrent dans le stationnement d’un lave-auto situé à proximité d’un bar fréquenté par plusieurs clients. C’est à ce moment que leur attention est attirée par la présence d’un véhicule garé, le moteur en marche, les phares éteints et les vitres dégivrées, contrairement aux autres voitures. Deux passagers se trouvent à l’intérieur et semblent s’affairer près du tableau de bord. Dans le but de procéder à une vérification du véhicule, le policier Montfils stationne l’auto-patrouille près de la voiture des suspects, sans activer les

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gyrophares. Les policiers sortent de leur véhicule et s’approchent des deux passagers. Arrivé au niveau de la porte du conducteur, le policier Montfils note que la fenêtre est entrouverte et décèle une forte odeur d’alcool. Quant au policier se trouvant du côté du passager, il remarque « des mouvements de mains sur le tableau de bord du véhicule1434 » et la présence d’un étui de carte de crédit. Aussitôt, l’agent Rouleau ouvre la portière du passager et voit une ligne de cocaïne que ce dernier est en train de préparer à l’aide d’un étui et de sa carte bancaire. De son côté, le policier Montfils constate la présence chez le conducteur de plusieurs symptômes de facultés affaiblies. Les deux individus sont arrêtés puis amenés au poste de police. Accusé de garde et contrôle d’un véhicule à moteur avec les facultés affaiblies (art. 253b) et 255(1) C.cr.) et de possession de cocaïne, le conducteur conteste la validité de l’interpellation à l’origine des constatations des policiers et plus précisément l’absence de motifs permettant aux agents de s’approcher du véhicule. D’après le juge Dalphond, « il est de jurisprudence bien établie que les policiers peuvent patrouiller pour assurer la paix et la sécurité, prévenir la commission d’infraction et venir en aide à un citoyen (R. c. Cotnoir, [2000] R.J.Q. 2488 (C.A.)). Il est aussi indéniable qu’en vertu de leurs pouvoirs généraux, les policiers peuvent interpeller des personnes et leur poser des questions dans le cadre d’une patrouille de routine1435 ». Comme les policiers

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ont stationné leur voiture parallèlement à celle de l’accusé, sans bloquer la sortie et sans activer les gyrophares, et qu’ils « voulaient voir se qui se passait » afin de vérifier qu’aucune personne n’était en difficulté ou en train de commettre un acte criminel, l’intervention ayant mené aux constatations reprochées s’inscrivait légitimement dans l’exercice des pouvoirs généraux des policiers « de maintenir la paix et la sécurité, de prévenir la commission d’infraction et de venir en aide à un citoyen1436 ».

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351. Les principes énoncés par le juge Dalphond, dans R. c. Dault, furent repris et développés par le juge Gosselin, dans R. c. Spence1437. Alors qu’ils patrouillaient sur la route 105 à Chelsea, les agents Cloutier et Deveau ont remarqué la présence d’un véhicule immobilisé, tard la nuit, le moteur en marche et les phares allumés, à proximité d’un restaurant ayant déjà fait l’objet d’une demande de surveillance. Au moment d’entrer dans le stationnement du commerce, les policiers aperçoivent un individu, qui vient de sortir de la voiture, se diriger vers le restaurant. Comme l’établissement est fermé, les policiers décident d’effectuer une vérification auprès du véhicule en question. Immobilisant l’auto-patrouille une dizaine de pieds à gauche de la Mercedes, l’agent Deveau constate que la conductrice a vu leur automobile s’approcher. Malgré plusieurs tentatives d’attirer son attention, la conductrice ne réagit pas à la présence des policiers. Trouvant la situation plutôt louche, « le constable Deveau décide à ce moment d’enquêter de façon plus approfondi[e] pour voir qu’est ce qui se produit sur le site du commerce1438 ». Le policier se trouvant, à ce moment, debout du côté de la porte de la conductrice, il aperçoit l’individu, qui avait quitté la voiture pour se diriger vers le restaurant, en train d’uriner. Sachant désormais ce que l’individu fait là, l’agent Deveau décide tout de même de compléter son intervention auprès de la conductrice afin (1) de s’enquérir des raisons de leur présence sur les lieux, (2) de s’assurer qu’il n’y a pas de problèmes et (3) de vérifier si la personne qui se trouvait à l’extérieur de la voiture n’a pas tenté de faire diversion en faisant semblant d’uriner. Après avoir cogné à la fenêtre de la conductrice pour engager la conversation, le policier décela une forte odeur d’alcool provenant de l’habitacle du véhicule. Ayant également remarqué les yeux rougis de la conductrice, le patrouilleur lui demanda de sortir du véhicule afin de subir un test de dépistage d’alcool, qu’elle échoua. Discutant de la légalité de l’intervention policière ayant mené à la constatation des symptômes de facultés affaiblies, le juge Gosselin conclut à l’absence de détention de l’accusée au moment de son interpellation et à la légitimité de l’intervention policière. Ce n’est donc pas parce que les policiers abordent une personne à des fins

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d’enquête qu’elle est nécessairement en détention au sens de l’article 9. Dans un passage d’une clarté et d’une précision remarquables, le juge Gosselin explique :

« D’abord que, si les policiers ont besoin d’avoir des soupçons raisonnables fondés sur des motifs concrets à l’effet qu’une personne est reliée à la perpétration d’une infraction pour pouvoir la détenir à des fins d’enquête, au sens des arrêts Mann et Suberu, et s’ils ont aussi besoin d’acquérir des motifs raisonnables de croire qu’une personne a commis une infraction pour pouvoir l’arrêter, l’exigence d’acquérir de tels soupçons ou motifs raisonnables n’est pas requise lorsque, dans l’exercice de leurs pouvoirs généraux d’assurer la protection des personnes et des biens et de prévenir le crime, ils procèdent à des vérifications de routine. Il suffit dès lors que l’intervention policière s’inscrive dans l’exercice légitime de ces pouvoirs généraux pour que les policiers soient justifiés, par exemple, d’approcher un véhicule automobile immobilisé dans un lieu accessible au public et d’interagir avec le conducteur, ou encore d’approcher quelqu’un sur la rue et d’interagir avec lui; pour autant, toutefois, que cette interaction se fasse dans le respect des droits et libertés enchâssés dans la Charte. Et pour autant, en conséquence, que cette interaction ne se métamorphose pas en une détention pour fins d’enquête ou encore en une [arrestation] pure et simple puisque, le cas échéant, le policier doit avoir préalablement acquis des soupçons raisonnables ou encore des motifs raisonnables1439. »

352. Les policiers ayant stationné leur voiture à la gauche de celle de la conductrice, sans bloquer le chemin ni activer leurs gyrophares, la liberté de mouvement de l’accusée n’a pas été contrainte dans les circonstances. Quant à la légalité de l’intervention policière, le constable Deveau avait « des raisons valables de procéder à une vérification du commerce et du véhicule stationné1440 » (présence d’un véhicule à une heure tardive dans le stationnement d’un restaurant fermé, secteur isolé, passager se dirigeant vers le commerce, conductrice faisant fi de la présence

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des policiers, etc.). Comme la décision d’approcher le véhicule suspect, puis de cogner à la fenêtre de la conductrice afin de vérifier ce qui se passait, s’inscrivait dans l’exercice légitime des pouvoirs des policiers « de prévenir le crime et de protéger la vie », les constatations effectuées par la suite pouvaient conférer aux policiers les soupçons raisonnables nécessaires afin d’obliger la conductrice à souffler dans l’appareil de détection approuvé1441.

353. En ce qui concerne les policiers qui agissent dans le cadre d’une enquête, ou d’un appel, ces derniers peuvent, conformément aux enseignements de la Cour suprême dans R. c. Suberu, interpeller un conducteur afin de déterminer si la personne « est mêlée à l’affaire d’une façon quelconque1442 ». En effet, « [i]l faut poser plusieurs questions préliminaires pour décider comment procéder par la suite. Tant que les renseignements relatifs à la perpétration possible d’une infraction criminelle et à l’identité de l’interlocuteur n’avaient pas été obtenus1443 », le policier pouvait continuer à poser des questions dans un climat exempt de contrainte, sans qu’il y ait détention.

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b) Le pouvoir d’interpeller (sans détention) le conducteur d’un véhicule immobilisé sur un terrain privé

354. Bien que l’interpellation d’un conducteur sur un terrain privé implique des considérations particulières, nous croyons qu’un policier peut, « à l’occasion de l’exercice légitime des devoirs permis par la loi et la common law1444 », interpeller le conducteur d’une automobile stationnée dans la cour d’une résidence privée1445. Comme l’exercice légitime des pouvoirs conférés par la loi ou la common law suppose la présence de raisons valables de procéder à l’interpellation du conducteur, les policiers doivent fonder leur intervention sur la présence de faits justifiant leur action. « Est-ce que le conducteur a besoin d’aide ? Se livre-t-il à une activité illicite ? A-t-il les facultés affaiblies ? Fait-il du repérage afin de vérifier si les habitants de la demeure sont présents ? » Naturellement, l’intervention fondée sur la race ou des préjugés ne s’inscrit pas dans l’« exercice légitime » des pouvoirs conférés par la loi ou la common law. Sans exiger des motifs précis ou des soupçons raisonnables, les policiers doivent avoir des raisons valables de procéder à la vérification du conducteur1446. Résultat :

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Les policiers qui aperçoivent un véhicule automobile circuler sur le terrain privé d’une usine fermée pendant la nuit pour ensuite se garer à proximité d’une génératrice fixée à l’immeuble en question peuvent intervenir auprès du conducteur afin « de prévenir la commission d’un crime ou d’aviser des individus de quitter les lieux s’ils n’avaient aucun droit légitime sur cette propriété1447 ». S’agissant d’une intervention, sans détention, effectuée dans le but de s’enquérir des raisons de leur présence à cet endroit, les policiers n’avaient rien à se reprocher. Quant à la voiture qui circulait, tard le soir, à plus de 178 km/h dans une zone de 100 km/h et qui fut retrouvée, quinze minutes plus tard, dans l’entrée d’une résidence privée dont les lumières étaient allumées, les policiers peuvent cogner à la porte de la demeure afin d’identifier le propriétaire du véhicule sans engager la protection offerte à l’article 91448. Bien que la présence de simples soupçons suffise, le policier qui se fonde « sur aucune observation [ou information] préalable sérieuse avant d’intercepter1449 » le conducteur, aura de la difficulté à justifier son

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intervention dans le cadre des pouvoirs qui lui sont conférés par la loi ou la common law.

Quatrième section : La norme des « soupçons raisonnables »

355. Les motifs gouvernant l’intervention d’un policier auprès d’un citoyen peuvent être classés en fonction du degré de probabilité qu’une personne se livre à une activité criminelle1450. Fondée sur une intuition, une hypothèse ou une supposition, la présence de « simples soupçons » ou de « soupçons généraux » peut amener des policiers à commencer ou pousser plus loin leur enquête, sans toutefois leur permettre de détenir la personne qui a attiré leur attention1451. Comme les faits ne sont pas encore suffisamment précis ou caractérisés pour constituer des « soupçons raisonnables », les policiers doivent s’abstenir de contraindre la liberté du suspect. On n’a qu’à penser au patrouilleur qui intercepte le conducteur d’un véhicule de location qui circule tard la nuit dans un secteur agricole reconnu pour la production de cannabis. L’intervention policière se fondant uniquement sur la présence de simples soupçons (le mois de septembre est la période de récolte du cannabis; l’endroit est reconnu pour la production illégale de cannabis; les récoltes ont généralement lieu la nuit; les individus qui procèdent aux récoltes circulent fréquemment sur des chemins de

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campagne ou des routes secondaires, les producteurs utilisent souvent des véhicules de location), le tribunal conclut à l’illégalité de la détention1452.

356. Pour être « raisonnables », les soupçons doivent reposer sur « des faits objectivement [discernables] ou vérifiables1453 ». La distinction entre un « simple soupçon » et un « soupçon raisonnable » tient donc dans la nature et la précision des faits à l’origine de la perception du policier1454. Pour s’en convaincre, citons, encore une fois, la décision de la Cour suprême dans R. c. Mann1455. À la suite d’une introduction par effraction commise dans un quartier voisin du centre-ville de Winnipeg, l’accusé, Philip Mann, fut interpellé puis détenu par des policiers à la recherche d’un suspect

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identifié. Comme l’accusé correspondait étroitement à la description du suspect et qu’il se trouvait à proximité du lieu de l’infraction peu de temps après sa commission, les policiers avaient des motifs raisonnables de soupçonner qu’il pouvait être impliqué dans la perpétration d’un acte criminel et qu’il était nécessaire de le détenir1456. « Les faits indiquent-ils objectivement la possibilité d’un comportement criminel compte tenu de l’ensemble des circonstances ? Dans l’affirmative, il est satisfait à l’élément objectif du critère. Dans la négative, l’analyse prend fin1457. » Le tribunal, rappelons-le, doit considérer la preuve à la lumière de toutes les

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circonstances de l’affaire1458. Des facteurs neutres ou anodins ne procurent pas de soupçons raisonnables « lorsqu’ils sont combinés à d’autres facteurs neutres, à moins que l’un de ces facteurs fournisse un support à un autre ou aux autres facteurs, ou que ces

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facteurs neutres, une fois réunis, se renforcent mutuellement1459 ». S’agissant de la possibilité raisonnable d’un crime, les soupçons se rapportent à un événement susceptible de se produire, sans exclure toutefois d’autres conclusions possibles.

357. À l’extrémité supérieure de l’échelle de probabilité se trouvent les « motifs raisonnables et probables de croire ». « Ce qui distingue les “soupçons raisonnables” de la norme plus stricte des “motifs raisonnables et probables” est simplement le degré de probabilité qu’une personne se livre à une activité criminelle, et non l’existence de faits objectivement vérifiables, qui, dans les deux cas, sont nécessaires pour justifier la fouille ou la perquisition1460. » Les faits indiquent-ils objectivement la probabilité qu’une infraction

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a été commise ? Si la réponse est oui, le policier peut procéder à l’arrestation de l’individu. Dans le cas contraire, la police peut interpeller, sans détention, le suspect en vertu de son pouvoir général de maintenir la paix et de prévenir le crime, ou procéder à sa détention à des fins d’enquête1461. L’exemple de la personne qui sort en courant d’un immeuble en feu avec un bidon d’essence dans les mains illustre bien cette situation. Comme les policiers ont des motifs raisonnables et probables de croire que l’individu a commis un acte criminel, ces derniers peuvent arrêter le suspect. L’arrestation qui s’incarne dans la prise de possession physique de l’individu étant plus envahissante que la détention à des fins d’enquête, il est normal d’exiger un degré de probabilité plus élevé quant à la preuve1462. En effet, « la norme des soupçons raisonnables est moins exigeante que celle de la cause probable non seulement parce que les soupçons raisonnables peuvent reposer sur des renseignements différents, sur le plan de la quantité et du contenu, de ceux requis pour établir l’existence d’une cause probable, mais également parce que des soupçons raisonnables peuvent découler de renseignements moins fiables que ceux requis pour démontrer l’existence d’une cause probable1463 ». La probabilité raisonnable, qui marque le passage de la détention à l’arrestation, permet donc à l’État d’empiéter davantage sur la liberté du suspect.

358. Envisagés sous l’angle de l’infraction reprochée, les « soupçons raisonnables » doivent se rapporter à l’implication

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possible d’une personne dans la poursuite d’une activité criminelle et à la nécessité de la détenir afin de procéder à une enquête plus approfondie1464. Discutant de la légalité de la détention à des fins d’enquête de deux individus qui s’affairaient à transférer des sacs à ordures d’un véhicule à l’autre dans le stationnement d’un centre commercial, la Cour d’appel confirme la validité de l’intervention policière1465. D’après le juge Chamberland, la position perpendiculaire d’un véhicule par rapport à l’autre, l’empressement des deux accusés à décharger la cargaison, le fait que les sacs paraissaient légers malgré qu’ils étaient pleins et la présence d’une femme à l’avant de la fourgonnette en train de faire le guet, contribuent à la présence de motifs raisonnables de soupçonner qu’une activité criminelle était en cours. En effet, « [i]l ne s’agit pas ici d’intuition; il s’agit plutôt de faits qui, mis ensemble et analysés, permettaient raisonnablement aux policiers de soupçonner qu’un crime se déroulait sous leurs yeux. Ils ne savaient peut-être pas précisément de quel crime ils étaient les témoins (le sergent-détective Lemire croyait à du recel ou à un trafic de stupéfiants), mais ils en avaient assez pour intervenir et, dans la foulée de cette intervention, détenir brièvement les appelants aux fins de leur enquête1466 ». Les policiers n’ont donc pas besoin d’identifier la nature exacte de l’infraction reprochée pour procéder à la détention des suspects1467.

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359. La seule présence de motifs raisonnables de soupçonner que l’accusé est « généralement impliqué dans une activité criminelle » (p. ex. : le trafic de stupéfiants), ne suffit pas pour conclure « qu’il commettait ou s’apprêtait à commettre un crime au moment de l’interception1468 ». Cela est particulièrement vrai lorsque les policiers aperçoivent uniquement l’individu déposer un objet non identifié dans le coffre de sa voiture. Quant à la présence d’un suspect dans un quartier réputé pour ses activités criminelles, elle ne permet pas l’établissement de « motifs raisonnables de soupçonner l’existence d’un lien clair entre la personne en cause et une infraction criminelle récente ou toujours en cours1469 ». Il en va également de la simple présence d’une personne qui n’est pas soupçonnée par la police dans un endroit « fréquenté quelques jours ou quelques semaines auparavant par une personne d’intérêt1470 ». « Même si certains immeubles d’appartements dans un quartier peuvent être connus des policiers comme des refuges pour les activités liées à la drogue, cela ne signifie pas que quiconque entre dans un immeuble à appartements dans un secteur ou un quartier mal défini peut objectivement être soupçonné d’activité criminelle1471. » Le policier qui souhaite pousser plus loin son enquête devra alors recourir à des techniques moins envahissantes, telles que la surveillance à pied ou en voiture.

360. En ce qui touche finalement la responsabilité de l’accusé, celle-ci exige la preuve de sa culpabilité « hors de tout doute raisonnable ». Il est donc important de ne pas confondre ces quatre niveaux de preuve (soupçons, soupçons raisonnables, motifs raisonnables et probables de croire, preuve hors de tout doute

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raisonnable), car ils conditionnent l’empiètement de l’État sur la liberté individuelle, ainsi que les limites qui s’y rapportent1472.

Cinquième section : L’arrestation

361. L’arrestation consiste dans le fait de se saisir d’une personne ou de la toucher dans le but de la détenir1473. De la saisir, tout d’abord, puisque le policier qui s’empare physiquement d’un suspect, ou qui menace d’employer la force à son endroit lorsque cela est possible, procède à son arrestation. L’arrestation qui découle de l’emploi de la force ou de la menace d’un tel emploi est donc la forme la plus simple et la plus évidente d’arrestation.

362. L’arrestation subséquente au toucher de la personne interpellée fut examinée par la Cour suprême dans l’arrêt R. c. Whitfield1474. Alors qu’il se trouvait à un feu rouge, un agent de police a repéré un automobiliste faisant l’objet d’un mandat d’arrestation. L’accusé ayant accéléré après avoir été informé par le policier qu’il avait un mandat contre lui, le suspect fut contraint de freiner, quelques mètres plus loin, en raison de la circulation. L’agent ayant rejoint le conducteur, il l’empoigna par la chemise et prononça les mots suivants : « Je vous arrête. » Les voitures s’étant déplacées entretemps, l’accusé réussit finalement à se

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libérer de l’emprise du policier en accélérant de nouveau. Discutant de la présence ou non d’une arrestation, le juge Judson s’inspire des principes issus de la jurisprudence et résumés dans l’affaire Nicholl v. Darley (1828) : « [E]n droit, il y a arrestation au moindre toucher1475. » Ce principe, qui fut repris et développé par le baron en chef Pollock, dans Sandon v. Jervis, ne fait plus aucun doute : « la loi c’est qu’il y a arrestation si l’agent est assez près du débiteur pour le toucher et de fait il le touche et l’informe de l’existence du bref1476 ». Le policier ayant touché l’accusé après l’avoir informé qu’il était en état d’arrestation, ce dernier devait se soumettre à l’ordre du policier.

363. De simples paroles, sans toucher ou contact, peuvent également constituer une arrestation si l’accusé se soumet à l’autorité des policiers. Cette hypothèse fut considérée par la Cour suprême dans R. c. Latimer1477. Dans le cadre de leur enquête sur la mort suspecte de sa fille lourdement handicapée, deux policiers se sont présentés au domicile de Robert Latimer afin de le placer sous garde. Convaincus de la présence de motifs raisonnables pour arrêter M. Latimer, mais de l’absence de preuve suffisante à ce stade pour obtenir un verdict de culpabilité, les agents ont dit à l’accusé qu’il « était détenu en rapport avec l’enquête sur la mort de Tracy1478 », puis l’ont informé de son droit à l’assistance d’un avocat et procédé à la mise en garde habituelle. Après avoir mentionné à Robert Latimer qu’ils devaient l’accompagner dans la maison pour se changer de vêtements, l’accusé fut conduit au détachement de North Battleford pour y être interrogé. La défense ayant contesté l’existence et la légalité de l’arrestation, la Cour

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conclut en la présence d’une arrestation de fait. Comme « c’est la substance de ce qu’on peut raisonnablement supposer que l’appelant a compris qui est déterminante plutôt que le formalisme des mots exacts utilisés1479 », il ne fait aucun doute que les paroles des policiers, une fois considérées à la lumière des circonstances de l’affaire et de la soumission de Robert Latimer, signifiaient qu’une arrestation avait bel et bien été effectuée.

364. En ce qui concerne l’intervention policière sans prise de possession physique ni toucher, sans risque de contrainte physique immédiate ni soumission, celle-ci ne constitue pas une arrestation. L’agent de sécurité qui brandit sa plaque d’inspecteur et qui se place devant la voiture de l’accusé en lui demandant de s’immobiliser n’effectue pas une arrestation si le suspect poursuit sa route et accélère pour déloger l’agent qui s’était retrouvé sur son capot. L’accusé n’ayant pas « renoncé à sa liberté », l’absence de soumission à l’autorité de l’inspecteur ne permettait pas dans les circonstances de parfaire l’arrestation1480.

365. Avant de terminer cette rubrique consacrée à la notion d’arrestation, il convient de dire quelques mots sur la nature de l’arrestation en tant que telle. Sur ce point, la jurisprudence est unanime : l’arrestation est un processus continu qui débute avec la prise de possession physique du suspect, le toucher ou les paroles suivies d’une soumission à l’autorité, et se prolonge jusqu’au moment où la personne est livrée à un agent de la paix, remise en liberté par un agent de la paix ou conduite devant un juge de paix pour être traitée selon la loi1481. L’entrave à la liberté, qui caractérise

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la mise en arrestation de l’accusé, est donc continue et non ponctuelle ou intermittente.

Première sous-section : L’arrestation sans mandat

366. Comme les pouvoirs d’arrestation fluctuent en fonction de la nature de l’infraction reprochée, c’est de ce côté qu’il faut commencer notre analyse de la légalité des arrestations prévues par le Code. Sur ce point, le législateur distingue entre l’« acte criminel » et les « infractions criminelles ». L’« acte criminel » renvoie aux actes criminels purs (actes poursuivis par mise en accusation) et aux infractions hybrides ou mixtes (actes poursuivis par mise en accusation ou par procédure sommaire, au choix du poursuivant)1482. Quant aux « infractions criminelles », elles recouvrent aussi bien les actes criminels purs, que les infractions hybrides ou mixtes et punissables par voie sommaire. La distinction est importante car elle détermine l’étendue des pouvoirs d’arrestation des simples citoyens et des agents de la paix conformément aux articles 494 et 495 du Code.

a) L’arrestation sans mandat par quiconque (article 494 C.cr.)

367. L’arrestation sans mandat par quiconque est un concept ancien dont l’origine remonte à l’époque des rois normands. Créé pour assurer la « paix du roi », le pouvoir d’arrestation des citoyens est antérieur à celui des agents de la paix. « En common law, un simple citoyen avait à la fois le droit et l’obligation absolue de procéder à une arrestation lorsqu’un crime était en train d’être

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commis ou avait “en fait” été commis1483. » Cette obligation, qui était absolue dans les cas de felonies, semblait plus limitée dans les cas de crimes mineurs. En effet, selon le juge Pigot, dans King v. Poe (1866), il n’existe aucun [Traduction] « droit d’arrêter l’auteur [...] d’une infraction mineure, en l’absence d’une violation de la paix et lorsqu’il n’est pas nécessaire de l’arrêter pour empêcher la répétition de l’acte en cause1484 ».

368. Issus de la common law, les pouvoirs d’arrestation du citoyen sont désormais prévus à l’article 494 du Code criminel. Aux termes de l’al. 494(1)a), « [t]oute personne peut arrêter sans mandat un individu qu’elle trouve en train de commettre un acte criminel1485 ». C’est l’exemple de l’individu qui aperçoit une personne en train de mettre le feu dans des poubelles situées sous les escaliers d’un immeuble à appartements. L’accusé ayant été pris en flagrant délit, le passant pouvait l’arrêter sur-le-champ. Pour procéder à une arrestation sans mandat en vertu de l’al. 494(1)a),

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le citoyen doit « constater lui-même une situation où une personne est apparemment en train de commettre une infraction1486 ». Le citoyen n’a pas à avoir personnellement connaissance de tous les éléments qui l’amènent à croire que la personne est « en train » de commettre un acte criminel. Des renseignements provenant d’un tiers confirmés par la vérification subséquente du citoyen peuvent être suffisants à ce stade. C’est ainsi qu’il faut envisager l’arrestation effectuée par des policiers militaires qui circulaient en voiture sur un chemin public lorsqu’ils ont été informés par un passant que le conducteur d’une automobile qui venait de s’immobiliser le long de la chaussée semblait conduire en état d’ébriété1487. Le véhicule ayant repris son chemin quelques instants plus tard, les policiers ont constaté la conduite erratique du conducteur puis procédé à son arrestation. Comme les renseignements reçus avaient été confirmés par les observations des policiers militaires, il était « apparent aux yeux d’une personne raisonnable qui se trouve dans les mêmes circonstances » que le conducteur était « en train de conduire son véhicule avec les facultés affaiblies1488 ».

369. De simples soupçons ne permettent pas de justifier une arrestation, même si ces derniers se confirment par la suite. L’exemple des clients d’un dépanneur qui ont procédé à l’arrestation d’un individu soupçonné d’avoir commis un vol à l’étalage illustre bien cette situation. Le caissier ayant demandé au suspect qui se trouvait près des frigidaires situés à l’arrière du commerce ce qu’il faisait là, celui-ci se retourna puis marcha dans l’allée. Comme ce dernier ne réagissait pas aux commentaires du caissier et qu’il se dirigeait vers la sortie, le plaignant et ses compagnons

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bloquèrent le chemin à l’accusé et tentèrent de le maîtriser. Au cours de l’altercation qui s’ensuivit, de la marchandise volée tomba des poches de l’accusé. Le plaignant ayant agi sur la base de simples soupçons, l’arrestation fut jugée illégale. Selon le tribunal, la découverte d’éléments de preuve démontrant après coup la commission de l’infraction ne permet pas de conclure ex post facto à la perpétration d’un acte criminel, et encore mois à la présence d’un flagrant délit. En ce qui concerne le moment pour procéder à l’arrestation, l’al. 494(1)a) n’exige pas que la personne arrête le suspect « sur-le-champ ». L’agent de sécurité n’est donc pas obligé d’intervenir immédiatement s’il désire parfaire son enquête1489.

370. Aux termes de l’al. 494(1)b), une personne peut arrêter sans mandat un individu qui, d’après ce qu’elle croit pour des motifs raisonnables, a commis une infraction criminelle et est en train de fuir des personnes légalement autorisées à l’arrêter. C’est l’exemple du citoyen qui marche sur le trottoir et qui aperçoit un individu courir dans sa direction, deux agents de police à ses trousses. Le piéton ayant des motifs raisonnables de croire que l’individu a commis une infraction et qu’il est en train de fuir des policiers qui le poursuivent, il peut procéder à son arrestation. Dans R. c. Matthews1490, le tribunal acquitte un gréviste impliqué dans une altercation avec un individu à la sortie d’un cinéma. Comme ce dernier avait agressé un piqueteur, que la police avait été appelée sur les lieux, qu’elle voulait s’entretenir avec le plaignant et que celui-ci était sorti par la porte arrière du cinéma, l’accusé pouvait l’arrêter1491.

371. Quant au par. 494(2) C.cr., il permet au propriétaire d’un bien, à celui qui en a la possession légitime ainsi qu’à toute personne qu’il autorise, à arrêter sans mandat une personne qu’il trouve en train de commettre une infraction criminelle sur ce bien, s’il procède à son arrestation sur-le-champ ou dans un délai

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raisonnable après la perpétration de l’infraction. Dans ce dernier cas, la personne qui procède à l’arrestation doit avoir des motifs raisonnables de croire que l’arrestation par un agent de la paix n’est pas possible dans les circonstances. On n’a qu’à penser aux agents de sécurité d’un magasin qui observent, à l’aide d’une caméra de surveillance, une employée entrer dans une salle d’essayage avec trois robes et un sac1492. Comme l’employée sort quelques minutes plus tard avec seulement deux robes, que son sac semble plein et que le vestiaire est vide, les agents fouillent le sac que la suspecte avait déposé dans un endroit réservé aux employés, puis procèdent à son arrestation à la fin de sa journée de travail. Ici, la décision de retarder l’arrestation pourrait leur être reprochée, car les agents de sécurité doivent procéder à l’arrestation de la personne sur-le-champ ou dans un délai raisonnable après la perpétration de l’infraction s’ils croient, pour des motifs raisonnables, que l’arrestation par un agent de la paix n’est pas possible dans les circonstances. Comme l’arrestation ne s’est pas produite sur-le-champ, que celle-ci pouvait être effectuée par un agent de la paix et que le vol, en tant qu’infraction hybride ou mixte, est réputé être un acte criminel, les agents pouvaient procéder à son arrestation conformément à l’al. 494(1)a) C.cr.

372. Permise en droit, l’arrestation sans mandat effectuée par un citoyen oblige ce dernier à livrer aussitôt la personne visée à un agent de la paix1493. L’expression « aussitôt » ne signifie pas immédiatement, mais aussi rapidement qu’il est « raisonnablement possible ou pratique dans les circonstances1494 ». Cette situation fut examinée récemment par la juge Suzanne Gagné, dans

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Giguère c. R.1495. Alors qu’il effectuait une surveillance dans une pharmacie Jean Coutu, un agent de sécurité remarqua la présence d’un suspect dans le rayon des appareils électroniques. Profitant des miroirs installés au plafond du commerce, l’agent de sécurité a aperçu l’appelant s’approcher d’une femme qui lui a donné un sac provenant d’un autre commerce. L’accusé ayant placé dans le sac le contenu d’une boîte dans laquelle se trouvaient un DVD, des fils d’alimentation et des manettes, l’agent de sécurité procéda à son arrestation. Après s’être identifié, l’agent de sécurité mentionna au suspect les motifs de son arrestation, puis lui demanda de le suivre jusqu’à un bureau situé au deuxième étage du commerce. Sur place, l’agent informa l’individu de son droit d’avoir recours à l’assistance d’un avocat et de garder le silence. Il composa ensuite le 911 pour demander à la police de venir chercher le suspect. Plus de trois heures plus tard, la police arriva finalement à la pharmacie. L’agent de police ayant procédé à l’arrestation de la personne pour l’identifier, il remit l’accusé en liberté environ 20 minutes plus tard, après lui avoir délivré une citation à comparaître. D’après la juge Gagné, « l’arrestation d’une personne par un simple citoyen constitue une action gouvernementale au même titre que si elle est effectuée par un agent de la paix1496 ». Comme le par. 494(3) du Code criminel prévoit que la personne arrêtée soit livrée aussitôt à la

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police, « un délai de plus de trois heures avant d’être livré à un agent de la paix et de pouvoir recouvrer sa liberté peut certainement constituer une violation du droit à la protection contre la détention arbitraire1497 ». Le défaut de livrer aussitôt le suspect à un agent de la paix rend donc, en l’espèce, « l’arrestation de l’appelant illégale et sa détention arbitraire au sens de l’article 9 de la Charte1498 ». L’arrestation persiste donc jusqu’au moment de la remise du suspect conformément à l’obligation prévue au paragraphe 494(3) C.cr.

373. Pour procéder à l’arrestation du suspect, le citoyen est autorisé à employer la force nécessaire1499, ce qui signifie que tout

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débordement quant à l’utilisation d’une force excessive et disproportionnée pourra lui être reproché. C’est l’exemple de l’individu qui a procédé à l’arrestation « musclée » d’une personne qu’il avait trouvée « en train » de dérober le plat de nourriture pour chats qui se trouvait sous l’abri d’auto, situé près de la porte d’entrée de sa résidence. La victime ayant été prise en flagrant délit, l’accusé se précipita sur elle, lui couvrit la tête d’une serviette, puis la projeta violemment au sol. Après avoir placé ses genoux sur la victime qui était allongée sur le ventre, l’accusé fixa des attaches en plastique autobloquantes aux poignets et aux chevilles de la plaignante. Bien que l’accusé puisse légalement procéder à son arrestation1500, il a utilisé une force qui était « déraisonnable et non proportionnelle à la menace dans les circonstances de l’espèce1501 ». D’où sa déclaration de culpabilité pour voies de fait.

b) L’arrestation sans mandat par un agent de la paix (art. 495 C.cr.)

374. Si un simple citoyen, un agent de sécurité, un constable auxiliaire1502 ou un policier militaire circulant sur un chemin public peuvent arrêter une personne en vertu de l’article 494 C.cr., les policiers et autres agents de la paix1503 (p. ex. : gardiens de prison,

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douaniers et agents de conservation de la faune agissant à l’intérieur de leur fonction) tirent leur pouvoir d’arrestation de l’article 495 C.cr. Enfin, mentionnons que les policiers qui ne sont pas en devoir conservent leur statut d’agent de la paix et peuvent exercer les pouvoirs d’arrestation qui leur sont dévolus1504.

375. Aux termes de l’al. 495(1)a) du Code, « un agent de la paix peut arrêter sans mandat une personne qui a commis un acte criminel ou qui, d’après ce qu’il croit pour des motifs raisonnables, a commis ou est sur le point de commettre un acte criminel1505 ». Dans la mesure où elle permet l’arrestation du suspect, l’existence

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de « motifs raisonnables et probables de croire » exige plus que de simples soupçons1506 ou de soupçons raisonnables. Cette exigence, qui vise à opérer un équilibre entre la protection de la société contre les abus des policiers et la répression du crime1507, comporte un

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volet à la fois subjectif et objectif1508. Subjectif, tout d’abord, puisque le policier doit croire en la présence de motifs raisonnables et probables qu’une infraction a été commise1509. Objectif, ensuite, car « une personne raisonnable se trouvant à la place de l’agent de police doit pouvoir conclure qu’il y avait effectivement des motifs raisonnables et probables de procéder à l’arrestation1510 ». La nécessité de préserver des éléments de preuve n’a aucune

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importance à ce stade1511. La croyance du policier doit être subjectivement honnête et objectivement vérifiable1512. Supérieure à la norme des soupçons raisonnables, l’exigence des « motifs raisonnables et probables de croire » n’exige pas la présence d’une preuve « suffisante à première vue pour justifier une déclaration de culpabilité1513 ». Quant à son application, l’examen du caractère raisonnable des motifs à l’appui de la croyance subjective du policier commande une analyse à la fois souple et réaliste des circonstances de l’affaire, qui tient compte non seulement du comportement de l’accusé, mais également de la formation et de l’expérience des policiers1514. Statuant sur un pourvoi logé à l’encontre d’un acquittement prononcé à l’endroit d’un individu qui fut arrêté par des policiers à la sortie d’une banque, alors qu’il était en possession d’un boîtier métallique fréquemment utilisé dans le cadre d’opérations frauduleuses, la Cour d’appel accueille le pourvoi, confirme la validité de l’arrestation et ordonne la tenue d’un nouveau

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procès1515. D’après la juge Thibault, la nervosité de l’individu à la sortie de la banque jumelée au fait qu’il a changé de direction à la vue des policiers et qu’il s’est dirigé vers l’arrière du stationnement où ne se trouvait aucun véhicule, justifiaient la décision des policiers de s’approcher du suspect afin de s’enquérir de la situation. En se faisant, ils ont observé l’accusé se pencher deux fois comme s’il tentait de dissimuler un objet derrière la bordure de ciment qui délimite l’espace de stationnement. Se trouvant à moins d’un mètre du suspect, les policiers ont aperçu, dans sa main gauche, un boîtier métallique argenté avec un cadenas à numéro ouvert. Questionné par les policiers, le suspect fut incapable d’expliquer la raison de sa présence sur les lieux. Possédant des motifs raisonnables et probables de croire que le suspect avait commis une infraction, ces derniers procédèrent à son arrestation pour fraude. Cette arrestation, précise la juge Thibault, était justifiée dans les circonstances compte tenu du comportement du suspect ainsi que de la formation et de l’expérience des policiers. Du comportement du suspect, tout d’abord, puisque selon la Cour suprême, dans R. c. MacKenzie, les observations faites par « la vue ou l’ouïe, les mouvements, le langage corporel et les types de comportement, notamment, font partie du bagage des agents de police que les tribunaux devraient prendre en considération pour déterminer si leurs témoignages, dans une affaire donnée, permettent d’établir [le seuil d’intervention requis en l’espèce]1516 ». Quant à la formation et l’expérience des policiers, il s’agit d’éléments pertinents dans l’évaluation du caractère raisonnable de la croyance voulant que l’accusé venait probablement de commettre une fraude1517. Le boîtier métallique

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fort caractéristique qui se trouvait entre les mains du suspect étant reconnu par les policiers comme étant fréquemment utilisé pour commettre des fraudes avec des cartes de crédit, ce facteur, une fois considéré, à la lumière du contexte global de l’intervention, permettait aux policiers de procéder à son arrestation. L’analyse, rappelons-le, est globale et contextuelle1518. Elle tient compte des circonstances de l’affaire, ainsi que de la formation et de l’expérience des policiers. Ces derniers ayant des motifs raisonnables de croire qu’un acte criminel avait été commis, « l’arrestation de l’intimé était justifiée, notamment pour éviter la perte des éléments de preuve qui se trouvaient sur lui1519 ».

376. La présence de « motifs raisonnables et probables de croire » provenant de renseignements fournis par un informateur fut examinée par la Cour suprême, dans R. c. Debot1520. En l’espèce, une source, bien connue des policiers, avait informé l’agent Gutteridge que l’appelant et deux autres personnes devaient se rencontrer pour conclure un marché de drogues et prendre possession d’une quantité importante d’amphétamines. Comme l’informateur avait déjà collaboré avec la police et que les informations obtenues provenaient d’une conversation entre ce dernier et une partie à la transaction, les policiers ont mis sur pied une opération de filature aux termes de laquelle l’appelant et ses complices furent arrêtés. Les motifs raisonnables et probables de croire que

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l’appelant avait des amphétamines sur lui provenant essentiellement des renseignements fournis par l’informateur, la Cour s’interrogea sur la suffisance des éléments de preuve à l’appui de l’arrestation. Dans un jugement empreint de lucidité, la Cour proposa un examen à trois volets permettant d’évaluer la fiabilité de la preuve et son degré de probabilité. Premièrement, les renseignements fournis par l’informateur sont-ils convaincants ?1521 Ce volet vise à évaluer la qualité des renseignements obtenus. S’agit-il d’informations précises et détaillées ou de simples « rumeurs ou racontars » ? Est-ce que les informations proviennent directement de personnes actives dans l’organisation criminelle ou d’individus agissant plus en périphérie du groupe ? « Deuxièmement, la source extérieure à la police d’où provenaient les renseignements était-elle fiable ?1522 » Ce volet cherche à vérifier la fiabilité des renseignements obtenus à travers la qualité de l’informateur. S’agit-il d’une source connue des policiers ou d’un informateur anonyme1523 ? La source a-t-elle déjà fourni des renseignements permettant des perquisitions fructueuses ou des arrestations1524 ? Pour quelles raisons donne-t-elle ces informations ? Par avidité, vengeance, envie

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ou crainte à l’égard des individus visés ? « Troisièmement, l’enquête de la police confirmait-elle ces renseignements avant que les policiers décident de procéder à l’arrestation ?1525 » Ce dernier volet s’attarde à la fiabilité des renseignements obtenus à travers la confirmation subséquente des informations provenant de l’informateur. La corroboration des renseignements par les dires d’une autre source ou par d’autres moyens d’enquête (p. ex. : surveillance physique du suspect1526, vérification de ses condamnations antérieures, observations additionnelles faites quelques instants avant de procéder à l’arrestation, etc.1527) constitue un moyen bien connu

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de s’assurer de la fiabilité des informations obtenues. La présence d’un complément d’enquête s’avère particulièrement importante lorsque la qualité des renseignements et/ou la fiabilité de la source demeure incertaine1528. Sans être fatale aux policiers, la faiblesse d’un volet doit être compensée par la force des autres facteurs de pondération1529. Si l’obtention de renseignements provenant d’une source plus ou moins connue des policiers peut s’avérer suffisante lorsque la qualité des renseignements fournis et l’enquête qui s’est ensuivie confirment les informations à l’origine de l’arrestation1530,

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on ne peut en dire autant de la source fiable dont les renseignements sont insuffisants et non vérifiés par les policiers1531. En ce qui concerne l’appelant Debot, la précision des renseignements fournis par l’informateur jumelée à la qualité de la source et à la vérification subséquente des policiers étaient suffisantes, en l’espèce, pour procéder à son arrestation.

377. Fondé sur la présence de motifs raisonnables de croire que la personne « a commis ou est sur le point de commettre un acte criminel », l’alinéa 495(1)a) s’applique également aux infractions mixtes ou hybrides1532, mais exclut les infractions punissables

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sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire1533. Dans ce dernier cas, le policier qui souhaite procéder à l’arrestation d’une personne soupçonnée d’avoir commis une infraction doit la trouver en train de commettre l’acte en question au sens de l’alinéa 495(1)b) du Code1534. C’est l’exemple du jeune homme qui se promène nu dans un endroit public. Un passant ayant porté plainte à la police, l’agent peut procéder à l’arrestation de l’individu s’il est toujours dévêtu (« en train de commettre »), ou lui délivrer une sommation s’il est habillé au moment de son interpellation. Quant à la personne qui est sur le point de commettre un acte criminel, la situation fut étudiée récemment par la Cour d’appel du Manitoba, dans R. c. Alexson1535. À la suite d’un appel au 911 dont la communication avait été coupée, des policiers se sont présentés chez le suspect afin de s’enquérir de la situation. Une fois sur place, les agents ont entendu et aperçu l’accusé, à travers la fenêtre du salon, crier après sa femme et son enfant. Les policiers ayant cogné à la fenêtre et à la porte de la demeure, la femme du suspect s’empressa de les faire entrer pour ensuite leur demander « d’emmener son mari ailleurs ». Malgré les tentatives pour calmer l’accusé, ce dernier, qui était intoxiqué et très agressif, serra les poings et adopta

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une position de combat face aux policiers. Convaincus qu’ils ne pouvaient permettre à l’accusé de demeurer chez lui sans danger, les policiers l’agrippèrent, puis le projetèrent au sol afin de le menotter. Le suspect ayant assené un coup de pied à un agent qui tentait de le placer dans l’auto-patrouille, il fut accusé de voies de fait contre des policiers dans l’exercice de leurs fonctions. Acquitté en première instance, la Cour d’appel cassa la décision et prononça un verdict de culpabilité. D’après le juge Chartier, les policiers avaient des motifs raisonnables de croire que l’accusé était « sur le point de commettre des voies de fait » au sens de l’alinéa 495(1)a) du Code. Cette disposition, selon le magistrat, n’oblige pas les agents « à attendre qu’une personne profère ouvertement des menaces ou devienne très violente avant d’intervenir1536 ». En effet, « what is required is that the officer’s belief that an assault was about to occur be more likely than not1537 ». Comme les policiers croyaient qu’ils devaient éloigner l’accusé de la résidence afin de protéger sa femme et son enfant et que l’une de ces personnes serait agressée en l’absence d’une telle intervention, le volet subjectif était respecté1538. Cette croyance, poursuit le Tribunal, était raisonnable compte tenu de l’appel au 911, de l’exaspération manifestée par l’accusé, de son intoxication avancée, de son attitude agressive en présence des policiers, de sa tentative de suivre sa femme et son enfant lorsqu’ils ont été placés à l’écart dans une autre chambre, et du fait qu’il avait les poings serrés et adopté une position de combat face aux policiers1539. Ces derniers possédaient donc des motifs raisonnables de croire que l’accusé était sur le point de commettre des voies de fait au sens de l’alinéa 495(1)a) du Code. D’où la légalité de l’arrestation de l’individu sans mandat1540.

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378. Aux termes de l’alinéa 495(1)b) C.cr., un agent de la paix peut arrêter sans mandat une personne qu’il trouve « en train » de commettre une infraction criminelle. C’est l’hypothèse du flagrant délit que nous avons étudiée dans le cadre de notre analyse des pouvoirs d’arrestation du citoyen. Conformément à la définition proposée dans l’arrêt R. c. Biron1541, l’agent de la paix peut procéder à l’arrestation sans mandat d’un suspect lorsqu’il « constate lui-même une situation où une personne est apparemment en train de commettre une infraction1542 ». Sans être témoin de tous les éléments qui l’amènent à croire que la personne est « en train » de commettre une infraction criminelle, « la validité de l’arrestation en vertu de cet alinéa doit être déterminée au regard des circonstances apparentes à l’agent de la paix lorsque l’arrestation s’effectue1543 ». Ces principes furent repris et développés par la Cour suprême, dans R. c. Roberge1544. Discutant de la légalité de l’arrestation d’un chauffeur de taxi qui conduisait à haute vitesse à l’entrée d’un pont où un policier était stationné, le Tribunal conclut que ce dernier avait des motifs raisonnables et probables de croire que le conducteur était « en train » de conduire dangereusement. L’infraction étant « apparente » aux yeux d’une personne raisonnable placée dans la même situation, le policier pouvait procéder à l’arrestation du suspect. Reposant sur les observations personnelles de l’agent, les éléments qui l’amènent à conclure que la personne est « en train » de commettre une infraction criminelle peuvent découler de la doctrine des objets « bien en vue ». Le policier qui aperçoit de la marijuana dans le porte-gobelet situé entre les deux sièges avant d’un véhicule intercepté légalement peut procéder à l’arrestation du suspect pour possession de cannabis. Même s’il s’agissait d’une infraction sommaire, l’alinéa 495(1)b) permet aux policiers de procéder à l’arrestation sans mandat afin d’éviter la destruction de la preuve ou d’empêcher que l’infraction

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se poursuive1545. Cette disposition s’applique donc autant aux actes criminels « purs » qu’aux infractions mixtes et sommaires1546.

379. Un agent de la paix peut, conformément à l’al. 495(1)c) du Code, arrêter sans mandat « une personne contre laquelle, d’après ce qu’il croit pour des motifs raisonnables, un mandat d’arrestation ou un mandat de dépôt [...] est exécutoire dans les limites de la juridiction territoriale dans laquelle est trouvée cette personne. C’est l’exemple du Hells Angels en cavale qui est intercepté au volant de sa voiture dans le cadre d’une opération de routine. Les policiers ayant identifié l’homme qui était recherché en vertu d’un mandat pancanadien, ils procédèrent à son arrestation sur-le-champ1547.

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380. L’article 405.1 C.cr. permet à l’agent de la paix qui a « des motifs raisonnables de croire qu’un prévenu soit a violé ou est sur le point de violer une sommation, une citation à comparaître, une promesse ou une ordonnance de mise en liberté le visant, soit a commis un acte criminel alors qu’il était visé par une sommation, une citation à comparaître, une promesse ou une ordonnance de mise en liberté », de procéder à son arrestation sans mandat « afin qu’il soit conduit devant un juge ou un juge de paix au titre de l’article 524 ».

381. Suivant l’alinéa 495(2)d) du Code, un agent de la paix ne peut arrêter une personne sans mandat pour un acte criminel mentionné à l’article 553, une infraction « hybride » ou une infraction sommaire, s’il a « des motifs raisonnables de croire que l’intérêt public, eu égard aux circonstances, y compris la nécessité d’identifier la personne, de recueillir ou conserver une preuve de l’infraction ou une preuve y relative, d’empêcher que l’infraction se poursuive ou se répète, ou qu’une autre infraction soit commise, peut être sauvegardé sans arrêter la personne sans mandat1548 ». Il en va de même, selon l’alinéa 495(2)e), « lorsqu’il n’a aucun motif raisonnable de croire que, s’il n’arrête pas la personne

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sans mandat, celle-ci omettra d’être présente au tribunal pour être traitée selon la loi ». D’après le juge Fisher, dans R. c. Jowett Work, « section 495(2) was enacted by the Bail Reform Act, R.S.C. 1970, c. 2 (2nd Supp.), s. 5, to prevent the unnecessary arrest of persons charged with certain kinds of offences where the public interest does not require an arrest1549 ». Bien entendu, le paragraphe 495(2) s’applique uniquement lorsque les conditions prévues au paragraphe 495(1) sont respectées1550. La question principale, lorsqu’un policier procède à l’arrestation sans mandat d’une personne qui a commis un acte criminel, demeure donc s’il avait les motifs nécessaires pour procéder à l’arrestation du suspect en vertu de l’alinéa 495(1)a) du Code1551. Quant au critère utilisé pour déterminer si l’agent de la paix avait des motifs raisonnables de croire que l’intérêt public pouvait être sauvegardé sans arrêter la personne sans mandat, il est à la fois subjectif et objectif. Subjectif, tout d’abord, puisque le policier doit croire que l’intérêt public peut être sauvegardé sans arrêter la personne. Objectif, ensuite, car la perception du policier doit être raisonnable dans les circonstances. Les deux conditions sont cumulatives. La personne qui allègue une violation du paragraphe 495(2) ne peut se contenter d’établir que l’intérêt public peut être sauvegardé objectivement, sans procéder

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à l’arrestation. Elle doit également démontrer que le policier croyait subjectivement que l’intérêt public pouvait être sauvegardé sans arrêter la personne, mais qu’il a néanmoins procédé à son arrestation1552.

382. L’interaction entre les paragraphes 495(1) et (2) fut examinée récemment par la Cour d’appel de la Colombie-Britannique, dans R. c. Jowett Work1553. À la suite d’une plainte déposée pour un vol de portefeuille, des policiers ont rencontré les plaignants qui leur ont fourni une description des suspects. Cette description correspondait aux images des voleurs captées sur la caméra de surveillance du restaurant McDonald’s où s’était produit le vol. Peu de temps après leur départ, l’agent de sécurité du McDonald’s a contacté les policiers pour leur dire qu’il avait aperçu les deux suspects marchant en direction ouest sur la rue Johnson. Une fois sur place, les policiers observèrent les suspects, puis procédèrent à leur arrestation quelques minutes plus tard. Une fouille accessoire ayant été effectuée dans le but de récupérer le portefeuille et d’assurer leur sécurité, l’un des policiers découvrit de la

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cocaïne dans les poches d’un suspect et procéda à son arrestation pour possession en vue d’en faire le trafic. D’après la juge du procès, la preuve n’était pas suffisante, en l’espèce, pour déterminer si le policier avait des motifs raisonnables de croire qu’il était nécessaire d’arrêter l’accusé afin de récupérer le portefeuille ou pour toute autre raison prévue aux alinéas 495(2)d) et e). Comme la poursuite n’avait pas réussi à démontrer que la police avait « agi d’une manière légale et raisonnable » en procédant à l’arrestation du suspect, la fouille accessoire n’avait plus de fondement et les droits prévus aux articles 8 et 9 avaient été violés. La décision ayant été portée en appel, la Cour cassa le jugement. En effet, un agent de la paix peut arrêter sans mandat une personne qui a commis un acte criminel ou qui, d’après ce qu’il croit pour des motifs raisonnables, a commis ou est sur le point de commettre un acte criminel. Le vol de moins de 5000 $ est une infraction hybride pouvant donner lieu à une arrestation sans mandat prévue à l’alinéa 495(1)a). Quant au par. 495(2), il n’entre en jeu qu’après avoir respecté le paragraphe 495(1) et constaté la présence de motifs raisonnables et probables d’arrêter la personne. Comme la juge du procès a affirmé qu’il s’agissait d’une affaire touchant le par. 495(2) et non le par. 495(1), elle a commis une erreur, car elle devait déterminer, en premier lieu, si les policiers avaient les motifs suffisants pour arrêter le suspect en vertu de l’al. 495(1)a). De plus, le non-respect du par. 495(2) ne peut transformer une arrestation légale en arrestation illégale, selon l’al. 495(3)a) du Code. Cette disposition, précise la Cour d’appel, prévoit qu’un agent de la paix agit légalement et que l’arrestation est légale si l’agent avait les motifs suffisants pour procéder à l’arrestation du suspect en vertu des alinéas 495(1)a) et b)1554. Comme « une arrestation qui est légale en vertu du par. 495(1) ne peut devenir illégale dans une procédure

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criminelle en raison du défaut du policier de considérer correctement l’intérêt public tel que prévu au par. 495(2)1555 », la juge du procès a commis une erreur en concluant que l’arrestation du suspect était illégale en raison du non-respect des conditions du par. 495(2).

383. L’arrestation sans mandat d’un individu soupçonné d’avoir commis un acte criminel prévu à l’article 553, une infraction hybride ou une infraction sommaire peut s’avérer nécessaire pour procéder à son identification. Sur ce point, citons le cas de l’individu qui se touche les parties génitales par-dessus son pantalon dans un parc, pour ensuite commencer à se masturber devant un policier habillé en civil. Le policier ayant montré son insigne et informé le suspect qu’il était en état d’arrestation, ce dernier a tenté de quitter les lieux à pied mais fut rapidement intercepté par un agent qui se trouvait à proximité. L’accusé fut alors « conduit à une auto-patrouille située à deux cents (200) mètres pour les procédures d’identification et a été libéré par la suite avec une citation à comparaître1556 ». Le besoin de recueillir ou de conserver une preuve peut également justifier l’arrestation sans mandat du suspect. On n’a qu’à penser aux quatre jeunes femmes arrêtées pour vol à l’extérieur d’un centre commercial de la région de

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Trois-Rivières. Comme les femmes étaient en possession de marchandises volées provenant du magasin Bouclair, que des sacs à poubelle remplis de linge et de tissus se trouvaient sur la banquette arrière de leur voiture et qu’elles étaient venues spécialement de Montréal pour commettre les vols, elles ont été arrêtées, fouillées, puis amenées au poste de police pour y être interrogées1557. En ce qui concerne la nécessité d’empêcher que l’infraction se poursuive ou se répète1558, ou qu’une autre infraction soit commise, citons l’exemple de l’individu qui avait agressé son ex-conjointe à la suite d’une dispute concernant la garde des enfants. Comme le défendeur devait retourner au domicile pour aller chercher ses enfants et qu’il avait menacé la victime de s’en prendre encore une fois à elle, la police a procédé à son arrestation afin d’empêcher toute récidive. La présence de motifs raisonnables de croire que la personne ne se présentera pas au tribunal à défaut d’arrestation permet également à l’agent de la paix de procéder à l’arrestation sans mandat du suspect1559. Bien que les circonstances mentionnées à l’alinéa 495(2)d) sont les plus importantes, la priorité demeure l’intérêt public et ce facteur ne peut être limité aux éléments précités1560.

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384. Lorsqu’un agent de la paix n’arrête pas une personne en vertu du par. 495(2), il peut lui délivrer une citation à comparaître conformément à l’article 497 C.cr. On n’a qu’à penser à l’individu appréhendé à la suite du vol d’un ordinateur dans un magasin d’équipements électroniques. Le suspect ayant été identifié par les policiers à l’aide de son permis de conduire, une citation à comparaître lui fut délivrée.

385. Lorsqu’une personne a été arrêtée sans mandat pour une infraction qui n’est pas mentionnée à l’article 469 et « n’a pas été conduite devant un juge de paix ni mise en liberté en vertu d’une autre disposition de la présente partie, un agent de la paix doit, dès que cela est matériellement possible, la mettre en liberté » si, selon le cas, il a l’intention d’obliger cette personne à comparaître par voie de sommation ou il lui a délivré une citation à comparaître ou que cette personne lui a remis une promesse1561. C’est l’exemple de l’individu qui est remis en liberté après avoir été identifié ou interrogé par la police. Les motifs présidant à son arrestation sans mandat ayant disparu, il n’y a plus lieu de le maintenir en détention. En sens contraire, l’al. 498(1.1)a) prévoit que « l’agent de la paix ne met pas la personne en liberté s’il a des motifs raisonnables de croire qu’il est nécessaire, dans l’intérêt public, de détenir la personne sous garde » ou de disposer de la question conformément à une autre disposition. L’intérêt public comprend notamment le besoin d’identifier la personne, de recueillir ou de conserver des éléments de preuve, d’empêcher que l’infraction se poursuive, se répète ou qu’une autre infraction soit commise, et d’assurer la sécurité des victimes ou des témoins de l’infraction1562. Les policiers peuvent donc détenir une personne

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s’ils ont des motifs raisonnables de croire que sa mise sous garde doit se poursuive afin de recueillir de la preuve. L’exception ne faisant pas de distinction quant à la technique d’enquête utilisée, les policiers peuvent procéder à l’interrogatoire du suspect, le soumettre à une séance d’identification ou à une autre procédure d’enquête1563. En ce qui concerne le prévenu qui indique à la police qu’il va s’en prendre à la victime à la première occasion ou qu’il va régler le compte de la personne qui l’a dénoncé, il doit également s’attendre à passer quelques heures en cellule. Les motifs d’intérêts publics ne se limitent pas aux facteurs énoncés à l’al. 498(1.1)a) du Code. D’autres circonstances peuvent s’ajouter afin de permettre aux policiers de détenir le prévenu sous garde. L’exemple du conducteur arrêté pour avoir refusé de fournir un échantillon d’haleine illustre bien cette situation. S’agissant d’une infraction hybride commise par un individu qui était agité, agressif, instable et non coopératif, ce dernier fut détenu au poste de police pendant une période de 12 heures. D’après le juge Cameron, de la Cour d’appel du Manitoba, l’intérêt public s’étend à d’autres considérations telles que la sécurité générale du public, de la police et du prévenu1564. Bien que le par. 498(1) n’exige pas que la personne détenue soit remise en liberté le plus rapidement possible, ni que sa détention, une fois considérée comme nécessaire à ce moment, se poursuive jusqu’à sa comparution, le policier doit, sous réserve de l’exception prévue au par. 498(1.1), la mettre en liberté « dès que cela est matériellement possible ». De son côté, l’article 493.1 C.cr. prévoit que l’agent de la paix doit « cherche[r] en premier lieu à mettre en liberté le prévenu à la première occasion raisonnable [...] tout en tenant compte des motifs visés au paragraphe 498(1.1) ».

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386. Aux termes du paragraphe 500(1) C.cr., une citation à comparaître indique notamment le nom du prévenu, sa date de naissance, ses coordonnées, l’essentiel de l’infraction qu’on lui reproche, ainsi que la date, l’heure et le lieu de sa comparution devant le tribunal. La citation doit également contenir un résumé des conséquences relatives à l’omission de se conformer à une citation. Quant au contenu de la promesse, celle-ci doit prévoir, en plus des renseignements se rapportant au prévenu et à l’infraction qu’il aurait commise, un résumé des dispositions applicables à défaut de respecter une telle promesse. La promesse doit obliger le prévenu à se présenter devant le tribunal aux date, heure et lieu prévus dans le document et aux autres dates qu’exigera par la suite le tribunal1565. Elle peut également être assortie de l’une ou de plusieurs conditions facultatives prévues aux al. 501(3)a) à k)1566. Ces conditions doivent être « raisonnables » compte tenu des circonstances entourant l’infraction et « nécessaires pour assurer la présence du prévenu au tribunal ou la sécurité des victimes ou des témoins de l’infraction ou pour empêcher que l’infraction se poursuive ou se répète ou qu’une autre infraction soit commise1567 ». Parmi les conditions pouvant être imposées au prévenu, mentionnons celle de « se présenter, aux moments indiqués, à l’agent de la paix ou à la personne qui y sont nommés1568 »; de « demeurer dans le ressort de la juridiction précisée1569 »; « d’aviser l’agent de la paix ou la personne qui y sont nommés de tout changement d’adresse, d’emploi ou d’occupation1570 »; de s’abstenir de communiquer avec toute personne identifiée (victime, témoin ou autre)1571 ou d’aller dans un lieu qui est lié à cette personne, si ce n’est en conformité avec les conditions qui y sont prévues1572; de déposer son passeport1573; de résider à l’adresse indiquée et à y être présent

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aux heures mentionnées1574; de s’abstenir de posséder une arme à feu1575; de « s’engager à verser la somme – d’au plus cinq cents dollars – qui y est précisée, en cas de non-respect de l’une ou l’autre des conditions de la promesse1576 »; de « déposer, auprès de l’agent de la paix nommé une somme d’argent ou autre valeur d’au plus cinq cents dollars si, au moment de remettre la promesse, le prévenu ne réside pas ordinairement dans la province où il est sous garde » ou à moins de 200 km du lieu de sa détention1577. La promesse peut également prévoir « toute autre condition indiquée pour assurer la sécurité des victimes ou des témoins de l’infraction en cause1578 ».

387. Si une citation à comparaître a été délivrée au prévenu aux termes de l’article 497, ou que la personne a recouvré sa liberté en vertu des articles 498 ou 503, « une dénonciation relative à l’infraction que le prévenu aurait commise [...] doit être faite devant un juge de paix dès que cela est matériellement possible par la suite et, dans tous les cas, avant le moment indiqué dans la citation à comparaître ou la promesse pour sa présence au tribunal1579 ». Lorsqu’il estime qu’on a démontré qu’il est justifié de le faire1580, le juge de paix qui reçoit la dénonciation doit confirmer la citation à comparaître ou la promesse, selon le cas1581. La citation à comparaître ou la promesse peut être annulée et remplacée par une sommation ou un mandat d’arrestation décerné conformément

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à l’article 507, pour obliger l’accusé à comparaître devant lui1582. Lorsque le juge estime qu’il n’a pas été démontré qu’il était justifié de le faire, il doit annuler la citation à comparaître ou la promesse et informer aussitôt le détenu de sa décision1583.

Deuxième sous-section : L’arrestation avec mandat

388. Si le prévenu n’a pas fait l’objet d’une arrestation sans mandat, une dénonciation peut être faite par un agent de la paix, un fonctionnaire public ou le procureur général ou son représentant1584. Les poursuites étant autorisées par le substitut du Procureur général, ce dernier « fait rédiger la dénonciation sous laquelle l’accusé comparaîtra plus tard1585 ». Une fois complétée, la dénonciation est remise à un policier (agent de liaison ou le policier à l’origine de la dénonciation) « qui va se faire assermenter par le juge de paix, alléguant qu’il a des motifs raisonnables de croire que ces infractions ont été commises par la personne mentionnée à la dénonciation1586 ». Cette demande peut être faite en personne par l’agent de la paix ou par « un moyen de télécommunication qui peut rendre la communication sous forme écrite1587 ». Le juge de paix qui reçoit la dénonciation doit entendre et examiner, ex parte, les allégations à la source de la dénonciation ainsi que les dépositions des témoins lorsqu’il croit que c’est utile. S’il « estime qu’on a démontré qu’il est justifié de le faire », le juge de paix doit décerner une sommation ou un mandat d’arrestation pour obliger l’accusé à comparaître devant lui ou un autre juge pour répondre des infractions reprochées1588. Ce faisant, il doit déterminer si la

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dénonciation est valide à sa face même et vérifier si les allégations ou les témoignages entendus révèlent une preuve prima facie de l’infraction reprochée. Une sommation est décernée dans tous les cas, à moins que les allégations du dénonciateur ou les observations des témoins ne « révèlent des motifs raisonnables de croire qu’il est nécessaire, dans l’intérêt public, de décerner un mandat [d’arrestation]1589 ». La notion d’intérêt public ne se limite pas à la présence de l’accusé au tribunal ni aux questions de sécurité, mais comprend toutes les circonstances ou facteurs pouvant susciter des motifs d’intérêt public1590. Si le besoin d’empêcher que l’infraction se poursuive ou se répète constitue indéniablement un motif d’intérêt public, ce facteur ne justifie pas la délivrance d’un mandat d’arrestation lorsqu’il peut être satisfait au moyen d’une sommation1591. Quant à la gravité objective de l’infraction, il peut s’agir d’un motif d’intérêt public dans les cas où la personne est poursuivie pour une infraction prévue à l’article 469 et pour celles mentionnées au par. 515(6) du Code criminel. Ces dispositions prévoient que le prévenu doit être détenu sous garde jusqu’à la fin de son procès à moins qu’il ne démontre que sa détention n’est pas justifiée aux termes du par. 515(10) du Code. Une fois émis, le mandat d’arrestation ordonne aux policiers qui se trouvent dans la même circonscription territoriale d’amener le prévenu devant un juge de paix. Son exécution peut être suspendue pour une certaine période afin de permettre au prévenu de se présenter de son propre gré, auquel cas le mandat sera présumé avoir été exécuté1592.

389. Aux termes du par. 507(6) C.cr., le mandat d’arrestation peut être visé ou non. Sous réserve d’une infraction prévue à l’article 469, le juge qui décerne un mandat en vertu de l’article 507 peut autoriser la mise en liberté du prévenu par un agent de la paix en application de l’article 499 du Code. Il s’agit du mandat visé. Cette procédure permet « au fonctionnaire responsable [auj. agent de la paix] de mettre un prévenu en liberté lorsque les circonstances

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le justifient afin d’éviter de prolonger indûment la détention en attendant sa comparution devant un juge de paix1593 ». La personne ayant été placée sous garde après avoir été arrêtée à la suite de l’exécution d’un mandat visé, tout agent de la paix peut alors libérer la personne s’il lui délivre une citation à comparaître ou si elle remet une promesse1594. L’emploi du mot « peut », contenu à l’article 499, indique une possibilité plutôt qu’une obligation. La personne qui refuse de signer la promesse ou qui indique son intention de ne pas la respecter une fois remise en liberté démontre l’importance d’une discrétion pouvant s’ajuster en fonction des circonstances de l’affaire1595. La disposition étant muette sur les facteurs qui bornent cette discrétion, celle-ci nous semble subordonnée aux motifs d’intérêt public qui se trouvent à l’article 498, et notamment au besoin de recueillir ou de conserver une preuve de l’infraction, d’empêcher la récidive et d’assurer la sécurité des victimes ou des témoins de l’infraction1596. « Le libellé des articles 499 et 507(6) ne comporte aucune exigence temporelle pour la remise en liberté1597. » Résultat : si certains prévenus sont arrêtés puis remis en liberté immédiatement, d’autres seront interrogés à la suite de l’exécution du mandat visé pour être libérés après avoir signé une promesse comportant certaines conditions spécifiques1598. Bien que le défaut de libérer l’accusé ou de considérer la possibilité de le libérer lorsque les circonstances s’y prêtent puisse parfois

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constituer une violation de l’al. 11e) de la Charte, l’agent de la paix demeure libre d’interroger le suspect afin de recueillir une preuve de l’infraction. Lorsque le mandat d’arrestation ne fait pas l’objet d’un visa, le prévenu devra comparaître détenu conformément à l’article 503 C.cr.

Sixième section : La comparution

390. Une fois arrêté avec ou sans mandat, le détenu doit comparaître dans un délai de vingt-quatre heures après son arrestation si un juge de paix est disponible, et le plus tôt possible si un juge de paix n’est pas disponible dans un tel délai1599. Comme un juge de paix est physiquement présent dans tous les districts

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judiciaires, l’agent de la paix a l’obligation de faire comparaître le détenu « sans retard injustifié et, dans tous les cas, au plus tard dans les 24 heures de son arrestation1600 ». C’est d’ailleurs ce que

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confirme le juge Gosselin, dans R. c. Lamoureux1601, en prononçant l’arrêt des procédures engagées à l’encontre d’un individu qui avait

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dû patienter plus de 68 heures avant de comparaître devant un juge de paix. Considérant (1) l’absence de remise en liberté de l’individu par une promesse de comparaître, (2) la disponibilité physique de juges de paix dans le district de Hull au moment de sa détention et (3) le défaut de comparaître dans un délai de 24 heures, la détention du prévenu fut jugée illégale, puis arbitraire en raison de la violation délibérée des droits de l’accusé. Comme cette violation continue et répétée des droits des personnes présumées innocentes était reconnue et entretenue par le système judiciaire depuis des années et que le préjudice subi se reflétait non seulement sur la personne détenue, mais également sur la société tout entière, le tribunal ordonna l’arrêt des procédures1602.

391. L’obligation de faire comparaître le prévenu sous garde dans un délai de 24 heures lorsqu’un juge de paix est disponible ou le plus tôt possible dans les autres cas, ne signifie pas que la personne détenue ne sera pas libérée avant l’expiration du délai pour comparaître. En effet, sous réserve des infractions prévues à l’article 469, l’agent de la paix qui est « convaincu que la continuation de la détention de la personne sous garde n’est plus nécessaire la met en liberté » s’il délivre à cette personne une citation à comparaître ou si « cette personne lui remet une promesse1603 ». Quant au par. 503(4) du Code, il prévoit que l’agent de la paix, qui

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est chargé de la garde d’une personne qui a été arrêtée sans mandat alors qu’elle était sur le point de commettre un acte criminel, remet la personne en liberté « dès que cela est matériellement possible à compter du moment où il est convaincu que la continuation de sa détention n’est plus nécessaire pour empêcher qu’elle commette un acte criminel ».

Septième section : L’arrestation effectuée dans une maison d’habitation

392. L’arrêt de principe en matière d’arrestation effectuée dans une maison d’habitation est R. c. Feeney1604. À la suite d’informations provenant de plusieurs personnes, des policiers se sont présentés chez l’appelant afin de l’interroger sur la mort brutale d’un dénommé Frank Boyle. Après s’être rendu à la remorque où M. Feeney habitait, un agent a frappé à la porte puis a annoncé sa présence en criant « Police ». N’ayant obtenu aucune réponse, le policier est entré sans permission dans la remorque de l’appelant. Comme il faisait sombre et que le policier voulait vérifier de plus près ses vêtements, l’agent a demandé à M. Feeney de se déplacer à l’avant de la remorque. Ayant constaté la présence de taches de sang sur son tee-shirt, le policier a procédé à l’arrestation du suspect. Ce dernier ayant été informé de ses droits, les policiers lui ont posé des questions concernant la présence des taches de sang sur ses vêtements et l’existence d’autres éléments de preuve pouvant l’impliquer dans la mort de la victime. Son gilet maculé de sang a été saisi, puis l’appelant fut conduit au détachement de la GRC à Williams Lake pour y être interrogé. Comme la poursuite se fondait principalement sur le pouvoir de fouille accessoire à une arrestation afin de justifier la perquisition et les saisies effectuées par les policiers, le Tribunal devait déterminer la légalité de l’arrestation en question. Après avoir conclu que l’arrestation sans mandat du suspect effectuée à la suite de l’entrée en force dans la remorque était illégale en raison de son absence de fondement subjectif et objectif, la Cour s’interrogea sur la conformité des

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règles développées par les tribunaux au regard de la Charte. Sur ce point, le juge Sopinka est sans détour : « Les arrestations sans mandat dans une maison d’habitation sont généralement interdites. Avant de procéder à une telle arrestation, il incombe au policier d’obtenir l’autorisation judiciaire de l’effectuer au moyen d’un mandat l’autorisant à entrer, à cette fin, dans la maison d’habitation1605. » Ce mandat, poursuit le juge Sopinka, ne peut être délivré que s’il existe des motifs raisonnables d’arrêter la personne et de croire que le suspect se trouve à l’endroit indiqué. En plus de l’obtention préalable d’une autorisation judiciaire, l’entrée par la force dans la maison d’habitation doit être précédée d’une annonce régulière1606.

393. L’obtention d’une autorisation préalable permettant de procéder à l’arrestation du suspect dans une maison privée n’est pas requise dans les cas de prise en chasse. Cette prise en chasse, selon le juge Lamer dans R. c. Macooh, « doit être continue et effectuée avec diligence raisonnable, de façon à ce que la poursuite et la capture, avec la perpétration de l’infraction, puissent être considérées comme faisant partie d’une seule opération1607 ». Une situation d’urgence pourrait également justifier l’intervention immédiate des policiers, bien que la commission d’un crime grave avec tout ce que cela peut comporter comme risque concernant la présence d’un individu dangereux et la destruction potentielle

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d’éléments de preuve ne soit pas suffisante à ce stade. Sur ce point, il ne faut pas confondre l’entrée dans une maison d’habitation pour procéder à une arrestation et l’arrestation effectuée après avoir pénétré légalement dans la maison d’habitation. La distinction est importante. Les policiers qui répondent à un appel d’urgence au 911 dont la communication a été coupée peuvent pénétrer de force dans un appartement « afin de s’assurer de la santé et de la sécurité de la personne qui a composé le 9111608 ». Si dans la poursuite de cet objectif, ils obtiennent des motifs raisonnables et probables de croire qu’un acte criminel a été commis, ils peuvent procéder sur-le-champ à l’arrestation du suspect. En plus de cette exception reconnue par les tribunaux, les policiers peuvent arrêter une personne sans mandat dans une maison d’habitation à la suite de l’invitation expresse ou tacite du propriétaire ou de son occupant1609. Des policiers qui répondent à un appel concernant la commission d’un délit de fuite peuvent donc entrer dans la demeure du père du suspect pour continuer leur enquête, s’ils obtiennent une invitation sans équivoque de sa part1610. En effet, « quand l’invitation a été lancée, Gilles Couturier savait que les policiers enquêtaient sur un délit de fuite et que son fils en était l’auteur. Il savait qu’à la suite de l’invitation, les policiers allaient questionner son fils et il comprenait très bien les conséquences que son geste pouvait avoir pour ce dernier. Je comprends mal pourquoi, dans de telles circonstances, on imposerait à un policier le devoir de refuser l’invitation lancée à moins d’informer la personne autorisée à faire l’invitation qu’elle a le droit de lui interdire d’entrer, ou encore, qu’elle peut retirer l’invitation à volonté1611 ». Pour être

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valide, le consentement ne doit pas avoir été obtenu à la suite d’un mensonge ou d’une supercherie. Des policiers qui procèdent à l’arrestation d’un individu dans la salle de lavage d’une maison de chambres, après avoir reçu la permission du propriétaire d’y pénétrer sous le faux prétexte qu’ils enquêtaient pour une plainte de bruit, ne peuvent invoquer la présence d’un consentement libre et éclairé de la part du propriétaire1612. Il faut distinguer ici l’entrée dans une maison d’habitation dans le but de procéder à une arrestation, de l’entrée effectuée dans la poursuite d’une enquête en cours1613. Si un mandat d’entrée est requis à défaut d’invitation ou de renonciation valide1614, l’article 529 ne s’applique pas aux

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policiers qui souhaitent poursuivre une enquête sans avoir à ce stade les motifs ou l’intention de procéder à une arrestation1615. Une fois obtenu, le consentement donné aux policiers peut être retiré en tout temps1616. Il en va ainsi de l’invitation implicite.

394. Quelques mois après la décision de la Cour suprême dans l’arrêt Feeney, le Parlement canadien adopta des dispositions

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spécifiques concernant les arrestations dans une maison d’habitation1617. Ces dispositions, qui reprennent essentiellement les directives formulées par le juge Sopinka, permettent à un juge ou à un juge de paix de délivrer un mandat autorisant un agent de la paix à pénétrer dans une maison d’habitation afin de procéder à l’arrestation d’une personne qui y est désignée ou pouvant être identifiée, s’il est convaincu, sur la foi d’éléments de preuve établis sous serment, « qu’il existe des motifs raisonnables de croire que cette personne s’y trouve ou s’y trouvera et que, selon le cas : a) elle fait déjà l’objet au Canada d’un mandat d’arrestation; b) il existe des motifs de l’arrêter sans mandat aux termes des al. 495(1)a) ou b) ou de l’article 672.91 du Code criminel; c) il existe des motifs pour l’arrêter sans mandat en vertu d’une autre loi fédérale1618 ». La maison d’habitation est définie à l’article 2 du Code criminel comme désignant « l’ensemble ou toute partie d’un bâtiment ou d’une construction tenu ou occupé comme résidence permanente ou temporaire », ce qui inclut les roulottes et bateaux utilisés à cette fin1619. Les policiers qui ont des motifs raisonnables et probables de croire qu’une personne a commis un acte criminel peuvent donc

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procéder à son arrestation dans l’ascenseur de l’unité de condominium où elle loue un appartement. Comme les policiers croyaient avoir assisté à une transaction de drogue, ils n’avaient pas à laisser le suspect retourner à son appartement pour demander ensuite un mandat d’entrée1620. La définition ne s’étend pas aux endroits qui ne sont pas tenus ou occupés comme résidence permanente ou temporaire, tels que les entrepôts, les lieux d’affaires et autres endroits utilisés comme cache de drogues1621. L’exception relative à la prise en chasse du suspect est maintenue1622. En effet, le policier qui poursuit un suspect qui entre dans sa demeure ou dans l’appartement d’un ami pour échapper à la justice, peut pénétrer dans la maison d’habitation afin de procéder à son arrestation. Cette situation fut examinée par la Cour d’appel du Québec, dans

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Tétard c. R.1623. L’accusé, qui était au volant de son automobile, fut impliqué dans un léger accrochage avec un autre conducteur. Ce dernier ayant rejoint l’appelant afin de remplir un constat amiable, il remarqua très rapidement son état ébriété avancé. L’accusé ayant admis qu’il avait beaucoup bu, le conducteur l’informa de son intention d’appeler la police. L’appelant en profita alors pour quitter les lieux au volant de sa voiture. Le conducteur ayant pris en note son numéro de plaque d’immatriculation, il communiqua avec le 911. Quelques minutes plus tard, l’appelant stationna sa voiture devant son domicile, entra dans l’immeuble, en ressortit afin de s’entretenir avec le conducteur, puis retourna dans la maison. Une fois la police arrivée sur les lieux, le conducteur montra les dommages causés à sa voiture et donna une description du suspect. Ce dernier se trouvant sur le balcon, la victime identifia l’appelant comme étant la personne fautive. Le policier demanda à l’appelant de sortir de la demeure. L’appelant refusa d’obtempérer. Le policier s’approcha aussitôt de la porte d’entrée et aperçut l’accusé se faufiler dans une pièce de la maison. Il décida alors de pénétrer dans la demeure où il constata l’état d’ébriété avancé de l’appelant et procéda à son arrestation. Discutant de la légalité de l’intervention policière, la Cour d’appel confirma la présence, aux termes de l’al. 495(1)a) du Code criminel, de motifs raisonnables de croire que l’appelant avait commis un acte criminel. Toujours

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selon la Cour, « l’arrestation sans mandat de l’appelant était autorisée en raison de la nécessité de l’identifier, de recueillir ou conserver une preuve de l’infraction et d’empêcher que l’infraction se poursuive ou se répète1624 ». En ce qui concerne l’absence de mandat d’entrée afin de procéder à l’arrestation du suspect, le tribunal rejeta catégoriquement toute distinction quant à l’identité de la personne à l’origine de la prise en chasse initiale. Les policiers peuvent donc « continuer une poursuite déjà engagée1625 » par un citoyen ou un autre policier, même s’ils n’ont pas été témoin personnellement des faits ayant donné lieu à la prise en chasse du suspect1626.

395. Le par. 529(1) permet au juge, qui délivre un mandat d’arrestation en vertu du Code criminel ou d’une autre loi fédérale, d’autoriser un agent de la paix à pénétrer dans une maison d’habitation afin de procéder à l’arrestation du suspect. Pour ce faire, le juge ou le juge de paix doit être convaincu qu’il existe des motifs raisonnables de croire que la personne qui en fait l’objet se trouve ou se trouvera dans cette maison d’habitation. Comme l’indique

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le juge Sopinka dans R. c. Feeney, « un mandat d’arrestation seulement constitue une protection insuffisante des droits du suspect à la vie privée1627 ». Ainsi, sous réserve d’une exception reconnue par la loi ou la jurisprudence, les policiers ne peuvent pénétrer dans une maison d’habitation pour procéder à une arrestation sans avoir obtenu, au préalable, un mandat d’entrée1628. Les policiers qui sont munis seulement d’un mandat d’arrestation peuvent cogner à la porte, demeurer à l’extérieur du domicile, puis attendre la sortie du suspect, mais ne peuvent y entrer dans le but de procéder à l’arrestation1629. Si, en ce faisant, l’individu tente de fermer la porte et se dirige rapidement vers sa chambre, les policiers peuvent entrer afin d’assurer leur sécurité et d’éviter sa fuite1630. L’autorisation

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de pénétrer dans une maison d’habitation prévue au paragraphe 529(1) est délivrée à la condition que le policier ne pénètre dans l’endroit indiqué que si, au moment de s’exécuter, « il a des motifs raisonnables de croire que la personne à arrêter s’y trouve1631 ».

396. Issue de la common law, l’exception relative aux cas d’urgence fut reprise et développée par le législateur à l’article 529.3 du Code. Aux termes de cette disposition, l’agent de la paix peut, sans autorisation préalable, pénétrer dans une maison d’habitation pour procéder à l’arrestation d’une personne « s’il a des motifs raisonnables de croire que la personne s’y trouve1632, si les conditions nécessaires à l’obtention d’un mandat d’entrée prévu à l’article 529.1 sont réunies et si l’urgence de la situation rend difficilement réalisable son obtention ». Il y a urgence lorsque l’agent de la paix possède « des motifs raisonnables de soupçonner qu’il est nécessaire de pénétrer dans la maison d’habitation pour éviter à une personne des lésions corporelles imminentes ou la

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mort » (529.3(2)a)); ou des motifs raisonnables de croire que des éléments de preuve concernant la perpétration d’un acte criminel se trouvent dans les lieux en question et « qu’il est nécessaire d’y pénétrer pour éviter leur perte ou leur destruction imminentes » (529.3(2)b)). Notons ici la distinction entre la norme exigée en matière de préjudice corporel (soupçons raisonnables)1633 et celle requise dans les cas de perte ou de destruction d’éléments de preuve (motifs raisonnables de croire). Quant à l’imminence du péril, « [i]l ne suffit pas que le danger soit prévisible ou probable; il doit être sur le point de survenir et être quasi certain de se produire1634 ».

397. Une situation n’est pas urgente parce qu’il serait plus commode, plus utile ou moins long de procéder sans mandat, mais parce qu’il y a des « circonstances pressantes propres à une situation qui requiert l’intervention immédiate des policiers soit pour préserver la preuve, soit pour assurer la sécurité des policiers ou celle du public1635 ». Comme l’urgence de la situation doit rendre difficilement réalisable l’obtention d’un mandat, le risque invoqué doit être suffisamment imminent, pour que le temps nécessaire afin d’obtenir un mandat « compromette sérieusement » la préservation

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de la preuve, la sécurité des policiers ou celle du public1636. La préservation de la preuve, tout d’abord, puisque des policiers qui répondent à un appel d’urgence au 911, pour apprendre par la suite qu’une personne vient de se faire couper la gorge par sa voisine, peuvent entrer dans l’appartement de la suspecte afin de procéder à son arrestation sur-le-champ. En plus d’avoir des motifs suffisants pour procéder à son arrestation, les policiers croyaient raisonnablement que des éléments de preuve se rapportant à la tentative de meurtre se trouvaient dans son appartement (p. ex. : sang, arme, etc.) et qu’il était nécessaire d’y pénétrer pour éviter qu’elle ne les détruise1637. La sécurité des agents ou celle d’une autre personne peut également requérir l’intervention immédiate des policiers.

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Dans R. c. Phillips1638, la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse s’interroge sur la légalité de l’arrestation sans mandat effectuée par des policiers dans le sous-sol de la résidence d’un prévenu souffrant de troubles psychologiques. L’accusé, qui s’était présenté à l’hôpital pour une prise de sang et une évaluation médicale, a affirmé à un résident en psychiatrie et à un médecin qui se trouvaient sur place qu’il se sentait déprimé et qu’il avait des pensées suicidaires et violentes. Comme l’accusé avait quitté l’urgence en raison de la durée de l’attente, les autorités médicales ont communiqué avec la police pour exprimer leurs inquiétudes quant aux tendances suicidaires de l’accusé. Les deux policiers qui ont répondu à l’appel se sont présentés au domicile de l’accusé, ont frappé à sa porte puis l’ont informé qu’il devait retourner à l’hôpital. La personne ayant refusé de suivre les policiers, l’agent Galloway empoigna le bras de l’accusé pour procéder à son interpellation en vertu de l’article 38 de l’Hospital Act. C’est alors que l’accusé assena un solide coup de poing à l’officier. Ayant pris la fuite dans la maison après avoir réussi à se dégager de l’emprise du policier, une altercation violente s’ensuivit au terme de laquelle l’individu fut arrêté, puis accusé de voies de fait contre un agent de la paix dans l’exercice de ses fonctions. Comme l’arrestation du suspect avait été effectuée dans la résidence de l’accusé, la Cour devait déterminer si les policiers pouvaient procéder à l’arrestation sans mandat de l’individu. Examinant les faits de l’affaire à la lumière des conditions prévues à l’article 529.3, le juge Fichaud confirme la légalité de l’intervention policière. Tout d’abord, la personne faisant l’objet de l’arrestation se trouvait chez elle lors de l’intervention conformément au par. 529.3(1) C.cr. Ensuite, il existait des motifs de l’arrêter sans mandat aux termes de l’alinéa 495(1)a) du Code puisque les policiers avaient été témoins de l’agression commise à l’endroit de l’agent Galloway. Enfin,

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l’urgence de la situation rendait difficilement réalisable l’obtention du mandat d’entrée, car les agents de police savaient que l’accusé était suicidaire. Les agents ayant observé le comportement imprévisible et violent de l’accusé lors de l’agression qui avait eu lieu à l’extérieur de la porte d’entrée, les policiers pouvaient légalement, en vertu de l’article 529.3, poursuivre l’accusé dans la demeure afin de procéder à son arrestation. Cette intervention pouvant également être justifiée dans le cadre de l’exception relative à la prise en chasse, l’arrestation n’était pas arbitraire au sens de l’article 9 de la Charte.

398. Aux termes du par. 529.4(1) C.cr., le juge ou le juge de paix qui permet à un agent de la paix de procéder à l’arrestation d’une personne dans une maison d’habitation peut l’autoriser à ne pas prévenir l’occupant avant d’y pénétrer, s’il est convaincu qu’il existe des motifs raisonnables de croire que le fait de prévenir exposerait l’agent de la paix ou une autre personne à des lésions corporelles imminentes ou à la mort, ou entraînerait la perte ou la destruction imminente d’éléments de preuve se rapportant à la perpétration d’un acte criminel1639. Dans ce cas, l’agent de la paix ne peut pénétrer dans la maison d’habitation sans prévenir que si, au moment de son entrée, il a des motifs raisonnables de soupçonner que le fait de prévenir l’exposerait ou exposerait une autre personne à des lésions corporelles imminentes ou à la mort, ou de croire que le fait de prévenir entraînerait la perte ou la destruction imminente d’éléments de preuve relatifs à la perpétration d’un acte criminel. Cette exception s’applique également à l’agent de la paix qui pénètre sans mandat dans une maison d’habitation pour procéder à l’arrestation d’un individu en raison d’une situation d’urgence prévue à l’article 529.3 du Code. Les craintes concernant la sécurité des policiers ou des occupants de la maison peuvent provenir, par exemple, des antécédents de violence du suspect, de sa participation à une organisation criminelle ou de son état psychologique1640. Quant à la destruction d’éléments de preuve, disons

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simplement que la nature de l’infraction commise et de la substance en question (p. ex. : cocaïne) sont des facteurs souvent pris en compte par les tribunaux dans leur évaluation des motifs raisonnables1641. Des préoccupations d’ordre général ou théorique à l’égard de la sécurité des policiers ou de la destruction d’éléments de preuve ne suffisent pas en semblable matière. Les policiers doivent procéder sur la base d’une analyse sérieuse des faits spécifiques à chaque affaire1642. La décision des policiers de ne pas s’annoncer doit être évaluée en fonction de ce qu’ils savaient ou

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auraient raisonnablement dû savoir au moment de la demande et non en fonction de ce qui s’est effectivement produit lors de l’intervention1643. Il ne s’agit pas d’une analyse ex post facto de la décision des policiers, mais bien d’un examen de ce qui a mené à la décision de ne pas s’annoncer. Ainsi, à moins d’urgence, les policiers doivent frapper à la porte et s’annoncer avant de pénétrer dans une maison d’habitation afin d’y effectuer une arrestation. À cette fin, les policiers doivent généralement donner « (i) avis de leur présence en frappant ou en sonnant, (ii) avis de leur autorité, en s’identifiant comme agents chargés d’exécuter la loi et (iii) avis du but de leur visite, en déclarant un motif légitime d’entrer1644 ». Faute de réponse dans un délai raisonnable, les policiers peuvent utiliser la force pour pénétrer dans la maison d’habitation et procéder à l’arrestation du suspect1645. À moins de constituer une

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invitation tacite à entrer, ce qui est plutôt rare, la présence d’une porte entrouverte ou déverrouillée ne dispense pas les policiers de donner un avis régulier1646. L’agent qui procède à l’arrestation d’un suspect à la suite d’un mandat d’entrée ou d’une autorisation de pénétrer dans une maison d’habitation est tenu, selon le par. 29(1) du Code, « de donner à cette personne, si la chose est possible, avis du mandat aux termes duquel il opère l’arrestation ». L’omission de le faire, sans bonne raison, constitue une violation de l’article 8 de la Charte1647.

399. Enfin, mentionnons que l’article 529.5 prévoit que le mandat visé à l’article 529.1 ou l’autorisation prévue aux articles 529 ou 529.4, peut être délivré à la suite d’une dénonciation faite par téléphone ou à l’aide d’un autre moyen de télécommunication, lorsque l’agent de la paix « considère qu’il serait peu commode dans les circonstances de se présenter en personne devant un juge ou un juge de paix » pour en faire la demande.

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Huitième section : L’enquête sur la mise en liberté de l’accusé

400. Lorsqu’une personne arrêtée n’est pas remise en liberté avant sa comparution, une enquête sera menée par le tribunal afin de déterminer le sort de l’accusé en attente de son procès1648. Cette audition, qui a lieu la journée même de la comparution ou dans les jours suivant la mise sous garde du prévenu1649, est régie par les articles 515 et suivants du Code criminel1650. Aux termes de ces dispositions, le juge de paix peut ordonner soit la remise en liberté de l’accusé avec ou sans conditions, soit sa détention jusqu’à la fin de son procès. Le droit à la liberté et la présomption d’innocence étant des piliers de notre système de justice pénale1651, la

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mise en liberté du prévenu s’impose dans tous les cas où sa détention sous garde n’est pas justifiée au sens du par. 515(10) ou que la loi ne le prévoit pas autrement. Le principe est donc « la mise en liberté de l’accusé et la détention, l’exception1652 ». Cette règle, qui est enchâssée à l’al. 11e) de la Charte, reconnaît à tout inculpé le droit « de ne pas être privé sans juste cause d’une mise en liberté assortie d’un cautionnement raisonnable1653 ». « Le terme

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cautionnement raisonnable se rapporte aux conditions de la mise en liberté1654 », c’est-à-dire au « montant du cautionnement » et aux restrictions imposées à l’accusé. Ainsi, lorsqu’un prévenu est accusé d’une infraction autre que celles prévues à l’article 469 ou au par. 515(6), le juge de paix doit ordonner la mise en liberté sans conditions de l’accusé, sauf si le poursuivant fait valoir à l’égard de cette infraction des « motifs justifiant la détention du prévenu sous garde », ou « une forme plus sévère de mise en liberté1655 ». La mise en liberté du prévenu peut donc être « avec » ou « sans conditions ». En l’absence de motifs justifiant la détention du prévenu sous garde, le juge de paix qui ne rend pas une ordonnance de mise en liberté sans conditions doit ordonner la mise en liberté du prévenu aux conditions qu’il fixe1656. Aux termes du par. 515(4) du Code, le juge de paix peut assortir l’ordonnance de l’une ou des conditions suivantes intimant au prévenu notamment de « se

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présenter, aux moments indiqués dans l’ordonnance, à un agent de la paix ou à la personne nommés » (al. 515(4)a)); « de demeurer dans le ressort de la juridiction précisée » (al. 515(4)b)); « d’aviser l’agent de la paix ou la personne nommés de tout changement d’adresse, d’emploi ou d’occupation » (al. 515(4)c)); de s’abstenir de communiquer directement ou indirectement avec toute personne identifiée dans l’ordonnance (al. 515(4)d)), ou d’aller dans un lieu qui y est mentionné (al. 515(4)e)); de déposer son passeport (al. 515(4)f)) et d’observer toute autre condition qui serait nécessaire afin d’assurer la sécurité des victimes ou des témoins de l’infraction (al. 515(4)g)). L’al. 515(4)h) permet au juge de paix d’imposer toute autre condition raisonnable qu’il estime indiquée. Parmi les conditions non énumérées souvent imposées, mentionnons « l’interdiction d’utiliser un téléphone cellulaire et d’avoir accès à l’Internet, le contrôle de la consommation d’alcool et de drogue et l’imposition d’un couvre-feu1657 ». S’il conclut qu’il est souhaitable de le faire pour la sécurité du prévenu, de la victime ou d’une autre personne, le juge doit interdire le prévenu d’avoir en sa possession une arme à feu, une arbalète, une arme prohibée, une arme à autorisation restreinte, des munitions, etc. Cette condition est requise notamment dans le cas d’une infraction perpétrée avec usage, tentative ou menace de violence, d’une infraction de terrorisme, de harcèlement criminel, d’intimidation d’une personne associée au système judiciaire, de certaines infractions à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, d’une infraction relative à une arme à feu, une arbalète, une arme prohibée, une arme à autorisation restreinte et d’autres objets de cette nature (par. 515(4.1)). Les conditions imposées par le juge de paix doivent se rapporter aux motifs pouvant justifier la détention de l’accusé au sens du par. 515(10) du Code1658. Ces conditions, précise la

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Cour suprême dans R. c. Zora, « doivent être minimales, nécessaires, raisonnables, les moins sévères possible dans les circonstances et suffisamment liées au risque indiqué au par. 515(10)1659 ».

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401. En plus des conditions autorisées au paragraphe 515(4), l’ordonnance de mise en liberté du prévenu est assortie, selon le cas, d’une indication que celle-ci « ne contient aucune forme d’obligation financière1660 »; de l’engagement de la part du prévenu à verser la somme d’argent indiquée dans les cas où il contreviendrait à une condition de l’ordonnance1661; « de l’obligation d’avoir une ou plusieurs cautions, avec ou sans engagement de la part du prévenu à verser la somme indiquée en cas de non-respect d’une condition de l’ordonnance1662 »; « de l’obligation de déposer la somme d’argent ou autre valeur indiquées, avec ou sans engagement de la part du prévenu à verser la somme d’argent indiquée en cas de non-respect d’une condition de l’ordonnance1663 » et, enfin, si le détenu ne réside pas ordinairement au Québec ou dans un rayon de deux cents kilomètres du lieu de garde, « de l’obligation de déposer la somme d’argent ou autre valeur indiquées, avec ou sans caution ainsi qu’avec ou sans engagement de la part du prévenu à verser la somme d’argent indiquée en cas de non-respect d’une condition de l’ordonnance1664 ». Dans tous les cas, « la forme de mise en liberté imposée à l’accusé ne doit pas être plus sévère que ce qui est nécessaire1665 ». C’est le « principe de l’échelle », reconnu au paragraphe 515(2.01) du Code1666. D’après ce principe,

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le juge de paix ne peut imposer une forme de mise en liberté plus sévère, « à moins que le ministère public ne démontre pourquoi des conditions de mise en liberté moins contraignantes seraient inappropriées1667 ». Pour reprendre une formule consacrée, la loi « favorise la mise en liberté à la première occasion raisonnable et [...] aux conditions les moins sévères possible1668 ».

402. Lorsque le prévenu est inculpé de meurtre ou d’une autre infraction prévue à l’article 469 du Code, un juge de la Cour supérieure doit ordonner la détention sous garde de l’accusé à moins que le prévenu ne démontre que celle-ci n’est pas justifiée aux termes du par. 515(10)1669. Le principe est alors inversé : la détention devient la règle et la mise en liberté, l’exception. Il en va également des infractions listées au par. 515(6) du Code, et plus particulièrement de certaines infractions de criminalité organisée (sous-al. 515(6)a)(ii)) et de terrorisme (sous-al. 515(6)a)(iii)); de trafic, de possession en vue du trafic ou d’exportation, d’importation et d’exportation de stupéfiants – passibles de l’emprisonnement à perpétuité – ou de complot en vue de perpétrer l’une de ces

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infractions (al. 515(6)d)); de l’utilisation d’une arme à feu dans le cadre d’infractions perpétrées contre la personne (sous-al. 515(6) a)(vii)(viii)); d’un acte criminel présumé avoir été commis alors que l’individu se trouvait en liberté à l’égard d’un autre acte criminel (sous-al. 515(6)a)(i)) et d’une infraction se rapportant à l’omission de comparaître ou à l’omission de se conformer à une condition d’une promesse, d’une ordonnance de mise en liberté, d’une sommation ou d’une citation à comparaître qu’il aurait commise après qu’il a été mis en liberté relativement à une autre infraction (al. 515(6)c)). La personne qui ne réside pas habituellement au Canada et qui est accusée d’avoir commis un acte criminel, autre qu’une infraction mentionnée à l’article 469, doit également être placée sous garde par le juge de paix à moins que le prévenu ne fasse valoir l’absence de fondement de cette mesure (al. 515(6)b)). Bien que les exceptions prévues au par. 515(6) privent le détenu de sa liberté sous caution dans certaines circonstances, la plupart de ces règles sont soigneusement conçues afin d’endiguer le risque que l’activité criminelle se poursuive, ou que le suspect s’esquive en tentant d’échapper à la justice1670. Cela est particulièrement évident en matière de gangstérisme et de trafic de stupéfiants où les risques (1) que l’activité criminelle se poursuive en raison des profits générés1671 et (2) que l’accusé s’esquive grâce à la présence

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d’une organisation bien structurée1672 sont bel et bien réels. Quant aux personnes ne pouvant bénéficier de moyens financiers aussi considérables ou d’un réseau d’entraide aussi sophistiqué, elles devraient généralement recouvrer leur liberté sous certaines conditions.

403. La constitutionnalité de l’al. 515(6)a) [auj. al. 515(6)a)(i)] fut confirmée par la Cour suprême, dans R. c. Morales1673. Mise de l’avant afin d’enrayer la poursuite de l’activité criminelle, cette disposition prive de liberté uniquement ceux qui sont inculpés d’un acte criminel alors qu’ils étaient en liberté sous caution à l’égard d’un autre acte criminel et qui ne font pas valoir l’absence de fondement de la détention. En ce qui concerne le renversement du fardeau de la preuve en matière de meurtre et autres infractions prévues à l’article 469, l’exception est suffisamment limitée pour constituer une « juste cause » au sens de l’al. 11e) de la Charte1674.

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En effet, le par. 522(2) ne s’applique qu’au meurtre et autres infractions prévues à l’article 4691675. Il s’agit pour la plupart d’infractions très graves qui sans exclure complètement la liberté sous caution, obligent l’accusé à faire valoir que sa mise en liberté est justifiée. Quant à la poursuite de fins étrangères au système de mise en liberté sous caution, l’article 522 ne fait « qu’établir un système efficace au regard d’infractions déterminées pour lesquelles le système normal de mise en liberté sous caution permettrait la poursuite d’une activité criminelle et un risque intolérable que le prévenu s’esquive1676 ». Si la poursuite de l’activité criminelle en matière de meurtre est possible – sans nécessairement être probable –, le risque d’échapper à la justice criminelle en s’esquivant ne peut être plus élevé compte tenu de la sévérité de la peine qui s’y rattache1677.

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404. Qu’il s’agisse de procéder en vertu du principe général de remise en liberté ou des exceptions prévues aux par. 515(6) et 522(2), le par. 515(10) prévoit que la détention d’un prévenu sous garde n’est justifiée que lorsqu’elle est nécessaire (1) pour garantir sa présence au tribunal afin qu’il soit traité selon la loi; (2) pour assurer la protection ou la sécurité du public, ou (3) pour ne pas miner la confiance du public envers l’administration de la justice. Pour garantir la présence du prévenu devant le tribunal, tout d’abord, puisqu’un individu qui possède un emploi, qui est marié, qui a des enfants, qui a mis fin à ses anciennes relations, qui a modifié son mode de vie, qui a toujours respecté ses engagements et qui demeure bien enraciné dans sa communauté fait preuve d’une stabilité qui lui permettra d’établir qu’il sera présent à son procès s’il est remis en liberté. La question ici n’est pas de savoir si l’État sera en mesure de retracer un accusé qui s’est esquivé, mais plutôt si sa détention est nécessaire pour assurer sa présence devant le tribunal pendant toute la durée des procédures. Comme les chances de s’esquiver sont généralement tributaires des moyens financiers de l’individu et de ses relations avec des complices prêts à l’aider, un prévenu sans le sou et agissant seul ou en relation avec une organisation mal structurée présente moins de risque d’échapper à la justice1678.

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La présence d’une preuve accablante et d’une peine sévère advenant une condamnation peut également être considérée par le tribunal sans nécessairement constituer un motif automatique de détention.

405. Aux termes de l’al. 515(10)b), la détention du prévenu est justifiée lorsqu’elle est nécessaire « pour la protection ou la sécurité du public, notamment celle des victimes et des témoins de l’infraction ou celle des personnes âgées de moins de dix-huit ans, eu égard aux circonstances, y compris toute probabilité marquée que le prévenu, s’il est mis en liberté, commettra une infraction criminelle ou nuira à l’administration de la justice ». La simple possibilité de commettre une infraction criminelle n’est pas suffisante en l’absence d’un risque « marqué » pour la protection ou la sécurité du public1679. Pour évaluer le degré de prévisibilité du risque, le tribunal peut recourir aux facteurs suivants : « (1) la nature de l’infraction, (2) les circonstances pertinentes de celle-ci, ce qui peut mettre en cause les événements antérieurs et postérieurs, (3) la probabilité d’une condamnation, (4) le degré de participation de l’inculpé, (5) la relation de l’inculpé avec la victime, (6) le profil de l’inculpé, i.e., son occupation, son mode de vie, ses antécédents judiciaires, son milieu familial, son état mental, (7) sa conduite postérieurement à la commission de l’infraction reprochée et (8) le danger que représente, pour la communauté particulièrement visée par l’affaire, la liberté provisoire de l’inculpé1680 ». L’analyse est

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contextuelle et tient compte de toutes les circonstances se rapportant à la protection ou à la sécurité du public. Un risque élevé de récidive découlant de la nature de l’infraction commise et du rôle joué par l’accusé milite donc en faveur de la détention du prévenu. On n’a qu’à penser à l’individu qui s’adonne au commerce de la drogue depuis plusieurs années ou qui est membre d’une organisation criminelle générant des profits considérables. « Plus l’organisation criminelle est importante et plus grand y est le rôle du prévenu, plus il sera difficile de convaincre la cour de l’absence de probabilité que la détention n’est pas nécessaire pour la protection ou la sécurité du public1681. » En sens contraire, la personne qui n’est pas impliquée dans une organisation structurée, dont l’activité criminelle est occasionnelle ou le mode d’opération artisanal pourra démontrer que sa détention n’est pas justifiée au sens de l’al. 515(10)b). Cela est d’autant plus vrai si le prévenu « suggère au tribunal quelque ensemble de conditions spécifiques susceptibles de limiter son potentiel de récidive1682 ». C’est dans cette perspective qu’il faut envisager la pertinence d’un plan de mise en liberté comprenant notamment une thérapie supervisée pour les personnes souffrant d’alcoolisme, de toxicomanie ou de problèmes de santé mentale. « La mise en liberté prévoyant l’admission dans un centre de traitement assortie de conditions appropriées permettra souvent de bien répondre à tout risque soulevé en application du par. 515(10) et constitue une solution de rechange moins onéreuse que la détention dans un établissement provincial1683. » En s’attaquant aux causes de la criminalité, cette option peut également diminuer le risque de récidive.

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406. Enfin, la détention d’un prévenu sous garde est justifiée lorsqu’elle est nécessaire pour ne pas miner la confiance du public envers l’administration de la justice. Dans le cadre de cette analyse, le tribunal doit tenir compte de toutes les circonstances de l’affaire, notamment « (i) du fait que l’accusation paraît fondée, (ii) de la gravité de l’infraction, (iii) des circonstances entourant sa perpétration, y compris l’usage d’une arme à feu et, enfin, (iv) du fait que le prévenu encourt, en cas de condamnation, une longue peine d’emprisonnement ou, s’agissant d’une infraction mettant en jeu une arme à feu, une peine minimale d’emprisonnement d’au moins trois ans1684 ». L’emploi de l’adverbe « notamment » nous indique que ces circonstances ne sont pas exhaustives. D’autres facteurs peuvent, en effet, s’ajouter afin de déterminer si la détention est nécessaire pour ne pas miner la confiance du public envers l’administration de la justice. Le fait que l’accusation paraît fondée constitue la première circonstance énoncée à l’al. 515(10)c). D’après le juge Wagner, dans R. c. St-Cloud1685, ce critère renvoie au sérieux de l’accusation, à la nature et à la qualité de la preuve, ainsi qu’aux moyens de défense pouvant être invoqués par l’accusé. Comme il ne s’agit pas d’un procès, mais d’une instance préliminaire régie par des règles de preuve plutôt souples, le juge saisi d’une demande de détention fondée sur l’al. 515(10)c) doit évaluer le sérieux de l’accusation sans se substituer au juge du procès. La crédibilité des témoins à charge, la fiabilité des éléments de preuve et le bien-fondé de certains moyens de défense devront être examinés plus tard au procès1686. Pour déterminer si « l’accusation paraît fondée », le juge tient compte de la qualité de la preuve en fonction de sa nature et de sa quantité1687. Une preuve imposante

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recueillie dans le cadre d’une enquête exhaustive s’étant déroulée sur plusieurs mois ou années ajoute du sérieux à l’accusation. Quant aux excuses et justifications pouvant être invoquées à l’encontre des accusations, le juge est « également autorisé à prendre en considération les moyens de défense auxquels la preuve pouvait donner prise; il serait en effet injuste de permettre à la poursuite de faire état de la preuve à charge sans que le juge puisse considérer non seulement ses faiblesses, mais aussi les moyens de défense qu’elle laisse voir1688 ». Envisagée du point de vue de l’infraction, de sa gravité objective, l’importance du crime « résulte principalement de la peine maximale prévue par le législateur, car cette peine maximale permet de hiérarchiser le crime à sanctionner dans l’échelle de gravité des crimes telle qu’elle résulte des différentes peines maximales prévues pour les divers crimes créés par le Parlement fédéral1689 ». L’imposition de peines minimales ou leur relèvement au cours des dernières années peut également être considéré par le juge dans l’évaluation de la gravité de l’infraction. Les circonstances entourant la perpétration du crime, y compris l’usage d’une arme à feu, renvoient aux circonstances aggravantes et/ou atténuantes qui caractérisent l’infraction en augmentant ou diminuant sa gravité subjective. Parmi les facteurs se rapportant à cette question, mentionnons la nature violente, odieuse ou horrible du crime; la commission d’une infraction motivée par des préjugés ou de la haine fondée sur des facteurs de discrimination; les crimes commis à l’égard d’un partenaire intime; les infractions perpétrées à l’endroit d’une personne vulnérable en raison de son jeune âge ou de son âge avancé, de sa condition physique ou mentale, de son

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emploi ou de sa situation factuelle; le terrorisme ou le gangstérisme; les séquelles physiques ou psychologiques subies par la victime; le nombre des victimes; la durée et la fréquence des infractions et le rôle de l’accusé dans la perpétration du crime. Le fait que le prévenu encourt une longue peine d’emprisonnement est la quatrième et dernière circonstance énoncée à l’al. 515(10)c). Cette question est déterminée en fonction de la nature du crime commis, de la peine qui s’y rattache, de la gravité du crime et du degré de responsabilité du délinquant. Bien qu’il ne s’agisse pas d’une audience sur la détermination de la peine, la présence de circonstances atténuantes et aggravantes se rapportant à la nature du crime et à la situation du délinquant révélera très rapidement l’ampleur de la peine anticipée.

407. Les quatre facteurs précités n’entraînent pas automatiquement la détention du prévenu aux termes de l’al. 515(10)c). Même s’il « doit prêter une attention particulière aux facteurs énoncés par le législateur1690 », le juge saisi d’une demande de détention fondée sur l’al. 515(10)c) doit tenir compte de toutes les circonstances pertinentes, y compris celles se rapportant à la situation personnelle du délinquant. La gravité subjective du crime ayant déjà été examinée par le tribunal, l’analyse des facteurs se rapportant à la personne du délinquant s’impose dans le cadre d’une évaluation sommaire, mais nécessaire, permettant de qualifier l’infraction et son auteur. Parmi les facteurs pertinents, mentionnons le jeune âge de l’accusé, la présence ou non d’antécédents judiciaires en semblable matière, sa fragilité psychologique, son appartenance à une organisation criminelle, son rôle au sein du groupe, son changement de mode de vie (p. ex. : le prévenu n’est plus membre des Hells Angels), l’adhésion à des valeurs plus positives1691, etc. La présence d’un plan de sortie soigneusement élaboré

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demeure un facteur pertinent afin de décider si la détention du prévenu est nécessaire pour ne pas miner la confiance du public envers l’administration de la justice1692. En plus des circonstances propres à l’accusé, le juge peut prendre note des délais nécessaires avant la tenue du procès. Loin d’être exhaustives, « les quatre circonstances énumérées ne sont que les principaux éléments que le juge doit pondérer en sus de tout autre élément pertinent, afin de déterminer si, dans l’affaire qui l’occupe, la détention est nécessaire pour réaliser l’objectif poursuivi : le maintien de la confiance du public envers l’administration de la justice au pays. Telle est la finalité de cet alinéa. Même si le juge doit prendre connaissance de toutes les circonstances de l’affaire et se livrer à un exercice de pondération, c’est cette question ultime que le juge doit trancher, et qui doit donc le guider dans sa décision1693 ».

408. La confiance du public envers l’administration de la justice renvoie « à une personne raisonnable, bien informée de la

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philosophie des dispositions législatives, des valeurs consacrées par la Charte et des circonstances réelles de l’affaire1694 ». Il ne s’agit pas d’une personne trop émotive, mal informée ou qui ne partage pas les valeurs qui surplombent notre système de justice pénale, ni d’une personne possédant les connaissances d’un juriste ou maîtrisant toutes les subtilités qui caractérisent la procédure judiciaire, les éléments constitutifs des infractions et les conditions d’ouverture des moyens de défense. Sans exclure la pertinence des reportages médiatiques qui reflètent l’opinion d’une partie de la population à l’égard de certains enjeux ou questions plus spécifiques, les tribunaux doivent se prémunir contre l’influence négative des reportages inexacts, mal informés, vindicatifs ou carrément incendiaires1695.

409. En résumé, l’alinéa 515(10)c) constitue un motif distinct qui permet d’ordonner la détention du prévenu lorsqu’elle est nécessaire pour ne pas miner la confiance du public envers l’administration de la justice. Bien que le juge doive prêter une attention particulière aux quatre facteurs énoncés aux sous-al. 515(10)c)(i) à (iv), sa décision doit tenir compte de toutes les circonstances de l’affaire. Comme aucune circonstance n’est déterminante, c’est l’effet combiné ou l’ensemble des circonstances qui permettra au juge de décider si la détention du prévenu est justifiée au sens de l’al. 516(10)c). Sans être réservée à des

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situations exceptionnelles ni à certaines infractions spécifiques1696, la détention du prévenu sera généralement ordonnée « en présence d’un crime grave ou très violent, lorsque la preuve contre l’accusé est accablante, et que la ou les victimes sont vulnérables1697 ». Un risque peu élevé de récidive et des moyens de défense sérieux peuvent, dans ce cas, permettre au détenu de recouvrer sa liberté sous différentes conditions1698. Ces conditions, une fois réunies, permettront de contenir le risque que le prévenu ne se présente pas à son procès, qu’il récidive ou cause un préjudice à autrui, ou qu’il nuise à l’administration de la justice.

410. Aux termes des articles 520 et 521 du Code criminel, la défense et le poursuivant peuvent s’adresser à un juge afin de réviser l’ordonnance rendue à l’égard du prévenu1699. Ces

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demandes, qui ne s’appliquent pas aux infractions mentionnées à l’article 469, peuvent être présentées « en tout temps » avant le début du procès. Le pouvoir de réviser l’ordonnance initiale de détention provisoire ou de mise en liberté du prévenu n’est pas « illimité »1700. Seule la présence d’une erreur de droit, d’une décision « manifestement inappropriée » en raison de l’importance démesurée accordée à certains facteurs de pondération ou de l’omission de prendre en considération un ou des facteurs pertinents peuvent justifier l’intervention du juge chargé de la révision de la décision initiale. Comme le juge qui a rendu la décision contestée jouit d’une grande discrétion, les juges réviseurs doivent faire preuve de retenue et s’abstenir d’intervenir à la légère. Une différence d’opinions sur l’importance accordée à certains facteurs pertinents ne peut justifier l’intervention du juge réviseur en l’absence d’une décision « manifestement inappropriée ». Une nouvelle preuve soumise par l’accusé ou la poursuite peut également amener le juge réviseur à modifier la décision initiale lorsque ces nouveaux éléments de preuve « démontrent un changement important et pertinent dans les circonstances de l’affaire1701 ». Quant aux infractions prévues à l’article 469, l’ordonnance rendue aux termes

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de l’article 522 peut être révisée par la Cour d’appel, en vertu du par. 680(1) du Code criminel. Cette révision, qui est subordonnée à un contrôle préalable du juge en chef1702, est effectuée par la Cour, sur l’ordre de ce dernier. Le Tribunal peut alors confirmer la décision initiale, modifier l’ordonnance rendue à l’égard du prévenu ou remplacer la décision par celle qui aurait dû être rendue conformément aux principes applicables1703.

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411. En plus des demandes de révision prévues aux articles 520 et 521 du Code, le paragraphe 525(1) prévoit que la personne qui a la garde d’un prévenu qui est accusé d’une infraction qui n’est pas mentionnée à l’article 469, doit, à l’expiration d’un délai de 90 jours suivant la date de la comparution du prévenu en vertu de l’article 503, de sa mise sous garde suite à une ordonnance rendue en vertu de l’article 521, du sous-alinéa 523.1(3)b)(ii) ou de l’article 524, ou de la décision rendue suite à une demande de révision présentée conformément à l’article 5201704, demander à un juge la tenue d’une audience afin de déterminer si le prévenu devrait recouvrer sa liberté1705. Le juge qui reçoit la demande fixe une date pour l’audition et informe les personnes concernées. L’audience doit avoir lieu le plus rapidement possible. Comme la

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demande vise à déterminer si le détenu « devrait être mis en liberté ou non », « la question que doit trancher le juge lors d’une audience prévue à l’art. 525 est la suivante : Le maintien en détention du prévenu sous garde est-il justifié au sens du par. 515(10) ?1706 ». S’il est évident que le juge peut examiner la transcription et les pièces se rapportant à une audience antérieure concernant la liberté provisoire du prévenu, il doit être attentif aux nouvelles preuves ainsi qu’à « tout changement important de la situation du prévenu » pouvant avoir un impact sur le bien-fondé de son maintien en détention sous garde1707. Dans son analyse, le juge doit tenir compte de l’incidence du temps qui s’est écoulé en prêtant une attention particulière au risque que la détention du prévenu soit aussi longue, sinon plus, que le temps estimé pour purger sa peine s’il était reconnu coupable. La prise en compte du temps écoulé ou prévu ne se limite pas à la confiance du public envers l’administration de la justice, mais s’étend également aux autres motifs indiqués au paragraphe 515(10). « Si, à la suite de l’audition, le juge n’est pas convaincu que la continuation de la détention du prévenu sous garde est justifiée aux termes du paragraphe 515(10), il rend l’ordonnance de mise en liberté visée à l’article 5151708. » Le juge appelé à statuer sur la demande présentée peut également, en vertu de l’article 526, donner des instructions afin d’accélérer le déroulement des procédures engagées. Le juge qui constate que le dossier s’étire et se dirige vers des délais déraisonnables devrait donc intervenir pour accélérer la tenue du procès.

412. Enfin, mentionnons que l’alinéa 523(2)a) du Code permet au juge « devant qui un prévenu subit son procès » de réviser l’ordonnance de mise en liberté ou de détention provisoire1709. Le

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procès commence au moment où le juge remet l’accusé entre les mains du jury1710. Lorsque le procès se tient devant un juge de la cour provinciale, le procès débute généralement avec la preuve de la poursuite1711. Le juge de gestion d’instance désigné en vertu de l’article 551.1 C.cr. n’est pas le juge du procès1712. Dans Villemaire c. R., le tribunal considère que le procès sans jury de l’accusé a commencé « puisque l’acte d’accusation a été déposé et que ce dernier a enregistré un plaidoyer de non-culpabilité devant le juge

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des faits1713 ». Cette conclusion s’imposait d’autant plus que le juge du procès s’était déjà saisi, à ce titre, de questions concernant la divulgation de la preuve et prononcé sur deux demandes de révision de détention présentées conformément à l’alinéa 523(2)a) du Code. La décision rendue en vertu des alinéas 523(2)a) ou c) n’est pas sujette à révision1714. « L’absence de mécanismes de révision interdit donc toute interférence d’une autre cour lorsque le procès est en cours1715. » La décision prise en vertu de l’alinéa 523(2)a) n’étant pas listée au paragraphe 680(1), celle-ci ne peut faire l’objet d’une révision par la Cour d’appel. Quant à l’alinéa 523(2)b), il permet au juge qui cite le prévenu à procès à la suite d’une enquête préliminaire tenue à l’égard d’une infraction qui ne figure pas à l’article 469, de substituer l’ordonnance initiale par toute autre ordonnance qu’il juge appropriée relativement à la mise en liberté ou à la détention du prévenu. L’ordonnance rendue en vertu de l’aliéna 523b) peut faire l’objet d’une révision aux termes des par. 520(1) et 521(2) du Code criminel.

413. En ce qui concerne le statut de la personne qui est en attente d’une décision en appel, celle-ci peut, conformément aux critères prévus au paragraphe 679(3), être mise en liberté si elle convainc le tribunal « que l’appel [...] n’est pas futile; qu’elle se livrera en conformité avec les termes de l’ordonnance et que sa

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détention n’est pas nécessaire dans l’intérêt public1716 ». Le premier critère n’est pas très exigeant1717. « Il permet au juge d’appel de refuser immédiatement la liberté (en répondant par un “oui” ou un “non” catégorique) lorsque l’appel est dénué de fondement1718. » Le second critère indique que le juge doit être convaincu que l’accusé ne s’esquivera pas entretemps et qu’il « se livrera au besoin1719 ». Le troisième critère se rapportant à l’intérêt public comporte deux volets : la sécurité publique et la confiance du public envers l’administration de la justice. La sécurité publique fait intervenir des considérations déjà étudiées dans le cadre de notre analyse de l’al. 515(10)b). Ce volet sera satisfait s’il n’y a pas de « probabilité marquée » que l’appelant commette une infraction criminelle

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ou nuira à l’administration de la justice1720. Le volet se rapportant à la confiance du public envers l’administration de la justice « suppose la mise en balance1721 » de deux intérêts divergents : la force exécutoire des jugements et le caractère révisable de ceux-ci. Pour déterminer si la mise en liberté de l’appelant en attendant la décision de son appel « pourrait porter atteinte à la confiance du public envers l’administration de la justice1722 », le juge doit s’inspirer des facteurs prévus à l’alinéa 515(10)c). Vue sous l’angle de l’intérêt lié à la force exécutoire des jugements, la gravité du crime joue un rôle important dans la décision du tribunal. Comme le jugement sur la peine tient compte de la gravité de l’infraction, des circonstances entourant sa perpétration et de la durée de l’emprisonnement, le juge d’appel profitera du jugement sur la peine pour prendre connaissance de ces facteurs1723. En plus de la gravité du crime, la confiance du public peut être minée par la présence d’un risque subsistant qui sans être suffisamment important pour compromettre la sécurité publique, peut militer en faveur de la détention de l’appelant. Il en va de même pour les risques de fuite qui

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ne répondent pas aux critères de l’alinéa 679(3)b). À l’inverse, l’absence de préoccupations importantes en matière de sécurité publique et de risques de fuite diminuera l’intérêt associé à la force exécutoire des jugements. En ce qui concerne l’intérêt lié au caractère révisable des jugements, sa nature transparaît à travers la « solidité des moyens d’appel » et le type de réparation recherchée1724. En effet, plus les moyens d’appel sont sérieux, plus l’intérêt lié à la force exécutoire des jugements diminuera au profit du caractère révisable de ceux-ci1725. La mise en balance des intérêts liés à la force exécutoire des jugements et à leur caractère révisable n’obéit pas à une règle prédéfinie, mais à une analyse globale et

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contextuelle des facteurs pertinents. En général, une déclaration de culpabilité pour meurtre ou pour un autre crime grave accentue l’intérêt du public concernant la force exécutoire des jugements au détriment de l’intérêt lié au caractère révisable de ceux-ci. Cette situation est d’autant plus évidente lorsqu’il subsiste des risques pour la sécurité du public ou des risques de fuite, ou lorsque les « moyens d’appel semblent faibles, ou les deux1726 ». À l’inverse, la présence de moyens d’appel « qui vont clairement au-delà des exigences du critère de “non-futilité”1727 », combinée à l’absence de préoccupations importantes se rapportant à la sécurité du public ou au risque de fuite, peuvent faire pencher la balance du côté de l’intérêt du public lié au caractère révisable des jugements, et cela même en matière de meurtre ou de crimes graves1728. Pour s’en convaincre, citons le cas d’Adèle Sorella, cette mère de famille qui avait demandé sa mise en liberté pendant l’appel du verdict de culpabilité de meurtre prononcé contre elle à la suite de la mort de ses deux enfants1729. Après avoir conclu que l’appel n’était pas futile, le juge Schrager souligne qu’il n’y a aucune raison « de douter que l’appelante se livrera aux autorités carcérales advenant le rejet de son appel1730 ». L’accusée, en effet, n’a pas de passeport, entretient une relation étroite avec les membres de sa famille et de sa communauté et a toujours respecté ses conditions de mise en liberté. De plus, une amie qui est membre du barreau s’est offerte pour l’héberger. Les deux premiers critères ayant été établis,

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le juge procéda à l’analyse de l’intérêt public prévu à l’alinéa 679(3)c). Sur ce point, l’appelante, qui est âgée de 54 ans, n’a pas d’antécédents judiciaires autres que ceux découlant de l’affaire. En plus d’avoir toujours respecté les conditions imposées par le tribunal, madame Sorella a participé à des séances de psychothérapie. Le juge Schrager conclut donc que l’accusée n’est pas violente et ne présente pas de risque pour la sécurité publique. Quant à la confiance du public envers l’administration de la justice, celle-ci doit être évaluée « du point de vue d’un membre raisonnable du public, c’est-à-dire d’une personne réfléchie, impartiale, bien informée sur les circonstances de l’affaire et respectueuse des valeurs fondamentales de la société1731 ». L’infraction, de toute évidence, est grave, mais les circonstances ne révèlent pas, selon le jugement sur la peine, la présence « d’un crime crapuleux » ou de violence extrême, mais plutôt d’un événement imputable, en partie, à la condition mentale de l’accusée1732. S’inspirant des commentaires du juge Moldaver, dans R. c. Oland, le juge Schrager mentionne que l’absence de risques de fuite et de risques pour la sécurité du public diminue l’intérêt lié à la force exécutoire des jugements. Quant aux motifs d’appel, il est difficile à ce stade de se prononcer catégoriquement en raison du fait que le juge n’a pas accès aux témoignages des psychiatres ni à la preuve ayant amené le jury à écarter la défense suggérée. Comme le juge est convaincu qu’une « personne réfléchie, impartiale, bien informée sur les circonstances de l’affaire et respectueuse des valeurs fondamentales de la société » estimerait que la détention de l’appelante, en attendant la décision de son appel, n’est pas nécessaire dans l’intérêt

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public, la requête est accueillie et la mise en liberté de l’appelante ordonnée aux conditions fixées par le Tribunal.

414. Avant de terminer notre étude des mesures concernant l’arrestation, la comparution et la mise en liberté provisoire du prévenu, il convient de souligner l’adoption récente de l’article 493.2 du Code criminel. Cette disposition prévoit que l’agent de la paix, le juge de paix ou le juge qui prend une décision concernant la liberté du suspect doit accorder « une attention particulière à la situation des prévenus autochtones et des prévenus appartenant à des populations vulnérables qui sont surreprésentées au sein du système de justice pénale et qui souffrent d’un désavantage lorsqu’il s’agit d’obtenir une mise en liberté au titre de la présente partie1733 ».

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Conclusion

415. L’étude de l’article 9 de la Charte nous a montré combien la liberté du citoyen était importante en droit pénal canadien. Une fois constatée, la détention du suspect exige la mise en place de protections visant à pallier le déséquilibre dans le rapport de force qui l’oppose désormais à l’État. Le droit d’être informé des motifs de sa détention ou de son arrestation et le droit à l’assistance d’un avocat permettront « à la personne détenue non seulement d’être informée de ses droits et de ses obligations en vertu de la loi, mais également d’obtenir des conseils sur la façon d’exercer ces droits1734 ».

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Notes de bas de page

1244. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 25.

1245. Fleming c. Ontario, [2019] A.C.S. No. 45, par. 111 :

« La Cour a jugé que, lorsqu’une intervention policière est autorisée par la common law, il n’y a pas d’atteinte à ces droits garantis par la Charte, parce que leur limite intrinsèque est respectée. Par exemple, il a été jugé dans les arrêts Clayton et Mann qu’une détention légale en vertu d’un pouvoir reconnu par la common law n’était pas arbitraire aux termes de l’art. 9. »

1246. Cloutier c. Langlois, 1990 CanLII 122 (CSC), [1990] 1 R.C.S. 158, par. 50.

1247. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 44.

1248. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 26 :

« Il est évident que, malgré le sens large donné aux entraves contre lesquelles l’art. 9 vise à protéger, – sens qui englobe celles tant à la liberté psychologique qu’à la liberté physique – toute entrave anodine ou négligeable ne donnera pas lieu à un examen fondé sur la Charte. Une interprétation aussi large de la détention banaliserait les droits garantis par la Charte et leur conférerait une portée excédant leur objet. Seule une personne dont la liberté est considérablement limitée a véritablement besoin des droits supplémentaires que la Charte confère aux personnes se trouvant dans cette situation. »

1249. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 37 :

« Une autre situation dont il est souvent question est celle où les policiers abordent les personnes qui se trouvent sur les lieux d’un accident ou d’un crime afin de déterminer si elles ont été témoins de l’événement et d’obtenir des renseignements susceptibles de les aider dans leur enquête. Même si beaucoup d’individus sont disposés à aider la police, il est clairement établi en droit que, sous réserve de dispositions précises qui s’appliquent exceptionnellement, les citoyens sont libres de quitter les lieux : R. c. Grafe (1987), 1987 CanLII 170 (ON CA), 36 C.C.C. (3d) 267(C.A. Ont.). Compte tenu de l’existence d’un tel droit généralement compris dans de telles circonstances, une personne raisonnable ne penserait pas avoir été privée de son droit de choisir de collaborer ou non avec la police. Cette conclusion est valable même si la personne se sent tenue de collaborer par obligation morale ou par devoir civique. »

1250. R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460, par. 21 :

« Reconnaître que la détention peut se manifester sous une forme physique ou psychologique est compatible avec notre opinion selon laquelle les mesures prises par les policiers peuvent être assez coercitives pour que la personne visée bénéficie de la protection offerte par les art. 9 et 10 de la Charte, même si elle n’est ni incarcérée ni menottée. »

1251. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 29.

1252. R. c. Whitfield, 1969 CanLII 4 (CSC), [1970] R.C.S. 46, par. 3.

1253. R. c. Thompson, [2020] O.J. No. 1757, par. 34 (C.A. Ont.) :

« Physical restraint has been called “the paradigm form of detention”, with arrest being the “paradigm form of physical restraint” : Paciocco, at p. 75. »

1254. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 25.

1255. R. c. Therens, 1985 CanLII 29 (CSC), [1985] 1 R.C.S. 613, par. 52.

1256. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 26 :

« Par conséquent, il y a détention même en l’absence d’une obligation légale de se conformer à une sommation ou à un ordre de la police, et même en l’absence d’une contrainte physique exercée par l’État, lorsqu’une personne raisonnable mise à la place de l’accusé se sentirait obligée d’obtempérer à un ordre ou à une sommation de la police, et conclurait qu’elle n’est pas libre de partir. »

1257. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 116 et 117 :

« Conclure autrement impose au plaignant l’obligation d’évaluer correctement à quel moment il est détenu et à quel moment il ne l’est pas. Ce problème précis se pose en l’espèce. Dans son témoignage, M. Le a affirmé que la police ne lui avait pas permis d’entrer dans la maison et l’avait physiquement empêché de le faire. Si l’on accepte le récit détaillé des faits de M. Le, sa perception subjective, aussi fugace soit-elle, selon laquelle il pouvait entrer dans la maison était simplement erronée. De plus, si, comme le conclut notre collègue, la mise en détention a eu lieu lorsque l’agent a dit au jeune homme de garder ses mains bien en vue, la perception subjective de M. Le n’aurait pris naissance qu’après que la détention eut déjà commencé. Même si on admet qu’il peut y avoir des situations où la perception subjective de l’accusé est pertinente, ce n’est pas le cas en l’espèce.

Par ailleurs, “la situation particulière de la personne visée ainsi que ses perceptions”, mentionnées dans l’arrêt Grant, devaient servir à établir s’il y avait un déséquilibre entre le pouvoir de cette personne et celui de la police, et non à juger s’il y avait en fait détention. Tout indique que les perceptions des accusés devaient jouer un rôle très limité, ce qui n’a pas été le cas en l’espèce. »

1258. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 116.

1259. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 44.

1260. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 35.

1261. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 36. R. c. Latour, [2018] J.Q. No. 14293, par. 204 :

« M. Bélisle-Maheux est intervenu rapidement et sommairement. Son but était d’identifier les personnes et d’orienter son enquête d’une manière générale quant à la commission d’une infraction ou à la survenance d’un accident. L’interférence avec le transport vers l’hôpital était de courte durée et la preuve n’en établit pas l’impact d’une manière particulière. »

1262. R. c. Légaré, [2016] J.Q. No. 347, par. 77 :

« À la suite d’un rapport d’accident, les policiers rencontrent des témoins et des personnes concernées par l’accident pour en comprendre les circonstances et satisfaire à leurs obligations en application du régime réglementaire de la sécurité routière. »

1263. R. c. Latour, [2018] J.Q. No. 14293, par. 169 :

« Discutant de l’autre extrémité du spectre, la Cour retient l’exemple de la police qui répond à un appel d’urgence médicale ou au 911 et qui aide des personnes ou encore recueille de l’information. La liberté de mouvement des personnes peut être incidemment restreinte par la prise en main des opérations. Toutefois, ces cas de figure n’engendrent pas une détention au sens constitutionnel. Cette situation couvre celle où les policiers abordent des personnes sur les lieux d’un accident ou d’un crime “afin de déterminer si elles ont été témoins de l’événement et [pour] obtenir des renseignements susceptibles de les aider dans leur enquête”. »

R. c. Culotta, 2018 ONCA 665 (CanLII), [2018] O.J. No. 3946, par. 19 et 20 (C.A. Ont.) :

« In terms of the statements made in the ambulance, I agree with the trial judge’s conclusion that the statements were voluntary. Indeed, the appellant made the statement that she had been driving the boat without even being asked. I do not agree with the appellant’s submission that she was detained, while in the ambulance, prior to the point when she was arrested. The appellant was in the ambulance, not through any actions of the police, but to receive medical treatment : see R. v. LaChappelle, 2007 ONCA 655, 226 C.C.C. (3d) 518, at para. 42. She was not, therefore, “detained” by the police at that time. The mere presence of a police officer in these circumstances does not constitute a detention.

Further, at the time that Officer Tunney entered the ambulance, he did not know if any criminal offence had been committed. He was just beginning his investigation into the conduct surrounding the collision of the boat on the rocks. In embarking on that investigation, Officer Tunney was entitled to interview the persons involved and to ask them questions. There was no reason, at that point in time, for Officer Tunney to inform any of the individuals with whom he spoke of their Charter rights. »

1264. R. c. Spence, [2010] J.Q. No. 29814, par. 73 :

« Or, en l’espèce, les policiers ne menaient pas une enquête générale sur un incident particulier, et ils ne visaient pas précisément non plus madame Spence dans le cadre d’une enquête ciblée. En réalité, ils se livraient tout naturellement à une activité de patrouille routinière et de prévention générale du crime, visant à assurer “simplement le maintien de l’ordre” une simple vérification de routine. »

Voir également R. c. Smith, [2012] O.J. No. 1015, par. 14 :

« I will now proceed step by step and appraise the whole transaction that terminated with the arrest of Mr. Smith in order to determine when the detention began. The chain of events began, when the attention of the investigating officers was drawn to the actions and body language of an individual they observed, while driving a marked police vehicle on routine patrol in the entertainment district, described in their evidence as a high crime area. A male person saw them, quickly turned around, and went into the inside portion of a parking lot. They decided this was suspicious and drove their police car into this part of the parking area. There was no evidence before the court as to whom the individual they initially saw was or what became of this person. Whether or not they were right to be suspicious of this man, these actions on their part consisted of merely observing him and then following him into a parking area. These actions did not restrain anyone physically or psychologically or suspend anyone’s liberty. Once in the parking area, the officers spotted three individuals in front of a car and decide to talk to them. There is nothing impermissible about this. Short conversations and quick checks of identifying information occurred, and the officers were satisfied that the information they had received was correct. This is very much like the preliminary questioning and brief checks in the Suberu case to decide whether to proceed further. »

1265. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 27.

1266. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 35.

1267. R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460, par. 30.

1268. R. c. Smith, [2012] O.J. No. 1015, par. 17 :

« When Mr. Smith’s story about where he came from and where he lived did not add up, his encounter with the police could no longer be characterized as a general inquiry regarding the smell of marijuana or Mr. Smith’s identity. Given that Mr. Doherty had pending robbery charges, it was entirely reasonable for the police to inquire as to the identities of all the individuals in his company, in order to determine if any of them were people with whom he was not permitted contact pursuant to his bail. But once the officers believed that Mr. Smith was lying about his identity, the character of his encounter with the police changed. He was no longer being asked the same general questions as the others. He was singled out for a focussed investigation of suspected false information about his identity and address. He was asked to leave the vehicle for officer safety reasons among others, and while outside the vehicle, he was rigorously questioned. He became impatient, upset, and belligerent. He wanted to leave, and he was not told that he could leave. The very officers, who protested in court that right up until he was told that he was detained, he could have left, did not tell him he could leave. If he was really free to leave, they should have told him. His impatience, belligerence, and desire to leave should have signalled to the officers that their conduct may be having a coercive effect on him. If it were truly their view that he was free to leave, then according to paragraph 32 in Grant, they should have informed Mr. Smith in unambiguous terms that he was under no obligation to answer questions and was free to go. They failed to do this, and it should be obvious to any reasonable person that Mr. Smith felt he could not leave. »

R. c. Côté, 2008 QCCS 3749 (CanLII), [2008] J.Q. No. 7951, par. 225, conf. à 2011 CSC 46 (CanLII), [2011] 3 R.C.S. 215 :

« On lui a posé ces questions tout en lui cachant soigneusement qu’on savait que M. Hogue avait une blessure par balles à la tête. Cette attitude, les questions posées, les vérifications effectuées dans la maison et à l’extérieur de celle-ci démontrent clairement que “l’enquête ne se faisait pas dans le seul but de recueillir de l’information, mais visait à préciser la participation de [Mme Côté] à ce crime”. »

1269. R. c. Folker, 2016 NUCJ 22 (CanLII), [2016] N.J. No. 25, par. 29 (C.A. T.-N.) :

« Mr. Folker’s July statements are recordings of early police investigatory work in which Mr. Folker’s words can be fairly characterized to have been made in furtherance of his position that he did not know what happened to Ms. Shirran and that he wanted to help the police to find her. The police questioning of Mr. Folker, in these first of many interactions with him, was of a general nature, naturally touching on his relationship with Ms. Shirran, possible reasons for her disappearance, and the efforts he made to contact her. In my view, the July 2010 interview was a far cry from “focussed interrogation amounting to detention”. There is nothing in the evidence of the way the police interacted with him during the three July interviews that would cause a reasonable person in his shoes to believe that he or she had no choice but to answer the police questions. All in all, the circumstances giving rise to Mr. Folker’s interviews with police in July, the nature of the police conduct and Mr. Folker’s personal circumstances do not support his contention that he was detained so as to engage his Charter rights. I conclude that the Judge did not err in determining that Mr. Folker was not detained when he gave those statements. »

1270. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 39. Voir sur ce point R. c. Seagull, [2015] B.C.J. No. 750, par. 58 (C.A. C.-B.) :

« Most significantly, it is apparent that the appellant was well-aware of the purpose of the interview, his potential jeopardy, and his rights in responding to the situation. He knew Cst. Cook was investigating allegations of sexual impropriety with the complainants. She told him he could be charged “right now”, and that a charge of sexual exploitation was a possible outcome. The appellant knew he could leave, that he had the right to remain silent, and that he was entitled to advice from a lawyer. He voluntarily came to the interview without legal assistance, however, and spoke to Cst. Cook for almost two hours, during which he carefully retained control of what he was prepared to say, before the interview was terminated at his request. »

1271. R. c. Koczab, 2013 MBCA 43 (CanLII), [2013] M.J. No. 160, par. 92 et 93 (C.A. Man.) :

« The trial judge found that the comment made by the officer was an implicit directive not to leave, which we must, for the purpose of this appeal, accept. It is also in accordance with the officer’s own evidence that, in his view, the accused was detained and would not have been allowed to leave if he attempted to do so. The trial judge was clear in confirming that, while he considered the officer’s decision to detain the accused as a factor, he did not see it as determinative of the issue. He assessed it in the context of the circumstances, which included the fact that the traffic stop had become a criminal investigation. By the time of the officer’s return to the vehicle, he was no longer conducting a traffic stop, but was involved in a drug investigation. He had already called for back-up as he would be detaining or arresting the accused.

In my view, a reasonable person, having been questioned aggressively on issues relating to drug convictions and whether he was currently involved in drug trafficking, having previously been told he was free to go, but then indirectly told to stay where he was, would likely conclude that he was not free to go and had to comply with that directive. It would take a brave soul in the circumstances to defy the state actor and go merrily on his way. He would, no doubt, soon be involved in a police chase. »

Ménard c. R., [2007] J.Q. No. 2816, par. 6 (C.A.) :

« En effet, la rencontre a duré près de six heures et l’appelant, s’il n’était qu’un témoin lorsque la rencontre a débuté, est clairement devenu un suspect au cours de l’interrogatoire lorsqu’il a révélé avoir accompagné un dénommé Ouellette pour voler la victime et qu’il décrit les coups portés à celle-ci par ce même individu. En outre, certaines questions du policier à l’appelant, par exemple :

– Est-ce que Jean-Guy Ouellette a parlé d’un plan dans l’éventualité où il y aurait quelqu’un dans la maison ?

– As-tu participé de quelque façon que ce soit à tuer l’homme qui se trouvait sur les lieux lors de ce vol, soit en le tenant ou soit en le frappant ?

illustrent bien que l’enquête ne se faisait pas dans le seul but de recueillir de l’information, mais visait à préciser la participation de l’appelant à ce crime alors que les policiers savaient déjà, à ce stade de l’enquête, que la victime avait été battue à mort à son domicile. »

1272. R. c. Way, 2011 NBCA 92 (CanLII), [2011] A.N.-B. No. 335, par. 37 (C.A. N.-B.) :

« L’accident signalé au 911 avait occasionné à un homme une blessure par arme blanche dont il devait mourir par la suite. Toute personne raisonnable se serait attendue à ce que, en pareilles circonstances, la police veuille enquêter sur l’”accident”. Il ne s’agissait pas ici de policiers fournissant une aide générale, assurant simplement le maintien de l’ordre ou menant une enquête générale sur un incident particulier, mais d’enquêteurs tenant la mort de M. Richard pour suspecte. Toute autre caractérisation serait absurde. Il n’est guère habituel que quelqu’un se perce le cœur en s’empalant sur un couteau. Les policiers savaient que seuls deux adultes se trouvaient dans la maison quand M. Richard avait été blessé et devaient forcément s’intéresser à Mme Way dans le cadre d’une enquête ciblée. Peut-être serait-il légitime de caractériser différemment les premières démarches des agents, sur les lieux de l’accident ou même à l’hôpital, mais le fait est que la police s’est livrée, au poste, à une enquête ciblée qui touchait Mme Way. Si la police avait simplement demandé à Mme Way une déclaration sur ce qui s’était produit, sans plus, il serait peut-être possible de caractériser différemment la situation. La police l’a toutefois questionnée à maintes reprises, pendant deux heures, ce qui indique que, dans les circonstances, Mme Way faisait l’objet d’une enquête ciblée. »

1273. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 32.

1274. R. c. Seagull, [2015] B.C.J. No. 750, par. 53, 55 et 57 (C.A. C.-B.) :

« The appellant’s strongest point is that Cst. Cook had grounds to arrest him and instead deliberately chose to interview him without advising him of his right to counsel in the hope of obtaining a confession. He is correct in saying this placed him in a state of potential legal jeopardy. The question, however, is whether a reasonable person, viewing the interaction as a whole, would have concluded the appellant was deprived of his choice to cooperate with the police.

There is no question that the appellant was the subject of precisely focussed suspicion, but this alone does not turn an encounter into a detention. What matters is the manner in which the police interacted with the suspect : Grant at para. 41.

While one of Cst. Cook’s objectives was undoubtedly to obtain inculpatory admissions, this was not the sole purpose of the interview. She testified that in her experience cases of sexual assault often have two sides to the story and so she wished to discover the appellant’s version of events. Consent was a real issue, given the boys’ ascending ages over the four years of the alleged sexual activity and, contrary to the appellant’s submission, Cst. Cook attempted to explore this with the appellant, as well as whether the sexual acts had occurred at all. I am accordingly satisfied there is evidentiary support for the trial judge’s conclusion that legitimate areas of inquiry remained and the interview had a valid investigatory purpose. »

1275. R. c. Hall, 2004 CanLII 46216 (ON CA), [2004] O.J. No. 5007, par. 22 (C.A. Ont.) :

« Counsel for the appellant contends that although the appellant was not physically restrained and felt no compulsion to go with the police, he was detained because the police had the authority to detain him under the warrants and intended to exercise that authority if the appellant did not cooperate. I see no reason in policy or logic to extend the concept of detention to situations in which the police have the authority to detain an individual, choose not to exercise that authority, and instead permit an individual to choose whether to voluntarily accede to a request from the police. If detention is to have any meaning, it must involve the exercise of some power by a state authority over an individual’s liberty, or the reasonable apprehension of the exercise of such power. Here, for tactical reasons, the police deliberately chose not to exercise that power and set about to avoid detaining the appellant. The appellant’s decision to go with the police made it unnecessary to detain him. »

Voir également R. c. Makhmudov, [2007] A.J. No. 847, par. 16 (C.A. Alb.) :

« We cannot accept the appellant’s submission that the detention begins at the instance the police officer decides that a suspect will be arrested. We can postulate many scenarios where an application of that concept would lead to absurd results. To illustrate, one might consider a situation where the suspect admits to a killing while talking to a person he believes to be a new acquaintance – who is actually a police officer. On the appellants’ theory, once the admission of the killing is made and the undercover officer decides to arrest then, or at some future time, he must immediately, without further conversation, advise the suspect that he will be detained and of his Charter rights. He could not otherwise continue the conversation to inquire about the location of the body or a murder weapon. »

1276. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 32.

1277. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 44.

1278. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 45.

1279. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 47.

1280. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 42 :

« Prenons l’exemple d’une policière qui poserait sa main sur le bras d’un individu. Si ce geste dure, il pourrait fort bien amener une personne raisonnable à conclure que sa liberté de choisir entre collaborer ou non lui a été retirée, ce que ne ferait peut-être pas un effleurement, compte tenu des circonstances. Il faut cependant se rappeler qu’une situation peut évoluer rapidement et qu’un seul acte ou mot percutant peut induire une personne raisonnable à conclure qu’elle n’a plus le droit de choisir comment répondre à la situation. »

1281. R. c. Rémillard, [2009] J.Q. No. 8342, par. 148 et 149 :

« Cependant, lorsque ce dernier continue sa route d’un pas rapide pour se rendre à la porte d’entrée de son domicile, ignorant de ce fait la demande qui lui a été faite par le policier, et que l’agent Héroux applique alors ce qu’il appelle un contact physique avec l’accusé en lui prenant le bras, il y a détention de l’accusé car il est manifeste que ce dernier n’a pas le choix de s’arrêter ou pas et de répondre ou non aux questions du policier. »

1282. R. c. Gasse, [2013] J.Q. No. 17051, par. 49 :

« Dans la présente affaire, les faits démontrent que les policiers ont activé les gyrophares et ont immobilisé leur véhicule dans l’entrée, en bloquant ainsi l’accès. Ils se dirigent directement vers les deux individus qui se trouvent à l’extérieur sur un terrain privé. »

St-Germain c. R., [2017] J.Q. No. 12044, par. 44-46 :

« Les policiers ont le droit de s’approcher d’un véhicule automobile stationné dans un lieu public pour faire une vérification de routine dans le cadre de leurs pouvoirs généraux d’agents de la paix, en autant que la personne vérifiée soit libre de répondre ou de quitter.

Par contre, positionner le véhicule patrouille pour empêcher le véhicule d’un individu de quitter et utiliser des lumières à haute intensité (take down) pour en éclairer l’intérieur constituent une détention pour fins d’enquête qui n’est pas autorisée en l’absence de motifs raisonnables de soupçonner que l’individu est relié à une infraction criminelle, à moins qu’elle ne soit justifiée par la législation provinciale relative au contrôle routier.

En l’espèce, les policiers ne sont pas intervenus en vertu du Code de la sécurité routière. Ils enquêtaient une information anonyme qui ne leur donnait aucunement des motifs raisonnables et probables de soupçonner que M. St-Germain était relié à une infraction criminelle. Ils n’étaient pas autorisés à l’empêcher de quitter les lieux en lui bloquant l’accès pour sortir. Il s’agit d’une détention illégale. »

Voir également R. c. Simard, [2010] J.Q. No. 6293, par. 12-13 (C.A.); R. c. Thompson, [2020] O.J. No. 1757, par. 58 (C.A. Ont.) :

« While the police did not engage in physical contact with the appellant before his arrest, their physical proximity in blocking his car would have created “an atmosphere that would lead a reasonable person to conclude that the police were taking control of the situation and that it was impossible to leave” : Le, at para. 50. »

1283. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 49 :

« Deux autres policiers se sont approchés, ont montré leur insigne et ont tactiquement pris une position antagonique derrière l’agent Gomes. La situation avait évolué, et M. Grant était personnellement devenu la cible de soupçons, comme le prouve la conduite des agents. Les questions, qui visaient d’abord à contrôler l’identité de l’appelant, ont alors eu pour objet de déterminer s’il “avait quelque chose qu’il ne devait pas avoir”. À ce moment, le contact relevant de services de police communautaire est devenu un interrogatoire visant à obtenir des renseignements incriminants dans une situation où l’appelant était bel et bien contrôlé par les policiers. Même si l’agent Gomes s’est montré respectueux en posant ses questions, l’interpellation était intrinsèquement intimidante. En outre, la jeunesse et l’inexpérience de M. Grant ont sans aucun doute accentué l’inégalité du rapport de force. L’ordre adressé à M. Grant de garder les mains devant lui, qui n’est pas déterminant en soi, a été suivi de l’arrivée de deux autres policiers qui ont sorti leur insigne et de questions procédant de soupçons dont M. Grant était la cible. »

1284. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 50 :

« Rien dans la preuve ne permet de conclure que les policiers ont eu un contact physique avec les jeunes hommes. Il y avait toutefois proximité physique : après l’entrée des policiers dans la cour arrière, huit personnes se trouvaient dans un petit espace. Chacun des policiers s’est placé de façon à pouvoir interroger les jeunes en question séparément. Le juge Lauwers a fait remarquer que les policiers se sont placés de manière à bloquer la sortie. Ce type de proximité physique délibérée dans un espace restreint crée une ambiance qui amènerait une personne raisonnable à conclure que la police prenait le contrôle de la situation et qu’il était impossible de partir. »

1285. DPCP c. Roy, [2014] J.Q. No. 7150, par. 20 :

« À ce moment, ils décident d’intervenir en s’approchant du véhicule, en actionnant les gyrophares et en descendant de leur véhicule, se rendant chacun de leur côté. »

1286. R. c. Spence, [2010] J.Q. No. 29814, par. 57 :

« Or, dans la mesure où la Mercedes était déjà stationnée sur un terrain commercial lorsque le constable Deveau a pris place debout à côté de la conductrice, et dans la mesure où l’auto-patrouille n’était pas positionnée de façon à l’empêcher de quitter, ni le véhicule, ni la conductrice n’ont alors été “interceptés” au sens de la Code du sécurité routière ou selon le sens commun du mot : madame Spence n’a en effet jamais été contrainte d’immobiliser son véhicule, ou de garder son véhicule immobilisé, contre sa volonté en raison d’un ordre donné par un agent de la paix. »

1287. R. c. Laroche, [2015] J.Q. No. 2443, par. 5 :

« Le policier immobilise alors le véhicule de patrouille et s’adresse à M. Roy-Dearden pour lui demander ce qu’il fait là, loin de chez lui; ce dernier est en état d’ébriété “très avancé” de même que son compagnon, le requérant, qui porte un sac ressemblant à une taie d’oreiller sur son épaule. »

1288. R. c. Dault, [2010] J.Q. No. 5939, par. 28 :

« Quatrièmement, le véhicule de l’intimé était à l’arrêt lorsque les policiers l’ont aperçu, puis s’en sont approchés à pied pour effectuer une vérification. Le véhicule des policiers, gyrophares éteints, n’était pas stationné de manière à empêcher le départ du véhicule de l’intimé. En droit, les policiers n’ont pas intercepté l’intimé ou son véhicule. Il serait aussi difficile de prétendre qu’une personne raisonnable conclurait que dès lors la détention de l’intimé et du passager s’est cristallisée au sens de l’arrêt R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460. »

1289. R. c. Fadel, [2015] J.Q. No. 6909, par. 40 (C.A.) :

« Dans notre dossier, l’intervention des policiers se fait en deux étapes, si je puis dire. Première étape, les policiers s’approchent de l’intimé dans les circonstances suivantes. L’intimé sort de la banque, il parle au téléphone. Il a l’air nerveux, ce qui attire l’attention des policiers et les autorise à interagir avec lui, comme la juge de première instance en convient. L’intimé se dirige vers le fond du stationnement, mais il n’y a pas de voiture stationnée. Cela amène les policiers à aller vérifier ce qui se passe de plus près en s’approchant de l’intimé. »

1290. R. c. Spence, [2010] J.Q. No. 29814, par. 74.

1291. R. c. Spence, [2010] J.Q. No. 29814.

1292. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 51.

1293. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 41 :

« Même si une telle conduite est jugée compatible avec une crainte d’intrusion, l’observateur raisonnable comprendrait que si les policiers voulaient simplement se renseigner, la hauteur de la clôture permettait pleinement à ceux-ci d’interagir avec les jeunes sans avoir besoin de pénétrer sur les lieux. Les policiers auraient pu tout simplement poser leurs questions en restant de l’autre côté de la clôture sans que soit diminuée pour autant leur capacité de voir les jeunes en question et d’entendre leurs réponses. Ils sont plutôt entrés dans la cour arrière sans obtenir de consentement, et sans objectif apparent ou déclaré, et ont immédiatement pris contact avec les occupants dans des conditions qui démontraient que ces derniers n’étaient pas, dans les faits, libres de partir. »

1294. R. c. Moran, 1987 CanLII 124 (ON CA), [1987] O.J. No. 794 (C.A. Ont.) :

« I venture to suggest that in determining whether a person who subsequently is an accused was detained at the time he or she was questioned at a police station by the police, the following factors are relevant. I do not mean to imply, however, that they are an exhaustive list of the relevant factors nor that any one factor or combination of factors or their absence is necessarily determinative in a particular case. These factors are as follows :

1. The precise language used by the police officer in requesting the person who subsequently becomes an accused to come to the police station, and whether the accused was given a choice or expressed a Preference that the interview be conducted at the Police station, rather than at his or her home;

2. Whether the accused was escorted to the police station by a police officer or came himself or herself in response to a police request;

3. Whether the accused left at the conclusion of the interview or whether he or she was arrested;

4. The stage of the investigation, that is, whether the questioning was part of the general investigation of a crime or possible crime or whether the police had already decided that a crime had been committed and that the accused was the perpetrator or involved in its commission and the questioning was conducted for the purpose of obtaining incriminating statements from the accused;

5. Whether the police had reasonable and probable grounds to believe that the accused had committed the crime being investigated;

6. The nature of the questions : whether they were questions of a general nature designed to obtain information or whether the accused was confronted with evidence pointing to his or her guilt;

7. The subjective belief by an accused that he or she is detained, although relevant, is not decisive, because the issue is whether he or she reasonably believed that he or she was detained. Personal circumstances relating to the accused, such as low intelligence, emotional disturbance, youth and lack of sophistication are circumstances to be considered in determining whether he had a subjective belief that he was detained. »

1295. R. c. Bear, [2016] S.J. No. 613, par. 10 :

« Constable Olson confirmed that he advised Mr. Bear that he was being asked to provide a voluntary statement; that Mr. Bear was not required to provide the statement; that Mr. Bear could leave at any time and that Constable Olson would drive Mr. Bear to wherever he wanted. »

R. c. O’Leary, [2015] O.J. No. 974.

1296. R. c. Kuchta, [2014] O.J. No. 6588.

1297. R. c. Newman, [2011] N.J. No. 457, par. 79 et 81 :

« Mr. Newman asked if he could give them a statement at his parents’ house and they said no, it would be better if they went to headquarters. Mr. Newman asked if he could take his own car and the police said it would be better if he accompanied them in their car. I accept Mr. Newman’s uncontradicted testimony on these points.

I find that the police did not give Mr. Newman a choice to either come with them or to arrange his own transportation. It was their intention that he be brought to headquarters in their company and that he would from that point on be separated from others until he was questioned. Mr. Newman was not given any reason for this. Once seated in the police car, Constable Warren started questioning him. Mr. Newman was driven in the back seat of the unmarked police car with the two officers, Normore and Warren, in front. »

R. c. Gayle, 2013 ONSC 5282 (CanLII), [2013] O.J. No. 3770, par. 8 :

« Mr. Gayle was transported to the station in a police cruiser. This was unlike his friend Dave, who as a witness went to the station in his own vehicle. Mr. Gayle sat in the back of the cruiser which was locked, and he was transported separately from Mrs. Gayle, Kashra and Fedrick, Jr. At the station, he was taken directly to the interview room, where he was videotaped and observed from the moment of his arrival. He was in the interview room for about 12 hours except to use the washroom. »

1298. R. c. Gayle, 2013 ONSC 5282 (CanLII), [2013] O.J. No. 3770.

1299. Charbonneau c. R., [2011] J.Q. No. 21885, par. 106 :

« De l’ensemble de ces témoignages, le Tribunal retient qu’en aucun temps les policiers ont refusé à Charbonneau la permission de quitter le poste de police. Il demandait s’il pouvait quitter et il acceptait d’y demeurer lorsqu’on lui expliquait que les démarches n’étaient pas terminées. »

1300. R. c. Taylor, [2012] M.J. No. 51; Charbonneau c. R., [2011] J.Q. No. 21885, par. 119 :

« Troisièmement, vu le statut de témoin important de Charbonneau plutôt que de suspect, les policiers sont allés au-delà de leur obligation légale en l’avisant qu’il pouvait communiquer avec un avocat et qu’il était libre de ne pas collaborer avec l’enquête policière. À tout moment ils ont agi équitablement envers Charbonneau. Ils prennent le soin de consulter un procureur-conseil pour s’assurer du statut de Charbonneau afin de respecter leurs obligations constitutionnelles. »

1301. R. c. Sharples, [2015] O.J. No. 4773, par. 23 et 24 :

« The determination as to when a person becomes a “suspect” and is no longer simply a “person of interest” has been the subject of much discussion. In R. v. Morrison, [2000] O.J. No. 5733, Trafford J. wrote at p. 26 : “A person is a ‘suspect’ when, objectively viewed, the information collected during an investigation tends to implicate him/her in the crime. It is an objective test, not a subjective one, that is to be applied to the totality of the information.”

Similarly, in the Worrall decision, Watt J. at para. 104 expressed the view that once a police officer had information that “would alert any reasonably competent investigator to the realistic prospect” that the death of the deceased may have been associated with an unlawful act committed by the person being questioned, the officer should caution that person. »

1302. R. c. Pomeroy, 2008 ONCA 521 (CanLII), [2008] O.J. No. 2550, par. 36 et 37 (C.A. Ont.) :

« At the time of the interview, the police were still in the early stages of their investigation. The DNA, footprint, and fingerprint analyses were still unavailable. While the appellant was a person of interest to the police, they had no basis for considering him to be a suspect or for telling him that he was one. In fact, according to P.C. Wilton, at that time there was “absolutely no information to implicate anyone as being a suspect”, nor was there evidence to support the conclusion that a crime had even occurred.

The focus of the interview was to gain general information as part of the investigation of the “suspicious death”; the questioning was not conducted for the purpose of obtaining incriminating statements from the appellant. In many ways, the nature of the questioning was similar to that in R. v. Caputo (1997), 1997 CanLII 1636 (ON CA), 114 C.C.C. (3d) 1 at 11-12 (Ont. C.A.), in which Rosenberg J.A. upheld the trial judge’s determination that the appellant had not been detained in violation of his s. 10(b) rights when he made a statement to the police. As in that case, the questioning here appears to have been general in nature and directed toward obtaining a witness statement from the appellant. At no point during the interview did the police confront the appellant with evidence pointing to his guilt for sexual assault or murder. »

1303. R. c. Sharples, [2015] O.J. No. 4773, par. 41 :

« Accordingly, I find that Sharples was a suspect in a criminal investigation into the disappearance of Shana at the time of interview number two on January 31, 2011. Therefore, a police officer should have cautioned Sharples prior to interview number two and prior to Sharples making any further statement to any police officer. »

1304. R. c. Wong, 2015 ONCA 657 (CanLII), [2015] O.J. No. 5049, par. 45-48 (C.A. Ont.) :

« The circumstances giving rise to the encounter : The encounter began as a consensual one, initiated by the appellant. It soon shifted, however, into a drug-related investigation centred on her apartment. This would cause a reasonable person to believe that the officer was no longer addressing her as the victim of a car theft, but rather as a potential suspect in his drug investigation.

The nature of the police conduct : The officer’s conduct became increasingly authoritative. He demanded an explanation for the presence of the drug paraphernalia : “So what’s going on here ?” He challenged her explanation : if the scale was for baking, where were her supplies ? He told her that she was in possession of the drug paraphernalia and that he could arrest her. As in Grant, the officer took control of the appellant and sought to obtain information from her.

The characteristics and circumstances of the appellant : The appellant was an apparently naïve young woman. She was alone, in her small apartment, with a uniformed police officer who was undertaking a drug investigation.

She told the officer she was frightened, as she undoubtedly was. As in Grant, the encounter, as it developed, was inherently intimidating.

In my view, the appellant was detained when, in furtherance of his drug investigation, the officer told her that he could arrest her based on the possession of drug paraphernalia and asked her for an explanation. A reasonable person in the appellant’s position, on being told that she could be arrested, would conclude that she was not free to go. »

1305. R. c. Thibodeau, [2015] J.Q. No. 7418, par. 21, citant les commentaires de la juge en chef McLachlin et de la juge Charron dans R. c. Grant, par. 39 : « Répétons-le, à moins que les policiers n’informent la personne qu’elle n’est pas tenue de répondre aux questions et qu’elle est libre de partir, il se peut fort bien que la détention se soit cristallisée. »

1306. R. c. Eaton, [2012] O.J. No. 4576, par. 22.

1307. R. c. Way, 2011 NBCA 92 (CanLII), [2011] A.N.-B. No. 335, par. 40 :

« Je signale au passage que des situations pourront se présenter où la police aura informé une personne qu’elle n’est pas tenue de répondre aux questions et qu’elle est libre de partir, et où les tribunaux concluront néanmoins à une contrainte psychologique. Il sera certainement beaucoup plus difficile, toutefois, d’établir la détention lorsqu’on aura véritablement communiqué cette information à la personne. »

1308. R. c. Pelletier, [2018] J.Q. No. 9730, par. 168, 171 et 172 :

« Les questions des enquêteurs n’étaient donc pas innocentes : elles visaient à établir la participation de Louis Pelletier dans la mort suspecte de Julie Morrisson.

La preuve révèle donc que les policiers menaient une enquête criminelle en s’entretenant avec un suspect “évident” lorsqu’ils rencontrent Louis Pelletier le 18 juillet 2013, bien que l’enquête était toujours en cours et que plusieurs éléments factuels demeuraient encore à confirmer.

Louis Pelletier n’a pas fait un choix éclairé de collaborer à l’enquête le 18 juillet 2013 et il est plus que probable qu’il ait ressenti une contrainte psychologique de privation de liberté au sens de la Charte. La preuve démontre de façon prépondérante qu’il a cru raisonnablement qu’il n’avait pas le choix d’agir autrement. »

1309. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 64.

1310. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 42.

1311. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 65.

1312. R. c. Newman, [2011] N.J. No. 456, par. 95.

1313. R. c. Way, 2011 NBCA 92 (CanLII), [2011] A.N.-B. No. 335, par. 38 :

« Comme le juge du procès, j’estime qu’une personne raisonnable, dans la situation de Mme Way, n’aurait pas cru qu’elle était détenue lorsque les agents, chez sa mère, lui ont demandé de se présenter au poste de police. En revanche, le point de vue d’une personne raisonnable aurait changé du tout au tout si, à son arrivée au poste, les agents l’avaient emmenée dans un secteur à accès restreint, l’avaient fait entrer dans une salle d’entrevue dont ils auraient refermé la porte, et lui avaient demandé de frapper à la porte s’il lui fallait ou si elle voulait quelque chose. La liberté de partir qu’aurait perçue une personne raisonnable aurait alors été sensiblement moindre. Si la personne raisonnable avait été, en outre, une jeune personne dépourvue du discernement nécessaire, à qui les policiers auraient affirmé que sa mère ne pouvait l’accompagner lors de l’entrevue et à qui ils auraient indiqué qu’elle ne pourrait partir tant que l’entrevue ne serait pas terminée, elle aurait manifestement eu la perception d’une forte entrave à la jouissance de sa liberté. »

1314. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 97.

1315. R. c. Mann, 2004 CSC 52 (CanLII), [2004] 3 R.C.S. 59.

1316. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 131, citant R. c. Mann, 2004 CSC 52 (CanLII), [2004] 3 R.C.S. 59, par. 34 :

« La détention doit être jugée raisonnablement nécessaire suivant une considération objective de l’ensemble des circonstances qui sont à la base de la conviction du policier qu’il existe un lien clair entre l’individu qui sera détenu et une infraction criminelle récente ou en cours. La question des motifs raisonnables intervient dès le départ dans cette détermination, car ces motifs sont à la base des soupçons raisonnables du policier que l’individu en cause est impliqué dans l’activité criminelle visée par l’enquête. »

Voir également Fleming c. Ontario, [2019] A.C.S. No. 45, par. 50 :

« Par exemple, la Cour a jugé dans l’arrêt Mann qu’il existe un pouvoir de détention aux fins d’enquête en common law lorsque : a) le policier a des motifs raisonnables de soupçonner qu’il existe un lien clair entre l’individu et une infraction criminelle commise récemment ou en cours; et b) la décision de détenir une personne est raisonnable, suivant une considération objective de l’ensemble des circonstances (par. 34). »

Voir enfin R. c. Sanscartier, [2019] J.Q. No 5132, par. 16 (C.A.) :

« Une détention aux fins d’enquête exécutée conformément aux pouvoirs conférés par la common law ne porte pas atteinte au droit prévu à l’article 9 de la Charte. Pour justifier une détention aux fins d’enquête, le policier doit avoir des motifs raisonnables de soupçonner que l’ensemble des circonstances démontre un lien clair entre l’individu détenu et une infraction criminelle récente ou en cours. En l’absence de tels soupçons raisonnables, la détention devient implicitement arbitraire et contrevient ainsi à l’article 9 de la Charte. »

1317. R. c. Mann, 2004 CSC 52 (CanLII), [2004] 3 R.C.S. 59, par. 45; Langlois c. R., [2011] J.Q. No. 9033, par. 41 (C.A.) :

« Le test consiste donc à vérifier si l’intervention initiale des policiers est fondée sur des “soupçons raisonnables” ou, dit autrement, si les policiers ont des motifs raisonnables de soupçonner que les individus en cause sont impliqués dans une activité criminelle et donc, d’enquêter. » (Soulignement de la Cour)

1318. R. c. Sanscartier, [2019] J.Q. No 5132, par. 17 (C.A.) :

« La seule croyance subjective du policier ne suffit pas. La norme des soupçons raisonnables exige en effet que les soupçons soient fondés sur des faits objectivement discernables. L’analyse doit être faite du point de vue d’une personne raisonnable “mise à la place de l’agent de police”. De tels soupçons doivent être évalués à la lumière de l’ensemble des circonstances. »

1319. R. c. Mann, 2004 CSC 52 (CanLII), [2004] 3 R.C.S. 59, par. 47.

1320. R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460.

1321. R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460, par. 9.

1322. R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460, par. 9.

1323. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 37 et 39 :

« Une autre situation dont il est souvent question est celle où les policiers abordent les personnes qui se trouvent sur les lieux d’un accident ou d’un crime afin de déterminer si elles ont été témoins de l’événement et d’obtenir des renseignements susceptibles de les aider dans leur enquête. Même si beaucoup d’individus sont disposés à aider la police, il est clairement établi en droit que, sous réserve de dispositions précises qui s’appliquent exceptionnellement, les citoyens sont libres de quitter les lieux : R. c. Grafe (1987), 1987 CanLII 170 (ON CA), 36 C.C.C. (3d) 267(C.A. Ont.). Compte tenu de l’existence d’un tel droit généralement compris dans de telles circonstances, une personne raisonnable ne penserait pas avoir été privée de son droit de choisir de collaborer ou non avec la police. Cette conclusion est valable même si la personne se sent tenue de collaborer par obligation morale ou par devoir civique. La Cour d’appel de l’Ontario a fait allusion à ce concept dans Grafe, où le juge Krever a écrit ce qui suit à la p. 271 :

[Traduction] Le droit reconnaît depuis longtemps, même en l’absence d’obligation légale, l’existence d’un devoir moral et social de tout citoyen de répondre aux questions qui lui sont posées par les policiers et de leur prêter ainsi assistance : voir, par exemple, les motifs du lord juge en chef Parker dans Rice c. Connolly, [1966] 2 All E.R. 649, p. 652. L’existence de cette obligation morale ou sociale habilite implicitement un policier à poser des questions même, selon moi, quand il n’a aucune raison de croire qu’une infraction a été commise. Dans de telles circonstances, se faire poser des questions ne peut être considéré comme une privation de liberté ou de sécurité.

[...]

L’application efficace de la loi dépend largement de la coopération des membres du public. Les policiers doivent avoir la capacité d’agir de façon à favoriser cette coopération, et non à la décourager. »

1324. R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460, par. 28.

1325. Voir sur ce point Vinet c. R., [2019] J.Q. No. 1865, par. 33 et 34 (C.A.) :

« Ici, la juge retient que la situation était difficile pour la policière, les qualifiant de “circonstances émotivement difficiles”, que la policière se souciait autant de la santé que des droits de l’appelant : jugement, par. 77 et 78. Lorsque la policière arrive sur les lieux, c’est un état d’urgence, elle s’adresse à l’appelant “à titre de personne blessée dans un accident” : jugement, par. 87.

La juge conclut donc que les motifs subjectifs de la policière se sont fixés plus tard, au moment où les ambulanciers prennent en charge l’appelant. L’argument de l’appelant voulant que la détention se soit cristallisée dès que la policière s’approche de lui est mal fondé. Je ne suis pas convaincu que la juge commet une erreur de droit, après avoir entendu le témoignage de la policière sur le moment où elle acquiert sa croyance subjective, c’est-à-dire une fois l’appelant remis entre les mains des ambulanciers. Le moment de détention, dans les circonstances, prenait naissance peu après ce moment. »

1326. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 38 :

« [I]l est impossible d’affirmer que la police “détient” au sens des art. 9 et 10 de la Charte, tout suspect qu’elle intercepte aux fins d’identification ou même d’interrogatoire. »

1327. R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460, par. 29.

1328. R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460, par. 32.

1329. R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460, par. 32.

1330. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353.

1331. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 4.

1332. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 5.

1333. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 49.

1334. R. c. Boisclair, [2012] N.S.J. No. 202.

1335. R. c. Griecken, [2009] O.J. No. 5035, par. 66 et 67 :

« It is important to note that when the officers arrived at the scene they believed that Mrs. Griecken had been stabbed by Mr. Griecken. However, they did not know that the man they found on the steps was Mr. Griecken. Cst. Johnston asked “what happened ?” in an effort to ascertain what was going on. All of the officers testified that they believed that the individual on the steps was a victim, not an aggressor. This belief was borne out by the fact that they left him alone on the steps when they entered the building and drew their firearms before entering the apartment, fearing that Mr. Griecken was inside with a knife.

When the officers returned to the steps of the apartment building after finding the body of Mrs. Griecken, they were still trying to ascertain what had happened. Cst. Onstein asked Mr. Griecken who stabbed him, as did Cst. Duke when he arrived at the scene. These questions were in the nature of the general inquires envisaged by Deschamps J. at paras. 19-29 of R. v. Suberu, supra. It was not until after Mr. Griecken had made the statements about stabbing his wife and a decision had been made to arrest him, shortly before he was loaded into the ambulance, that he could be considered to be under detention. »

1336. R. c. Moran, 1987 CanLII 124 (ON CA), [1987] O.J. No. 794 (C.A. Ont.) :

« In determining whether a person, who subsequently becomes an accused, was detained at the time he was interviewed by the police, it is important to bear in mind that a police officer when endeavouring to discover whether or by whom an offence has been committed, is entitled to question any person, whether suspected or not, from whom he thinks useful information can be obtained. Although a police officer is entitled to question any person in order to obtain information with respect to a suspected offence, as a general rule, he has no power to compel the person questioned to answer. Moreover, he has no power to detain a person for questioning and if the Person questioned declines to answer, the police officer must allow him to proceed on his way unless he arrests him on reasonable and probable grounds : see R. v. Esposito (1986), 1985 CanLII 118 (ON CA), 24 C.C.C. (3d) 88 at 94 (Ont. C.A.); (leave to appeal to the Supreme Court of Canada refused February 24, 1986). »

1337. R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460, par. 30.

1338. P.G. c. R., [2020] J.Q. No. 3106 (C.A.).

1339. P.G. c. R., [2020] J.Q. No. 3106, par. 56 et 57 (C.A.) :

« Lors de l’arrivée des policiers à l’hôpital, ceux-ci ne peuvent confirmer la commission d’un acte criminel. Si le syndrome du bébé secoué est invoqué comme hypothèse afin de justifier l’état de l’enfant, personne n’est en mesure de l’affirmer puisque les examens médicaux ne sont pas terminés.

De plus, personne ne peut expliquer l’état de l’enfant. Personne n’a en effet été témoin de gestes déplacés de l’un des deux parents à l’égard de leur enfant. Les enquêteurs ne savent donc pas si un crime a été commis malgré que cette thèse soit envisagée. Leur présence sur les lieux est donc dans ce but précis : de faire la lumière sur les événements. Ils mènent donc une enquête générale plutôt que particulière. C’est d’ailleurs à cette conclusion que le juge de première instance arrive. La Cour lui doit à cet égard une déférence à moins d’une erreur manifeste et déterminante, ce qui n’est pas le cas ici. »

1340. P.G. c. R., [2020] J.Q. No. 3106, par. 58-60 (C.A.) :

« Qui plus est, dans l’hypothèse où il serait possible d’affirmer que les enquêteurs avaient effectivement des soupçons à l’égard de l’appelant quant à la commission de l’infraction, les circonstances entourant la rencontre ne tendent pas vers une conclusion qui établirait un état de détention.

En effet, l’enquêteur Veillette a témoigné qu’il avait indiqué, dès le début de l’entretien, les raisons pour lesquelles les policiers rencontraient l’appelant. Les policiers lui ont ainsi mentionné en début de rencontre qu’ils le rencontraient puisque les médecins soupçonnaient un cas de maltraitance d’enfant et qu’ils étaient sur les lieux pour tenter de faire la lumière sur les événements. Ils ont également indiqué à l’appelant qu’il était libre de quitter ou de répondre à leurs questions. Ce témoignage n’est pas contredit.

Lors des pauses, l’appelant était par ailleurs libre d’aller où bon lui semblait et aucun enquêteur ne l’accompagnait alors. De plus, il ressort de la preuve que les enquêteurs n’ont en aucun cas créé une atmosphère intimidante ou oppressante, laissant parfois l’appelant seul pendant de longues périodes de temps. Selon les témoignages des deux enquêteurs, les questions posées sont demeurées générales, visant véritablement à comprendre l’état de l’enfant. Il n’est donc pas possible d’affirmer que les questions posées étaient l’objet d’une ruse destinée à incriminer l’appelant. »

1341. P.G. c. R., [2020] J.Q. No. 3106, par. 55 (C.A.). Voir également au par. 51 :

« Ainsi, même le fait d’interroger un individu n’implique pas nécessairement une détention. Il est en effet généralement admis qu’un interrogatoire comportant des questions d’ordre général ou préliminaires ne donne pas lieu à une détention, alors que lorsque celui-ci porte sur des questions particulières et ciblées, la personne pourra se considérer comme détenue. »

1342. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 41 :

« Comme nous l’avons vu précédemment, le fait qu’un policier patrouilleur pose des questions générales ne constitue pas une menace à la liberté de choix. Par contre, poser ce type de questions peut conduire à des situations où les préoccupations générales de police communautaire cèdent le pas aux soupçons à l’égard d’un individu en particulier. Les soupçons ne transforment pas en soi le contact en détention. Ce qui compte, c’est la façon dont la police, compte tenu de ces soupçons, a interagi avec l’individu. »

1343. R. c. Spence, [2010] J.Q. No. 29814, par. 73.

1344. R. c. Spence, [2010] J.Q. No. 29814, par. 10.

1346. R. c. Mann, 2004 CSC 52 (CanLII), [2004] 3 R.C.S. 59, par. 19.

1347. R. c. Fadel, [2015] J.Q. No. 6909, par. 40 (C.A.) :

« Dans notre dossier, l’intervention des policiers se fait en deux étapes, si je puis dire. Première étape, les policiers s’approchent de l’intimé dans les circonstances suivantes. L’intimé sort de la banque, il parle au téléphone. Il a l’air nerveux, ce qui attire l’attention des policiers et les autorise à interagir avec lui, comme la juge de première instance en convient. L’intimé se dirige vers le fond du stationnement, mais il n’y a pas de voiture stationnée. Cela amène les policiers à aller vérifier ce qui se passe de plus près en s’approchant de l’intimé. »

1348. Gagnon c. R., 2015 QCCA 1138 (CanLII), [2015] J.Q. No. 6206, par. 90 (C.A.) :

« S’il est vrai que tous les contacts entre les policiers et les citoyens ne génèrent pas à coup sûr une détention au sens de la Charte et que les policiers sont autorisés à aborder les citoyens sans qu’ils soient détenus, tel n’est pas le cas en l’espèce. Non seulement l’intention du policier MacKay était de détenir Gagnon et son passager, mais ses actions le confirment. »

1349. R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460, par. 23.

1350. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34.

1351. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 8.

1352. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 9.

1353. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 10.

1354. R. c. Mann, 2004 CSC 52 (CanLII), [2004] 3 R.C.S. 59, par. 19.

1355. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 28 :

« En l’espèce, il est admis que les jeunes hommes n’étaient pas “légalement tenu[s] de se conformer à un ordre ou à une sommation” des policiers, ce qui est important, car il en ressort que les jeunes concernés n’étaient pas légalement tenus de répondre aux questions posées par les policiers, de présenter une pièce d’identité ou de suivre les ordres reçus concernant la position de leurs mains. Les policiers n’étaient pas légalement autorisés à contraindre ceux-ci à faire ces choses. Par conséquent, l’analyse en l’espèce portera sur la deuxième forme de détention psychologique, soit sur la question de savoir si une personne raisonnable, mise à la place de l’appelant, se serait sentie obligée d’obtempérer et ne se serait pas sentie libre de partir quand les policiers sont entrés dans la cour arrière et ont pris contact avec les jeunes hommes. »

1356. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 115 et 116 :

« Accorder trop d’importance aux perceptions subjectives affaiblit les assises de l’adoption d’un critère objectif; il en existe au moins trois. Premièrement, comme notre Cour l’a conclu dans l’arrêt Grant, la nature objective de l’analyse permet aux policiers “de savoir quand il y a détention [...] [et, partant, de] s’acquitter des obligations qu’impose la Charte en ce cas et [...] [d’]accorder à la personne détenue les protections supplémentaires qui lui sont conférées” (par. 32). Deuxièmement, la nature objective de l’analyse permet d’assurer le maintien de la primauté du droit puisque les revendications seront toutes assujetties à la même norme. En d’autres termes, la norme objective permet de s’assurer que toutes les personnes seront traitées également et bénéficieront des mêmes protections garanties par la Charte sans égard à leurs propres seuils subjectifs de détention psychologique ou à leurs propres perceptions de leurs interactions avec les policiers. Autrement dit, la nature objective de l’analyse permet un certain niveau d’uniformité dans l’application de la Charte à la conduite policière. Troisièmement, et dans le même ordre d’idées, la nature objective de l’analyse tient compte du fait que certaines personnes seront incapables d’avoir des perceptions subjectives lorsqu’elles interagiront avec les policiers.

Par conséquent, l’analyse fondée sur l’art. 9 ne devrait pas porter principalement sur ce qui se passait dans l’esprit de l’accusé à un moment précis, mais plutôt sur la façon dont les policiers ont agi et, eu égard à l’ensemble des circonstances, sur la manière dont un tel comportement serait raisonnablement perçu. Conclure autrement impose au plaignant l’obligation d’évaluer correctement à quel moment il est détenu et à quel moment il ne l’est pas. Ce problème précis se pose en l’espèce. Dans son témoignage, M. Le a affirmé que la police ne lui avait pas permis d’entrer dans la maison et l’avait physiquement empêché de le faire. Si l’on accepte le récit détaillé des faits de M. Le, sa perception subjective, aussi fugace soit-elle, selon laquelle il pouvait entrer dans la maison était simplement erronée. De plus, si, comme le conclut notre collègue, la mise en détention a eu lieu lorsque l’agent a dit au jeune homme de garder ses mains bien en vue, la perception subjective de M. Le n’aurait pris naissance qu’après que la détention eut déjà commencé. Même si on admet qu’il peut y avoir des situations où la perception subjective de l’accusé est pertinente, ce n’est pas le cas en l’espèce. »

Voir également R. c. Thompson, [2020] O.J. No. 1757, par. 45 et 48 :

« This court has similarly highlighted that it is an error of law to approach psychological detention “largely as a subjective inquiry” : R. v. McSweeney, 2020 ONCA 2, at para. 35; see also R. v. Wong, 2015 ONCA 657, 127 O.R. (3d) 321, at paras. 26-28, 43.

[...]

The trial judge focussed on what the appellant subjectively perceived about the police presence, rather than what a reasonable person in his circumstances would conclude from the nature of the police interaction. Whether the appellant was detained, triggering the police’s Charter obligations, should not turn on whether the appellant saw the police in his rear-view mirror as they boxed him in (a subjective approach), but on whether a reasonable person in his circumstances would conclude that this police conduct effected a detention (an objective approach). »

1357. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 40 et 42 :

« Dans une telle situation, une personne raisonnable saurait seulement que trois policiers sont entrés sur une résidence privée sans être munis d’un mandat, sans obtenir de consentement et sans s’annoncer. Les agents se sont immédiatement mis à interroger les jeunes hommes sur qui ils étaient et ce qu’ils faisaient – il s’agissait de questions ciblées et précises qui auraient clairement indiqué à tout observateur raisonnable que la police s’intéressait aux jeunes hommes eux-mêmes (R. c. Wong, 2015 ONCA 657, 127 O.R. (3d) 321, par. 45-46; R. c. Koczab, 2013 MBCA 43, 294 Man. R. (2d) 24, par. 90-104, opinion du juge Monnin (dissident), adoptée dans 2014 CSC 9, [2014] 1 R.C.S. 138). De plus, ils ont exigé que les jeunes hommes présentent une pièce d’identité et leur ont donné des ordres, ce qui aurait clairement indiqué à un observateur raisonnable que la police prenait le contrôle des personnes se trouvant dans la cour arrière.

[...]

Indépendamment des intentions des policiers alors qu’ils s’approchaient de la cour arrière, ou de la légitimité de leurs objectifs d’enquête, une personne raisonnable ne percevrait pas leur entrée dans la cour comme une simple entrée dans l’exercice de leur fonction “d’assistance en cas de besoin et de maintien élémentaire de l’ordre” (Grant, par. 40). »

1358. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 47.

1359. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 50. Voir également aux par 51 et 56 :

« Il existe un rapport important entre le fait que l’interaction en question ait eu lieu dans une résidence privée et le mode d’entrée choisi par les policiers. La nature de l’intrusion de policiers dans un domicile ou dans une cour arrière sera raisonnablement perçue comme plus percutante, coercitive et menaçante que si pareil acte de l’État se produisait dans un lieu public. Les gens s’attendent à juste titre à ne pas être importunés par l’État dans leurs espaces privés. Il y a aussi, sur le plan pratique, la réalité que, lorsque les autorités prennent le contrôle d’un espace privé, comme une cour arrière ou une résidence, il n’existe souvent aucun autre endroit où se réfugier contre une autre intrusion forcée.

[...]

Une personne raisonnable percevrait le mode d’entrée choisi comme coercitif et intimidant. Deux policiers sont entrés immédiatement. Le fait qu’un troisième policier ait tout d’abord fait le tour du périmètre avant d’entrer en passant par-dessus la clôture donnerait à penser à la personne raisonnable que l’interaction avait un aspect tactique. En outre, une personne raisonnable interpréterait la décision de l’agent O’Toole d’entrer en passant par-dessus la clôture comme témoignant d’une certaine urgence. En pareilles circonstances, nous convenons avec le Scadding Court Community Centre intervenant pour dire que le recours à de telles tactiques par les policiers dans le but d’entrer dans une résidence privée témoigne de l’exercice d’un pouvoir et serait interprété comme tel par une personne raisonnable. »

1360. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 60

1361. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 64

1362. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 72 et 73. Voir également le par. 82 :

« Une personne raisonnable mise à la place de l’accusé est censée connaître l’incidence des relations interraciales sur l’interaction entre des agents de police et quatre hommes de race noire et un homme asiatique présents dans la cour arrière d’une maison en rangée faisant partie d’une coopérative d’habitation de Toronto. »

1363. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 97 :

« Nous n’hésitons pas à conclure que, même en l’absence de ces rapports très récents, nous sommes maintenant arrivés au point où les travaux de recherche montrent l’existence d’un nombre disproportionné d’interventions policières auprès des collectivités racialisées et à faible revenu (voir D. M. Tanovich, “Applying the Racial Profiling Correspondence Test” (2017), 64 C.L.Q. 359). C’est d’ailleurs dans ce contexte social plus large qu’il convient d’examiner l’entrée des policiers dans la cour arrière et l’interrogatoire de M. Le et de ses amis. Il s’agit là d’un autre exemple de l’expérience commune de jeunes hommes appartenant à des groupes racialisés, lesquels sont fréquemment pris pour cibles, appréhendés et appelés à répondre à des questions ciblées et familières. L’historique documenté des relations entre la police et les collectivités racialisées aurait eu une incidence sur les perceptions d’une personne raisonnable mise à la place de l’accusé. »

1364. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 121.

1365. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 129.

1366. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 131; R. c. Mann, 2004 CSC 52 (CanLII), [2004] 3 R.C.S. 59, par. 34 et 45.

1367. R. c. Barclay, [2018] O.J. No. 664, par. 28 (C.A. Ont.) :

« But all investigative detentions must be “brief” because the state interference with the individual’s liberty rests on a reasonable suspicion of criminal activity, a much lower standard than the reasonable and probable grounds needed for an arrest. The relatively low “reasonable suspicion” standard cannot constitutionally sustain a detention that is not “brief”. »

1368. R. c. Barclay, [2018] O.J. No. 664, par. 31 (C.A. Ont.) :

« The permitted duration of an investigative detention is case-specific. Some of the relevant factors include :

the intrusiveness of the detention. For example, handcuffing the suspect behind his or her back and placing the suspect in a police cruiser, or diverting the suspect from his intended path by taking him to the police detachment to continue the investigation, will generally be more intrusive of the suspect’s liberty interest than asking him questions at the point of initial detention. The more intrusive the detention is to the suspect’s liberty interest, the more closely its duration will be scrutinized.

the nature of the suspected criminal offence. If the suspected offense is not serious, the permitted duration will probably be at the shorter end of “brief”.

the complexity of the investigation. If the investigation is not complex, one would expect that police questioning of the suspect would not reasonably need to be lengthy, and the permitted duration will probably be at the shorter end of “brief”. However, if the investigation of the suspected criminal offence is complex, its complexity will only justify a longer permitted duration within the range of “brief” to the extent it is causally linked to the duration of the detention.

any immediate public or individual safety concerns. Immediate public or individual safety concerns may justify a permitted duration at the longer end of “brief”.

the ability of the police to effectively carry out the investigation without continuing the detention of the suspect. If there are other reasonable means of continuing the investigation without detaining the suspect, the continued detention of the suspect would likely render continued detention unconstitutional.

the lack of police diligence. For example, if a sniffer dog were immediately available, and yet the police detained the suspect for 20 minutes before employing the dog to confirm or refute their suspicion, then, depending on all of the other relevant factors, the interference with the suspect’s liberty interest as a result of the lack of police diligence might render the delay unconstitutional.

the lack of immediate availability of the required investigative tools. On the other hand, depending on all of the other relevant factors, if a sniffer dog were made available as soon as practicable and employed as soon as available, the same 20-minute detention might fall within the range of time that can be characterized as a “brief” detention. »

1369. [Notre traduction] R. c. Barclay, [2018] O.J. No. 664, par. 34 (C.A. Ont.).

1370. R. c. Dault, [2010] J.Q. No. 5939, par. 22.

1371. R. c. Spence, [2010] J.Q. No. 29814, par. 54-56.

1372. Desbiens c. R., [2016] J.Q. No. 8668, par. 23 et 24 :

« La situation d’un véhicule en mouvement est à différencier d’avec les différents cas traités par la jurisprudence alors que le véhicule est immobile ou encore lorsque la personne interpellée est un piéton. Dans de telles circonstances, il n’y a pas nécessairement une détention : selon chacun des cas, celle-ci débutera si et lorsque la liberté de circuler du citoyen se retrouve entravée.

Dans le cas d’une interpellation selon l’article 636, dès que l’immobilisation est requise par une signalisation adéquate, le conducteur doit modifier son agissement et se conformer à la demande de l’agent de la paix. Sa liberté est dès lors entravée. »

1373. R. c. Spence, [2010] J.Q. No. 29814, par. 55; R. c. Fafard, [2010] J.Q. No. 4768, par. 29 :

« Lorsqu’un policier intercepte une automobile, le conducteur est détenu puisque le policier exerce une contrainte physique qui prive l’accusé de l’exercice de son droit de circuler librement (R. c. Orbanski; R. c. Elias, 2005 CSC 37 (CanLII), [2005] 2 R.C.S. 3, par. 31). »

1374. R. c. Dedman, 1985 CanLII 41 (CSC), [1985] 2 R.C.S. 2.

1375. R. c. Dedman, 1985 CanLII 41 (CSC), [1985] 2 R.C.S. 2, par. 68.

1376. R. c. Hufsky, 1988 CanLII 72 (CSC), [1988] 1 R.C.S. 621.

1377. R. c. Hufsky, 1988 CanLII 72 (CSC), [1988] 1 R.C.S. 621, par. 4.

1378. R. c. Ladouceur, 1990 CanLII 108 (CSC), [1990] 1 R.C.S. 1257.

1379. R. c. Soucisse, [1994] J.Q. No. 544 (C.A.).

1380. R. c. Vinet, [2010] J.Q. No. 1439, par. 13 :

« Les tribunaux d’instance supérieure sont venus, à maintes reprises, affirmer le fait que les policiers ont le droit d’intercepter au hasard des véhicules automobiles. Par ailleurs, les agents de la paix doivent avoir un motif précis pour procéder à cette interception, lequel doit obligatoirement être relié à la sécurité routière. La vérification de la sobriété des conducteurs, de la validité du permis de conduire, de l’immatriculation, des assurances ainsi que de l’état mécanique du véhicule sont des motifs considérés comme étant valables. »

Sur les limites de ce pouvoir, voir R. c. Nakhal, [2011] J.Q. No. 9372, par. 25 :

« Généralement, elle peut faire cette vérification sans fouiller l’auto et il s’agit alors d’une fouille “plain view”. Cependant, rien dans le Code de la sécurité routière ne donne le pouvoir à un agent de la paix de procéder à une fouille pour voir si une auto est volée. Les limites strictes de l’article 636 permettent une interception pour vérifier la sobriété du conducteur, la validité du permis et des assurances et l’état mécanique du véhicule. Aucune autre fin n’est autorisée par cet article. L’enquête visant à vérifier si l’auto est volée est une enquête relative au Code criminel et ne vise aucunement la sécurité routière. Par conséquent, l’article 636 n’autorise pas la fouille du véhicule dans les circonstances. »

1381. Sur la nature préventive du pouvoir conféré aux policiers, voir R. c. Tremblay, [2017] J.Q. No. 12880, par. 21 :

« Il affirme que le policier Morin aurait dû attendre que l’intimé sorte du stationnement et semble vouloir fuir le barrage routier, avant de l’intercepter, il ne tient aucunement compte de l’article 636 du Code de la sécurité routière qui permet d’agir de façon préventive en vérifiant l’état d’un conducteur. »

1382. R. c. Benoit-Sauvageau, [2015] J.Q. No. 2374, par. 25; R. c. Lim, [2019] J.Q. No. 1921, par. 25.

1383. Voir également R. c. Jacob, [2014] J.Q. No. 18016.

1384. LSJPA – 1530, [2015] J.Q. No. 7332 (C.A.). Voir également Thuot c. R., [2012] J.Q. No. 9159.

1385. R. c. Pinsonneault, [2015] J.Q. No. 6184; Tremblay c. R., [2015] J.Q. No. 23713.

1386. R. c. Tsakalis, [2015] J.Q. No. 5097, par. 7 :

« L’agent Bernier a affirmé qu’il était en patrouille régulière avec une collègue le 14 mai 2010, vers 2 h 30 du matin. Leur voiture était garée dans le stationnement d’un “truck stop”, voisin d’un bar de danseuses appelé le Hilltop. Leur objectif était de vérifier l’état des conducteurs à la sortie des bars. Le policier Bernier a affirmé que, vers 2 h 30 du matin, il a vu le véhicule conduit par l’Intimé sortir du stationnement du bar Hilltop et prendre la route. Dès lors que ce véhicule serait arrivé à la hauteur de leur véhicule de police, il aurait fait demi-tour et se serait dirigé en direction opposée. »

Voir également R. c. Élie, [2010] J.Q. No. 9322; Desbiens c. R., [2016] J.Q. No. 8668.

1387. R. c. Dang, [2009] J.Q. No. 13437, par. 21 :

« À la lumière de ce qui précède, force est de constater que la vérification de routine d’un automobiliste pour vérifier l’état de son véhicule constitue une détention arbitraire justifiée. »

1388. Voir sur ce point en Ontario R. c. Gonzales, 2017 ONCA 543 (CanLII), 136 O.R. (3d) 225, par. 55 et 56 (C.A. Ont.) :

« Section 216(1) of the HTA authorizes a police officer to stop vehicles for highway regulation and safety purposes, even where the stops are random : Brown v. Durham, at para. 21; R. v. Ladouceur, 1990 CanLII 108 (CSC), [1990] 1 S.C.R. 1257, [1990] S.C.J. No. 53, at p. 1288 S.C.R.; R. v. Simpson (1993), 1993 CanLII 3379 (ON CA), 12 O.R. (3d) 182, [1993] O.J. No. 308, 79 C.C.C. (3d) 482 (C.A.), at p. 492 C.C.C. This detention is circumscribed by its purpose. It is limited to the roadside. [page237] It must be brief, unless other grounds are established that permit a further detention. An officer may require a driver to produce the documents drivers are legally required to have with them. To check those documents against information contained in databases accessible through the on-board computer terminal in police vehicles, an officer is entitled to detain the vehicle and its occupants while doing so : Brown v. Durham, at para. 24.

In addition to requiring production of various documents associated with the operation of a motor vehicle, a police officer, acting under the authority of s. 216(1) of the HTA, may also make a visual examination of the interior of the vehicle to ensure their own safety during the detention : Brown v. Durham, at para. 24; Ladouceur, at pp. 1286-87 S.C.R.; R. v. Mellenthin, 1992 CanLII 50 (CSC), [1992] 3 S.C.R. 615, [1992] S.C.J. No. 100, at pp. 623-24 S.C.R. However, s. 216(1) does not authorize more intrusive examinations of the interior of the vehicle or inquiries of any occupant directed at subjects not relevant to highway safety concerns : Brown v. Durham, at para. 24; Mellenthin, at p. 623-24 S.C.R. »

1389. Sur la possibilité toutefois de recueillir des renseignements pouvant servir dans le cadre de leur enquête sur des activités criminelles, voir R. c. Gonzales, 2017 ONCA 543 (CanLII), 136 O.R. (3d) 225, par. 59 (C.A. Ont.) :

« Gathering police intelligence falls within the ongoing police duty to investigate criminal activity. And so it is that it is permissible for police to intend, within the confines of a stop and detention authorized by s. 216(1), to avail themselves of the opportunity to further the legitimate police interest of gathering intelligence in their investigation of criminal activity : Brown v. Durham, at paras. 31 and 33; R. v. Storrey, 1990 CanLII 125 (CSC), [1990] 1 S.C.R. 241, [1990] S.C.J. No. 12, at pp. 254-55 S.C.R. »

1390. R. c. Urban, 2017 ABCA 436 (CanLII), [2017] A.J. No. 1393, par. 4 (C.A. Alb.) :

« Cst. Shule asked for documentation and where Mr. Urban was coming from and going to. Mr. Urban stated that he was travelling from Kelowna to Edmonton to help his pregnant sister with bathroom renovations. Cst. Shule testified in the voir dire that he always asked such questions during a traffic stop to determine whether the driver was fatigued or impaired. »

1391. R. c. Labonté, [2014] J.Q. No. 17988, par. 67.

1392. Expression empruntée à l’arrêt R. c. Perka, 1984 CanLII 23 (CSC), [1984] 2 R.C.S. 232, par. 37.

1393. LSJPA – 1530, [2015] J.Q. No. 7332, par. 31 (C.A.) :

« Les motifs ayant fondé la décision d’intercepter le véhicule dans lequel se trouvait l’appelant doivent donc être établis. Il est important d’analyser la finalité de l’intervention pour déterminer si celle-ci vise la sécurité routière ou non. Il ne peut s’agir de transformer cette intervention en une enquête générale dénuée de tout fondement ou en une fouille abusive. »

R. c. Royer, [1998] J.Q. No. 1135, par. 10 (C.A.) :

« En vertu de l’article 636 du Code de la sécurité routière, les policiers jouissent d’un large pouvoir d’interpellation. Ce pouvoir doit cependant être utilisé pour les fins prévues à ce code. Il ne peut être utilisé de façon oblique, c’est-à-dire à une fin qui n’est pas prévue au Code de la sécurité routière. Il n’est pas inutile de rappeler les paroles du juge Cory dans R. c. Mellenthin :

Les programmes de contrôle routier entraînent la détention arbitraire d’automobilistes. Ces programmes sont justifiés dans la mesure où ils visent à réduire le nombre effroyable de décès et de blessures si souvent causés par des conducteurs dangereux. Le programme vise donc principalement à vérifier la sobriété des conducteurs, leur permis, leur certificat de propriété, leurs assurances et l’état mécanique de leur automobile. Dans son recours aux contrôles routiers, la police devrait s’en tenir à ces objectifs. »

1394. Bachand c. R., [2009] J.Q. No. 3930; R. c. Fafard, [2010] J.Q. No. 4768 (vérifier l’identité de Fafard dans le cadre d’une enquête de vol de véhicule); R. c. Lessard, [2007] J.Q. No. 12140, par. 10 (vérifier la raison de sa présence dans le stationnement du commerce à une heure aussi tardive).

1395. R. c. Lacasse, [1993] J.Q. No. 2350, par. 60 :

« Ici les policiers ont été très honnêtes et ont admis qu’ils n’ont pas agi dans le cadre d’application dudit code mais dans un cadre d’enquête pour des infractions relatives aux biens d’autrui (vols et effractions). »

1396. R. c. Gagnon, [2009] J.Q. No. 16765.

1397. Larochelle c. Cour du Québec, [2017] J.Q. No. 344, par. 16.

1398. Bachand Leblanc c. R., [2015] J.Q. No. 5864, par. 27 :

« Le pouvoir de l’État ne permet pas d’intercepter des personnes dans n’importe quelle circonstance. L’on ne peut intercepter un véhicule uniquement par curiosité ou pour des motifs reliés à l’exercice de libertés individuelles, comme par exemple se diriger dans une autre direction que l’adresse de son domicile. »

1399. R. c. Fafard, [2010] J.Q. No. 4768, par. 80 :

« L’interception d’un citoyen afin de vérifier si son profil “fite” avec le véhicule qu’il conduit ouvre la porte à divers dérapages, telle la discrimination fondée sur la race et le sexe notamment. »

1400. R. c. Tsakalis, [2015] J.Q. No. 5097, par. 21 et 22 :

« La très vaste majorité des décisions soumises par l’Intimé au Tribunal, et auxquelles le juge Mercier réfère au paragraphe 17 de sa décision, concerne des situations qui se distinguent du présent cas puisqu’il s’agit de cas où les policiers ont prétexté intercepter un véhicule en vertu de leur pouvoir sous 636 du Code de la sécurité routière alors qu’ils enquêtaient plutôt sur la commission d’une infraction criminelle qui ne relève pas de la conduite sécuritaire d’un véhicule automobile.

Par exemple, il y eut des cas où des policiers sont intervenus pour demander à un véhicule de s’immobiliser et faire certains constats, dont l’état d’ébriété du conducteur, alors que leur demande d’interception résultait de vagues soupçons relatifs à la possibilité de vols survenus dans un secteur. C’est le cas de l’interception d’un véhicule circulant à basse vitesse dans un secteur où des vols avaient été commis et où les policiers sont présents afin de prévenir d’autres vols. Ils soupçonnent le conducteur du véhicule d’être impliqué dans la commission de vols et interceptent le véhicule sur ce motif. Par la suite, ils tentent de justifier leur interception du véhicule comme découlant de leurs pouvoirs prévus à l’article 636 du Code de la sécurité routière. Le vol n’est certes pas une infraction qui concerne la sécurité routière et c’est à bon droit que ces décisions ont écarté la preuve ainsi obtenue puisque l’intervention policière ne découlait pas du pouvoir d’interception prévu à l’article 636 pour les matières relevant de la sécurité routière. »

Bien que la conduite avec les facultés affaiblies constitue un acte criminel, les policiers peuvent, dans le cadre des pouvoirs conférés par le CSR, intercepter, au hasard ou sur la base de simples soupçons, le conducteur d’un véhicule afin de vérifier son alcoolémie. Voir sur ce point R. c. Calci, [2009] J.Q. No. 16694, par. 178 et 179 :

« Ainsi donc, l’agent de police qui désire entreprendre une enquête concernant une infraction criminelle non reliée à la sécurité routière devra, pour pouvoir légalement interpeller le conducteur d’un véhicule automobile, disposer de motifs raisonnables de ce faire.

J’estime que la prétendue confusion dont parle le procureur du défendeur provient du fait que la conduite en état d’ébriété est une infraction criminelle, au même titre que toute autre infraction prévue au Code criminel.

Toutefois, il me semble clair à la lecture des arrêts de la Cour suprême et de notre Cour d’appel que le contrôle de la sobriété au volant relevant de la sécurité routière, un agent de police est autorisé, en vertu de l’article 636 du Code de la sécurité routière, à intercepter au hasard un conducteur de véhicule automobile dans le but de vérifier sa sobriété, et ce sans qu’il soit nécessaire qu’il dispose au préalable de soupçons raisonnables ou de motifs raisonnables de croire à la commission d’une infraction aux articles 253a) et b) du Code criminel. »

R. c. Gardner, [2018] O.J. No. 3404, par. 23 (C.A. Ont.) :

« If the police stop a motorist for a criminal investigation unrelated to highway safety, then they must have an articulable cause for the stop. In Simpson, the police were investigating drug activity, not highway safety. That is the reason that this court found a Charter breach, excluded the evidence, quashed the conviction, and entered an acquittal in that case. »

1401. Desbiens c. R., [2016] J.Q. No. 8668, par. 38 :

« En conclusion, il en résulte que Brassard n’était pas animé pas des motifs obliques. Je suis d’opinion que l’interception avait un lien rationnel avec la sécurité routière. »

1402. Directeur des poursuites criminelles et pénales c. Murray, [2016] J.Q. No. 22551, par. 33 :

« Par conséquent, le Tribunal constate qu’il ne s’agit pas d’une interception au hasard. La preuve démontre plutôt que c’est l’apparence physique ou l’habillement du défendeur qui a initialement attiré l’attention de l’agent Fortin et déclenché une filature sur plus d’une dizaine de kilomètres avant son interception. »

1403. Desbiens c. R., [2016] J.Q. No. 8668, par. 32 :

« La question précise devient donc la détermination de l’intention véritable des policiers de vérifier l’état du conducteur. »

R. c. Gonzales, 2017 ONCA 543 (CanLII), 136 O.R. (3d) 225, par. 67 et 69 (C.A. Ont.) :

« To determine the police purpose in effecting a stop and detection, we must consider the evidence of the officers involved, the persons detained and any other evidence, testimonial or real, concerning the circumstances and conduct of the stop. In this case, that takes us to the testimony of Det. Ward.

[...]

The trial judge was obliged to ground the findings necessary to engage s. 216(1) on the evidence adduced on the voir dire and any reasonable inferences that might arise from that evidence. The record reveals no basis upon which to reject Det. Ward’s testimony that his purpose in stopping the van was to pursue his investigation of the residential break-ins, his raison d’être for being in the area in the first place. This he planned to do by looking into the interior of the van for any indicia associated with break-ins : contraband, gloves, tools of the trade and such. Not only did Det. Ward identify his purpose as other than traffic regulation or vehicular safety, but he denied that the latter was the, or even a, purpose for the stop. »

1404. Marin c. R., 2012 QCCA 254 (CanLII), [2012] J.Q. No. 905, par. 36 et 37 (C.A.) :

« Par ailleurs, les photos déposées au dossier de la Cour démontrent clairement que le pare-brise était très endommagé. Le motif invoqué pour intercepter le véhicule de l’appelant était donc réel. On ne peut imposer aux policiers qui constatent une infraction au Code de la sécurité routière de ne pas intervenir en raison du fait que le conducteur fait l’objet d’une enquête criminelle. Or, ce n’est qu’à la suite de cette interception que le patrouilleur Fréchette a senti l’odeur de cannabis frais et aperçu les sacs qui le contenaient.

À mon avis, l’ensemble des circonstances permettait de procéder à l’arrestation de l’appelant pour possession de cannabis et, un peu plus tard, pour production de cannabis. En effet, l’interception était légale et c’est par la suite que le patrouilleur Fréchette a acquis des motifs raisonnables de procéder à la fouille et à l’arrestation de l’appelant. »

Voir également R. c. Harding, 2010 ABCA 180 (CanLII), [2010] A.J. No. 651, par. 18 (C.A. Alb.) :

« At trial, during the voir dire, counsel for the appellant had conceded that the initial traffic stop was not arbitrary because of the obscured licence plate : R. v. Harding, 2008 ABQB 761 at para. 23. The fact that Sgt. Topham was concurrently conducting a traffic inquiry while observing grounds for a drug related offence does not make the detention arbitrary : R. v. Yague, 2005 ABCA 140, 371 A.R. 286 at paras. 7-9. »

R. c. Zolmer, 2019 ABCA 93 (CanLII), [2019] A.J. No. 292, par. 36 (C.A. Alb.) :

« In any event, for at least two hundred years it has been accepted that police might extend their investigations opportunistically while exercising an initial lawful authority provided the extension is reasonable. Resort, therefore, to other statutory or common law authorities should not be automatically presumed to be pre-textual. Such authorities do not automatically vanish simply because the police happen to have – or happen to develop – during their dealings with the subject a basis for additional authorities of a different sort : compare Brown et al v. Durham (Regional Municipality) Police Force (1998), 1998 CanLII 7198 (ON CA), 131 CCC (3d) 1 (ONCA) at paras 43-54, appeal to SCC discontinued, [1999] SCCA No 87 (QL); R v. Nolet, 2010 SCC 24 at paras 23-26 and paras 39-43, [2010] 1 SCR 851. »

1405. R. c. Dault, [2010] J.Q. No. 5939, par. 94 et 95 (C.A.); R. c. Garand, [2017] J.Q. No. 14761, par. 96 et 97 :

« Le Tribunal considère que l’interception s’est faite dans un stationnement visé par les dispositions du CSR où le public peut y circuler librement. Aucune preuve n’a été présentée qu’il y avait des restrictions au public d’avoir accès à ce stationnement par le propriétaire des lieux.

Or, les policiers, compte tenu des dispositions du Code de la sécurité routière et des éléments de preuve soumis au Tribunal concernant l’observation du véhicule du requérant qui avance et par la suite, s’immobilise et se stationne, agissent dans le cadre de leurs fonctions. »

En ce qui concerne la situation des automobiles se trouvant dans un stationnement d’un immeuble à logements, voir R. c. Vega Diaz, [2017] J.Q. No. 9370; Marin c. R., [2016] J.Q. No. 17403 (C.A.).

1406. R. c. Thibeault, [2006] J.Q. No. 3108, conf. à [2007] J.Q. No. 6887 (C.A.). Voir également R. c. Fortin, [2018] J.Q. No. 3074; R. c. Tolley, [2006] J.Q. No. 17726, par. 10 :

« Un restaurant étant par définition, selon Le petit Larousse illustré, un “établissement public où l’on sert des repas moyennant paiement”, j’estime que l’expression “et autres terrains où le public est autorisé à circuler” est suffisamment large pour inclure le stationnement d’un restaurant. En effet, lorsque, comme dans le cas en l’espèce, le terrain en question a comme vocation de donner accès en automobile au restaurant en question, à savoir en fournissant accès et espace de stationnement au public, il va de soi qu’il s’agit d’un terrain où le public est autorisé à circuler. Par ailleurs, en utilisant un premier exemple dans l’expression “sur les terrains de centres commerciaux”, le législateur donne déjà une indication du genre de terrain visé par l’expression “et autres terrains où le public est autorisé à circuler”; le terrain de stationnement d’un restaurant n’en est qu’une variante. »

1407. R. c. Thibeault, [2006] J.Q. No. 3108, par. 8.

1408. Voir également Durocher c. R., [2013] J.Q. No. 4489.

1409. Harvey c. R., [2008] J.Q. No. 5060 (C.A.).

1410. Harvey c. R., [2008] J.Q. No. 5060, par. 8 et 9 (C.A.) :

« D’entrée de jeu, les policiers ont le pouvoir d’enquêter lorsqu’ils soupçonnent que la présence d’un véhicule à une heure tardive puisse être reliée à la commission de crimes dans le secteur en question ou, à tout le moins, leur paraît suspecte : R. c. Coates (2003), 2003 CanLII 36956 (ON CA), 176 C.C.C. (3d) 215 (C.A. Ont.). La surveillance du véhicule de l’appelante s’appuie donc sur un motif précis. Or, c’est au cours de l’exercice légitime de ce pouvoir d’enquête que les policiers remarquent que l’appelante, qui conduisait le véhicule, a une démarche lente à la sortie de celui-ci. S’approchant de l’appelante pour effectuer une vérification de ses papiers, les policiers dénotent une odeur d’alcool. Dès lors, ils ont des raisons de croire qu’une infraction au Code criminel a été commise. »

1411. Harvey c. R., [2008] J.Q. No. 5060, par. 14 (C.A.). R. c. Bergeron, [2015] J.Q. No. 6135, par. 43 :

« Le cas de madame Bergeron est différent de celui d’Alexandre Gasse. Dans le dossier à l’étude, les agents aperçoivent le véhicule de l’accusée reculer, s’immobiliser une dizaine de secondes et s’engager sur la route. L’agent Aubin décide d’aller vérifier son état et ses documents. Il a le droit de le faire. Et le fait que madame Bergeron soit stationnée sur un chemin privé lors de son interpellation n’est pas un élément déterminant. »

1412. R. c. Harvey, [2006] J.Q. No. 9008, par. 41 :

« Le Tribunal n’est pas en présence d’un policier qui, a posteriori, se drape dans les dispositions de 636 C.S.R. pour justifier ses agissements. Son intervention révèle que la preuve s’est déroulée en deux séquences bien distinctes :

1. Il suit, dans le cadre de son devoir de prévenir le crime, compte tenu des circonstances exposées antérieurement, un véhicule suspect jusque dans la cour de la résidence de l’intimée, endroit où il réalise que ses soupçons sont sans fondement;

2. Toute intervention additionnelle lui semblant injustifiée, il est sur le point de quitter, quand le comportement de l’intimée attire son attention, ce qui l’amène à se prévaloir des dispositions de l’article 636 C.S.R. »

1413. R. c. Gasse, [2013] J.Q. No. 17051.

1414. R. c. Lemay, [2015] J.Q. No. 5890. Voir également R. c. Millaire, [2010] J.Q. No. 6731; Boucher-Bélanger c. R., [2012] J.Q. No. 4251, par. 54 :

« Une constellation de faits justifiait de procéder à cette vérification. L’accusé a des antécédents criminels. Il doit respecter plusieurs ordonnances de probation. Il entretient des liens avec un criminel notoire, Sonny Garneau, contre qui pèse un mandat d’arrestation pour des introductions par effraction et vols. Les vitres arrière du véhicule sont maquillées sauf pour une petite ouverture placée sur la lunette arrière. En 10 ans de métier, la policière n’a jamais vu un véhicule avec des vitres modifiées de la sorte. Ce véhicule a été vu sur les lieux où des introductions par effraction et vols de cuivre se sont produits. L’accusé conduit ce véhicule aux petites heures de la nuit près d’un parc industriel où un tel vol a été commis. Dès que les policiers s’apprêtent à faire demi-tour, le véhicule suspect accélère subitement et bifurque sur la première rue située à sa droite. »

1415. Pour une situation similaire, mais ne comportant pas assez d’éléments pour obtenir des soupçons raisonnables, voir R. c. Lessard, [2007] J.Q. No. 12140 :

« La décision dans R. c. Vigneault, (2003) 2003 CanLII 27327 (QC CA), 182 CCC (3d) 422 ne supporte pas la conclusion que la seule présence d’une automobile, en pleine nuit, près d’un établissement commercial est suspecte et que cela fournit des motifs raisonnables de soupçonner l’existence d’un lien clair entre l’individu qui va être détenu et une infraction criminelle récente ou en cours. »

1416. R. c. Brie, [2016] J.Q. No. 16033, par. 37; R. c. Gonzales, 2017 ONCA 543 (CanLII), 136 O.R. (3d) 225, par. 76 et 77 (C.A. Ont.) :

« To justify the detention requires a constellation of objectively discernible facts that gave Det. Ward reasonable cause to suspect that the occupants of the van were criminally implicated in the residential break-in activity under investigation.

Detective Ward had no information to link the van or its occupants to the daytime residential break-ins he was investigating. The officer knew about the number of break-ins and the time and manner of entry. But neither the police, nor Det. Ward, had a description of any individuals or vehicles that might have been involved in or associated with these activities. Detective Ward had seen the same van in the same area twice in five days. Each time, there was a driver and a passenger. However, on the first occasion, what happened satisfied Det. Ward that there was no connection between the van and the break-ins. The occupants had access to [number omitted] Hislop. They entered the house. Detective Ward did not see them leave. He thought that one of the men may have lived there. Scarcely the stuff of articulable cause or reasonably grounded suspicion. »

1417. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 131.

1418. R. c. Morrissette, [2016] J.Q. No. 7673.

1419. R. c. Lelièvre, [2016] J.Q. No. 2332.

1420. R. c. Cotnoir, 2000 CanLII 7581 (QC CA), [2000] J.Q. No. 3610 (C.A.); autorisation d’appel refusée [2001] 1 R.C.S. ix.

1421. R. c. Cotnoir, 2000 CanLII 7581 (QC CA), [2000] J.Q. No. 3610, par. 16 et 17 (C.A.) :

« La preuve révèle que l’agent Gougeon croyait surprendre un voleur en flagrant délit. Après avoir aperçu ce qui lui semblait être un individu se cachant à l’intérieur d’un véhicule, elle a déclaré à son partenaire : “on va aller voir tout d’un coup que c’est un voleur, tsé c’est un beau pick-up, ça a l’air pis ça vaut une trentaine de mille”. En pénétrant dans la cour de la résidence de l’appelant et en lui demandant de décliner son identité, l’agent Gougeon ne cherchait qu’à prévenir la perpétration d’un crime.

Quant à l’agent Bélanger, la preuve révèle qu’il croyait que l’accusé souffrait d’un malaise et il avait l’intention de revenir sur les lieux après sa ronde dans le secteur. S’il avait lui-même pénétré dans la cour de l’accusé pour vérifier l’état de ce dernier, il se serait alors acquitté d’un autre devoir dévolu aux policiers par la common law, celui de protéger la vie des citoyens. Tel que le rappelait le juge Lamer dans l’affaire Godoy, ce devoir général ne se limite pas à la protection de la vie des victimes de crimes. »

1422. R. c. Cotnoir, 2000 CanLII 7581 (QC CA), [2000] J.Q. No. 3610, par. 20 (C.A.).

1423. Laramée c. R., [2007] J.Q. No. 1237, par. 18 :

« Dans le présent dossier, les policiers se trouvaient sur la propriété de l’appelant pour des raisons légitimes – ils avaient des motifs raisonnables de soupçonner que le conducteur d’un véhicule s’y trouvant avait conduit avec les facultés affaiblies. Leur enquête pouvait les amener sur la propriété. De plus, l’appelant n’a, à aucun moment, retiré l’invitation tacite faite à tout membre du public, incluant les policiers, de se rendre à sa porte dans un but légitime. »

1424. R. c. Lacasse, [1993] J.Q. No. 2350; DPCP c. Roy, [2014] J.Q. No. 7150, par. 26 :

« De plus, il s’agit d’un terrain privé d’une grande dimension où la présence d’un véhicule n’a rien d’anormal ou permettant d’éveiller des soupçons raisonnables de la commission d’une infraction. Elle ne savait pas à qui appartenait ce véhicule et elle admet qu’il aurait pu être au propriétaire des lieux. Le véhicule ne gênait absolument pas la circulation et elle ne voyait personne rôder sur le terrain ou autour du véhicule. Elle n’avait donc aucun motif raisonnable de soupçonner que l’accusée était d’une quelconque façon impliquée dans une infraction. »

1425. R. c. Bilodeau, 2004 CanLII 45922 (QC CA), [2004] J.Q. No. 10705 (C.A.).

1426. R. c. Bilodeau, 2004 CanLII 45922 (QC CA), [2004] J.Q. No. 10705, par. 13 (C.A.).

1427. R. c. Bilodeau, 2004 CanLII 45922 (QC CA), [2004] J.Q. No. 10705, par. 65 (C.A.).

1428. Pelland c. R., [2017] J.Q. No. 14967 (C.A.).

1429. R. c. Pelland, [2015] J.Q. No. 6903, par. 12.

1430. Pelland c. R., [2017] J.Q. No. 14967, par. 3 (C.A.).

1431. Pelland c. R., [2017] J.Q. No. 14967, par. 4 (C.A.).

1432. Pelland c. R., [2017] J.Q. No. 14967, par. 4 (C.A.).

1433. R. c. Dault, [2010] J.Q. No. 5939 (C.A.).

1434. R. c. Dault, [2010] J.Q. No. 5939, par. 11 (C.A.).

1435. R. c. Dault, [2010] J.Q. No. 5939, par. 32 (C.A.).Voir sur ce point les commentaires du juge Doyon dans R. c. Simard, [2010] J.Q. No. 6293, par. 50 et 72 (C.A.) :

« Comme le signale le juge de première instance, les deux policiers auraient été pleinement justifiés de se diriger vers les deux véhicules afin de vérifier ce qu’il en était. Lorsqu’une automobile est stationnée à la vue du public dans les circonstances de l’espèce, on ne peut prétendre que les agents de la paix n’auraient aucun droit de s’en approcher pour voir, par exemple, si quelqu’un a besoin d’aide, s’il s’agit d’un véhicule abandonné ou si la situation requiert pour d’autres raisons une intervention. Une telle démarche entre dans le cadre des pouvoirs généraux des agents de la paix : R. c. Dault, 2010 QCCA 986, paragr. 34 à 36 et 64. Par contre, la façon de stationner le véhicule de patrouille, l’utilisation des projecteurs à haute intensité, la conduite des policiers qui a suivi et leurs explications, telles qu’interprétées par le juge de première instance, permettent de conclure à la détention de l’intimé. Si les policiers pouvaient faire demi-tour pour aller procéder à quelques vérifications d’usage, ils n’étaient pas pour autant autorisés à exercer leur pouvoir de n’importe quelle façon notamment en retenant les individus contre leur gré, sans autres motifs, dès le contact initial comme ils l’ont fait.

Comme le souligne le juge, considérant l’heure, le lieu et la position des deux véhicules, les policiers pouvaient légitimement s’interroger et s’approcher pour savoir ce qui se passait. Le problème a débuté uniquement au moment où les policiers ont décidé d’agir de façon à empêcher le déplacement de l’automobile et d’allumer leurs projecteurs à haute intensité. La situation a dégénéré par la suite, mais force est d’admettre que, initialement, la décision de faire demi-tour et de s’approcher des véhicules était tout à fait justifiable. »

1436. Kong c. R., [2019] J.Q. No. 5270, par. 54, 55, 56, 57 et 59 :

« Le Tribunal souligne par ailleurs que rien n’empêche les policiers de circuler dans des endroits accessibles au public, tels des stationnements publics, dans le but de maintenir la sécurité et l’ordre. Rien ne les empêche non plus de s’approcher des véhicules stationnés tout en gardant les yeux ouverts. Il est également acquis que dans l’exercice des pouvoirs qui leurs sont conférés par la loi, les policiers peuvent se fonder sur des observations faites à partir d’endroits où ils se trouvent légalement pour étayer leurs motifs d’intervention.

En l’espèce, les policiers Hubert et Clavet n’agissaient pas dans le cadre d’une enquête ni ne répondaient à un appel. Ils procédaient en vertu de leurs pouvoirs généraux.

Rien n’empêchait l’agent Hubert de circuler sur l’avenue Coloniale dans le cadre d’une patrouille régulière.

En toute transparence, l’agent Hubert fait état de la nature de ses “soupçons” au moment précis où il note la présence du véhicule du requérant. Ces soupçons sont intimement liés à son expérience comme policier, à la position de ce véhicule immobilisé derrière ceux stationnés, avec les trois passagers à bord, à ses observations du passager arrière qui, le torse penché vers l’avant, semble s’adresser au conducteur, tous ces éléments combinés à l’heure tardive.

[...]

Les policiers n’ont pas « intercepté » le véhicule du requérant. La preuve révèle, du témoignage même du requérant, que son véhicule était déjà immobilisé sur un chemin public, moteur en marche. »

1437. R. c. Spence, [2010] J.Q. No. 29814.

1438. R. c. Spence, [2010] J.Q. No. 29814, par. 10.

1439. R. c. Spence, [2010] J.Q. No. 29814, par. 50.

1440. R. c. Spence, [2010] J.Q. No. 29814, par. 62.

1441. Voir également R. c. Boivin, [2014] J.Q. No. 18157, par. 7 :

« Plus spécifiquement, voici ce que l’agent Lévesque mentionne :

R. Ben premièrement, le véhicule y’est immobile dans un stationnement de commerce, donc, le magasin est fermé à une heure et quelques du matin, bon y’a sûrement lieu de se questionner à savoir pourquoi le véhicule est là en dehors des heures d’ouverture. Bon. Dans... Dans c’cas-là euh... mon travail est d’aller vérifier qu’est-ce que le véhicule-là fait dans l’espace de stationnement du commerce qui est fermé, vérifier l’état du conducteur, est-ce que la personne a eu un malaise ou peu importe, quelque chose comme ça, ou si c’est autre chose on... on se doit d’aller vérifier, y’est pas dans une cour de... privée ou peu importe, c’est un commerce, ça fait que si on veut savoir si les gens y s’apprêtent à faire un vol ou une introduction par… »

1442. R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460, par. 30.

1443. R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460, par. 30.

1444. Hallé c. R., [2010] J.Q. No. 13160, par. 34 (C.A.).

1445. LSJPA-1363, [2013] J.Q. No. 17799 (C.A.).

1446. R. c. Spence, [2010] J.Q. No. 29814, par. 62.

« Or, à cet égard, il faut préciser en premier lieu que la question de la détention de madame Spence ne se pose pas jusqu’à ce que le constable Deveau cogne à sa fenêtre. D’abord, pour reprendre les propos du juge Gagnon dans l’arrêt Dault, précédemment cité, les policiers n’ont pas “besoin de motifs quelconques pour s’approcher d’un véhicule” immobilisé dans un stationnement accessible au public. Mais il y a davantage : en l’espèce, le constable Deveau a des raisons valables de procéder à une vérification du commerce et du véhicule stationné, vérification tout à fait légitime dans les circonstances (en plein milieu de la nuit, dans un secteur isolé, alors que le commerce est fermé, qu’un véhicule est anormalement stationné, que le passager l’a quitté pour se rendre en direction du commerce, et que la conductrice adopte une attitude suspecte en détournant le regard). Il est donc justifié d’approcher l’automobile immobilisée, justifié aussi de vouloir interagir avec la conductrice, et justifié enfin de cogner dans la vitre pour attirer son attention (puisqu’il n’est pas certain que le passager n’est sorti que pour uriner et que la conductrice ne fait que l’attendre). Sa décision de cogner dans la vitre, arrêtée quelques “fractions de secondes” après avoir réalisé que le passager urinait, demeure en effet justifiée à partir du moment où le policier entretient des doutes sur la possibilité qu’il puisse s’agir d’une diversion, comme on le verra maintenant. »

1447. R. c. Deschatelets-Boulet, [2020] J.Q. No. 1311, par. 28.

1448. Hallé c. R., [2010] J.Q. No. 13160, par. 33 :

« L’appelant prétend qu’il est détenu dès le moment où il ouvre la porte à l’agente Arcand. Elle lui explique pourtant en termes non équivoques la raison de sa présence. L’appelant n’est pas sous le coup d’une demande contraignante. Il n’est pas davantage l’objet d’une contrainte physique ou psychologique. Les mots utilisés par l’agente Arcand, lors de sa brève conversation avec l’appelant, ne sont pas de nature à créer chez une personne raisonnable, qui n’est pas particulièrement vulnérable, une contrainte psychologique susceptible d’amener cette personne à croire que son droit à la liberté est suspendu au sens où l’entendent les articles 9 et 10 de la Charte. Bref, à cette étape dans la chronologie des événements, l’appelant n’est ni détenu et encore moins en état d’arrestation. »

1449. R. c. Lotozky, 2006 CanLII 21041 (ON CA), [2006] O.J. No. 2516, par. 35 (C.A. Ont.) :

« The fact that the police officer intends to pursue an investigation on the driveway, at least if the investigation relates to a motor vehicle, does not in my view exceed the bounds of the implied invitation, provided that the officer has a legitimate basis for entering on the driveway. Interpreting the common law in this way is, in my view, consistent with the broader principle identified by Sharpe J.A. that licences may arise by implication from the nature of the use to which the owner puts the property. As I have said, the use to which this property is put is to park motor vehicles and it is an area of the property that is open to public view. »

R. c. Gasse, [2013] J.Q. No. 17051, par. 40. Voir également R. c. Pelland, [2015] J.Q. No. 6903.

1450. R. c. Ayangma, 2016 PECA 6 (CanLII), [2016] P.E.I.J. No. 19, par. 37 (C.A. I.P.E.) :

« Reasonable and probable grounds relate to the probability of criminal activity; reasonable suspicion relates to the possibility of criminal activity. Reasonable suspicion is an intermediate standard between suspicion and reasonable and probable grounds. Reasonable and probable grounds will suffice to obtain a search warrant while a reasonable suspicion will not. It is simply a matter of degree. To determine reasonable suspicion the court must consider the constellation of objectively discernable facts. »

1451. Gagnon c. R., 2015 QCCA 1138 (CanLII), [2015] J.Q. No. 6206, par. 67 (C.A.) :

« [L]a seule croyance subjective du policier ne suffit pas. Si l’expérience et la formation du policier offrent un fondement expérientiel qui doit être évalué, l’intuition policière n’a droit à aucune déférence. »

1452. R. c. Laplante, [2015] J.Q. No. 8739, par. 33-34 :

« Le requérant n’a pas été interpelé en vertu du Code de la sécurité routière, pour vérifier sa sobriété ou encore parce qu’il existait des motifs raisonnables et probables de croire qu’il avait commis un acte criminel.

L’agent Denis n’avait pas non plus de motifs raisonnables de soupçonner que le requérant était impliqué dans un crime donné ou qu’il y avait un lien clair entre ce dernier et une infraction criminelle récente ou en cours si ce n’est sa seule présence dans un secteur reconnu pour la récolte de cannabis à cette période de l’année.

Les policiers ont été guidés par leur intuition selon laquelle le requérant était mêlé à une affaire de production de cannabis. Ils n’auraient jamais dû procéder à son interception.

Conséquemment, il faut en venir à la conclusion qu’il y a violation de l’article 9 de la Charte. »

1453. R. c. Kang-Brown, 2008 CSC 18 (CanLII), [2008] 1 R.C.S. 456, par. 60. Voir également R. c. Chehil, 2013 CSC 49 (CanLII), [2013] 3 R.C.S. 220, par. 26; R. c. Simpson (1993), 1993 CanLII 3379 (ON CA), 12 O.R. (3d) 182, 202 :

« [Traduction] Ces affaires exigent qu’il existe un ensemble de faits objectivement discernables donnant au policier qui exerce la détention un motif raisonnable de soupçonner que la personne détenue est criminellement impliquée dans l’activité visée par l’enquête. L’exigence que les faits satisfassent à une norme objectivement discernable [...] sert à empêcher l’exercice inconsidéré et discriminatoire des pouvoirs de la police. [Je souligne.] »

1454. R. c. Kang-Brown, 2008 CSC 18 (CanLII), [2008] 1 R.C.S. 456, par. 75.

« La norme des “soupçons raisonnables” n’est pas une nouvelle norme juridique créée pour les besoins de la présente affaire. Les “soupçons” sont une impression que l’individu ciblé se livre à une activité criminelle. Les soupçons “raisonnables” sont plus que de simples soupçons, mais ils ne correspondent pas à une croyance fondée sur des motifs raisonnables et probables. »

1455. R. c. Mann, 2004 CSC 52 (CanLII), [2004] 3 R.C.S. 59.

1456. R. c. Mann, 2004 CSC 52 (CanLII), [2004] 3 R.C.S. 59, par. 47 :

« Les policiers avaient des motifs raisonnables de détenir l’appelant. Il correspondait étroitement à la description du suspect transmise par le répartiteur radio et il se trouvait à seulement deux ou trois pâtés de maisons de la scène du crime. Ces facteurs ont amené les policiers à soupçonner raisonnablement que l’appelant avait été impliqué dans des activités criminelles récentes et qu’il devait à tout le moins faire l’objet d’une enquête plus approfondie. »

Voir également R. c. Paul, [2017] J.Q. No. 2110, par. 26 :

« Il était raisonnable pour les policiers de croire à la possibilité que le véhicule visé et ses occupants étaient reliés au crime sous enquête. En effet, le véhicule se trouvait à proximité des lieux du crime, dans les minutes suivant le crime, sur une trajectoire de fuite et il était conduit par un homme noir alors qu’un individu correspondant à ce signalement avait été vu fuir la scène des événements. Ensuite, la couleur et le modèle du véhicule correspondaient à la description d’un véhicule suspect aperçu sur les lieux. »

Voir enfin R. c. Richard, [2018] J.Q. No. 1709, par. 54 :

« Il y a d’une part, la totalité des circonstances ou éléments et les différents liens, croisements ou recoupements qui surgissent. Pour le Tribunal, le temps entre la première information et la présence de l’accusé a plus ou moins 150 mètres de l’endroit de la tentative d’introduction, indique une concomitance. L’heure et le jour de la semaine peuvent certainement réduire la probabilité que la présence de l’accusé soit anodine. À cela peuvent s’ajouter la description transmise et les caractéristiques de l’accusé. Finalement, l’accusé qui regarde à plusieurs reprises en direction des policiers peut être ajouté comme indice additionnel d’un lien entre l’accusé et l’infraction signalée. »

1457. R. c. MacKenzie, 2013 CSC 50 (CanLII), [2013] 3 R.C.S. 250, par. 72; R. c. Chehil, 2013 CSC 49 (CanLII), [2013] 3 R.C.S. 220, par. 27 :

« Ainsi, bien que les motifs raisonnables de soupçonner, d’une part, et les motifs raisonnables et probables de croire, d’autre part, soient semblables en ce sens qu’ils doivent, dans les deux cas, être fondés sur des faits objectifs, les premiers constituent une norme moins rigoureuse, puisqu’ils évoquent la possibilité – plutôt que la probabilité – raisonnable d’un crime. Par conséquent, lorsqu’il applique la norme des soupçons raisonnables, le juge siégeant en révision doit se garder de la confondre avec la norme plus exigeante des motifs raisonnables et probables. »

Voir également Wolfson c. R., [2020] J.Q. No. 4123, par. 58 et 59 (C.A.) :

« Le juge entreprend une analyse détaillée des circonstances entourant l’intervention du 3 novembre 2012. Il précise que les agents n’ont pas agi par intuition ou instinct, mais bien sur le fondement de faits objectivement observables qui incluent notamment : l’interaction entre l’appelant et un des trois hommes arrêtés pour possession d’arme, le positionnement de l’appelant au moment de l’arrestation des trois individus, le port d’un manteau mi-long dans un lieu surchauffé, l’absence de consommation, son attitude lors de l’arrestation des trois individus, sa fuite lorsqu’il est ciblé par une lampe de poche et enfin, sa réaction lorsqu’il est interpellé par les policiers. Il s’agit d’un ensemble de facteurs suffisamment spécifiques pour conclure à l’existence de motifs raisonnables de soupçonner.

Les soupçons dépassant largement le cap des soupçons généraux; les multiples facteurs évoqués par les policiers sont directement liés à l’appelant. Les circonstances, dans leur ensemble, indiquaient objectivement la possibilité, sinon la probabilité, d’un comportement criminel. Les policiers ont agi à l’intérieur des pouvoirs qui leur sont conférés par la common law et c’est donc à bon droit que le juge a conclu à la légalité de la détention. »

1458. R. c. Chehil, 2013 CSC 49 (CanLII), [2013] 3 R.C.S. 220, par. 29 :

« Les soupçons raisonnables doivent être évalués à la lumière de toutes les circonstances. L’appréciation doit prendre en compte l’ensemble des faits objectivement discernables qui donneraient à l’enquêteur un motif raisonnable de soupçonner une personne d’être impliquée dans le type d’activité criminelle sur lequel porte l’enquête. L’appréciation doit s’appuyer sur des faits, être souple et relever du bon sens et de l’expérience pratique quotidienne (voir R. c. Bramley, 2009 SKCA 49, 324 Sask. R. 286, par. 60). Les soupçons raisonnables du policier ne sauraient être évalués isolément (voir Monney, par. 50). »

Voir également Wolfson c. R., [2020] J.Q. No. 4123, par. 53 (C.A.) :

« Les policiers peuvent détenir une personne aux fins d’enquête “s’ils ont des motifs raisonnables de soupçonner, à la lumière de toutes les circonstances, que cette personne est impliquée dans un crime donné et qu’il est nécessaire de la détenir.” Les “motifs raisonnables de soupçonner” constituent une norme moins rigoureuse que les “motifs raisonnables de croire” puisqu’ils évoquent la possibilité et non la probabilité d’un crime. Les soupçons raisonnables ne peuvent être justifiés par une simple croyance subjective; ils doivent reposer sur des faits objectivement discernables et être analysés à la lumière de l’ensemble des circonstances. Il faut davantage que des soupçons généraux ou uniquement liés à un lieu ou une activité particulière pour que le seuil soit franchi. Le pouvoir de détention ne peut être exercé sur la foi d’une simple intuition. En définitive, l’appréciation doit “s’appuyer sur des faits, être souple et relever du bon sens et de l’expérience pratique quotidienne”. »

1459. Les facteurs qui peuvent aller « dans les deux sens » ne sont pas suffisants en soi pour fournir des soupçons raisonnables, mais peuvent le devenir « s’ils s’inscrivent dans un ensemble de facteurs » indiquant la possiblité d’une activité criminelle. R. c. Chehil, 2013 CSC 49 (CanLII), [2013] 3 R.C.S. 220, par. 31; R. c. Urban, 2017 ABCA 436 (CanLII), [2017] A.J. No. 1393, par. 43 (C.A. Alb.) :

« The dictum in Chehil, at para 31, that innocuous factors that “go both ways” cannot support reasonable suspicion on their own but may when combined with other factors, should not be understood as endorsing a kind of alchemy whereby a group of severally innocuous factors somehow become grounds for reasonable suspicion when considered together. Individually innocuous factors do not support a reasonable suspicion when they are combined with other innocuous factors, unless one factor provides support to another or the innocuous factors, together, are mutually reinforcing : MacKenzie at paras 82-83. With that said, most of the factors relied on by Cst. Shule in this case were either neutral or “went both ways”. »

1460. P. Sankoff et S. Perrault, “Suspicious Searches : What’s so Reasonable About Them ?” (1999), 24 C.R. (5th) 123, 124-125, cité dans R. c. Kang-Brown, 2008 CSC 18 (CanLII), [2008] 1 R.C.S. 456, par. 75. R. c. Molnar, [2018] M.J. No. 132, par. 35 (C.A. Man.) :

« To conclude, the difference between reasonable suspicion to detain and reasonable and probable grounds to arrest is a matter of degree. Reasonable suspicion is generally framed in terms of possibility, while reasonable grounds for arrest is linked to probability. Reasonable suspicion is a lower threshold than reasonable grounds to believe. There was no evidence that the grey suitcase in question was the only grey suitcase in the baggage car bound for Washago. While the evidence was strong to establish a reasonable suspicion, particularly after Bernie’s positive hit on the grey suitcase, in contrast to the cases cited above, the required strong connection between the grey suitcase and the accused for the RCMP to have objective reasonable grounds to arrest her did not exist. »

1461. Dans ce dernier cas, les policiers doivent avoir « des motifs raisonnables de soupçonner l’existence d’un lien clair entre la personne en cause et une infraction criminelle récente ou toujours en cours » (R. c. Mann, 2004 CSC 52 (CanLII), [2004] 3 R.C.S. 59, par. 34 et 45; R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 131).

1462. R. c. McGuffie, 2016 ONCA 365 (CanLII), [2016] O.J. No. 2504, par. 37 (C.A. Ont.) :

« In Mann, at para. 35, Iacobucci J. stressed that an investigative detention was not the same thing as an arrest and could not be allowed to become “a de facto arrest”. The significant interference with individual liberty occasioned by an arrest is justified because the police have reasonable and probable grounds to believe that the arrested person has committed an offence. Investigative detention does not require the same strong connection between the detained individual and the offence being investigated. The detention contemplated by an investigative detention cannot interfere with individual liberty to the extent contemplated by a full arrest. »

1463. Alabama v. White, 496 U.S. 325 (1990), 330.

1464. R. c. Chehil, 2013 CSC 49 (CanLII), [2013] 3 R.C.S. 220, par. 35 : « Enfin, les faits objectifs doivent révéler la possibilité d’un comportement criminel. »

1465. Langlois c. R., [2011] J.Q. No. 9033 (C.A.).

1466. Langlois c. R., [2011] J.Q. No. 9033, par. 47 (C.A.).

1467. Voir également R. c. Nesbeth, 2008 ONCA 579 (CanLII), [2008] O.J. No. 3086, par. 18 (C.A. Ont.) :

« This constellation of factors was sufficient to give the police officers reasonable grounds to suspect that the respondent was involved in criminal conduct. These were not the actions of a mere trespasser. While the court in Mann speaks of reasonable grounds to suspect that the individual is connected to “a particular crime”, in my view, it is not necessary that the officers be able to pinpoint the crime with absolute precision. Given the respondent’s behaviour in relation to the knapsack and the desperation with which he fled the police, the police could reasonably suspect that he was in possession of contraband : either drugs or weapons or both. They were therefore entitled to detain him for investigation in accordance with Mann. »

1468. R. c. Sanscartier, [2019] J.Q. No. 5132, par. 20 (C.A.).

1469. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 131 et 132. R. c. Mann, 2004 CSC 52 (CanLII), [2004] 3 R.C.S. 59, par. 47 :

« La présence d’une personne dans un quartier dit à criminalité élevée n’est pertinente qu’en ce qu’elle témoigne du fait que cette personne se trouvait à proximité du lieu du crime. Le fait qu’un quartier possède un taux de criminalité élevé ne constitue pas en soi une raison de détenir quelqu’un. »

1470. R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 132.

1471. R. c. N.O., 2009 ABCA 75 (CanLII), [2009] A.J. No. 213, par. 40 (C.A. Alb.), cité en français dans R. c. Le, 2019 CSC 34 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 34, par. 132.

1472. R. c. Manning, [2019] N.J. No. 226, par. 44 (C.A. T.-N & L.) :

« The state of mayhem in the house, the fresh cut on Ms. Manning’s lip, and the fact that there were two women sitting on Mr. Manning, to my mind are circumstances that show a nexus between Mr. Manning and the offence, past or ongoing, of assault. The SCAC Judge’s reasoning that there was no nexus between Mr. Manning and a recent or on-going criminal offence seems to have been based on the notion that broken furniture in the home and the cut on Brenda Manning’s lip could have been caused in any number of ways. This reasoning is more akin to application of the reasonable grounds to believe standard, or the standard of reasonable doubt in determining guilt, rather than the reasonable suspicion standard justifying investigative detention. »

1473. 10 Halsbury, 3e éd., p. 342 (cité avec approbation dans R. c. Whitfield, 1969 CanLII 4 (CSC), [1970] R.C.S. 46, par. 3).

1474. R. c. Whitfield, 1969 CanLII 4 (CSC), [1970] R.C.S. 46.

1475. Nicholl v. Darley (1828), 2 Y. & J. 399, 148 E.R. 974 (Ex.), 976. Voir également Genner v. Sparks (1704), 6 Mod. Rep. 173, 87 E.R. 928 (Q.B.), p. 929 :

« [Traduction] “si, en l’espèce, il avait touché au défendeur, ne serait-ce que du bout des doigts, il y aurait eu arrestation” (en italique dans l’original). Il ne fait aucun doute que l’appelant comprenait la signification du toucher de l’inspecteur puisque, selon le juge du procès, il a tout fait pour l’éviter. »

1476. Sandon v. Jervis (1859), El. Bl. & El. 942, 120 E.R. 760, 762 (Ex.).

1477. R. c. Latimer, 1997 CanLII 405 (CSC), [1997] 1 R.C.S. 217.

1478. R. c. Latimer, 1997 CanLII 405 (CSC), [1997] 1 R.C.S. 217, par. 8.

1479. R. c. Evans, 1991 CanLII 98 (CSC), [1991] 1 R.C.S. 869, par. 35.

1480. R. c. Asante-Mensah, 2003 CSC 38 (CanLII), [2003] 2 R.C.S. 3, par. 48 :

« Lors du troisième épisode (survenu dans l’après-midi du 25 juillet 1991), au cours duquel l’inspecteur s’est retrouvé sur le capot de la voiture sans avoir touché l’appelant, et qui n’a comporté même aucun risque de contrainte physique immédiate et certainement aucune soumission, il n’y a pas eu d’arrestation. »

1481. Holgate-Mohammed c. Duke, [1984] A.C. 437 (H.L.), p. 441 :

« [Traduction] Le mot “arrestation” [...] est un terme technique. Il convient d’abord de signaler que l’arrestation est un acte continu; elle commence lorsqu’une personne place une autre personne sous sa garde (au moyen de gestes ou de mots la contraignant à rester sous sa surveillance), et elle se poursuit jusqu’à ce que la personne ainsi maîtrisée soit relâchée, ou encore, si elle a été amenée devant un magistrat, jusqu’à ce qu’elle soit renvoyée en détention provisoire par le magistrat. »

1483. R. c. Asante-Mensah, 2003 CSC 38 (CanLII), [2003] 2 R.C.S. 3, par. 37.

1484. Cité dans R. c. Asante-Mensah, 2003 CSC 38 (CanLII), [2003] 2 R.C.S. 3, par. 38.

1485. Voir sur ce point R. c. Desrosiers, [2006] J.Q. No. 2580, par. 55-59 :

« Bien que cet article fasse référence à un acte criminel, aux termes de l’article 34.(1)a) de la Loi d’interprétation, l’infraction est réputée un acte criminel si le texte prévoit que le contrevenant peut être poursuivi par mise en accusation;

Dans la présente instance, l’infraction que Marc Tremblay a trouvé Germain Desrosiers en train de commettre est celle prévue à l’article 253 qui, aux termes de l’article 255(1) du Code criminel, peut être punissable sur déclaration sommaire de culpabilité par procédure sommaire ou par mise en accusation.

Bien que Germain Desrosiers ait été poursuivi sur infraction punissable sur déclaration sommaire de culpabilité, la décision de choisir par procédure sommaire ou par mise en accusation est ultérieure à l’arrestation et ne ressort pas de la discrétion de la personne qui procède à cette arrestation, qu’elle soit un citoyen ordinaire ou un policier.

L’article 494.(1)a) C.cr. doit donc se lire pour permettre à toute personne d’arrêter sans mandat un individu qu’elle trouve en train de commettre une offense qui peut être poursuivi[e] par voie de mise en accusation seulement ou encore par voie de poursuite sommaire ou de mise en accusation, au choix du ministère public.

Une personne ne peut donc arrêter un individu qu’elle verrait en train de commettre une infraction qui ne pourrait être poursuivi[e] autrement que par poursuite sommaire. »

1486. Passage tiré de l’arrêt R. c. Biron, 1975 CanLII 13 (CSC), [1976] 2 R.C.S. 56, par. 48. R. c. Abel, [2008] B.C.J. No. 197, par. 52 (C.A. C.-B.) :

« In other words, before invoking this power the arresting officer must have reasonable grounds to believe that the person to be arrested is apparently in the process of committing a crime in his or her presence. In the context of a citizen’s arrest under s. 494(1)(a) of the Code, this means that before a citizen can effect an arrest, he or she must have reasonable grounds to believe that the person to be arrested is apparently in the process of committing an indictable offence in his or her presence. »

1487. R. c. Sirois, [1999] J.Q. No. 1079 (C.A.).

1488. R. c. Sirois, [1999] J.Q. No. 1079, par. 7 (C.A.).

1489. R. c. Yurko, [2004] A.J. No. 1077, par. 16.

1490. R. c. Matthews, [2001] B.C.J. No. 2111.

1491. R. c. Matthews, [2001] B.C.J. No. 2111, par. 66.

1492. R. c. Huot, [2008] J.Q. No. 12646.

1493. Art. 494(3) C.cr.

1494. R. c. Cunningham, [1979] M.J. No. 355, par. 17 :

« It has been held that the term “forthwith” does not mean “instantly”. See R. vs. Vogin, [1966] C.C.C. 103 at 107 and The King vs. Cuthbertson, 1949 CanLII 267 (FC), [1949] 4 D.L.R. 369. The term has been held to mean as soon as is “reasonably possible or practicable under all the circumstances”. See R. vs. Bell, 1968 CanLII 491 (SK QB), [1969] 2 C.C.C. 9. Certainly the Accused did not turn their prisoner over to the police instantly, but, in my opinion, they did turn him over as soon as was reasonable and practicable in accordance with the instructions they had received from the police. »

1495. Giguère c. R., [2017] J.Q. No. 11851.

1496. Giguère c. R., [2017] J.Q. no 11851, par. 41. Voir sur ce point R. c. Lerke, 1986 ABCA 15 (CanLII), [1986] A.J. No. 27 (C.A. Alb.); R. c. Gendron-Grondines, [2020] J.Q. No. 2437, par. 115-117 :

« On peut regrouper les situations où une personne ou un organisme privé ne peut être considéré comme un agent de l’État en deux catégories :

– Si l’intervention de l’individu peut être reliée à celle des représentants de l’État. L’individu ou l’organisme agit alors selon les directives, les demandes ou les ordres des représentants de l’État. C’est le cas, par exemple, du codétenu ou d’un visiteur qui est mandaté par la police pour obtenir du suspect détenu des confidences quant aux crimes qu’on lui reproche ou, par exemple, un employé de gare routière qui ouvre un casier loué à la demande des policiers afin que ces derniers saisissent sans mandat la drogue qui s’y trouve.

– Lorsqu’un individu ou un organisme privé est chargé par la loi d’une fonction gouvernementale précise. Ce fut le cas pour les hôpitaux, des organismes privés, chargés d’appliquer la Loi sur l’assurance hospitalisation de la Colombie-Britannique.

Donc, en principe, la Charte ne s’applique pas aux actions posées par les agents de sécurité. Elle s’appliquera si la preuve établit que ceux-ci peuvent être considérés comme des agents de l’État selon l’une des deux situations mentionnées précédemment. »

Voir toutefois R. c. Skeir, 2005 NSCA 86 (CanLII), [2005] N.S.J. No. 209, par. 18 et 21 (C.A. N.-É.) :

« As counsel for Mr. Skeir points out, Buhay concerned a search, not an arrest, and the Supreme Court did not have to address the interesting issue of whether s. 494 of the Code expressly delegates the arrest power. Nonetheless, the suggestion that s. 494 expressly delegates or abandons the police arrest function, which would subject private security officers’ arrests to the Charter, is inconsistent with the message in Buhay, para. 31. The private security guard’s arrest function may be subject to the Charter only if, after a case specific analysis, it is determined that he acted as a state or police agent, a characterization which Mr. Skeir’s factum acknowledges to be inapplicable here. My interpretation of Buhay is consistent with the Ontario Court of Appeal’s conclusion in R. v. N.S., [2004] O.J. No. 290.

[...]

In summary, there has been neither an express delegation nor an abandonment in whole or part, of the police arrest power to private security officers such as Mr. Novelli. His arrest of Mr. Skeir was not subject to the Charter. The trial judge made no error in principle or in the applicable rules of law and no unreasonable finding. I would dismiss the appeal on this basis. »

1497. Giguère c. R., [2017] J.Q. No. 11851, par. 54.

1498. Giguère c. R., [2017] J.Q. No. 11851, par. 58.

1499. Corbeil c. R., [2018] J.Q. No. 11449, par. 48-50 :

« Lors de l’audience en appel, les parties ont admis que l’appelant avait le pouvoir légal d’arrestation sans mandat de l’article 494 C.cr., sous réserve de l’utilisation d’une force nécessaire et raisonnable.

En effet, le citoyen peut, comme l’agent de la paix qui effectue une arrestation, utiliser la force nécessaire pour contraindre et fouiller la personne arrêtée et la détenir jusqu’à l’intervention du policier.

Ainsi, le législateur est intervenu pour dissiper tout doute à cet égard en adoptant l’article 494(4) C.cr., lequel précise que le citoyen bénéficie de la protection de l’article 25 C.cr. permettant l’emploi de la force nécessaire et raisonnable. »

1500. Corbeil c. R., [2018] J.Q. No. 11449, par. 62 :

« D’emblée, il est admis que l’appelant avait le pouvoir légal dévolu par l’article 494 C.cr. et qu’il a procédé à l’arrestation de la plaignante en vertu de l’article 494(2)a) C.cr. »

1501. Corbeil c. R., [2018] J.Q. No. 11449, par. 32.

1502. R. c. Desrosiers, [2006] J.Q. No. 2580, par. 14 :

« Bien que son titre de constable auxiliaire puisse le laisser croire, il ne jouissait d’aucun pouvoir qui aurait pu être attribué aux termes de la Loi sur la police par le ministère de la Sécurité publique. »

1503. Pour une définition de ce concept, voir art. 2 du Code criminel (« agent de la paix »).Voir également R. c. Decorte, 2005 CSC 9 (CanLII), [2005] 1 R.C.S. 133, par. 21 :

« Enfin, tous les membres du Service de police Anishinabek sont des “agents de la paix” au sens de l’al. c) de la définition de cette expression au Code criminel. Le paragraphe 254(3) du Code autorisait donc l’agent Johnson, en tant qu’”agent de la paix”, à ordonner à M. Decorte de fournir un échantillon d’haleine et, en compagnie de l’agent Pelletier, à arrêter M. Decorte pour refus d’obtempérer à cet ordre. »

1504. R. c. Beck, [1999] J.Q. No. 783, par. 14,15 et 19 :

« Le législateur parle d’un agent de la paix sans y joindre l’expression “dans l’exécution de ses fonctions” ou “dans l’exercice de ses fonctions” que l’on retrouve, entre autres, aux textes d’infractions prévues aux articles 129 et 270 du Code criminel.

En présumant que le législateur possède une certaine cohérence législative dans la rédaction de ses lois, il faut conclure que cette exigence n’existe pas en matière d’arrestation sans mandat et qu’un agent de la paix est un officier tel que défini à l’article 2 du Code criminel, soit “tout officier de police, agent de police, huissier ou autre personne employée à la préservation et au maintien de la paix publique [...]”.

Pour déterminer la légalité de l’arrestation, il faut examiner si l’agent de la paix se retrouve dans les circonstances prévoyant l’exercice de ce pouvoir qui sont édictées à l’article 495 du Code criminel. En l’espèce, comme l’agent de la paix au moment où il a constaté l’infraction provinciale (omission d’effectuer l’arrêt obligatoire), n’a pas trouvé une personne en train de commettre une infraction criminelle, l’alinéa 1 b) ne peut s’appliquer. C’est en poursuivant la filature du véhicule qu’il a acquis la conviction que le contrevenant avait commis un acte criminel et c’est l’alinéa 495 (1) a) du Code criminel qui doit s’appliquer. »

R. c. Rozon, [2002] J.Q. No. 6351, par. 17 :

« Il est reconnu que l’accusé, même s’il n’était pas en devoir le 15 septembre 2001, gardait son statut d’agent de la paix de même que son pouvoir d’arrestation afférent à ses fonctions. »

1505. R. c. Janvier, 2007 SKCA 147 (CanLII), [2007] S.J. No. 646, par. 15 et 16 (C.A. Sask.) :

« The trial judge spoke of “reasonable and probable grounds” and did not identify the section under which he was addressing the police power of arrest. Judges and authors continue to speak of “reasonable and probable grounds” (see, e.g., R. v. Storrey), perhaps because of the way in which s. 495(1)(a) was amended. Section 495(1)(a) was re-enacted as part of the 1985 revision of statutes (see Criminal Code, R.S.C. 1985, c. C-46 which came into effect December 12, 1988). Section 495(1)(a) was formerly s. 450(1)(a), prior to the 1985 revision, which read :

450(1) A peace officer may arrest without warrant

(a) a person who has committed an indictable offence or who, on reasonable and probable grounds, he believes has committed or is about to commit an indictable offence. [Emphasis added.]

“[A]nd probable” was dropped in the revision, but s. 4 of the Revised Statutes of Canada, 1985 makes it clear that no change in the law was effected :

4 The Revised Statutes shall not be held to operate as new law, but shall be construed and have effect as a consolidation of the law as contained in the Acts and portions of Acts repealed by section 3 and for which the Revised Statutes are substituted.

In Baron v. Canada, the Supreme Court of Canada indicated that “reasonable grounds” and “reasonable and probable grounds” import the same standard, as the word “reasonable” alone encompasses a requirement of probability. The standard is the same for both “reasonable grounds” and “reasonable and probable grounds” : one of credibly based probability. The normal statutory phrase, however, is “reasonable grounds.” Thus, I do not read anything more into the trial judge’s reasons than a repetition of a common error, which is permitted by s. 4 of the Revised Statutes of Canada, 1985, and conclude Mr. Janvier could only have been arrested under s. 495(1)(b). »

Voir également R. c. Webster, [2008] B.C.J. No. 2234, par. 47 (C.A. C.-B.); R. c. Glendinning, [2019] B.C.J. No. 1990, par. 2 (C.A. C.-B.), autorisation d’appeler refusée [2019] C.S.C.R. No. 460.

1506. R. c. Beaupré, [2000] J.Q. No. 5212, par. 21 (C.A.) : « L’existence de motifs raisonnables doit se justifier au-delà des simples soupçons qu’un agent de la paix peut avoir au sujet d’une personne. » R. c. Dhillon, 2016 ONCA 308 (CanLII), [2016] O.J. No. 2216, par. 25 (C.A. Ont.) :

« The standard does not require that the police demonstrate anything more than reasonable and probable grounds. They are not required to establish a prima facie case for conviction before making the arrest. The standard is met at the point where credibly-based probability replaces suspicion. Of course, the totality of the circumstances is to be considered. »

Voir enfin R. c. Canary, 2018 ONCA 304 (CanLII), [2018] O.J. No. 1786, par. 23 (C.A. Ont.); R. c. Simon, [2020] N.S.J. No. 114, par. 13 (C.A. N.-É.).

1507. R. c. Storrey, 1990 CanLII 125 (CSC), [1990] 1 R.C.S. 241, par. 14 :

« Il ressort clairement du par. 450(1) que la police devait avoir des motifs raisonnables et probables de croire que l’appelant avait commis l’infraction de voies de fait graves, sans quoi elle ne pouvait l’arrêter. En l’absence de cette importante mesure protectrice, même la société la plus démocratique ne pourrait que trop facilement devenir la proie des abus et des excès d’un État policier. Afin de sauvegarder la liberté des citoyens, le Code criminel exige que la police, lorsqu’elle tente d’obtenir un mandat d’arrestation, démontre à un officier de justice qu’elle a des motifs raisonnables et probables de croire que la personne à arrêter a perpétré l’infraction. Dans le cas d’une arrestation sans mandat, il importe encore davantage que la police établisse l’existence de ces mêmes motifs raisonnables et probables justifiant l’arrestation. »

1508. R. c. Canary, 2018 ONCA 304 (CanLII), [2018] O.J. No. 1786, par. 21 (C.A. Ont.);

« Where a peace officer believes on reasonable grounds that a person has committed an indictable offence, the officer may make a warrantless arrest : s. 495(1)(a) of the Criminal Code. There is both a subjective and objective component to the reasonable grounds inquiry. To fulfill the subjective requirement, the officer must hold an honest belief that the person committed an offence. The officer “must subjectively believe that there are reasonable grounds to make the arrest” : R. v. Saciragic, 2017 ONCA 91, leave to appeal refused, [2017] S.C.C.A. No. 106, at para. 16. To fulfill the objective requirement, the officer’s belief must be objectively reasonable in the circumstances known to the officer at the time of arrest : R. v. Storrey, 1990 CanLII 125 (CSC), [1990] 1 S.C.R. 241, at pp. 250-51; R. v. Bush, 2010 ONCA 554, 101 O.R. (3d) 641, at para. 38; Saciragic, at para. 16. The objective inquiry asks whether “a reasonable person, standing in the shoes of the police officer, would have believed that reasonable and probable grounds existed to make the arrest” : Storrey, at pp. 250-51. »

1509. Sur l’importance de la croyance subjective du policier, voir R. c. Feeney, 1997 CanLII 342 (CSC), [1997] 2 R.C.S. 13, par. 29 :

« Peu importe qu’il ait eu raison ou non de conclure que la norme objective était respectée, ce avec quoi j’exprime mon désaccord plus loin, le juge du procès a commis une erreur en invoquant uniquement une norme objective. L’article 495 prévoit clairement que l’agent de la paix ne peut arrêter une personne que s’il croit, pour des motifs raisonnables, qu’elle a commis un acte criminel. Une norme objective a été ajoutée dans l’arrêt Storrey, précité, mais elle n’a pas remplacé la condition subjective : voir Storrey, précité, à la p. 250. En fait, il serait incompatible avec l’esprit de la Charte de permettre à un policier d’effectuer une arrestation sans mandat même s’il ne croit pas à l’existence de motifs raisonnables d’y procéder. Par conséquent, l’absence de croyance subjective rendait l’arrestation illégale dans le cas qui nous occupe, indépendamment de l’existence de motifs objectifs de l’effectuer et de l’incidence de la Charte sur les pouvoirs de la police d’entrer sans mandat dans une maison d’habitation pour y effectuer une arrestation. »

1510. R. c. Storrey, 1990 CanLII 125 (CSC), [1990] 1 R.C.S. 241, par. 16 :

« Il existe une autre protection contre l’arrestation arbitraire. Il ne suffit pas que l’agent de police croie personnellement avoir des motifs raisonnables et probables d’effectuer une arrestation. Au contraire, l’existence de ces motifs raisonnables et probables doit être objectivement établie. »

Voir sur ce point R. c. Whyte, 2011 ONCA 24 (CanLII), [2011] O.J. No. 126 (C.A. Ont.); R. c. Brown, 2012 ONCA 225 (CanLII), [2012] O.J. No. 1569 (C.A. Ont.).

1511. R. c. Feeney, 1997 CanLII 342 (CSC), [1997] 2 R.C.S. 13, par. 30.

1512. Pour une application de ce principe, voir R. c. Latimer, 1997 CanLII 405 (CSC), [1997] 1 R.C.S. 217, par. 27 :

« Le juge du procès a conclu expressément qu’il existait des motifs raisonnables d’arrêter M. Latimer, et je ne vois aucune raison d’altérer cette conclusion. Il est manifeste que les policiers, en dépit du fait qu’ils avaient décidé de ne pas procéder à l’arrestation de M. Latimer, croyaient subjectivement qu’ils avaient des motifs raisonnables de l’arrêter. Ils avaient décidé de ne pas le faire parce qu’ils pensaient, au moment de l’arrestation, qu’ils ne disposaient pas d’assez de preuves pour obtenir un verdict de culpabilité. Cela ressort très clairement du témoignage de l’agent Lyons qui a déclaré que [Traduction] “certainement, il existait des motifs de l’arrêter” et que “[c]ertainement, il y avait des motifs raisonnables et probables de l’arrêter”. Objectivement, une personne raisonnable se trouvant à la place des agents ayant procédé à l’arrestation aurait conclu à l’existence de motifs raisonnables. Ces motifs comprenaient : la présence de monoxyde de carbone dans le sang de Tracy, indiquant fortement qu’elle avait été empoisonnée; le fait que la possibilité d’un décès accidentel était extrêmement faible; le fait que son état excluait la thèse du suicide; et finalement le fait que l’accusé avait un mobile et avait eu la possibilité de commettre le crime. J’estime, par conséquent, que le juge du procès a eu raison de conclure qu’il existait des motifs raisonnables et probables de procéder à une arrestation. »

1513. R. c. Storrey, 1990 CanLII 125 (CSC), [1990] 1 R.C.S. 241, par. 17.

1514. R. c. Messina, [2013] B.C.J. No. 2521 (C.A. C.-B.); R. c. Wilson, [2012] B.C.J. No. 2731 (C.A. C.-B.).

1515. R. c. Fadel, [2015] J.Q. No. 6909 (C.A.). Voir également Lévesque Mandacini c. R., [2014] J.Q. No. 8430 (C.A.).

1516. R. c. Mackenzie, 2013 CSC 50 (CanLII), [2013] 3 R.C.S. 250, par. 62.

1517. Voir sur ce point R. c. Glendinning, [2019] B.C.J. No. 1990, par. 36 (C.A. C.-B.), autorisation d’appeler refusée [2019] C.S.C.R. No. 460 :

« Again, I am unable to agree with this argument. As noted in Gill, the police officer had to make his decision based on what he did observe, not on what he did not see. In my view the conduct observed by the officers was highly suspicious and it was not unreasonable for the police officers here to form the opinion that a drug transaction had occurred and that the driver of the truck was trafficking in drugs on the day in question. While it is true that police must not take a cynical or highly suspicious approach to what they see, neither should they be naïve or overly cautious in enforcing the laws of the land. Their belief must be reached based on the totality of the circumstances, again including their particular expertise and experience in drug investigations »

1518. R. c. Nolet, 2010 CSC 24 (CanLII), [2010] 1 R.C.S. 851, par. 48 :

« Comme il est dit dans R. c. Marin, [1994] O.J. No. 1280 (QL) (Div. gén.), par. 16, approuvé dans R. c. Jacques, 1996 CanLII 174 (CSC), [1996] 3 R.C.S. 312, par. 25 : “Aucun indicateur pris isolément n’est vraisemblablement suffisant pour justifier la rétention et la saisie. L’ensemble est plus grand que la somme de chacune des parties prises individuellement.” »

1519. R. c. Fadel, [2015] J.Q. No. 6909, par. 43 (C.A.).

1520. R. c. Debot, 1989 CanLII 13 (CSC), [1989] 2 R.C.S. 1140; R. c. Beaupré, [2000] J.Q. No. 5212, par. 25 (C.A.) :

« Dans l’arrêt Debot, il s’agissait d’évaluer la légalité d’une fouille sans mandat plutôt qu’une arrestation sans mandat. Toutefois, ces principes s’appliquent chaque fois qu’un agent de la paix agit sur la foi d’éléments fournis par un informateur (R. c. Plant, 1993 CanLII 70 (CSC), [1993] 3 R.C.S. 281, à la p. 297). »

1521. R. c. Debot, 1989 CanLII 13 (CSC), [1989] 2 R.C.S. 1140, par. 53.

1522. R. c. Debot, 1989 CanLII 13 (CSC), [1989] 2 R.C.S. 1140, par. 53 (phrase exacte prise dans le résumé de l’arrêt).

1523. R. c. Dupuis, [2004] J.Q. No. 1011, par. 21 (C.A.) :

« Par contre, il ne s’agit tout de même pas d’un informateur anonyme puisqu’il était connu de la police. Le fait que l’informateur s’identifie à la police donne plus de garantie de fiabilité que si l’on était en présence d’une information de source anonyme : il est en effet plus facile de mentir lorsqu’on le fait de façon anonyme. Mais le seul fait de s’être identifié n’est pas à lui seul un facteur qui permet d’atteindre un degré de fiabilité élevé puisqu’il n’établit pas que cet informateur a déjà, dans le passé, fourni une information pertinente et vérifiée. »

Voir également R. c. Chioros, 2019 ONCA 388 (CanLII), [2019] O.J. No. 2426, par. 17-20 (C.A. Ont.).

1524. Voir sur ce point R. c. Warford, [2001] N.J. No. 330 (C.A. T.-N.); R. c. Day, 2014 NLCA 14 (CanLII), [2014] N.J. No. 68, par. 50 (C.A. T.-N.), conf. à 2014 CSC 74 (CanLII), [2014] 3 R.C.S. 614 :

« Constable Emberley testified as to Source B’s reliability. The officer stated that he had received information from Source B on 20 occasions, and whenever the police had acted on his or her information in the past it had proved to be accurate. He said that Source B’s motivation for informing was financial, and that he or she was paid only if the tips were accurate. Constable Emberley said that the police had never been misled by Source B, nor had Source B ever exaggerated his or her information. Importantly, he also stated that Source B’s information was based on personal observations and conversations with Mr. Day and his roommate. »

R. c. Pilbeam, 2018 MBCA 128 (CanLII), [2018] M.J. No. 328, par. 17 (C.A. Man.) :

« It was also open to the trial judge to view the CI as a credible source. The CI was not anonymous or untried; he or she was a proven reliable informant. According to the ITO, there were indicia of the CI’s reliability (see Garofoli at p 1457). Previously, the CI had “never” provided information that turned out to be “false or unreliable.” In the past, the CI had provided general information about the drug trade in Winnipeg known by police to be “true and accurate” because it had been confirmed from other investigative sources. As well, the CI had given specific information that had led to “several arrests, seizures of drugs and Canadian currency.” In a case where police rely on an anonymous or untried informant, the quality of the information provided and the existence of corroborative evidence will be of greater concern on the Garofoli review than in the case where the informant has a proven track record, as is the case here (see Debot at pp 1170-71; R v. Duncan (W), 2004 MBCA 64 at para 29; R v. Pilkington (No 1), 2013 MBQB 79 at paras 57-58; and R v. Zettler, 2015 ONCA 613 at para 7). »

1525. R. c. Debot, 1989 CanLII 13 (CSC), [1989] 2 R.C.S. 1140, par. 53.

1526. Girard c. R., [2009] J.Q. No. 9863 (C.A.).

1527. R. c. Desbiens, [1996] J.Q. No. 4036, par. 18 (C.A.) :

« La Cour ne peut pas suivre l’intimé sur cette voie. Les policiers peuvent tenir compte des résultats de leur enquête, même sommaire, avant de procéder, ou non, à l’arrestation sans mandat et à la fouille d’un individu. En l’espèce, les informations obtenues par les policiers après leur départ du poste (présence de la bicyclette, présence de l’intimé dans l’établissement, présence de ce dernier à l’endroit décrit par l’informateur) et la réaction de l’intimé alors que le policier Tremblay pénètre dans le bar (il met la main dans la poche de son manteau) et l’invite à l’accompagner à l’extérieur (il renverse la table puis se précipite en courant vers la sortie arrière) sont pertinentes à la décision des policiers de procéder à l’arrestation de l’intimé, comme ils pensaient le faire en quittant le poste. L’inverse aurait pu se produire; les événements auraient pu amener les policiers à douter des informations qu’ils avaient obtenues et à décider, faute de motifs raisonnables, de ne pas procéder à l’arrestation. Puisque ces faits étaient pertinents à la décision prise par les policiers, ils sont pertinents à l’analyse que la requête de l’intimé invitait le juge du procès à faire. »

1528. R. c. Debot, 1989 CanLII 13 (CSC), [1989] 2 R.C.S. 1140, par. 63 :

« À mon avis, il n’est pas nécessaire que la police confirme tous les détails des renseignements fournis par l’informateur quand le déroulement des événements observés correspond assez bien à la séquence prévue pour écarter la possibilité d’une coïncidence fortuite. Comme je l’ai déjà signalé toutefois, le niveau de vérification peut être plus élevé quand les policiers agissent sur la foi de renseignements d’un informateur dont ils ne peuvent évaluer la crédibilité ou s’ils ont moins de détails et que le risque de coïncidence fortuite est plus grand. »

R. c. Simon, [2020] N.S.J. No. 114, par. 38 (C.A. N.-É.) :

« While confirmation of criminal activity or suspicious circumstances is not necessary in all cases, in my view, such confirmation was necessary here in light of the fact that the informants had not been proven reliable nor credible and the information provided was not sufficiently detailed to be considered compelling. »

1529. R. c. Debot, 1989 CanLII 13 (CSC), [1989] 2 R.C.S. 1140, par. 53 :

« Je n’affirme pas que chacune de ces questions constitue un critère distinct. Je me range plutôt à l’avis du juge Martin d’après lequel [Traduction] “l’ensemble des circonstances” doit satisfaire au critère du caractère raisonnable. La valeur des renseignements sous deux aspects peut, dans une certaine mesure, compenser leur faiblesse sous le troisième. »

1530. R. c. Debot, 1989 CanLII 13 (CSC), [1989] 2 R.C.S. 1140, par. 59 :

« Il va de soi que d’autres considérations s’appliquent quand la police doit décider en fonction d’un renseignement anonyme ou fourni par un informateur qui n’a pas fait ses preuves. Dans ces circonstances, la qualité des renseignements et des preuves corroborantes doit être suffisante pour suppléer à l’impossibilité d’évaluer la crédibilité de la source des renseignements. »

Voir sur ce point la décision de la Cour d’appel dans R. c. Bennett, [1996] J.Q. No. 545, par. 34 et 36 (C.A.) :

« La nature des éléments dont disposait le policier, à la suite de sa rencontre avec une informatrice qu’il ne connaît pas et qui refuse de répondre à toutes ses interrogations les plus élémentaires (Qui êtes-vous ? D’où venez-vous et pourquoi faites-vous cette dénonciation ?) justifiait une démarche ultérieure de sa part, soit de se rendre sur les lieux et de poursuivre son enquête.

[...]

On peut imaginer une foule d’éléments confirmatifs qu’aurait pu ici explorer le policier, par exemple, quant à l’identité des deux personnes à l’extérieur de l’immeuble, l’identité de l’appelante ou de l’homme qui la tenait dans ses bras, ou encore, des éléments qui auraient pu se dégager d’observations additionnelles ou de communications avec la brigade des stupéfiants dont incidemment le policier ne faisait pas partie. »

1531. R. c. Beaupré, [2000] J.Q. No. 5212, par. 33 (C.A.).

1532. R. c. Jowett Work, [2019] B.C.J. No. 1198, par. 20-24 (C.A. C.-B.) :

« In this case, the police officers purported to arrest the respondent under s. 495(1)(a) of the Criminal Code, which permits a peace officer to arrest without warrant :

a person who has committed an indictable offence or who, on reasonable grounds, he believes has committed or is about to commit an indictable offence ...

It is not in dispute that this section requires that the arresting officer subjectively believe there are reasonable and probable grounds to arrest, and that those grounds are objectively reasonable : Storrey at 250.

The offence for which the respondent was initially arrested was theft, contrary to s. 334 of the Criminal Code. While theft over $5,000 is an indictable offence, theft under $5,000 is a hybrid offence; i.e., an offence that can be prosecuted either by indictment or by summary conviction.

As recognized by this court in R. v. Ashby, 2013 BCCA 334 at para. 8, the power to arrest without warrant under s. 495(1)(a) extends to hybrid offences by virtue of s. 34(1) of the Interpretation Act, R.S.C. 1985, c. I-21 :

34(1) Where an enactment creates an offence,

(a) the offence is deemed to be an indictable offence if the enactment provides that the offender may be prosecuted for the offence by indictment …

See also : R. v. S (WEQ), 2018 MBCA 106 at paras. 19, 20. »

1533. R. c. Stevens, [1976] N.S.J. No. 476, par. 24 (C.A. N.É.) :

« In order to arrest a person without a warrant for a summary conviction offence it is not sufficient for the arresting officer to show that he had reasonable and probable grounds to believe such offence had been, or was about to be, committed; rather, he must go further and show that he found a situation in which a person was apparently committing an offence. »

Voir également R c. Capocci, [1982] J.Q. No. 231, par. 20 (C.A.) :

« Le premier juge n’a pas fait la distinction entre les deux sortes d’infractions. À mon avis la distinction n’aurait pas été inutile puisque le jury a certainement été impressionné par le fait que l’appelante avait fracassé un cadenas et causé certains dommages à une porte. Ces dommages, d’une valeur de moins de 50,00 $, avaient été causés hors la présence de l’agent. Cette infraction, punissable sur poursuite sommaire de culpabilité, commise hors la présence de l’agent, ne pouvait donc pas justifier l’arrestation. Même si l’agent a bien dit au jury que ce n’est pas pour cette raison qu’il avait mis l’appelante sous arrêt, le jury, sans directives sur le sujet, a pu croire que le bris du cadenas a constitué une justification supplémentaire à l’arrestation. »

1534. Desrosiers c. R., [2018] J.Q. No. 3625 (C.A.).

1535. R. c. Alexson, 2015 MBCA 5 (CanLII), [2015] M.J. No. 14 (C.A. Man.).

1536. R. c. Alexson, 2015 MBCA 5 (CanLII), [2015] M.J. No. 14, par. 26 (C.A. Man.). (Notre traduction)

1537. R. c. Alexson, 2015 MBCA 5 (CanLII), [2015] M.J. No. 14, par. 26 (C.A. Man.).

1538. R. c. Alexson, 2015 MBCA 5 (CanLII), [2015] M.J. No. 14, par. 27 (C.A. Man.).

1539. R. c. Alexson, 2015 MBCA 5 (CanLII), [2015] M.J. No. 14, par. 28 (C.A. Man.).

1540. R. c. Alexson, 2015 MBCA 5 (CanLII), [2015] M.J. No. 14, par. 29 (C.A. Man.).

1541. R. c. Biron, 1975 CanLII 13 (CSC), [1976] 2 R.C.S. 56.

1542. R. c. Biron, 1975 CanLII 13 (CSC), [1976] 2 R.C.S. 56, par. 48.

1543. R. c. Biron, 1975 CanLII 13 (CSC), [1976] 2 R.C.S. 56, par. 41.

1544. R. c. Roberge, 1983 CanLII 120 (CSC), [1983] 1 R.C.S. 312.

1545. Demers c. R., [2016] J.Q. No. 10818, par. 44 :

« Enfin, la preuve permet de conclure que sans l’arrestation, l’infraction reprochée à l’appelante pour laquelle elle a été arrêtée se serait poursuivie et les éléments de preuve relatifs à cette infraction n’auraient pu être recueillis. »

Voir également R. c. Tremblay, [2015] J.Q. No. 845, par. 68; R. c. Gallant, [2015] J.Q. No. 2898; R. c. Suriakumar, [2013] J.Q. No. 14141.

1546. R. c. MacCannell, [2014] B.C.J. No. 2069, par. 26 et 33 (C.A. C.-B.) :

« Subsection (b) permits an officer to arrest an individual who is committing a criminal offence either summary conviction or indictable.

Thus, Ashby and Boyd establish that an arrest for possession of marihuana in the circumstances of Ashby and this case is based on ss. (b) not ss. (a). As the Crown argues in this case, ss. (b) provides for the arrest of an individual whom the arresting officer « finds committing any offence », whether summary or indictable. The significance of the arrest being under ss. (b) is that proof of the offence of possession does not depend on the amount of marihuana being greater than 30 grams. Mr. MacCannell’s argument that the officer could not have known or have had reasonable grounds to believe he was in possession of more than 30 grams is irrelevant. »

1547. Ce cas n’est pas sans analogie avec celui étudié dans l’arrêt R. c. Gamracy, 1973 CanLII 25 (CSC), [1974] R.C.S. 640. Le suspect ayant résisté à son arrestation, une altercation s’ensuivit au cours de laquelle le policier fut blessé après avoir été projeté au sol. S’agissant d’une arrestation sans mandat effectuée en vertu d’un mandat non exécuté mais toujours valide, le policier n’avait pas à montrer le mandat à l’appelant ni à l’informer de sa teneur. Ici, le simple fait de mentionner à l’appelant qu’il était arrêté en raison d’un mandat exécutoire suffisait en l’espèce.

1548. R. c. Jowett Work, [2019] B.C.J. No. 1198, par. 25 (C.A. C.-B.) :

« It imposes a further duty on a police officer not to arrest a person without warrant for a hybrid offence where the officer “believes on reasonable grounds” that the public interest may be satisfied without an arrest, for the reasons set out in ss. 495(2)(d)(i), (ii) or (iii) and (e) :

495 ... (d) he believes on reasonable grounds that the public interest, having regard to all the circumstances including the need to

(i) establish the identity of the person,

(ii) secure or preserve evidence of or relating to the offence, or

(iii) prevent the continuation or repetition of the offence or the commission of another offence,

may be satisfied without so arresting the person, and

(e) he has no reasonable grounds to believe that, if he does not so arrest the person, the person will fail to attend court in order to be dealt with according to law. »

Voir également Tremblay c. Ottawa (City) Police Services Board, [2018] O.J. No. 2870, par. 89 (C.A. Ont.) :

« Section 495(2)(d) of the Criminal Code stipulates, in part, that a peace officer, despite having grounds to arrest, shall not arrest where he or she believes on reasonable grounds that the public interest may be satisfied without arresting the person. »

1549. R. c. Jowett Work, [2019] B.C.J. No. 1198, par. 25 (C.A. C.-B.).

1550. R. c. Fortune, [2012] B.C.J. No. 2850, par. 87 :

« I agree with defence counsel’s submission that Parliament intended s. 495(1) and (2) of the Code to be read as a whole. Section 495(1) empowers officers; s. 495(2) limits an officer’s powers of arrest and provides the principal basis upon which an officer is to exercise their discretion before arresting and searching a suspect. »

1551. R. c. Jowett Work, [2019] B.C.J. No. 1198, par. 27 (C.A. C.-B.) :

« What this means is that the primary question in a case of a warrantless arrest for an indictable offence (including a hybrid offence) is whether the arresting officer had reasonable and probable grounds under s. 495(1)(a). In this case, the trial judge considered the submissions of counsel on this issue, but failed to make any determination. Instead, she considered only s. 495(2) “as the applicable section”. In doing so, it is my view that she erred. »

Tremblay c. Ottawa (City) Police Services Board, [2018] O.J. No. 2870, par. 91 (C.A. Ont.) :

« Before moving on, I observe that s. 495(2) only comes into play once s. 495(1) is satisfied and the peace officer already has grounds to arrest. Section 495(2) does not require the officer to conduct additional investigation to determine if the public interest may be satisfied without arresting the person. »

1552. Tremblay c. Ottawa (City) Police Services Board, [2018] O.J. No. 2870, par. 93 et 94 (C.A. Ont.) :

« Section 495(2) places a duty on a police officer who has grounds for arrest under s. 495(1), to not arrest where he or she believes on reasonable grounds that the public interest may be satisfied without arresting the person. The phrase “believes on reasonable grounds” makes clear that the test for applying the limitation in s. 495(2) is both subjective and objective. The police officer must believe that the public interest can be satisfied without arrest, and that subjective belief must be objectively reasonable. Both components must be satisfied. To be clear, it is not enough for a person alleging a violation of s. 495(2) to establish that, objectively, the public interest can be satisfied without an arrest. The person must also establish the police officer believed the public interest could be satisfied without an arrest but went ahead and made the arrest in any event.

The trial judge set out the correct test for s. 495(2), citing Collins. She said, at para. 86, that the respondents “have to prove that Sergeant Aylen, Officer Aspilaire, and Officer Ryan believed on reasonable grounds that the public interest, having regard to all of the circumstances, could be satisfied without arresting Mr. Tremblay”. It is not clear that she found the subjective component of the test was satisfied. She did say at para. 87, “I am satisfied that, not only could the public interest have been satisfied without Mr. Tremblay being arrested, but also, Sergeant Aylen realized that at the time”. »

1553. R. c. Jowett Work, [2019] B.C.J. No. 1198 (C.A. C.-B.).

1554. R. c. Jowett Work, [2019] B.C.J. No. 1198, par. 32 (C.A. C.-B.) :

« The effect of this provision is that a police officer still acts lawfully and the arrest is lawful as long as the Crown establishes that the officer had reasonable and probable grounds to arrest under s. 495(1)(a) or (b) : R. v. Adams (1972), 21 C.R.N.S. 257 (Sask. C.A.); R. v. McKibbon (1973), 1973 CanLII 1395 (BC CA), 12 C.C.C. (2d) 66 (B.C.C.A.); Re Bunn and the Queen (1986), 1986 CanLII 4735 (MB QB), 29 C.C.C. (3d) 133 (Man. Q.B.); R. v. Cayer(1988), 28 O.A.C. 105 (C.A.). Subsection (3)(b) provides an exception to this deeming provision only in a non-criminal context (as in Tremblay) where noncompliance with s. 495(2) is established by a plaintiff or applicant. »

1555. R. c. Jowett Work, [2019] B.C.J. No. 1198, par. 39 (C.A. C.-B.) :

« Therefore, it is my view that an arrest that is lawful under s. 495(1) cannot be rendered unlawful in a criminal proceeding due only to a peace officer’s failure to properly consider the public interest in an arrest as set out in s. 495(2), and the trial judge erred in concluding that the arrest of the respondent was unlawful because the requirements of s. 495(2) had not been satisfied. »

Voir également R. c. Cayer, [1988] O.J. No. 1120 (C.A. Ont.) :

« Section 450(3)(a) provides, however, that notwithstanding s-s. 2, a peace officer exercising his power under s. 450(1) is deemed to be acting lawfully and in the execution of his duty for the purposes of any proceedings under the Code or any other Act of Parliament. Thus, a peace officer exercising his power of arrest without warrant under s. 450(1) is deemed by s. 450(3) to be acting lawfully for the purpose of any proceedings under the Code or any other Act of Parliament, even though, in arresting a person without warrant he has breached the duty imposed on him by s. 450(2) not to arrest the accused in the circumstances therein specified : (1972), 21 C.R.N.S. 257 (Sask. C.A.); R. v. McKibbon (1973), 1973 CanLII 1395 (BC CA), 12 C.C.C. (2d) 66 (B.C.C.A.)»

1556. R. c. Chamberland, [2010] J.Q. No. 24205, par. 8.

1557. Voir également Nadon c. R., [2008] J.Q. No. 9986, par. 1 (C.A.) :

« La Cour est d’avis qu’une arrestation sans mandat de l’appelant pouvait légalement être faite le 19 février 2007 en vertu de l’article 495 C.cr. Si les policiers avaient des motifs raisonnables de croire qu’un acte criminel, soit le trafic de drogues illicites, était en train d’être commis ou sur le point de l’être, et qu’à défaut d’arrestation la preuve pouvait être détruite ou l’infraction commise. »

1558. R. c. Gagné, [2007] J.Q. No. 2202, par. 28-31.

1559. Art. 495(2)e) C.cr.

1560. Collins c. Brantford Police Services Board, 2001 CanLII 4190 (ON CA), [2001] O.J. No. 3778, par. 14 (C.A. Ont.) :

« The real question in this case turned on the limitation on the arrest power in s. 495(2). I point out, however, that by virtue of s. 495(3), the burden of proving that the arrest was unlawful because of non-compliance with s. 495(2) was on the plaintiff. Thus, in the words of s. 495(2), it was for the plaintiff to establish that Constable Sawkins believed on reasonable grounds that the public interest, having regard to all the circumstances, could be satisfied without arresting him. The trial judge and the Divisional Court judge both appeared to consider that this issue was determined by the finding that the arrest was not necessary to prevent the continuation or repetition of the offence or the commission of another offence within the meaning of s. 495(2)(d)(iii). In my view, they were in error. The decision not to make a warrantless arrest for a hybrid offence must be made in the public interest having regard to all of the circumstances. The factors enumerated in s. 495(2)(d) are only some, albeit the most important, of the factors to which the officer’s attention is expressly directed. The overriding consideration remains the public interest. In my view, the plaintiff did not meet his onus of establishing that the public interest could have been satisfied without an arrest. »

1561. Art. 498(1) C.cr.

1562. L’agent de la paix ne met pas la personne en liberté également, s’il a des motifs raisonnables de croire que celle-ci fera défaut de se présenter au tribunal pour être traitée selon la loi : al. 498(1.1)b) C.cr.

1563. R. c. Viszlay, [2012] B.C.J. No. 2330, par. 63 (C.A. C.-B.) :

« It is clear from both the English and the French versions of the Criminal Code that the police are not required to release a person who has been lawfully arrested when there are reasonable grounds to believe that the continued detention of that person is needed for the purpose of obtaining evidence. Nothing in the language of the exception differentiates one investigative technique from another, nor does it differentiate one form of evidence from another. »

1564. R. c. Hardy, 2015 MBCA 51 (CanLII), [2015] M.J. No. 134, par. 63 (C.A. Man.).

1565. Art. 501(2) C.cr.

1566. Art. 501(3) C.cr.

1567. Art. 501(3) C.cr.

1568. Art. 501(3)a) C.cr.

1569. Art. 501(3)b) C.cr.

1570. Art. 501(3)c) C.cr.

1571. Art. 501(3)d) C.cr.

1572. Art. 501(3)e) C.cr.

1573. Art. 501(3)f) C.cr.

1574. Art. 501(3)g) C.cr.

1575. Art. 501(3)h) C.cr.

1576. Art. 501(3)i) C.cr.

1577. Art. 501(3)j) C.cr.

1578. Art. 501(3)k) C.cr. Voir sur ce point l’article 493.1 C.cr. :

« 493.1 Principe de la retenue – Dans toute décision prise au titre de la présente partie, l’agent de la paix, le juge de paix ou le juge cherchent en premier lieu à mettre en liberté le prévenu à la première occasion raisonnable et aux conditions les moins sévères possible dans les circonstances, notamment celles qu’il peut raisonnablement respecter, tout en tenant compte des motifs visés aux paragraphes 498(1.1) ou 515(10), selon le cas. »

1579. Art. 505 C.cr.

1580. Art. 508(1)b) C.cr.

1581. Art. 508(1)b)(i) C.cr.

1582. Art. 508(1)b)(ii) C.cr.

1583. Art. 508(1)c) C.cr.

1584. Art. 507(1) C.cr.

1585. R. c. Boucher, [2002] J.Q. No. 10000, par. 8, conf. à [2003] J.Q. No. 5322 (C.A.) (autorisation d’appel refusée, [2003] 2 R.C.S. v).

1586. R. c. Boucher, [2002] J.Q. No. 10000, par. 8 , conf. à [2003] J.Q. No. 5322 (C.A.) (autorisation d’appel refusée, [2003] 2 R.C.S. v).

1587. Art. 508.1(1) C.cr.

1588. Art. 507(1)b) C.cr.

1589. Art. 507(4) C.cr.

1590. Lafleur c. R., [2009] J.Q. No. 4166, par. 53.

1591. Lafleur c. R., [2009] J.Q. No. 4166, par. 56 et 64.

1592. Art. 511(3) C.cr.

1593. R. c. G.F., [2012] J.Q. No. 12585, par. 33.

1594. Art. 499 C.cr.

1595. R. c. G.F., [2012] J.Q. No. 12585, par. 32.

1596. R. c. G.F., [2012] J.Q. No. 12585, par. 34 :

« Aucun critère n’est expressément prévu par l’article 499 C.cr. afin de guider le fonctionnaire responsable [auj. agent de la paix] dans l’exercice de sa discrétion de libérer l’accusé. L’auteur R.E. Salhany suggère que ce devrait être les mêmes principes qui sont applicables à l’exercice de la discrétion pour un accusé arrêté sans mandat qui sont prévus à l’article 498 C.cr., c’est-à-dire à moins que le fonctionnaire responsable [auj. agent de la paix] ait des motifs raisonnables de croire qu’il est nécessaire de détenir l’accusé afin d’établir son identité, de recueillir ou conserver la preuve de l’infraction, d’empêcher que l’infraction se poursuive ou se répète, ou d’assurer la sécurité des victimes ou témoins de l’infraction, le prévenu devrait être libéré. »

1597. R. c. G.F., [2012] J.Q. No. 12585, par. 30.

1598. Le nouvel art. 493.1 précise toutefois que l’agent de la paix doit chercher « à mettre en liberté le prévenu à la première occasion raisonnable ».

1599. Par. 503(1) C.cr. Voir sur ce point l’excellente analyse du juge Béliveau dans R. c. Hannaburg, [1997] J.Q. No. 5698, par. 60-63, 65 et 66 :

« On peut tirer un certain nombre de conclusions de cette jurisprudence. Premièrement, le paragraphe 503(1) exige, lorsqu’un juge de paix est disponible dans un délai de vingt-quatre heures, que l’accusé comparaisse sans retard injustifié. Cette disposition n’a pas pour effet d’autoriser la détention pendant un tel laps de temps. Voir l’arrêt de la Cour d’appel de Terre-Neuve dans l’affaire R. c. Simpson. Même si cela n’est pas pertinent en l’espèce, la Cour rappelle, dans un deuxième temps, que cette disposition n’implique pas non plus que l’accusé doit comparaître dès qu’un juge de paix est disponible. Les nécessités de l’enquête peuvent justifier qu’on retarde la comparution dans la mesure où elle n’est pas faite dans un délai excédant vingt-quatre heures. C’est ce que la Cour suprême a décidé dans l’arrêt R. c. Storrey, 1990 CanLII 125 (CSC), [1990] 1 R.C.S. 241, alors qu’elle a indiqué que les policiers avaient été justifiés de détenir un accusé pendant dix-huit heures pour faire venir les victimes de l’agression reprochée afin qu’elles puissent identifier leur agresseur.

Troisièmement, dans les milieux urbains où il y a des juges de paix résidents, un accusé ne peut comparaître après un délai de plus de vingt-quatre heures. À défaut, il y a contravention au paragraphe 503(1) du code. L’arrêt de la Cour suprême dans l’affaire R. c. Simpson confirme implicitement la décision de la Cour d’appel de Terre-Neuve sur ce point. Voir aussi l’arrêt R. c. MacPherson de la Cour d’appel du Nouveau-Brunswick.

Quatrièmement, l’alinéa b) de cette disposition ne pouvant s’appliquer que dans des endroits isolés et éloignés des grands centres, il ne saurait être invoqué pour justifier un délai plus long en milieu urbain.

Cinquièmement, à moins de circonstances exceptionnelles, comme celles qui prévalaient dans l’arrêt R. c. Tam, une contravention au paragraphe 503(1) du code constitue une violation à l’article 9 de la Charte. Des contingences administratives ne peuvent justifier qu’on excède le délai de vingt-quatre heures. Cela est encore plus vrai si ces contingences sont d’origine systémique. Voir R. c. Simpson et R. c. MacPherson. Sixièmement, ce délai de vingt-quatre heures n’est pas suspendu pendant les fins de semaines, incluant les dimanches, et les jours fériés. »

R. c. Reilly, [2019] A.J. No. 676, par. 6 et 7 (C.A. Alb.), décision cassée sur l’arrêt des procédures R. c. Reilly, 2020 CSC 27 :

« Section 503(1)(a) provides a dual time limit for the holding of the bail hearing. The detained person must be taken before a justice a) without unreasonable delay, and b) in any event no later than 24 hours after the person was arrested. As will be seen (infra, para. 9) the respondent was detained for approximately 35 hours before he was taken before a justice, resulting in his application for a stay of proceedings.

Section 503(1)(a) does not provide that the police can always hold a detained person for 24 hours; that is just the outside limit of what is “unreasonable delay” : R. v. E.W., 2002 NFCA 49 at paras. 13-5, 168 CCC (3d) 38; R. v. Precourt (1976), 1976 CanLII 692 (ON CA), 18 OR (2d) 714 at p. 722 (CA). While it is obviously contemplated that a detained person will be released within a reasonable time after bail is granted, the section does not specify a time within which actual release must occur. The 24 hour time limit is until the detained person is “taken before a justice”, not until the time he or she actually walks out of the police station. »

1600. R. c. Lamoureux, [2002] J.Q. No. 1059, par. 57. Pour un bilan complet de la situation au Québec, voir l’analyse du juge Grenier dans Garneau c. R., [2020] J.Q. No. 2444, par. 32, 33, 41-45, 60 :

« Jusqu’au 5 avril 2013, le DPCP offre un service de comparutions téléphoniques en continu à compter de 16 h 30 le vendredi jusqu’à minuit le dimanche soir, sauf en ce qui concerne les districts de Québec et Montréal, où se déroule une séance de comparutions le samedi matin.

Le 5 avril 2013, les juges de paix magistrats du Québec mettent fin aux comparutions téléphoniques la nuit, du vendredi au dimanche, à moins de circonstances exceptionnelles.

[...]

Ainsi, à compter de juin 2015, le service de comparutions téléphoniques est offert le vendredi, entre 16 h 30 et 22 h ainsi que le samedi, de 7 h à 16 h 30. Il n’y a plus de comparutions téléphoniques le dimanche dans aucun district judiciaire, sauf circonstances exceptionnelles.

En ce qui concerne les districts de Québec et de Montréal, le service de comparutions téléphoniques a toujours été offert en cas de circonstances exceptionnelles seulement, sauf durant la période du 12 décembre 2003 au 30 janvier 2004, où il a été offert dans sa pleine mesure dans le district de Québec.

Quant aux comparutions qui ont lieu dans la ville de Québec, la procédure suivante s’applique aux personnes détenues le samedi matin et les jours fériés : le dossier du détenu doit être acheminé au Bureau de liaison avant 9 h pour transmission, étude et autorisation par un procureur.

La plainte doit être autorisée avant 10 h 30, sans quoi la comparution n’aura pas lieu. Une seule séance de comparution est prévue le samedi, à 11 h, par visioconférence.

Si la comparution n’a pas lieu, les agents doivent reprendre la charge du détenu et assurer sa libération immédiate ou, à défaut, attendre la prochaine journée de comparution. Ceci implique, par la force des choses, une comparution au-delà du délai de vingt-quatre heures prévu à l’al. 503(1)a) du Code criminel.

[...]

Le 16 décembre 2019, dans une communication adressée aux intervenants de la communauté juridique (DPCP, avocats de la défense, Centre communautaire juridique de Québec), le juge coordonnateur de la chambre criminelle de la Cour du Québec, district judiciaire de Québec, annonce que, en respect des droits des accusés, “l’ensemble des intervenants du système judiciaire ont convenu de procéder à des séances de comparutions les dimanches et les jours fériés”, qui débuteront le 9 février 2020 selon l’horaire de comparution qui a cours le samedi. »

1601. R. c. Lamoureux, [2002] J.Q. No. 1059; R. c. Simpson, 1994 CanLII 4528 (NL CA), [1994] N.J. No. 69, par. 35 et 36 (C.A. T.-N.) (infirmé pour d’autres motifs dans R. c. Simpson, 1995 CanLII 120 (CSC), [1995] 1 R.C.S 449) :

« Section 503(1)(b) provides that, where a justice is not available within 24 hours after the person has been arrested, the person shall be taken before a justice as soon as possible. It seems that this is being relied upon by the police to justify the continuation of detention on a weekend until the Provincial Court opens on Monday morning. While the purpose of this enactment is not absolutely clear, it probably applies to situations where a person is arrested in a remote area where a justice is not available. It cannot be said to apply to an arrest in the City of St. John’s where there are a large number of Provincial Court judges and 55 justices of the peace. It is ludicrous to say in those circumstances that a justice is not available within a 24 hour period. It is difficult to conceive of any circumstances in St. John’s (and probably in most parts of Newfoundland although this judgment only puts in issue police practices in St. John’s) where the police could rely on s. 503(1)(b) to justify detaining an arrested person until the Provincial Court opened on Monday morning or Tuesday morning as the case might be.

Section 503 may be one of the most important procedural provisions of the Criminal Code. The liberty of the subject is dominant. A person not convicted of an offence should never be held in custody except in accordance with constitutionally valid provisions of the Criminal Code or other legislation. In some jurisdictions, even during the sitting week, the police will bring an arrested person before a justice, as soon as the various tasks that generally follow an arrest are completed, for hearing as to whether the person should be released or detained. If necessary, a trial will be interrupted for this purpose. »

Voir également R. c. Poirier, 2016 ONCA 582 (CanLII), [2016] O.J. No. 3873, par. 58 (C.A. Ont.); Ayotte c. R., [2009] J.Q. No. 11587 (C.A.); R. c. Dufresne, [2004] J.Q. No. 3732.

1602. Sur l’arrêt des procédures en semblable matière, voir Garneau c. R., [2020] J.Q. No. 2444, par. 156 :

« Le Tribunal est d’avis qu’à la lumière de la preuve présentée, de la gravité particulière de la conduite reprochée aux acteurs institutionnels et du mépris flagrant qui a été démontré envers les droits des justiciables pendant de longues années, il n’est d’autre remède que l’arrêt des procédures qui puisse en l’occurrence être prononcé. »

Voir récemment R. c. Reilly, 2020 CSC 27 :

« Eu égard aux circonstances, y compris la conclusion tirée par la juge de première instance au par. 63 de ses motifs (2018 ABPC 85, 411 C.R.R. (2d) 10), selon laquelle la violation de l’art. 503 du Code criminel, L.R.C. 1985, c. C-46, était une manifestation d’un problème systémique et persistant à l’égard duquel aucune mesure satisfaisante n’était prise pour y remédier, nous sommes toutes et tous d’avis que rien ne justifiait l’intervention de la Cour d’appel dans l’exercice par la juge de première instance de son pouvoir discrétionnaire : voir R. c. Babos, 2014 CSC 16, [2014] 1 R.C.S. 309, par. 41. L’appel est accueilli et l’arrêt des procédures est rétabli. »

1604. R. c. Feeney, 1997 CanLII 342 (CSC), [1997] 2 R.C.S. 13.

1605. R. c. Feeney, 1997 CanLII 342 (CSC), [1997] 2 R.C.S. 13, par. 49.

1606. R. c. Feeney, 1997 CanLII 342 (CSC), [1997] 2 R.C.S. 13, par. 51 :

« En résumé, les conditions ci-après doivent généralement être remplies pour qu’une arrestation relative à un acte criminel dans une maison privée soit légale : un mandat doit être obtenu sur la foi de motifs raisonnables et probables d’effectuer une arrestation et de croire que la personne recherchée se trouve dans les lieux en question, et une annonce régulière doit être faite avant d’entrer. Cette règle souffre une exception dans le cas d’une prise en chasse. »

1607. R. c. Macooh, 1993 CanLII 107 (CSC), [1993] 2 R.C.S. 802, par. 24. Reprenant la définition de R. E. Salhany dans Canadian Canadian Criminal Procedure, 5th ed. Aurora : Canada Law Book, 1989, p. 44. Qu’il s’agisse d’une arrestation pour une infraction provinciale ou un acte criminel importe peu si les circonstances permettant aux policiers de procéder à une arrestation sans mandat sont présentes.

1608. R. c. Godoy, 1999 CanLII 709 (CSC), [1999] 1 R.C.S. 311, par. 22.

1609. R. c. Shears, [2008] O.J. No. 4895.

1610. R. c. Couturier, 2004 NBCA 91 (CanLII), [2004] A.N.-B. No. 430 (C.A. N.-B.).

1611. R. c. Couturier, 2004 NBCA 91 (CanLII), [2004] A.N.-B. No. 430, par. 32 (C.A. N.-B.). R. c. Van Wyk, [1999] O.J. No. 3515, par. 42 (conf. sans mention sur ce point à R. c. Van Wyk, [2002] O.J. No. 3144 (C.A. Ont.) :

« The police knocked and identified themselves as police officers and, in an objective sense, exhibited no coercive conduct capable of exercising compulsion upon Ms. Van Wyk. Indeed, the police, on all of the evidence, made no request to enter the residence. Ms. Van Wyk, in her own testimony, invited the police into the home. Her motivation in doing so, respect for the police, and an upbringing favouring cooperation with the authorities, does not undermine the lawfulness of the entry. Nor, in my view, does the act of the investigators, prior to entering the home, of failing to disclose fully to Ms. Van Wyk the nature of the proposed communication with her husband, vitiate the consent to enter or cause her invitation to be uninformed. »

1612. R. c. Adams, 2001 CanLII 16024 (ON CA), [2001] O.J. No. 3240, par. 5-7 (C.A. Ont.) :

« He submits that the police obtained the superintendent’s permission to enter the premises because they tricked him into believing that their purpose was to investigate a noise complaint whereas, as admitted by the Crown at trial, their purpose was to come in and arrest him. Consequently, he argues that the consent was not informed, and therefore invalid.

In our view, the appellant is quite correct in that the Feeney warrant requirement is not limited to arrests in a suspect’s dwelling house. There is nothing in s. 529 of the Criminal Code or in Feeney to suggest that a warrant is not required for an arrest in the dwelling house of a third party.

Also, in our view, the evidence is clear, and it is not seriously contested by the Crown, that the consent in this case was not valid : see R. v. Mellenthin (1992), 1992 CanLII 50 (CSC), 76 C.C.C. (3d) 481 at 487 (S.C.C.); R. v. Borden (1994), 1994 CanLII 63 (CSC), 92 C.C.C. (3d) 404 at 417 (S.C.C.); R. v. Wills (1992), 1992 CanLII 2780 (ON CA), 70 C.C.C. (3d) 529 at 543-46 (Ont. C.A.); R. v. Lewis (1998), 1998 CanLII 7116 (ON CA), 13 C.R. (5th) 34 at 40-41 (Ont. C.A.)»

1613. R. c. LeClaire, 2005 NSCA 165 (CanLII), [2005] N.S.J. No. 547 (C.A. N.-É.) (autorisation d’appel refusée, [2006] 1 R.C.S. xi).

1614. R. c. Guiboche, 2004 MBCA 16 (CanLII), [2004] M.J. No. 43, par. 59 et 60 (C.A. Man.) :

« I am satisfied that the actions and words of Joe Guiboche manifest permission on his part for the police to move from the doorway area into the house proper, and to go upstairs for the purpose of finding the accused, which is why Cpl. Fraser had told him they were there. Indeed, the only thing missing in this scenario to remove any doubt on this point is that there were no actual words of consent. But looking at all the facts, such were unnecessary. The homeowner consented to the police going into the house proper and upstairs, in connection with their stated search for the accused. Joe Guiboche, a person who, on the evidence, as will be discussed, had a reasonable expectation of privacy in the house, was an active participant assisting the police, and his conduct and communication show more than mere acquiescence or compliance. The judge clearly erred when he described this case as borderline, and said there was no consent. The evidence shows that there was sufficiently informed consent, as explained above. My conclusion is that apart entirely from the issue of exigent circumstances, no warrant was needed for the entry, and unless otherwise required by the Charter, nothing in the circumstances of the police entry into the house vitiates the lawfulness of the arrest.

Leaving aside the issue raised by where the accused was arrested, there is no doubt that the police were fully empowered in the circumstances to apprehend and arrest him as soon as they found him, without the aid of a warrant. See s. 495(1)(a) of the Code, and the comments of Cory J. for the Supreme Court in R. v. Storrey, 1990 CanLII 125 (CSC), [1990] 1 S.C.R. 241 at 250. On the facts as known to the police at the time, they had reasonable and probable grounds to believe, and the evidence shows they did believe, that the accused was directly implicated in the death of the victim and the assault on her daughter. I am satisfied that, Charter issues aside, the arrest, per se, was lawful. »

1615. R. c. Reid, [2016] O.J. No. 6471, par. 25 (C.A. Ont.) :

« In my view, the facts do not support Mr. Reid’s assertion that Sergeant Dey entered the unit to arrest him. Rather, and as the trial judge found, Sergeant Dey was investigating various possible criminal acts. As such, this case is distinguishable from those cases recognizing that a Feeney warrant is required where police enter a dwelling for purposes of arresting an occupant. »

R. c. Petri, 2003 MBCA 1 (CanLII), [2003] M.J. No. 1, par. 23, 24 et 28 (C.A. Man.) :

« If the police are present for the lawful purpose of conducting an investigation by communicating with the occupant, they can continue the communication unless and until the occupant makes known that his cooperation has been withdrawn.

In the case at bar, the accused never did change his reaction. To the contrary, he permitted the police officers to enter the landing and responded to their questions with informative answers.

If there was consensual entry into the dwelling of the accused as part of the police investigation, and if the subsequent arrest was based upon the acknowledgment made by the accused on the landing and on the obvious signs of impairment, then R. v. Feeney has no application and there is no issue of warrantless arrest. In our case, there was no reasonable ground for arrest until after entry had been granted and the investigation had been completed. »

1616. R. c. Russell, [2008] A.J. No. 1345; R. c. Couturier, 2004 NBCA 91 (CanLII), [2004] A.N.-B. No. 430 (C.A. N.-B.); R. c. Petri, 2003 MBCA 1 (CanLII), [2003] M.J. No. 1 (C.A. Man.); R. c. Bédard, 2016 QCCA 807 (CanLII), [2016] J.Q. No. 4649, par. 19 (C.A.).

1617. R. c. Couturier, 2004 NBCA 91 (CanLII), [2004] A.N.-B. No. 430, par. 25 (C.A. N.-B.) :

« La décision Feeney a été rendue le 22 mai 1997, mais elle n’est entrée en vigueur que le 18 décembre 1997, suite à l’obtention d’un sursis d’exécution jusqu’à l’adoption du projet de loi C-16 le 18 décembre 1997. (R. c. Feeney, 1997 CanLII 343 (CSC), [1997] 2 R.C.S. 117.) Cette loi met en place un régime par rapport à l’obtention d’un mandat d’arrestation en vue d’une arrestation dans une maison d’habitation, et prévoit des situations d’urgence qui permettent d’entrer sans mandat d’arrestation. Le législateur insérait alors au Code criminel les articles 529 à 529.5 qui, de toute évidence, ont été promulgués en réponse à l’arrêt Feeney. (Voir à cet effet les commentaires de Greenspan et Rosenberg, Martins Annual Criminal Code, Aurora, Canada Law Book, 2004, aux pages CC/946 et 949.) »

1619. R. c. Hamilton, [2017] O.J. No. 5801, par. 12 :

« I agree with the defence that Sgt. Gravelle required a warrant to board Mr. Hamilton’s boat if his purpose was to arrest Mr. Hamilton and if the boat was a dwelling house within the meaning of the Criminal Code. Prior judicial authorization by way of an arrest warrant is generally required to arrest within a dwelling house : see Feeney, supra, paras. 44-51. To obtain an arrest warrant, the police will need to satisfy a judicial officer that reasonable grounds exist to believe the person sought has committed an offence, and that the person is within the dwelling. Further, even if an arrest warrant were obtained, the police are generally required to announce their presence before forcibly entering the dwelling. The Feeney requirements have largely been codified since the Supreme Court released its decision in 1997 : see ss. 529-529.4 of the Criminal Code. »

1620. R. c. Webster, [2015] B.C.J. No. 1314, par. 83 (C.A. C.-B) :

« The evidence was that having witnessed what they considered to be a drug transaction, the police concluded that the appellant should be arrested while in possession of the drugs. No consideration was given to letting him return to his apartment while the police waited to obtain a warrant. »

1621. R. c. Shin, 2015 ONCA 189 (CanLII), [2015] O.J. No. 1364, par. 84 (C.A. Ont.) :

« Once the police located the drugs and money in the appellant’s stash house, he was “arrestable”. The application judge found as a fact that the Apartment was not the appellant’s residence but, rather, was something between a place of business and a storage place in which the appellant had a minimal expectation of privacy. As the stash house was not a dwelling-house within the meaning of s. 529.1 of the Criminal Code, that provision did not apply to his arrest. »

1622. Tétard c. R., [2010] J.Q. No. 13161, par. 20 (C.A.) :

« Contrairement à la prétention implicite de l’appelant, l’adoption des articles 529 et suivants du Code criminel n’a pas eu pour conséquence l’abolition de l’exception de la prise en chasse. Renee Pomerance (elle n’était pas alors juge) en explique la raison :

The drafters of Bill C-16 were careful not to oust or limit other authority which would permit warrantless entry of a dwelling. The preamble explicitly declares that “nothing in this Act is intended to limit or restrict the circumstances under which peace officers may be justified in entering a dwelling-house for the purposes of arrest or apprehension, in the absence of prior judicial authorization, under this or any other Act or law”.[46] Thus, while the Bill makes no reference to hot pursuit, the police have authority to enter on this basis, as a result of the decision in Feeney. Similarly, the legislation leaves it open to the courts to consider and recognize other types of exigent circumstances, on a case-by-case basis. »

1623. Tétard c. R., [2010] J.Q. No. 13161 (C.A.). Voir également plus récemment Renaud c. R., [2018] J.Q. No. 3560, par. 79, 86 et 87 :

« Et tel qu’énoncé par la Cour suprême dans l’arrêt Macooh, les policiers peuvent continuer une poursuite déjà engagée dans la mesure où il s’agit d’une seule opération. L’exception à la règle du mandat d’arrestation dans les cas de prise en chasse s’applique même si la prise en chasse initiale est celle d’un citoyen et qu’elle est complétée et finalisée par un policier.

[...]

Dans le présent cas, les pompiers ont constaté une conduite automobile erratique, ont suivi le véhicule, ont vu le conducteur sortir difficilement de son véhicule et avoir une démarche erratique laissant soupçonner la conduite du véhicule automobile avec les facultés affaiblies par l’effet de l’alcool ou d’une drogue.

Les policiers avaient donc des motifs raisonnables de croire que le requérant avait commis un acte criminel. L’entrée sans mandat et l’arrestation du requérant étaient autorisées en raison de la nécessité de l’identifier, de recueillir et conserver une preuve de l’infraction, soit les symptômes associés à la conduite automobile sous l’effet de l’alcool et d’empêcher que l’infraction se poursuive ou se répète. »

1624. Tétard c. R., [2010] J.Q. No. 13161, par. 28.

1625. R. c. Macooh, 1993 CanLII 107 (CSC), [1993] 2 R.C.S. 802, par. 30 :

« Il est intéressant de noter qu’en l’espèce l’infraction a été commise en présence des policiers conformément à l’exigence mentionnée par Foster et Magnet. Je ne crois toutefois pas qu’il soit opportun d’imposer strictement cette condition au droit d’entrer dans le contexte d’infractions autres que des actes criminels. Cette condition est trop restrictive. Les policiers qui arrivent peu après la perpétration de l’infraction, et voient fuir le contrevenant, devraient en effet pouvoir le suivre jusque dans des locaux privés, tant dans le contexte d’une infraction provinciale que dans celui d’un acte criminel. Ce pouvoir d’entrer devrait également être donné aux policiers qui continuent une poursuite déjà engagée. »

1626. R. c. Haglof, 2000 BCCA 604 (CanLII), [2000] B.C.J. No. 2236, par. 38 (C.A. C.-B.) :

« In my opinion, the case at bar represents a situation of hot pursuit notwithstanding that the officers did not in fact see the accident occur or the appellant enter the house. The time between the accident and the arrest was only some 35 minutes. Within approximately fifteen minutes of the accident, Constable King arrived at the Ethel Residence. This represented the length of time it took to locate the suspect. The remaining 20 minutes were spent at the premises of the appellant attempting to and finally succeeding in effecting an arrest. In my view, these events are sufficiently proximate to be considered as forming part of a single transaction. »

1627. R. c. Feeney, 1997 CanLII 342 (CSC), [1997] 2 R.C.S. 13, par. 48.

1628. R. c. Sharpe, [2002] B.C.J. No. 1219, par. 65 :

« As I read Feeney, it says that forcible entry by a police officer into a private dwelling to effect an arrest without a warrant expressly authorizing entry of the dwelling is generally prohibited. This general rule is subject to exceptions, however, such as “hot pursuit” and possibly other “exigent circumstances”. »

1629. R. c. Sharpe, [2002] B.C.J. No. 1219, par. 57 :

« I find that the actual arrest occurred at the doorway of Mr. Sharpe’s apartment, when Det. Watters informed Mr. Sharpe that he was under arrest on child pornography charges. Both Det. Watters and Sgt. Smith testified that this was when the arrest took place. Counsel for Mr. Sharpe expressed the same view. I agree. »

R. c. Bui, [2016] J.Q. No. 22251, par. 49 :

« Il se dégage que même en présence d’un mandat, les agents doivent annoncer l’arrestation à la porte alors qu’ils sont à l’extérieur du domicile. Ce n’est pas le cas ici. Ils sont déjà à l’intérieur la porte fermée quand la traduction se fait. Ils ne peuvent justifier cette présence au motif de vouloir rencontrer des témoins potentiels dans le cadre d’une enquête comme dans L’Espérance, car ils veulent dès le départ arrêter la requérante. »

1630. R. c. Sharpe, [2002] B.C.J. No. 1219, par. 76 et 77 :

« As I said earlier, the arrest was made at the doorway of Mr. Sharpe’s apartment. Mr. Sharpe was naked and he attempted to close the door to the apartment but Sgt. Smith prevented him from doing so. Mr. Sharpe then left the doorway and proceeded quickly toward his bedroom. In my opinion, the officers having already made the arrest were entitled to follow Mr. Sharpe into the apartment in order to keep him in custody. They were also entitled to ensure their own safety and that of Mr. Sharpe. They had no way of knowing whether there were any weapons stored in the apartment or whether Mr. Sharpe might attempt to obtain a weapon to harm them or himself. Sgt. Smith was therefore entitled to follow Mr. Sharpe into the bedroom and search his clothes while he got dressed. Likewise, Det. Watters and Cst. Hymes were entitled to post themselves near the bedroom in case Sgt. Smith needed assistance. Det. Watters’ observations were the result of her being alert to what was in her plain view while she lawfully carried out her duties. The seizures by the officers of the computer disc and the booklet also occurred as a direct result of the officers carrying out their duties.

In summary, I am of the opinion that everything that the officers did in entering and while in Mr. Sharpe’s apartment was pursuant to the « exceptional circumstances » part of the officers’ authority incidental to his arrest. Their behaviour was justified by the state’s interest in the effective administration of justice which, in the circumstances of Mr. Sharpe’s lawful arrest, was so compelling as to override Mr. Sharpe’s right to privacy in his own home. »

1632. R. c. Guiboche, 2004 MBCA 16 (CanLII), [2004] M.J. No. 43, par. 52 et 53 (C.A. Man.) :

« Cpl. Fraser testified that, when he attended at the detachment office, he was told that the whereabouts of the accused were unknown. He was told he might have been at his father’s residence or possibly at the residence of Danny Gott, and he was, with others, assigned the task of finding the accused. Clearly there was no ground for a belief that the accused was in any particular location and Cpl. Fraser acknowledged that when he went to the house, he had no evidence to support any belief that the accused was there; it was only a possibility.

On this basis, an essential condition to the application of s. 529.3 has not been satisfied. On the facts, I do not see how this provision of the Code can have any application, and in finding that it did, the judge erred. »

1633. E.G. c. Carrier, [2010] J.Q. No. 4887, par. 174 :

« Compte tenu de l’historique psychologique de G..., que connaissait Carrier, ce dernier était raisonnablement en mesure de soupçonner que le demandeur puisse se causer des lésions corporelles ou même se donner la mort au contact des policiers. Carrier connaissait le tempérament bouillant de l’accusé. En effet, B... lui avait confié l’état dans lequel G... était rentré à la maison à la suite de la visite des policiers à son lieu de travail le 25 décembre 2002. Il se souvenait également des démarches faites par G... pour localiser B... dans le centre d’hébergement où elle se trouvait. Il craignait donc pour la sécurité de B… »

1634. Définition tirée de l’arrêt R. c. Latimer, 2001 CSC 1 (CanLII), [2001] 1 R.C.S. 3, par. 29.

1635. R. c. Paterson, 2017 CSC 15 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 202, par. 33. Dans cette affaire, la Cour s’interrogeait sur la signification de l’expression « lorsque l’urgence de la situation rend son obtention difficilement réalisable » contenue au par. 11(7) de la LRCDAS. À cet égard, le juge Brown, au nom de la majorité, refuse d’utiliser le par. 529.3(2) du Code criminel pour définir l’expression « urgence de la situation » que l’on retrouve au par. 11(7) de la LRCDAS. En effet, « l’article 11 de la LRCDAS ne comporte pas le libellé exprès du par. 529.3(2) du Code criminel qui rend la disposition applicable, lorsqu’il s’agit de préserver un élément de preuve, seulement en lien avec un acte criminel. » (par. 31).

1636. R. c. Paterson, 2017 CSC 15 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 202, par. 36.

1637. R. c. Gallagher, [2020] A.N.-B. No. 264, par. 51-55 :

« Je conclus que les intentions subjectives exprimées reposaient sur des motifs objectivement discernables. En particulier, le gendarme Jean avait des motifs raisonnables de croire que des éléments de preuve relatifs à la perpétration d’une tentative de meurtre se trouvaient dans l’appartement et qu’il était nécessaire d’y pénétrer à ce moment pour arrêter Mme Gallagher, sans mandat d’arrestation, pour éviter leur perte ou leur destruction imminentes.

Ni l’un ni l’autre agent n’a indiqué dans son témoignage de quels éléments de preuve il pouvait s’agir ni pourquoi ces éléments risquaient d’être perdus ou détruits. J’en viens toutefois à la conclusion qu’ils n’avaient pas à le faire. Eu égard aux circonstances (les policiers ayant d’abord constaté l’état de Mme Aubin), il n’est pas nécessaire de faire un acte de foi pour s’attendre de manière raisonnable à ce qu’une tentative de meurtre présumément commise entre les murs d’une habitation privée, la victime ayant la gorge tranchée, produise un environnement très propice à une expertise judiciaire (présence de sang ou d’armes, par exemple). La logique et le bon sens nous amènent à cette conclusion.

De même, l’intention des policiers de [Traduction] “préserver la scène de crime” correspond aussi, en toute logique, à la nécessité de veiller à ce que la preuve ne soit pas perdue ou détruite. Dans pareilles circonstances, si la personne soupçonnée demeure seule sur la scène du crime, cachée à la vue, peu après la perpétration du crime présumé, il existe des motifs raisonnables de croire objectivement que toute expertise judiciaire éventuelle puisse être mise en péril, que ce soit intentionnellement, inconsciemment ou accidentellement. Autrement dit, l’on peut discerner objectivement qu’il était essentiel, pour ces agents, d’agir rapidement. Encore une fois, la logique et le bon sens nous amènent à cette conclusion.

L’appréciation de l’incidence de la Charte nécessite, en matière pénale, de mettre en balance l’attente raisonnable de l’accusé au respect de sa vie privée et l’intérêt du public dans l’application efficace de la loi (voir R. c. Wiley, 1993 CanLII 69 (CSC), [1993] 3 R.C.S. 263). Les articles 529, 529.1 (obligation d’obtenir un mandat) et 529.3 (sauf en situation d’urgence) du Code criminel représentent cette mise en balance.

En dernière analyse, la Cour conclut qu’il y avait urgence, au sens de l’al. 529.3(2)b), et que cela rendait l’obtention d’un mandat d’arrestation difficilement réalisable. Le ministère public a démontré que, eu égard aux circonstances, le choix fait par le gendarme Jean (et le gendarme Pelchat) était défendable sur le plan constitutionnel. »

1638. R. c. Phillips, 2006 NSCA 135 (CanLII), [2006] N.S.J. No. 565 (C.A. N.-É.).

1639. R. c. Cornell, 2010 CSC 31 (CanLII), [2010] 2 R.C.S. 142, par. 18.

1640. R. c. Chang, [2019] A.J. No. 1155, par. 90 (C.A. Alb.) :

« In concluding that the no-knock entry was reasonable, the trial judge in Chang No 2 found as follows :

a) The police conducted two risk assessments relative to the manner of entry in accordance with established protocol : at para 128(F)(k);

b) The police considered whether less drastic forms of entry would achieve their objectives regarding officer safety and preserving evidence : at para 128(F)(k);

c) Following an investigation, the police reasonably believed that the appellant’s residence was being used to store and distribute illicit drugs : at para 128(F)(l);

d) There were multiple warrants being executed on the same morning increasing the risk of a co-accused alerting the appellant and thereby jeopardizing officer safety and the preservation of evidence : at paras 72, 79; and

e) That the presence of weapons was not uncommon in drug investigations and the individuals under investigation had ties to an organized crime group with a history of violence : at paras 34, 128(F)(m). »

1641. R. c. Cornell, 2010 CSC 31 (CanLII), [2010] 2 R.C.S. 142.

1642. R. c. Cao, [2008] B.C.J. No. 181, par. 27-29 :

« A dynamic entry, where there is no prior announcement and request to enter, is only justified if there is a real threat of violent behaviour associated with the particular residence or a demonstrated risk that evidence could be destroyed. It is not sufficient to warrant a dynamic entry that the police identify the risks associated with marihuana grow operations in general. As Williamson J. concluded in Vadon at para. 21 :

To attempt to justify the routine use of a battering ram to violate, unannounced, a private residence on the grounds that there have been weapons found in some homes where there have also been marihuana grow operations does not come close to meeting the onus upon the police to show why they concluded such force and surprise were necessary in a particular entry. It is clear from the comments in Genest [1989 CanLII 109 (CSC), [1989] 1 S.C.R. 59] that the Crown must lay an evidentiary framework to show that there were grounds to be concerned about the possibility of violence in this particular case.

There were clearly no exigent circumstances identified in evidence warranting a dynamic entry in this case. The police had never observed anyone associated with this Residence. There is also no evidence that, at the time, the police addressed their minds to the question of whether there was a risk of a violent response from any occupants in this Residence in particular. Nor did the officers consider a dynamic entry was necessary simply because they suspected it housed a marihuana grow operation.

It is also apparent that a warrant for the purpose of searching a residence for bulk or growing marihuana, equipment, and documentation does not, by itself, justify a dynamic entry to prevent the destruction of evidence. This is not the kind of evidence that may be destroyed in the time necessary for a proper announcement : Vadon at para. 22. Indeed, Constable Foster acknowledged that in this case there was no demonstrated risk of the destruction of evidence. »

1643. R. c. Cornell, 2010 CSC 31 (CanLII), [2010] 2 R.C.S. 142, par. 23.

1644. Eccles c. Bourque, 1974 CanLII 191 (CSC), [1975] 2 R.C.S. 739, par. 7

1645. R. c. Pan, 2012 ONCA 581 (CanLII), [2012] O.J. No. 4162, par. 40-43 (C.A. Ont.) :

« I accept that there is a subsidiary, but perhaps important, issue arising out of the way the police implemented the knock-and-announce rule. The issue is whether they waited long enough before forcing entry into the home. The knock-and-announce rule requires the police to give the occupants of the home a reasonable amount of time to answer : see e.g. R. v. Cao, 2008 BCSC 139, 167 C.R.R. (2d) 120. Whether the 30 to 40 seconds the police waited in this case was a reasonable amount of time may have to be considered at the new trial.

The trial judge did express concern that the police waited less than one minute before entering the home. That was not, however, the focus of his finding that they ignored the law. Instead, he focused on the police’s “dynamic entry”. He held that the dynamic entry, unless justified, amounts to a breach of the knock-and-announce rule. That holding was an error of law.

The stay imposed by the trial judge flowed from his holding that the Crown had failed to justify a departure from the knock-and-announce rule :

The duty to engage in analysis of the need to depart from the knock-and-announce rule is not a guideline; it is a prerequisite to the lawfulness of the decision. The need for some basis for such a decision is not preferable; it is obligatory.

The obligation on the Crown to lead evidence to justify the decision is a prerequisite to a finding by the court, if one is to be made, that the departure was necessary. The police did not know what the law was; did not care; and did not comply with it. An occupant of the house received serious, foreseeable injuries. There is nothing unclear about this case. Anything short of a stay would be an expression of approval of the police decision to ignore the legal requirements of the execution of the warrant in this manner.

The trial judge erred in holding that the Crown was required to justify a departure from the rule. The record shows that the police complied with the three components of the rule. »

1646. R. c. Delong, 1989 CanLII 7164 (ON CA), [1989] O.J. No. 206 (C.A. Ont.) :

« Although, in my opinion, the fact that a door is open or unlocked should not in all cases give a police officer the licence to enter the private premises, there may be circumstances in which the unlocked or open door could be construed as an invitation to enter. »

1647. R. c. Bohn, [2000] B.C.J. No. 867, par. 34 (C.A. C.-B.).

1648. R. c. Zora, 2020 CSC 14 (CanLII), [2020] A.C.S. No. 14, par. 1 :

« Tout individu accusé d’avoir commis un crime est présumé innocent et a le droit de ne pas être privé sans juste cause d’une mise en liberté assortie d’un cautionnement raisonnable. La plupart des personnes prévenues ne sont pas détenues sous garde entre la date de l’accusation et le procès parce que le Code criminel, L.R.C. 1985, c. C-46 (“Code”) et la Charte canadienne des droits et libertés (“Charte”) exigent en règle générale qu’elles fassent l’objet d’une libération communément appelée “mise en liberté sous caution”. Les personnes prévenues qui ne sont pas remises en liberté par la police sont conduites devant une entité judiciaire (c.-à-d. juge de paix ou juge) pour une enquête sur le cautionnement. Pour la plupart des crimes, la forme de mise en liberté par défaut est la libération de la personne prévenue sur promesse d’être présente au procès, sans conditions restreignant ses activités ou actions (par. 515(1) du Code). Toutefois, l’entité judiciaire peut imposer des conditions de mise en liberté si la Couronne la convainc que des restrictions particulières doivent être prises pour assurer la présence de la personne prévenue au tribunal, pour assurer la protection ou la sécurité du public ou pour ne pas miner la confiance du public envers l’administration de la justice (par. 515(10); R. c. Antic, 2017 CSC 27, [2017] 1 R.C.S. 509, par. 21, 34 et 67j)). »

1649. Voir sur ce point le par. 516(1) C.cr.

1650. Sur la question, voir le magnifique ouvrage de Mathieu CHENETTE, La libération provisoire au Canada, LexisNexis Canada, Montréal, 2019.

1651. R. c. Myers, 2019 CSC 18 (CanLII), [2019] 2 R.C.S. 105, par. 1; R. c. St-Cloud, 2015 CSC 27 (CanLII), [2015] 2 R.C.S. 328, par. 109. Voir également R. c. Hall, 2002 CSC 64 (CanLII), [2002] 3 R.C.S. 309, par. 47 et 48 :

« La liberté du citoyen est au cœur d’une société libre et démocratique. La liberté perdue est perdue à jamais et le préjudice qui résulte de cette perte ne peut jamais être entièrement réparé. Par conséquent, dès qu’il existe un risque de perte de liberté, ne serait-ce que pour une seule journée, il nous incombe, en tant que membres d’une société libre et démocratique, de tout faire pour que notre système de justice réduise au minimum le risque de privation injustifiée de liberté.

En droit criminel, cette liberté fondamentale se traduit de manière générale par le droit d’être présumé innocent jusqu’à preuve du contraire et, plus précisément, par le droit à la mise en liberté sous caution. Le refus d’accorder la mise en liberté sous caution à une personne simplement accusée d’une infraction criminelle porte nécessairement atteinte à la présomption d’innocence. »

Voir enfin R. c. Antic, 2017 CSC 27 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 509, par. 1 :

« Le droit de ne pas être privé sans juste cause d’une mise en liberté assortie d’un cautionnement raisonnable est un élément essentiel d’un système de justice pénale éclairé. Il consacre l’effet de la présomption d’innocence à l’étape préalable au procès criminel et protège la liberté des accusés. »

1652. R. c. St-Cloud, 2015 CSC 27 (CanLII), [2015] 2 R.C.S. 328, par. 70. R. c. Hall, 2002 CSC 64 (CanLII), [2002] 3 R.C.S. 309, par. 49 :

« L’alinéa 11e) de la Charte canadienne des droits et libertés incite particulièrement les tribunaux, en leur qualité de gardiens de la liberté, à veiller à ce que la mise en liberté avant le procès soit la règle et non l’exception et à n’ordonner la détention avant le procès que dans le cas où un intérêt sociétal urgent dont l’existence peut se démontrer justifie la suppression des droits et libertés fondamentaux de l’accusé. »

R. c. Myers, 2019 CSC 18 (CanLII), [2019] 2 R.C.S. 105, par. 1 :

« Le droit à la liberté et la présomption d’innocence sont des préceptes fondamentaux de notre système de justice criminelle. Lors des procédures préalables au procès, la mise en liberté – à la première occasion et aux conditions les moins sévères possible – est la présomption qui s’applique par défaut en droit criminel canadien. La détention avant le procès est l’exception et non la règle. »

1653. R. c. Pearson, 1992 CanLII 52 (CSC), [1992] 3 R.C.S. 665, par. 45 et 46 :

« L’alinéa 11e) garantit le droit de tout inculpé “de ne pas être privé sans juste cause d’une mise en liberté assortie d’un cautionnement raisonnable”. À mon avis, cet alinéa comprend deux éléments distincts, savoir le droit à “un cautionnement raisonnable” et le droit de ne pas être privé d’une mise en liberté “sans juste cause”. [...] »

R. c. Hall, 2002 CSC 64 (CanLII), [2002] 3 R.C.S. 309, par. 13 :

« Le droit conféré est “un droit fondamental à une mise en liberté assortie d’un cautionnement raisonnable sauf s’il existe une juste cause justifiant le refus de l’accorder” : Pearson, 1992 CanLII 52 (CSC), [1992] 3 R.C.S. 665, précité, p. 691. Ce droit repose sur la présomption qu’un accusé est innocent jusqu’à ce que la preuve du contraire soit faite au procès. Toutefois, l’al. 11e) reconnaît aussi qu’il peut exister, malgré la présomption d’innocence, une “juste cause” qui justifie le refus de mettre en liberté un accusé en attente de procès. »

1654. R. c. Pearson, 1992 CanLII 52 (CSC), [1992] 3 R.C.S. 665, par. 46.

1655. R. c. Antic, 2017 CSC 27 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 509, par. 45.

1656. R. c. Zora, 2020 CSC 14 (CanLII), [2020] A.C.S. No. 14, par. 21 :

« L’article 515 du Code régit la façon dont les entités judiciaires exercent leur pouvoir discrétionnaire pour accorder la mise en liberté sous caution, prévoit les formes juridiques que celle-ci peut revêtir et exige que les conditions imposées ne soient pas plus sévères que nécessaire pour répondre aux risques énumérés au par. 515(10), à savoir le risque que la personne prévenue ne se présente pas au tribunal, le risque pour la protection ou la sécurité du public et le risque que le public perde confiance envers l’administration de la justice. Les paragraphes 515(1) à (3) codifient le “principe de l’échelle”, fondé sur la retenue, selon lequel « la forme de mise en liberté imposée à [la personne accusée] ne doit pas être plus sévère que ce qui est nécessaire » (Antic, par. 44). L’entité judiciaire n’est autorisée à imposer une forme de mise en liberté plus sévère que si la Couronne “démontre pourquoi une forme qui l’est moins serait inappropriée” (Antic, par. 47). Par conséquent, la forme de mise en liberté par défaut qui devrait être imposée à une personne prévenue inculpée d’une infraction, autre que les infractions très graves énumérées à l’art. 469, est la mise en liberté sur remise d’une promesse sans conditions (par. 515(1)). Aux termes de l’al. 515(2)a), si la Couronne démontre que la personne prévenue ne devrait pas être mise en liberté sur remise d’une promesse sans conditions, l’entité judiciaire devrait envisager de la mettre en liberté sur remise d’une promesse assortie de conditions. »

1657. R. c. Zora, 2020 CSC 14 (CanLII), [2020] A.C.S. No. 14, par. 23. Sur la pertinence et le bien-fondé de certaines conditions, voir les commentaires de la juge Martin au par. 91-99 de la décision.

1658. R. c. Zora, 2020 CSC 14 (CanLII), [2020] A.C.S. No. 14, par. 22 :

« Le Code prévoit certaines conditions précises ainsi que d’autres conditions non précisées de mise en liberté sous caution. Les conditions énumérées aux par. 515(4) à (4.2) donnent des indications quant à la nature individualisée des conditions et le degré attendu de lien entre la condition imposée et les risques énumérés au par. 515(10). La plupart des conditions discrétionnaires énumérées au par. 515(4) visent le risque de fuite de la personne prévenue ou le risque qu’elle ne se présente pas au tribunal au moment indiqué : se présenter à la personne responsable selon l’al. 515(4)a), demeurer dans le ressort de la juridiction (al. 515(4)b)), aviser la personne responsable selon l’al. 515(4)c) de tout changement d’adresse et d’emploi (al. 515(4)c)) et remettre son passeport (al. 515(4)e)) (voir G. T. Trotter, The Law of Bail in Canada (3e éd. (feuilles mobiles)), p. 6-27 à 6-32). Les conditions énumérées relatives aux ordonnances de non-communication (al. 515(4)d) et par. 515(4.2)), aux restrictions géographiques (al. 515(4)d)) et aux interdictions impératives de possession d’armes pour des infractions précises (par. 515(4.1)) sont directement liées au deuxième motif de détention : la sécurité publique. En fait, même dans le cas des interdictions impératives de possession d’armes, l’entité judiciaire dispose d’une certaine marge de manœuvre pour ne pas imposer de telles interdictions si elle considère que la condition n’est pas nécessaire pour protéger la sécurité de la personne prévenue, de la victime ou de toute autre personne (art. 515(4.1)). »

1659. R. c. Zora, 2020 CSC 14 (CanLII), [2020] A.C.S. No. 14, par. 24. Voir également au par. 89 :

« En résumé, les questions suivantes peuvent aider à structurer l’analyse afin que les principes de retenue et de révision fassent réellement partie intégrante de l’élaboration de conditions de mise en liberté sous caution appropriées :

• Si elle est libérée sans condition, la personne prévenue poserait-elle un risque précis prévu par la loi qui justifie l’imposition de conditions de mise en liberté sous caution ? Si la personne prévenue est libérée sans condition, existe-t-il un risque qu’elle ne se présente pas au tribunal au moment exigé, qu’il y ait atteinte à la sécurité ou à la protection du public ou que soit minée la confiance du public envers l’administration de la justice ?

• La condition est-elle nécessaire ? Si la condition n’était pas imposée, y aurait-il un risque de fuite de la part de la personne prévenue, un risque d’atteinte à la protection ou à la sécurité du public ou un risque que le public perde confiance envers l’administration de la justice, qui empêcherait le tribunal de libérer la personne prévenue sur remise d’une promesse sans condition ?

• La condition est-elle raisonnable ? La condition est-elle claire et proportionnelle au risque que pose la personne prévenue ? Peut-on s’attendre à ce que la personne prévenue respecte la condition de façon sécuritaire et raisonnable ? Sur le fondement de ce que l’on sait de la personne prévenue, est-il probable que ses conditions de vie, sa dépendance, son handicap ou sa maladie fassent en sorte qu’elle serait incapable de se conformer à la condition ?

• La condition est-elle suffisamment liée aux motifs de détention prévus à l’al. 15(10)c) ? Se limite-t-elle à répondre au risque précis que pose la libération de la personne prévenue ?

• Quel est l’effet cumulatif de toutes les conditions ? Prises ensemble, constituent-elles les conditions les moins nombreuses et les moins sévères nécessaires dans les circonstances ? »

Voir également l’art. 493.1 C.cr.

1665. R. c. Antic, 2017 CSC 27 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 509, par. 44.

1666. R. c. Zora, 2020 CSC 14 (CanLII), [2020] A.C.S. No. 14, par. 24 :

« La jurisprudence exige que les entités judiciaires respectent le principe de l’échelle : elles doivent d’abord considérer une mise en liberté sous caution assortie de peu de conditions, peu sévères, avant de considérer une mise en liberté sous caution assortie de conditions plus sévères (voir R. c. Schab, 2016 YKTC 69, 35 C.R. (7th) 48, par. 29; R. c. Prychitko, 2010 ABQB 563, 618 A.R. 146, par. 14). [...] Le principe de l’échelle s’applique aux conditions de mise en liberté tout comme il s’applique aux formes de mise en liberté. Il existe un lien entre le principe de l’échelle et le nombre et le contenu des conditions de mise en liberté sous caution. Sans une approche empreinte de retenue dans l’imposition des conditions, une forme moins sévère de mise en liberté sous caution, comme une promesse assortie de conditions, peut devenir tout aussi sinon plus sévère que d’autres mesures à des échelons plus élevés de la mise en liberté sous caution, voire, dans certains cas, encore plus restrictive qu’une ordonnance de sursis et une ordonnance de probation rendues à la suite d’une déclaration de culpabilité (R. c. McCormack, 2014 ONSC 7123, par. 23 (CanLII); R. c. Burdon, 2010 ABCA 171, 487 A.R. 220, par. 8). »

1667. R. c. Antic, 2017 CSC 27 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 509, par. 47. Voir également au par. 49 :

« En conséquence, dans les cas où l’imposition d’une condition monétaire de mise en liberté est nécessaire, et où un engagement personnel suffisant ou un engagement avec caution peut être obtenu, le juge de paix ou le juge ne peut pas imposer un cautionnement en espèces. L’engagement et le dépôt jouent le même rôle : l’accusé ou la caution peut perdre son argent si l’accusé ne respecte pas les conditions de sa mise en liberté sous caution. La mise en liberté assortie d’un engagement monétaire a donc le même pouvoir coercitif que celle assortie d’un dépôt d’argent. »

Voir à ce sujet le par. 515(2.01) du Code :

« 515 (2.01) Imposition des formes les moins sévères de mise en liberté – Le juge de paix ne peut rendre une ordonnance assortie des conditions visées à l’un des alinéas (2)b) à e) que si le poursuivant démontre qu’une ordonnance assortie des conditions visées aux alinéas qui le précèdent et qui présentent une forme moins sévère de mise en liberté serait inadéquate. »

1668. R. c. Antic, 2017 CSC 27 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 509, par. 29, citant R. c. Anoussis, [2008] Q.J. No. 9260, par. 23.

1670. Si la Cour suprême mentionne dans les arrêts Morales et Pearson que les al. 515(6)a) et d) sont soigneusement conçus, elle ne se prononce pas sur les autres cas d’application du par. 515(6). Des auteurs universitaires et la Commission sur le racisme systémique dans le système de justice pénale de l’Ontario ont critiqué au cours des dernières années la portée excessive des cas d’application du par. 515(6), en particulier des al. 515(6)c) et d). Voir sur ce point Mathieu CHENETTE, La libération provisoire au Canada, LexisNexis Canada, Montréal, 2019, p. 219 et suiv.

1671. R. c. Pearson, 1992 CanLII 52 (CSC), [1992] 3 R.C.S. 665, par. 61 :

« Les particularités exceptionnelles des infractions qui font l’objet de l’al. 515(6)d) semblent indiquer qu’elles sont perpétrées dans un contexte très différent de celui de la plupart des autres crimes. La majorité des infractions ne sont pas commises systématiquement. Par contre, le trafic des stupéfiants est une activité systématique, pratiquée d’ordinaire dans un cadre commercial très sophistiqué. Il s’agit souvent une entreprise et d’un mode de vie. C’est une activité très lucrative, ce qui pousse fortement le contrevenant à poursuivre son activité criminelle même après son arrestation et sa mise en liberté sous caution. Vu ces circonstances, le processus normal d’arrestation et de mise en liberté sous caution ne sera normalement pas efficace pour mettre un terme à l’activité criminelle. Il faut des règles spéciales pour établir un système de mise en liberté sous caution qui maintient le droit du prévenu à être mis en liberté provisoire tout en décourageant la poursuite de l’activité criminelle. »

1672. R. c. Pearson, 1992 CanLII 52 (CSC), [1992] 3 R.C.S. 665, par. 62 :

« Un autre caractère particulier des infractions qui font l’objet de l’al. 515(6)d) est le danger marqué que le prévenu se soustraie à la justice. Assurer la comparution du prévenu au procès est le but principal de tout système de mise en liberté provisoire, et le système doit être organisé de manière à réduire au minimum le risque que le prévenu s’esquive au lieu de comparaître au procès. Dans le cas de la plupart des infractions, le risque que le prévenu s’esquive est minime. Il n’est pas facile d’échapper à la justice. Le prévenu doit demeurer un fugitif le reste de ses jours. Il doit fuir dans un autre pays qui n’a pas conclu de traité d’extradition avec le Canada (ou dont le traité d’extradition ne vise pas l’infraction qui lui est reprochée). Ou encore il doit continuellement se cacher. Dans un cas comme dans l’autre, cela coûte cher. Et cela n’est possible que s’il est très riche ou s’il appartient à une organisation qui peut l’aider dans sa tâche difficile de se soustraire à la justice. La plupart des prévenus ne sont ni riches ni membres d’organisations sophistiquées. Les importateurs et les trafiquants de drogue ont toutefois accès à des sommes considérables et à des organisations sophistiquées qui peuvent les aider à fuir la justice. Il y a donc un risque important que ces criminels s’esquivent avant leur procès. »

1673. R. c. Morales, 1992 CanLII 53 (CSC), [1992] 3 R.C.S. 711. L’arrêt R. c. Pearson, 1992 CanLII 52 (CSC), [1992] 3 R.C.S. 665 confirme la constitutionnalité de l’al. 515(6)d).

1674. Voir à ce sujet R. c. Antic, 2017 CSC 27 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 509, par. 40 :

« Une disposition ne peut pas priver sans “juste cause” l’accusé d’une mise en liberté sous caution. Le droit de l’accusé de ne pas se voir refuser sans juste cause une mise en liberté sous caution impose une norme constitutionnelle à laquelle il faut satisfaire pour qu’un tel refus soit valide. Le juge en chef Lamer a statué que le refus d’accorder une mise en liberté sous caution ne repose sur une juste cause que lorsque (1) la mise en liberté n’est refusée que “dans certains cas bien précis”, et que (2) le refus “s’impose pour favoriser le bon fonctionnement du système de mise en liberté sous caution et [qu’]on n’y recourt pas à des fins extérieures à ce système” (Pearson, p. 693; voir aussi Morales, p. 737, et Hall, par. 16). »

1675. R. c. Sanchez, [1999] N.S.J. No. 142, par. 25 et 26 (C.A. N.-É.) :

« The number of persons charged with murder is fortunately very small in comparison with the number of persons charged with the type of drug offences which the Supreme Court of Canada considered were appropriately chosen by Parliament as offences, where on a bail application, the accused should bear the burden of establishing that there was just cause for release. Under s. 522(2) of the Code, as it applies to murder, not all persons charged are denied bail but only those who do not or cannot show cause that their detention is not justified. I accept without hesitation the Crown’s submission that the reverse onus so established for bail in murder offences meets the first branch of the test for constitutionality, namely that it occurs in a narrow set of circumstances. »

1676. R. c. Pearson, 1992 CanLII 52 (CSC), [1992] 3 R.C.S. 665, par. 67. Il faut noter cependant que l’arrêt Pearson ne parle pas de l’art. 522.

1677. R. c. Sanchez, [1999] N.S.J. No. 142, par. 27 (C.A. N.-É.) :

« The passage quoted above from the decision of Lamer, C.J.C. in Pearson, supra, at p. 146 indicates the type of cases for which special bail rules are necessary to create a system which will not be subverted by continuing criminal activity and by absconding accused. In my opinion, these considerations apply to a charge of murder. Continuing criminal activity is of course a risk in many, although not all cases of murder. The circumstances clearly exist under which offenders are likely to abscond rather than face trial. If convicted, an accused faces the mandatory sentence of imprisonment for life without eligibility for parole for 10 to 25 years. The motivation to flee could not be higher than in the case of a murder charge. The accused already faces the maximum penalty that can be imposed. These factors were recognized in R. v. McCreery, supra, (1996), 110 C.C.C. (3d) at p. 572 and R. v. Beamish, supra, (1995), 133 Nfld. & P.E.I. R. at p. 235. »

1678. R. c. Vincent, [1998] J.Q. No. 2838, par. 21 :

« La poursuite n’a pas vraiment insisté sur la nécessité de détenir le requérant pour assurer sa présence devant le tribunal. La Cour considère que c’est à juste titre. L’accusé n’a pas les ressources nécessaires pour penser pouvoir se soustraire à la justice de façon efficace et il a par ailleurs plusieurs liens qui rendent une fuite peu probable. Il a en sus une certaine chance d’acquittement. »

Voir toutefois les commentaires fort intéressants de Gregory KOTURBASH, A Guide to Conducting Bail Hearings in Canada, Toronto, LexisNexis, 2020, p. 97 (par. 12.12) :

« 12.12 When considering the primary ground [(s. 515(10)a))], it is vital to recognize how the same considerations can operate differently for differently-situated accused. Many of the factors work against the marginalized : the homeless, unemployed, poor, and socially-isolated. For the marginalized, it can often be more challenging to find a responsible member of the community to act a surety to satisfy the primary ground. »

1679. R. c. Morales, 1992 CanLII 53 (CSC), [1992] 3 R.C.S. 711, par. 39 :

« Je suis convaincu que la portée de l’élément “sécurité du public” de l’al. 515(10)b) est suffisamment limitée pour satisfaire à la première exigence de l’al. 11e). La mise en liberté sous caution n’est pas refusée à toutes les personnes qui risquent de commettre une infraction ou de nuire à l’administration de la justice si elles sont mises en liberté. Elle n’est refusée que s’il y a une “probabilité marquée” que le prévenu commettra une infraction criminelle ou nuira à l’administration de la justice et seulement si cette “probabilité marquée” compromet “la protection ou la sécurité du public”. Au surplus, la détention n’est justifiée que si elle est “nécessaire” pour la sécurité du public. Elle n’est pas justifiée si la détention est seulement commode ou avantageuse. Ces motifs sont assez limités pour remplir la première exigence de l’al. 11e) quant à la juste cause. »

1680. R. c. Rondeau, 1996 CanLII 6516 (QC CA), [1996] J.Q. No. 1090, par. 15 (C.A.). Sur l’état mental de l’accusé, voir M.L. c. Directeur des poursuites criminelles et pénales, [2020] J.Q. No. 10544, par. 26 :

« D’abord, la détermination de l’état mental d’un accusé, lorsqu’elle s’avère pertinente, relève du juge des faits. Certes, il peut se présenter des situations où l’expérience ou la connaissance du juge des faits s’avère insuffisante pour tirer des conclusions appropriées d’un comportement humain. Ce n’est pas le cas en l’espèce. En effet, lorsque le premier juge utilise le terme “état mental”, il ne le fait pas au sens médical ou clinique du terme, mais il se prononce plutôt sur la stabilité de l’accusé à partir de son comportement passé pour évaluer le risque qu’il pose. C’était son devoir de le faire. »

1681. R. c. Perlini, [1996] J.Q. No. 2578, par. 113.

1682. Garand c. R., [2015] J.Q. No. 12013, par. 44.

1683. R. c. Myers, 2019 CSC 18 (CanLII), [2019] 2 R.C.S. 105, par. 67. Voir toutefois R. c. Zora, 2020 CSC 14 (CanLII), [2020] A.C.S. No. 14, par. 79, 92 et 93; R. c. Penunsi, 2019 CSC 39 (CanLII), [2019] A.C.S. No. 39, par. 80.

1684. Art. 515(10)c)(i), (ii), (iii), (iv) C.cr.

1685. R. c. St-Cloud, 2015 CSC 27 (CanLII), [2015] 2 R.C.S. 328.

1686. R. c. Turcotte, [2014] J.Q. No. 13532, par. 49 (C.A.) :

« Au stade de la mise en liberté, le juge n’a pas l’obligation d’évaluer le bien-fondé de la défense. Cette tâche revient au jury. L’enquête sur mise en liberté judiciaire est une procédure plus sommaire où les règles de preuve sont plus souples. »

1687. Teran Flores c. R., [2018] J.Q. No. 23502, par. 67 (C.A.) :

« Le fait qu’il y a un problème d’identification dans cette affaire fragilise l’accusation qui est portée contre le requérant. À mon avis, il ne s’agit pas d’un de ces cas qui peut justifier le refus de mise en liberté avant procès. La confiance en l’administration de la justice d’un public bien informé ne pourrait être ébranlée dans de telles circonstances. »

Gaglia c. R., [2019] J.Q. No. 11846, par. 33 :

« À la lumière de ce dernier arrêt de la Cour d’appel et des enseignements de la Cour suprême dans les arrêts St-Cloud et Antic, le Tribunal conclut que le requérant doit être remis en liberté puisqu’il est en présence d’un accusé sans antécédents, qui bénéficie d’un emploi, d’un support familial, d’un plan de sortie très sérieux, qui ne constitue pas un danger pour la protection et la sécurité du public (article 515(10)b) C.cr.) et qui fait l’objet d’accusations dont la preuve à son égard n’est pas très forte, contrairement à ce que le juge d’instance a indiqué. »

1688. R. c. Coates, [2010] J.Q. No. 4187, par. 19 (C.A.).

1689. R. c. Paquette, [2007] J.Q. No. 1124, par. 39.

1690. R. c. Hall, 2002 CSC 64 (CanLII), [2002] 3 R.C.S. 309, par. 41.

1691. R. c. Coates, [2010] J.Q. No. 4187, par. 50 (C.A.) (citant le juge de première instance) :

« [17] Compte tenu du fait que les gestes reprochés au requérant remontent à huit ans; qu’il a quitté les H.A. il y a huit ans; qu’il est devenu un membre productif de la société; qu’il a complètement changé ses valeurs depuis huit ans; qu’il y a absence totale de preuve pour même soupçonner qu’il ait été impliqué dans des activités criminelles depuis huit ans, la Cour conclut que le requérant a rencontré son fardeau sur le troisième critère. La Cour concède que ce n’est pas sans hésitation qu’elle en est arrivée à cette conclusion. »

1692. Ouati c. R., [2018] J.Q. No. 23045, par. 25, 26 et 31 :

« Il est vrai que la qualité de la preuve et la gravité des infractions sont des facteurs qui soulèvent des préoccupations sérieuses à l’égard de la confiance du public dans l’administration de la justice. Il fallait cependant considérer la question en tenant compte du plan de sortie présenté par M. Ouati pour déterminer si ce plan était de nature à rassurer un public raisonnable et bien informé (G. Trotter, The Law of Bail in Canada, 3rd ed., Toronto, Carswell, version électronique, m.à.j. oct. 2018, section 3.4 g).

M. Ouati demande non pas d’être tout bonnement libéré sans supervision. Il propose plutôt d’être soumis à des conditions strictes. Il veut faire une démarche thérapeutique sérieuse pour s’attaquer à son problème de toxicomanie. Le fait que M. Ouati, un toxicomane, ait décidé d’adhérer à une thérapie seulement après son arrestation n’a rien d’étonnant. Avec respect, écarter du revers de la main le plan de sortie proposé était une erreur, car il s’agissait d’un facteur tout à fait pertinent pour apprécier si la détention était nécessaire pour maintenir la confiance du public envers le système judiciaire. En somme, le public raisonnable et bien informé comprendrait que la détention de M. Ouati n’est pas nécessaire dans la mesure où celui-ci serait soumis à des conditions strictes et confié à un centre de thérapie en matière de toxicomanie. Le public garderait pleinement confiance envers l’administration de la justice qui permet à M. Ouati de recouvrer sa liberté pour s’attaquer au problème de toxicomanie lié à sa criminalité. »

1693. R. c. St-Cloud, 2015 CSC 27 (CanLII), [2015] 2 R.C.S. 328, par. 69.

1694. R. c. St-Cloud, 2015 CSC 27 (CanLII), [2015] 2 R.C.S. 328, par. 87.

1695. R. c. Turcotte, [2014] J.Q. No. 13532, par. 68 (C.A.) :

« La lecture des coupures de presse montre à quel point il est dangereux de recourir à ce mode de preuve. On y retrouve des opinions diverses, plus ou moins nuancées, plus ou moins objectives, plus ou moins mesurées, plus ou moins superficielles. Plusieurs exposent des faits inexacts ou ne rapportent pas ceux qui sont essentiels. La plupart taisent les principes juridiques essentiels à la prise de décision en matière de mise en liberté. Certaines opinions attisent la colère et dénaturent le débat. Peu rapportent fidèlement les faits et rappellent correctement les principes applicables. Globalement, il faut convenir qu’elles ne satisfont pas au critère de la personne raisonnable définie par la jurisprudence. »

1696. R. c. St-Cloud, 2015 CSC 27 (CanLII), [2015] 2 R.C.S. 328, par. 50 :

« Par ailleurs, je suis d’accord avec l’appelante pour affirmer que la détention pourrait n’être justifiée qu’en de rares occasions, mais qu’il ne s’agit là que d’une conséquence de l’application de l’al. 515(10)c), et non d’une condition préalable à son application, d’un critère dont doit tenir compte le tribunal dans son analyse ou du but de cette disposition. »

1697. R. c. St-Cloud, 2015 CSC 27 (CanLII), [2015] 2 R.C.S. 328, par. 88.

1698. R. c. Coates, [2010] J.Q. No. 4187, par. 44 et 45 :

« L’analyse du troisième motif mérite quelques remarques supplémentaires. Le juge a convenu que trois des circonstances dont un juge doit tenir compte militaient contre la mise en liberté des intimés. Il s’agit de la gravité de l’infraction, des circonstances entourant sa perpétration et de la longue peine d’emprisonnement associée à ce type d’infraction. De fait, dans le cas d’un meurtre, le juge conclura souvent à la nécessité de détenir l’accusé. Mais cela n’est pas automatique puisque le juge doit aussi tenir compte “de toutes les circonstances”, y compris du “fait que l’accusation paraît fondée”, ce qui amène le juge saisi d’une demande de mise en liberté à soupeser, de façon sommaire, la preuve proposée par la poursuite.

C’est donc à bon droit que le juge s’est ici interrogé, non seulement sur la force apparente de la preuve de la poursuite, mais également sur les moyens de défense que pourraient faire valoir les intimés. Tel que mentionné précédemment, il serait injuste d’ignorer les arguments que la défense pourrait soulever pour ne retenir que la preuve que la poursuite affirme être en mesure de produire. »

1699. Villemaire c. R., [2020] J.Q. No. 5134, par. 27 et 38 :

« Le recours prévu à l’article 520 C.cr. permet à l’accusé de demander “en tout temps avant son procès sur l’inculpation” (“at any time before the trial of the charge”) la révision de l’ordonnance de détention rendue en vertu de certains paragraphes de l’article 515 C.cr. ou de l’alinéa 523(2)b) C.cr.

Le recours en révision prévu à cet article est présenté devant un juge de la Cour supérieure du Québec ou trois juges de la Cour du Québec, par le jeu du renvoi à la définition de “juge” à l’article 493 C.cr. En pratique, ce recours se fait devant un juge unique de la Cour supérieure. »

1700. R. c. St-Cloud, 2015 CSC 27 (CanLII), [2015] 2 R.C.S. 328, par. 120 :

« L’examen du libellé des art. 520 et 521 C. cr., la comparaison avec d’autres dispositions en matière de révision et avec l’appel en matière de peine, ainsi que la nature de la décision qui fait l’objet de la révision, m’amènent à conclure que ces dispositions ne confèrent pas au juge réviseur un pouvoir illimité pour réviser l’ordonnance initiale relative à la détention ou à la mise en liberté de l’accusé. Le juge doit donc se demander s’il est opportun qu’il exerce ce pouvoir de révision. »

1701. R. c. St-Cloud, 2015 CSC 27 (CanLII), [2015] 2 R.C.S. 328, par. 121. Voir sur ce point Ouati c. R., [2018] J.Q. No. 23045, par. 21 :

« Lors d’une révision en application de l’art. 520 du Code criminel, le prévenu a le fardeau de démontrer que la première ordonnance de détention doit être révisée. Selon l’arrêt St-Cloud, la procédure de révision est un recours hybride. L’intervention du juge réviseur est permise dans trois situations : 1) une erreur de droit; 2) une décision manifestement inappropriée; et 3) un changement important de circonstances démontré par une nouvelle preuve. Si la preuve nouvelle est admise, le juge réviseur est autorisé à reprendre l’analyse comme s’il était le premier décideur. »

Teran Flores c. R., [2018] J.Q. No. 23502, par 47 (C.A.) :

« Le juge Wagner est d’avis que le recours en révision prévu dans ces dispositions est de nature hybride. Sauf en présence d’une preuve nouvelle, le juge réviseur n’est pas en meilleure position que le juge de paix pour évaluer la nécessité de la détention. Il doit donc faire preuve de déférence envers l’appréciation que ce dernier fait des différentes circonstances de l’affaire. Il ne pourra intervenir que dans les cas suivants : (1) une preuve nouvelle démontre un changement important et pertinent dans les circonstances de l’affaire; (2) le juge de paix a erré en droit; ou (3) la décision contestée est manifestement inappropriée. »

1702. R. c. Oland, 2017 CSC 17 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 250, par. 64 :

« En résumé, le juge en chef devrait envisager d’ordonner une révision dans les cas où il est possible de soutenir que le juge a commis des erreurs importantes de fait ou de droit lorsqu’il a rendu la décision contestée, ou que celle-ci était clairement injustifiée dans les circonstances. »

1703. R. c. Oland, 2017 CSC 17 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 250, par. 61 :

« En dernière analyse, je suis d’avis que les trois principes suivants devraient guider la formation chargée de réviser, en vertu du par. 680(1), la décision rendue par un juge siégeant seul. Premièrement, en l’absence d’erreur manifeste et dominante, la formation de révision doit faire preuve de déférence à l’égard des conclusions de fait du juge. Deuxièmement, elle peut intervenir et substituer sa décision à celle du juge lorsqu’elle est convaincue que celui-ci a commis une erreur de droit ou de principe, et que cette erreur était importante quant à l’issue de l’affaire. Troisièmement, en l’absence d’une erreur de droit, la formation de révision peut intervenir et substituer sa décision à celle du juge dans les cas où elle conclut que celle-ci était clairement injustifiée. »

Teran Flores c. R., [2018] J.Q. No. 23502, par. 50 etc 51 (C.A.) :

« Ce passage de l’arrêt Oland indique à mon avis que la procédure de révision par une cour d’appel d’une décision sur la mise en liberté en attendant l’appel est la même que celle relative à la mise en liberté avant procès. La différence majeure entre ces deux étapes est toutefois que le juge qui se prononce en première instance en vertu de l’article 522 C.cr. de même que la Cour, lorsqu’elle révise cette décision en vertu de l’article 680 C.cr., doivent tenir compte que le prévenu, avant procès, bénéficie de la présomption d’innocence.

La Cour, en l’espèce, n’est pas dans une meilleure position que le juge de première instance pour évaluer la nécessité de garder l’appelant en détention en attendant son procès. Elle ne peut donc intervenir que dans les cas suivants : (1) si le juge a commis une erreur de droit ou de principe importante quant à l’issue de l’affaire ou, en l’absence d’une telle erreur (2) si la décision contestée est clairement injustifiée. »

1704. R. c. Myers, 2019 CSC 18 (CanLII), [2019] 2 R.C.S. 105, par. 37 :

« La règle est donc la suivante : la personne qui a la garde du prévenu doit normalement présenter la demande au juge dès l’expiration du délai de 90 jours suivant la date à laquelle l’accusé a été conduit à l’origine devant un juge de paix en vertu de l’art. 503 : sous-al. 525(1)a)(i) C. cr. Toutefois, lorsqu’une nouvelle ordonnance de détention ou une ordonnance de maintien en détention a été rendue contre le prévenu en vertu des art. 520, 521 ou 524 après sa comparution initiale selon l’art. 503, le compte à rebours de 90 jours recommence à zéro par application du sous-al. 525(1)a)(ii). À titre d’exemple, si le prévenu est conduit devant un juge de paix en vertu de l’art. 503 et qu’il est placé en détention le premier jour, puis comparaît devant un juge pour demander la révision de cette décision en vertu de l’art. 520 le cinquantième jour de sa détention (et que sa détention est confirmée), l’obligation du geôlier de présenter la demande ne prend naissance que 140 jours après la date à laquelle l’accusé a été placé en détention au départ. »

1705. R. c. Myers, 2019 CSC 18 (CanLII), [2019] 2 R.C.S. 105, par. 24 :

« Peu importe le critère appliqué, les tribunaux de partout au Canada s’entendent pour dire que l’objet des audiences prévues à l’art. 525 est d’éviter que les prévenus ne croupissent en détention avant leur procès et de veiller à ce qu’ils soient jugés rapidement : voir, p. ex., Fraser Regional Correctional Centre c. Canada (Attorney General), 1993 CanLII 354 (C.S. C.-B.), p. 2-3; Gill, par. 3; Sawrenko, par. 26 (CanLII); Sarkozi, par. 8-11 (CanLII); Haleta, par. 8-10. Il est par ailleurs clair que le Parlement a cherché à atteindre cet objectif en soumettant les longues détentions avant le procès à un contrôle judiciaire à certains intervalles réguliers, en donnant au juge la possibilité de vérifier si le maintien en détention d’un prévenu est justifié et en conférant au juge le pouvoir discrétionnaire d’accélérer le déroulement du procès des individus incarcérés avant leur procès. »

1706. R. c. Myers, 2019 CSC 18 (CanLII), [2019] 2 R.C.S. 105, par. 46.

1707. R. c. Myers, 2019 CSC 18 (CanLII), [2019] 2 R.C.S. 105, par. 49.

1709. Villemaire c. R., [2020] J.Q. No. 5134, par. 38 :

« Pour déterminer le régime de révision applicable et ainsi connaître la juridiction compétente, il est essentiel de décider si le procès a véritablement débuté, comme l’affirme le juge Gary T. Trotter dans son ouvrage The law of bail in Canada : “once the trial has commenced, s. 523(2)(a) is the only means by which the bail issue can be revisited “. »

R. c. Ali, [2020] O.J. No. 3814, par. 11-13 (C.A. Ont.) :

« Part XVI of the Criminal Code provides various avenues for the review of bail decisions, ensuring that the accused person and the prosecutor have the ability to challenge the accused person’s bail status as the case travels through the trial process. The main bail review provisions are found in ss. 520, 521, 525 and 680. Sections 520 and 521, which were considered by the Supreme Court of Canada in R. v. St-Cloud, 2015 SCC 27, [2015] 2 S.C.R. 328, at paras. 90-139, permit the review of bail decisions made in respect of offences not listed in s. 469 of the Criminal Code. Additionally, s. 525 of the Code requires the review of an accused person’s detention when the trial has been delayed, but only in respect of offences not listed in s. 469. See the discussion in R. v. Myers, 2019 SCC 18, [2019] 2 S.C.R. 105, at paras. 28-63. Finally, s. 680 permits the review of pre-trial bail decisions made under s. 522 (for s. 469 offences), as well as other decisions listed in the paragraph above. See the discussion of s. 680 in R. v. Oland, 2017 SCC 17, [2017] 1 S.C.R. 250, at paras. 53-64.

Section 523(2) augments these main bail review provisions by providing avenues for review that are more specialized. Subsections 523(1) to (1.2) deal with the duration of bail orders and address the impact on bail when a new information is received, or a direct indictment is preferred.

This application only concerns s. 523(2)(a), which authorizes the judge “before whom an accused is being tried” to review a bail order while the trial is underway. Section 523(2)(b) empowers the preliminary inquiry judge to review a prior bail decision in relation to offences not listed in s. 469, whereas s. 523(2)(c) provides a procedure for returning to the court with plenary bail jurisdiction to request changes to a prior order, under s. 515 or s. 522 as the case may be, with consent of both parties. »

1710. Larouche c. R., [2011] J.Q. No. 21309; R. c. Durrani, 2008 ONCA 856 (CanLII), 94 O.R. (3d) 350 (C.A. Ont.).

1711. R. c. Pumphrey, 2006 YKSC 15 (CanLII), [2006] Y.J. No. 16, par. 40 :

« In the result, I conclude that a trial at the territorial/provincial court level begins when the Crown opens its case and evidence is called. However, there may be instances where the Crown opens its case with one or more motions on the admissibility of evidence, which could necessitate one or more voir dires. In some of those cases, depending on the nature of the motions and/ or the evidence called on the voir dires, the trial may be deemed to have commenced and the judge would be seized of the matter. »

1712. R. c. D’Urso, [2014] J.Q. No. 24195.

1713. Villemaire c. R., [2020] J.Q. No. 5134, par. 63-67.

1714. Voir sur ce point Villemaire c. R., [2020] J.Q. No 5134, par. 35 et 36 :

« La Cour d’appel de l’Ontario a affirmé dans R. v. Passera qu’un juge d’une cour supérieure n’a pas de compétence inhérente pour réviser une décision fondée sur l’alinéa 523(2)a) C.cr. Le législateur a en effet volontairement omis de prévoir un mécanisme de révision à l’égard des décisions fondées sur cette disposition. Les articles 520 et 521 C.cr. ne permettent la révision que des ordonnances rendues sous les alinéas 515(2), (5), (6), (7), (12) et 523(2)b). L’article 680 ne permet quant à lui que la révision des ordonnances prononcées en vertu des articles 522, 524(3) à (5), 261 et 679. Selon la Cour d’appel de l’Ontario, ce choix du législateur est justifié : “[t]he decisions of trial judges on procedural, evidentiary and substantive issues within their purview, in short, the management of trial proceedings, is left to the trial judge”.

Cependant, aucune disposition du Code criminel n’empêche un accusé de présenter ultérieurement une nouvelle demande fondée sur l’alinéa 523(2 a). »

1715. R. c. Ali, [2020] O.J. No. 3814, par. 15 (C.A. Ont.) (notre traduction)

1716. R. c. Oland, 2017 CSC 17 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 250, par. 19 :

« Il incombe au demandeur qui sollicite une mise en liberté sous caution d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que chacun de ces critères est respecté (R. c. Ponak, 1972 CanLII 1540 (BC CA), [1972] 4 W.W.R. 316 (C.A. C.-B.), p. 317-318; R. c. Iyer, 2016 ABCA 407, par. 7 (CanLII); R. c. D’Amico, 2016 QCCA 183, par. 10 (CanLII); R. c. Gill, 2015 SKCA 96, 465 Sask. R. 253, par. 14). »

La mise en liberté d’une personne condamnée d’une infraction sommaire est régie par l’article 819 du Code criminel. D’après le juge Cournoyer, dans R. c. Rivière, [2019] J.Q. No. 5430, par. 20, « aucune raison ne justifie de ne pas appliquer les mêmes critères que ceux explicitement prévus à l’article 679 du Code criminel. »

1717. R. c. Oland, 2017 CSC 17 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 250, par. 20.

1718. Turgeon c. R., [2020] J.Q. No. 7026, par. 24 (C.A.), citant R. c. Oland, 2017 CSC 17 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 250, par. 41.

1719. R. c. Oland, 2017 CSC 17 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 250, par. 21 :

« Suivant le deuxième critère, le demandeur doit démontrer « qu’il se livrera en conformité avec les termes de l’ordonnance [de mise en liberté] » (al. 679(3)b)). Le juge d’appel doit être convaincu que le demandeur ne fuira pas le ressort du tribunal et qu’il se livrera au besoin. »

Turgeon c. R., [2020] J.Q. No. 7026, par. 25 (C.A.) :

« L’appelant doit démontrer en second lieu qu’il ne fuira pas le ressort du tribunal et se livrera au besoin. L’appelant, qui est détenu depuis le 31 mai 2018, est disposé à souscrire un engagement de 5 000 $ avec dépôt et à demeurer à la résidence d’une amie vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sauf en cas d’urgence médicale. Bien que l’appelant ait été reconnu coupable d’omission de se conformer à une ordonnance de probation ou à un engagement dans le passé, je suis prêt à reconnaître que les garanties décrites ci-dessus l’empêcheront de déroger à ce deuxième critère. »

1720. Turgeon c. R., [2020] J.Q. No. 7026, par. 34 (C.A.) :

« J’ai rappelé à dessein la condamnation de l’appelant à des infractions liées au trafic de stupéfiants en 2013 qui ont justifié son incarcération pour une période de 48 mois. Or, quelques mois après sa libération totale en mars 2017, l’appelant retourne rapidement dans le milieu criminalisé des stupéfiants et se voit reproché, dès mars 2018, des crimes de la même nature. En agissant ainsi, l’appelant a sans conteste démontré qu’il présente des risques marqués de commission d’une autre infraction justifiant ainsi, pour des motifs liés à la sécurité publique, le refus de sa mise en liberté. »

Poulin c. R., [2020] J.Q. No. 5877, par. 50 (C.A.) :

« Troisièmement, comme la Cour suprême le soulignait dans Oland, la sécurité publique est liée au péril représenté par l’élargissement de la liberté du requérant en appel et par la probabilité qu’il puisse commettre une autre infraction criminelle ou qu’il nuise à l’administration de la justice. Je me contenterai ici de remarquer qu’à ce sujet les agissements passés du requérant ne sont pas garants d’une faible probabilité qu’il commette d’autres infractions ou qu’il nuise autrement à l’administration de la justice. »

1721. R. c. Oland, 2017 CSC 17 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 250, par. 24.

1722. R. c. Oland, 2017 CSC 17 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 250, par. 32.

1723. Charest c. R., [2017] J.Q. No. 17840, par. 31 (C.A.) :

« Le jugement sur la peine est un élément important, voire essentiel, pour évaluer l’opportunité d’une mise en liberté au stade de l’appel puisqu’il explique la gravité du crime en cause, les circonstances entourant sa perpétration et la durée de l’emprisonnement : R. c. Oland, 2017 CSC 17 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 250, par. 38 (Oland). »

1724. Sur ce point, voir Charest c. R., [2017] J.Q. No. 17840, par. 77 et 78 (C.A.) :

« [...] Si un appel fructueux laisse entrevoir le maintien d’une condamnation ou un impact mitigé sur la peine, cela “amoindrira l’intérêt relatif au caractère révisable des jugements, et ce, même si les moyens d’appel paraissent solides” : Oland, précité, par. 45-46.

J’estime que c’est ici le cas. L’appelant n’a pas démontré de manière prépondérante le sérieux de ses moyens d’appel d’une manière qui permet d’envisager un impact important sur les condamnations et sur la peine légitime qu’il doit purger. »

1725. Charest c. R., [2017] J.Q. No. 17840, par. 53 et 54 (C.A.) :

« L’intérêt public exige une mise en balance de deux intérêts opposés. D’un côté, les jugements sont, en principe, appliqués lorsqu’ils sont prononcés; c’est la force exécutoire des jugements. De l’autre, notre droit prévoit que les jugements peuvent être révisés s’ils sont entachés d’erreurs; c’est le caractère révisable des jugements : Oland, précité, par. 24-25.

On comprend que la force des erreurs invoquées à l’encontre du jugement en affaiblit la force exécutoire. Par conséquent, plus les moyens dépassent les exigences du critère de “non-futilité”, moins sa force exécutoire sera importante. »

Catellier c. R., [2020] J.Q. No. 10049, par. 19 et 20 (C.A.) :

« Même si, en l’espèce, les arguments que le requérant soutient dans sa demande d’autorisation à la Cour suprême n’apparaissent pas futiles et qu’ils sont suffisants pour remplir le premier critère, leur peu de chance de succès demeure un facteur pertinent dans l’analyse du troisième critère de l’intérêt public. D’autres facteurs doivent aussi être considérés, tels la gravité du crime, la sécurité du public et la confiance de celui-ci dans l’administration de la justice.

Bien qu’il demeure possible que la Cour suprême accueille l’un ou l’autre moyen du requérant et ordonne la tenue d’un nouveau procès et que la sécurité du public ne parait pas être en jeu, le requérant ne démontre pas que ses moyens aient des chances raisonnables de succès et que sa mise en liberté ne minera pas la confiance du public dans le système de justice quant aux crimes graves dont il a été déclaré coupable. »

1726. R. c. Oland, 2017 CSC 17 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 250, par. 50.

1727. R. c. Oland, 2017 CSC 17 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 250, par. 51.

1728. R. c. Oland, 2017 CSC 17 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 250, par. 66 :

« Le législateur n’a pas restreint la possibilité pour les personnes reconnues coupables de meurtre ou de tout autre crime grave d’obtenir une mise en liberté sous caution en attendant l’issue de leur appel, et les tribunaux devraient respecter cela. En conséquence, pour l’application de l’al. 679(3 c) et même dans le cas d’infractions très graves, lorsqu’il n’existe pas de préoccupations en matière de sécurité publique ou de risques de fuite et que les moyens d’appel vont clairement au-delà des exigences du critère de « non-futilité », un tribunal peut fort bien conclure que l’intérêt relatif au caractère révisable des jugements l’emporte sur l’intérêt lié à la force exécutoire de ceux-ci et que, pour cette raison, la détention ne sera pas nécessaire dans l’intérêt public. »

1729. Sorella c. R., [2020] J.Q. No. 4339 (C.A.).

1730. Sorella c. R., [2020] J.Q. No. 4339, par. 10 (C.A.).

1731. R. c. Oland, 2017 CSC 17 (CanLII), [2017] 1 R.C.S. 250, par. 47.

1732. Voir sur ce point Delisle c. R., 2012 QCCA 1250 (CanLII), [2012] J.Q. No. 6555, par. 65 (C.A.) :

« Il appartiendra à une formation de cette Cour de se prononcer sur la valeur des moyens soulevés, mais dans le cadre de la décision sur remise en liberté, et même si certains moyens d’appel sont sérieux, ils ne permettent pas l’élargissement de l’appelant pendant son pourvoi. Ici, l’appelant a été reconnu coupable par douze personnes, impartiales et indépendantes, d’avoir commis l’un des crimes les plus sérieux sanctionnés par le Code criminel. Il s’agit d’un meurtre prémédité d’une violence évidente sur une personne vulnérable. L’appelant devait établir l’existence de très sérieux moyens d’appel pour justifier, à la lumière de toutes les circonstances de cette affaire, sa remise en liberté. Cette démonstration n’a pas été faite. »

1733. R. c. Zora, 2020 CSC 14 (CanLII), [2020] A.C.S. No. 14, par. 26 et 79 :

« Beaucoup de parties intervenantes ont attiré l’attention sur les problèmes répandus qui persistent, même après la publication de l’arrêt Antic de la Cour, en raison du fait que les personnes prévenues continuent de se voir imposer des conditions de mise en liberté sous caution inutiles, déraisonnables, indûment restrictives, trop nombreuses ou qui, dans les faits, vouent la personne prévenue à l’échec. Une telle pratique contrevient au principe de la retenue qui a toujours été la pierre angulaire du droit régissant l’établissement des conditions de mise en liberté sous caution. La retenue comporte une dimension constitutionnelle et une assise législative, et est non seulement reconnue dans la jurisprudence, mais a aussi été expressément confirmée par les modifications récentes qui sont entrées en vigueur le 18 décembre 2019. L’article 493.1 énonce maintenant explicitement le “principe de la retenue” applicable à toutes les décisions de mise en liberté provisoire. Ce principe implique de “cherche[r] en premier lieu” à accorder à la personne prévenue une mise en liberté aux “conditions les moins sévères possible dans les circonstances, notamment celles qu’[elle] peut raisonnablement respecter”. L’article 493.2 exige que les entités judiciaires qui prennent des décisions sur la mise en liberté sous caution accordent une attention particulière aux circonstances propres aux personnes prévenues autochtones ou aux personnes prévenues appartenant à des populations vulnérables qui sont surreprésentées au sein du système de justice pénale et qui souffrent d’un désavantage lorsqu’il s’agit d’obtenir une mise en liberté. Une troisième constatation en ce qui concerne la mise en liberté sous caution est que l’imposition de conditions sévères touche de façon disproportionnée les populations vulnérables et marginalisées (rapport de l’ACLC, p. 72-79). Les personnes vivant dans la pauvreté ou aux prises avec des problèmes de toxicomanie ou des maladies mentales ont souvent de la difficulté à respecter les conditions auxquelles elles ne sont pas raisonnablement en mesure de se conformer (voir, p. ex., Schab, par. 24-25; Omeasoo, par. 33 et 37; R. c. Coombs, 2004 ABQB 621, 369 A.R. 215, par. 8; M. B. Rankin, “Using Court Orders to Manage, Supervise and Control Mentally Disordered Offenders : A Rights-Based Approach” (2018), 65 C.L.Q. 280). Les personnes autochtones, surreprésentées au sein du système de justice criminelle, sont aussi touchées de façon disproportionnée par l’imposition de conditions de mise en liberté sous caution inutiles et déraisonnables et des accusations pour manquement qui en découlent (voir, p. ex., R. c. Murphy, 2017 YKSC 34, par. 31-34 (CanLII); Omeasoo, par. 44; rapport de l’ACLC, p. 75-79; J. Rogin, “Gladue and Bail : The Pre-Trial Sentencing of Aboriginal People in Canada” (2017), 95 Can. Bar. Rev. 325; Ewert c. Canada, 2018 CSC 30, [2018] 2 R.C.S. 165, par. 57-60; voir aussi la version de l’art. 493.2 en vigueur en date du 18 décembre 2019). »

1734. R. c. Roy, [2015] J.Q. No. 8934, par. 47, R. c. Manninen, 1987 CanLII 67 (CSC), [1987] 1 R.C.S. 1233.

Wilson et Lafleur

La diffusion de l'ouvrage Traité de droit criminel. Tome IV, Les garanties juridiques de Hugues Parent, et publié par Wilson et Lafleur, est rendue possible grâce à une licence accordée au CAIJ par Wilson et Lafleur.

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