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Charte canadienne des droits et libertés
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Article 7

 
Charte canadienne des droits et libertés (partie I de la Loi constitutionnelle de 1982 constituant l'annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, c. 11)
 
GARANTIES JURIDIQUES
 
 

Article 7
Vie, liberté et sécurité

Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale.

Section 7
Life, liberty and security of person

Everyone has the right to life, liberty and security of the person and the right not to be deprived thereof except in accordance with the principles of fundamental justice.

Annotations
Alter Ego : Chartes des droits de la personnee (2022) par Henri Brun, Pierre Brun et Fannie LafontaineInformation
FermerExtraits de : Henri Brun, Pierre Brun et Fannie Lafontaine, Chartes des droits de la personne : Législation, jurisprudence et doctrine, Collection Alter Ego, 35e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2022 (version intégrale dans eDOCTRINE).
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Traité de droit criminel. Tome IV, Les garanties juridiques (2021) par Hugues ParentInformation
FermerExtraits de : Parent, Hugues, Traité de droit criminel. Tome IV, Les garanties juridiques, 2e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2021 (version intégrale dans eDOCTRINE).

Chapitre premier - L’article 7

4. Aux termes de l’article 7 de la Charte : « Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale. » Subordonné à la présence d’une atteinte au droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne7, l’article 7 consacre « les éléments essentiels d’un système d’administration de la justice fondé sur la foi en la dignité et la valeur de la personne humaine et en la primauté du droit8. » Comme les articles 8 à 14 de la Charte « visent des atteintes spécifiques au “droit” à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne qui violent les principes de

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justice fondamentale9 », ce chapitre sera consacré à l’étude de deux principes reconnus en common law qui, tout en étant protégés par la Charte, ne font pas l’objet d’une disposition particulière. Le droit de garder le silence garanti par l’article 7, tout d’abord, puisque le choix de parler ou non aux policiers est une manifestation du principe interdisant l’auto-incrimination qui est, lui-même, un « principe directeur général du droit criminel10 ». Ce principe, qui s’incarne dans des protections plus spécifiques telles que le droit à l’assistance d’un avocat (al. 10b)), le droit de ne pas être contraint de témoigner contre soi-même (al. 11c)) et le droit à l’immunité contre l’utilisation dans d’autres procédures de son propre témoignage incriminant (art. 13)11, accorde également une protection résiduelle au droit de garder le silence. En ce qui concerne l’obligation de divulgation du ministère public, celle-ci est une composante du droit à une défense pleine et entière garanti par l’article 7. S’agissant d’un principe de justice fondamentale ne faisant pas l’objet d’une protection spécifique, son étude sera abordée dans le cadre de ce chapitre consacré à l’article 7. À l’analyse de la règle des confessions et du droit de garder le silence, succédera un examen de l’obligation de divulgation de la preuve qui incombe au ministère public en droit pénal canadien.

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Première section : La règle des confessions et le droit de garder le silence

5. Malgré la présence de recoupements importants12, la règle des confessions et le droit de garder le silence ne sont pas des concepts équivalents. Si l’un et l’autre s’éclairent mutuellement en raison de leur attachement respectif à la notion de libre arbitre, la règle des confessions et le droit de garder le silence se distinguent quant à la portée des droits reconnus, quant au fardeau de la preuve qui incombe à la partie concernée ainsi qu’à la réparation consécutive à leur violation.

6. À la portée des droits reconnus, tout d’abord, puisque le droit de garder le silence garanti par l’article 7 de la Charte n’entre en jeu qu’après la mise en détention du suspect13, tandis que la

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règle des confessions s’applique chaque fois que l’accusé croit raisonnablement qu’il s’adresse à une personne en situation d’autorité. La règle des confessions a donc « une portée plus grande » que le droit de garder le silence14. Envisagée du point de vue du fardeau de la preuve, la Charte impose à l’accusé la charge d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que son droit au silence a été violé, alors que la règle des confessions exige de la poursuite la preuve, hors de tout doute raisonnable, du caractère volontaire de la déclaration. En ce qui concerne finalement la réparation consécutive à la violation de la règle ou du droit en question, la déclaration obtenue en contravention du droit de l’accusé de garder le silence est écartée s’il est établi, eu égard aux circonstances, que son utilisation est susceptible de déconsidérer l’administration de la justice, alors que l’aveu obtenu à la suite d’une violation de la règle des confessions doit être exclu sur-le-champ15.

7. Droit de garder le silence et règle des confessions. Voilà donc deux façons différentes de protéger le droit du suspect « de faire un choix libre et utile quant à la décision de parler aux autorités ou de garder le silence16 ». S’il est vrai que le droit de garder le silence doit céder le pas à la common law lorsque le détenu s’adresse à un policier ou à un gardien de prison identifiable comme tel17, sa pertinence demeure entière lorsque la déclaration a été

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recueillie par un agent banalisé, un codétenu ou un autre informateur « recruté par la police18 ».

Première sous-section : La règle des confessions

8. Selon le juge Dickson, dans R. c. Erven, « il est maintenant bien établi au Canada qu’aucune déclaration extrajudiciaire d’un accusé à une personne ayant autorité ne peut être admise en preuve contre lui à moins que la poursuite n’établisse à la satisfaction du juge du procès que la déclaration a été faite librement et volontairement19 ». Si la première condition exige la présence d’une personne en autorité, la seconde oblige la poursuite à démontrer le caractère volontaire de la déclaration hors de tout doute raisonnable. Cette règle, mise de l’avant afin de contenir le pouvoir coercitif de l’État et de protéger l’accusé contre l’auto-incrimination20, reconnaît les dangers associés à la crainte d’un préjudice, à l’espoir d’un avantage ou à l’instauration d’un climat d’oppression favorable à l’obtention d’une fausse déclaration21.

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1) La personne en autorité

9. D’après le juge Cory, dans R. c. Hodgson, une personne en autorité désigne, de façon générale, « toutes les personnes qui participent officiellement à l’arrestation, à la détention, à l’interrogatoire ou à la poursuite de l’accusé22 ». Comme il n’existe pas de catégorie prédéfinie de personnes en situation d’autorité23, chaque cas est unique et doit être tranché en fonction des faits de l’affaire. S’il est évident que les policiers et les gardiens de prison en uniforme correspondent, à première vue, à cette définition, il est plus difficile de se prononcer sur le cas des personnes qui, en agissant pour le compte de la police ou en étroite collaboration avec elle, peuvent influencer les poursuites engagées contre l’accusé. La règle ne s’applique donc pas uniquement aux personnes en situation d’autorité au sens « classique » ou « traditionnel » du terme, mais également à celles qui peuvent influer sur l’enquête ou les poursuites judiciaires.

10. Selon la Cour suprême, dans les arrêts Hodgson et Grandinetti, le critère utilisé pour déterminer si l’accusé s’adressait à une personne en situation d’autorité est la fois subjectif et objectif. Subjectif, tout d’abord, puisque l’accusé doit croire qu’il s’adresse à une personne en situation d’autorité. À ce stade, c’est la perception de l’accusé qui compte, ce qu’il a cru ou pensé au moment de sa déclaration. En effet, « [à] qui l’accusé croyait-il

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parler ? [...] Avait-il l’impression que s’il ne parlait pas à cette personne, qui avait le pouvoir d’influencer les poursuites judiciaires, il en subirait un préjudice, ou croyait-il qu’une déclaration lui permettrait d’obtenir un avantage ou une récompense ?24 ». Si l’accusé ne croyait pas s’adresser à une personne en situation d’autorité, la première condition n’est pas remplie et la déclaration sera admise en preuve. On n’a qu’à penser à l’individu qui confesse la commission d’un crime à un collègue de travail. Comme l’accusé croyait s’adresser à un ami, il n’y a pas lieu de penser que sa déclaration fut obtenue par crainte d’un préjudice ou dans l’espoir d’un avantage25.

11. Si la croyance de l’accusé est pertinente au stade de la qualification de la personne en situation d’autorité, encore faut-il qu’elle soit raisonnable dans les circonstances (critère objectif). En effet, l’accusé doit croire sincèrement et pour des motifs raisonnables qu’il s’adresse à une personne pouvant influencer le déroulement des poursuites judiciaires. « Par exemple, si la preuve révèle l’existence d’un lien de mandataire ou d’une collaboration étroite entre la personne recevant la déclaration et les policiers ou le ministère public, et que ces rapports étaient connus de l’accusé, la personne qui reçoit la déclaration peut être considérée comme une personne en situation d’autorité26. » Quant à la croyance qui relève de la pure spéculation ou de l’imagination du suspect, celle-ci n’est pas suffisante à ce stade27. Subjective, la croyance de

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l’accusé en la présence d’une personne en situation d’autorité l’est certainement. Objective, elle l’est également puisque à moins de reposer sur des motifs raisonnables, la perception de l’accusé ne sera pas suffisante pour satisfaire au premier critère. La croyance de l’accusé doit donc être sincère (critère subjectif) et raisonnable dans les circonstances (critère objectif).

12. Comme la preuve se rapportant à la présence d’une personne en situation d’autorité relève en grande partie de l’accusé, il incombe à ce dernier « d’établir qu’il y a au dossier des éléments de preuve à l’appui de son affirmation que la personne à qui il a fait une déclaration est une personne en autorité28 ». La plupart des déclarations incriminantes se faisant à des policiers ou à d’autres agents de la paix identifiables comme tels, l’accusé s’acquittera de son fardeau de présentation en démontrant qu’il connaissait le statut de la personne en question. Dans ce cas, l’obligation de tenir un voir-dire s’impose, sauf si l’avocat de l’accusé renonce à cette procédure et consent à l’admission de la preuve29. Lorsque celui

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qui reçoit une déclaration n’est pas une personne en situation d’autorité au sens « classique » ou « traditionnel » du terme, il appartient généralement à l’accusé « de soulever la question et de demander la tenue d’un voir-dire30 ». L’accusé s’acquittera de son fardeau de présentation s’il démontre l’existence d’un lien étroit entre la personne qui a reçu la déclaration et les autorités policières ou chargées des poursuites. À défaut de soulever la question, le juge du procès devra tenir un voir-dire s’il est « convaincu que, si l’accusé avait été conscient du lien entre la personne qui a reçu sa déclaration et les autorités, il aurait raisonnablement pu croire que cette personne agissait en tant que mandataire des policiers ou des autorités chargées des poursuites et que, de ce fait, elle était capable d’influencer les poursuites contre lui31 ». Si l’existence d’un lien étroit entre la personne qui reçoit la déclaration et les autorités peut commander la tenue d’un voir-dire, l’examen qui s’ensuit vise à déterminer si l’accusé croyait raisonnablement que la personne qui a reçu la déclaration « agissait pour le compte de la police ou des autorités chargées des poursuites32 ». Dans l’affirmative, le ministère public devra prouver hors de tout doute raisonnable le caractère volontaire de la déclaration.

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13. S’il est vrai qu’un policier ou un gardien de prison en uniforme est une personne en situation d’autorité, que les déclarations faites à des amis ou à d’autres personnes ordinaires ne répondent généralement pas à cette définition, qu’en est-il des personnes qui, en raison des liens qu’elles entretiennent avec l’accusé, la victime ou l’infraction, peuvent influencer le cours des poursuites ? À l’analyse de la situation des codétenus, agents banalisés et agents doubles, succédera un examen du statut de la victime, de ses proches, des directeurs d’écoles et autres agents de sécurité.

14. a) Codétenu agissant comme indicateur de la police, agents banalisés et agents doubles : Subordonnée à la croyance subjective de l’accusé qu’il s’adresse à une personne en situation d’autorité, l’obligation de prouver le caractère volontaire de la déclaration incriminante ne s’applique pas aux aveux faits à des compagnons de cellule, qu’il s’agisse d’un codétenu agissant ou non pour le compte de la police ou d’un agent banalisé. Discutant de l’admissibilité d’une déclaration faite par un suspect à un policier habillé en civil qui fut placé dans la même cellule afin de recueillir des renseignements compromettants, le juge Martland, dans R. c. Rothman33, réitère l’importance de la perception subjective de l’accusé. Comme l’agent Knight se faisait passer pour un chauffeur de camion qui était en prison à cause d’une contravention aux règles de la sécurité routière, le détenu ne croyait pas s’adresser à une personne en situation d’autorité. La déclaration faite à un agent banalisé ou à un codétenu agissant ou non pour la police n’est donc pas soumise à la règle des confessions. Il en va également des déclarations faites par un suspect dans le cadre d’opérations secrètes d’infiltration, qu’il s’agisse d’enquêtes traditionnelles ou d’opérations de type « Monsieur Big34 ». Sur ce point, citons la décision de la Cour suprême dans R. c. Grandinetti35. Soupçonnant l’accusé d’être impliqué dans le meurtre de sa tante, la police avait mis sur pied une opération secrète au cours de laquelle plusieurs policiers prétendaient appartenir à une organisation criminelle

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fictive. Après avoir gagné la confiance de l’accusé et signifié que sa participation aux activités illégales pourrait s’accroître, des agents doubles lui ont laissé croire qu’ils pouvaient, grâce à leurs contacts avec des policiers corrompus, faire disparaître les soupçons que la police avait à son égard. Comme l’accusé refusait encore de parler, les agents lui ont mentionné que la poursuite de l’enquête sur le meurtre pourrait nuire à leurs activités criminelles et qu’il devait « se mettre à table » afin d’éviter que les policiers s’ingèrent dans leurs affaires. M. Grandinetti avoua la commission du meurtre. D’après la juge Abella, qui s’exprimait au nom de la Cour, « l’appelant croyait que les agents doubles étaient des criminels, pas des policiers, même s’il pensait que ces criminels avaient des liens avec des policiers corrompus susceptibles d’influencer l’enquête dont il était l’objet. Lorsque, comme en l’espèce, l’accusé avoue son crime à un agent double qu’il croit en mesure d’influencer, grâce au concours de policiers corrompus, l’enquête dont il fait l’objet, le pouvoir coercitif de l’État n’est pas en cause. Les déclarations n’ont donc pas été faites à une personne en situation d’autorité36 ». Encore une fois, « la règle des confessions ne s’applique qu’à l’égard des déclarations faites à une personne en situation d’autorité. L’agent double, dont l’accusé ignore qu’il agit à titre d’autorité de l’État, ne fait pas partie de cette catégorie37 ».

15. b) La victime et ses proches (famille, conjoint, ami, connaissance) : Consterné par la découverte qu’un proche a été victime d’un acte criminel, il arrive parfois – souvent même – qu’un parent, conjoint ou ami de la victime confronte l’accusé relativement aux actes reprochés. La présentation d’excuses ou de justifications étant fréquente, il convient de s’interroger sur le statut des personnes qui ont reçu de telles déclarations. Sur ce point, trois décisions retiennent particulièrement notre attention. Il s’agit des arrêts Hodgson38, S.G.T.39 et Wells40. Dans R. c. Hodgson,

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l’appelant, qui était un ami de la famille de la victime, fut accusé d’avoir agressé sexuellement la plaignante à plusieurs reprises pendant qu’il gardait la jeune fille avec ses frères et sœurs. Après avoir conservé le silence pendant des années parce qu’elle craignait des représailles, la victime a finalement avoué son terrible secret à sa mère. Mis au fait des agressions, la mère, le père et le beau-père de la plaignante se sont rendus, avec elle, au lieu de travail de l’accusé afin de le confronter. L’appelant, selon les personnes concernées, aurait alors admis avoir agressé sexuellement la victime à plusieurs reprises. Il aurait également exprimé des regrets et affirmé qu’il « savait que ça finirait par lui retomber sur le nez41 ». Son avocat ne s’étant pas opposé à l’admission de la déclaration extrajudiciaire, la Cour suprême devait décider si le juge du procès avait commis une erreur en ne tenant pas d’office un voir-dire afin de déterminer si les déclarations de l’accusé avaient été faites à des personnes en situation d’autorité. Dans un jugement étoffé, le juge Cory répond par la négative. Selon ce dernier, « rien n’indiquait que la plaignante ou les membres de sa famille avaient parlé aux policiers ou à quelque autre personne en situation d’autorité, ou envisageaient même de déposer une plainte. De même, rien ne tendait à indiquer que l’appelant croyait subjectivement que la famille de la plaignante avait quelque pouvoir à l’égard des procédures criminelles. Dans ces circonstances, il est impossible d’affirmer que le juge du procès a commis une erreur en ne tenant pas d’office un voir-dire42 ».

16. Dans R. c. S.G.T.43, la Cour devait se prononcer sur l’admissibilité en preuve d’un courriel adressé à la mère d’une victime d’agression sexuelle. La plaignante, qui est la fille de l’ancienne conjointe de l’accusé, fut adoptée par ce dernier à la suite de son mariage avec sa mère. Le couple s’étant séparé quelques années plus tard, une entente de garde partagée fut conclue entre les deux parties. La jeune fille devant habiter chez son père deux jours par semaine, un week-end sur deux et un mois pendant l’été,

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celle-ci informa une amie, puis sa mère, du comportement sexuel déplacé de son père. La mère de la jeune fille ayant communiqué avec la police, on lui demanda de rappeler plus tard car le service spécialisé dans les cas d’agression sexuelle n’était pas encore ouvert au moment de l’appel. La mère de la victime préféra laisser tomber l’affaire. Environ un an plus tard, la plaignante fit part des gestes inappropriés de son père à sa conseillère d’orientation qui contacta aussitôt la police. Accusé d’avoir procédé à trois reprises à des attouchements sexuels sur la victime, l’appelant fit parvenir un courriel à la mère de la plaignante dans lequel il s’excusa du mal qu’il avait pu causer à sa fille. L’appel du verdict de culpabilité ayant été accueilli en raison du fait que le juge du procès n’avait pas tenu d’office un voir-dire sur l’admissibilité du courriel, la Cour suprême écarta la décision de la Cour d’appel de la Saskatchewan et conclut à l’absence de personne en situation d’autorité. En effet :

« S.G.T. n’a pas témoigné qu’il croyait que la mère de A avait pouvoir ou influence sur l’instance. Même si c’était le cas, toute croyance subjective doit reposer sur un fondement factuel raisonnable. Rien ne prouve que la mère pouvait exercer le moindre pouvoir sur la poursuite en justice de S.G.T. ou qu’elle agissait pour le compte des enquêteurs. En fait, c’est plutôt le contraire qui ressort de la preuve. Lorsque la mère de A a appelé la police après que sa fille l’a [sic] mise au fait des incidents en 2003, on lui a demandé de rappeler parce que le service compétent n’était pas ouvert à ce moment-là. Elle n’a jamais rappelé parce qu’elle redoutait les répercussions qu’une plainte pourrait avoir sur son fils, B. La police n’a commencé à faire enquête sur S.G.T. qu’en 2004, après les révélations faites par A aux autorités scolaires (dossier de l’appelante, p. 80). Dans ces circonstances, rien dans la preuve n’indiquait au juge du procès que la mère de A put avoir un autre statut que celui de témoin ordinaire. J’en conclus donc que le juge du procès n’a pas commis d’erreur en ne tenant pas de voir-dire pour déterminer si la mère de A était une personne en autorité44. »

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17. En ce qui concerne la décision de la Cour suprême dans R. c. Wells45, celle-ci constitue un des rares cas où, malgré l’inaction de l’avocat de l’accusé, le juge du procès se devait de tenir d’office un voir-dire pour déterminer si les parents étaient des personnes en situation d’autorité et, dans l’affirmative, si les déclarations avaient été faites volontairement. Informé que le fils de S.T. avait été victime d’attouchements sexuels de la part de l’accusé, G.D. s’est rendu avec son ami S.T. au détachement local de la GRC afin de discuter de la situation avec un policier. À la suite de deux rencontres, G.D. et S.T. ont décidé, d’un commun accord, de tendre un piège à l’accusé afin de l’amener à confesser ses crimes. Ce piège consistait essentiellement à confronter l’accusé aux allégations reprochées pour ensuite examiner sa réaction. L’accusé ayant admis avoir accidentellement touché le pénis du fils de S.T., G.D. demanda à son garçon et à son neveu si l’accusé les avait également touchés, ce à quoi ils répondirent par l’affirmative. L’accusé ayant nié ces allégations, G.D. le saisit par les cheveux et lui plaça un couteau sous la gorge. Après avoir dit à l’accusé qu’il pourrait le tuer pour ce qu’il a fait à ses enfants, ce dernier affirma : « J’aimerais que tu le fasses. Je ne sais pas ce qui cloche en moi46. » G.D. ayant laissé tomber le couteau puis asséné un coup de poing à l’accusé, il obligea ce dernier à s’excuser auprès des enfants. À ce moment, l’accusé aurait dit : « Je n’ai jamais voulu vous faire du mal et j’ai eu tort de vous toucher. Je suis désolé47. » L’avocat de l’accusé ne s’étant pas opposé à l’admission des déclarations incriminantes, le Tribunal devait déterminer si le juge du procès avait commis une erreur en ne tenant pas d’office un voir-dire. Comme G.D. et S.T. avaient rencontré des policiers au détachement local de la GRC au sujet des événements en question et qu’ils avaient décidé par la suite de tendre un piège à l’accusé afin de lui soutirer un aveu, « il est raisonnable de conclure que le juge du procès aurait dû demander à l’avocat de la défense s’il voulait ou non renoncer

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à la tenue d’un voir-dire en ce qui concerne les déclarations contre intérêt faites par l’intimé à G.D.48 ».

18. Cette analyse sur le statut des proches de la victime ayant reçu un aveu ou une déclaration incriminante de la part de l’accusé ne serait pas complète sans parler des décisions rendues par les autres tribunaux à travers le Canada. Sur ce point, les jugements sont assez nombreux et éloquents pour fixer le droit positif sur la question. L’individu qui est confronté par un proche de la victime et qui admet sa participation dans la commission d’un crime parce qu’il craint que son interlocuteur va détruire sa réputation (« I know what you did. You have one chance to tell the truth or I will go so public it will make your head spin »), ne s’adresse pas à une personne en situation d’autorité s’il ne croit pas raisonnablement que ce dernier agissait alors pour le compte de la police ou des autorités chargées des poursuites49. Il en va ainsi de la déclaration obtenue à la suite de menaces de porter plainte à la police s’il n’avoue pas son crime (« I will call the police if you do not tell me50 ») ou de la promesse de ne pas appeler la police s’il

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admet son délit (« I won’t call the police if you tell me51 »). S’il est vrai que l’accusé peut croire que la plaignante ou l’un de ses proches est en mesure d’influencer la poursuite en gardant le silence sur les événements en question, la preuve doit indiquer la présence d’autres facteurs pouvant démontrer qu’ils agissaient alors en tant que mandataires des policiers ou des autorités chargées des poursuites. C’est la protection de l’accusé contre le comportement coercitif de l’État qui compte. « Dans les cas où les parents ont été considérés comme personnes en autorité, il y avait généralement une certaine interaction entre la police et eux52. » En effet, ce n’est pas parce que la plaignante a le pouvoir de freiner le cours de la justice en choisissant de ne pas porter plainte à la police, qu’elle possède nécessairement la capacité d’influencer

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le déroulement de l’enquête ou de la poursuite engagée contre l’accusé53. En sens contraire, la plaignante qui s’entend avec la police pour menacer l’accusé de le dénoncer s’il ne parle pas agit pour le compte de l’État. Dans ce cas, « si l’accusé parle par crainte de représailles ou dans l’espoir d’obtenir un avantage parce qu’il croit raisonnablement que la personne qui reçoit sa déclaration agit à titre de mandataire de la police ou des autorités chargées des poursuites et qu’elle pourrait par conséquent avoir quelque influence ou pouvoir sur les poursuites engagées contre lui, cette personne est alors à juste titre considérée comme une personne en situation d’autorité54 ». Quant à l’aveu arraché à la suite de l’emploi de la force ou de menaces d’emploi de la force, le principe demeure le même : « [N]o matter how brutal the circumstances of the extraction of these statements were, they do not, in my view, meet or come

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anywhere close to satisfying me that they were made to a person in authority55. »

19. c) Directeurs d’école et agents de sécurité : À l’image de la victime et de ses proches, les directeurs d’école peuvent parfois être considérés comme des personnes en situation d’autorité. Encore une fois, l’analyse est contextuelle et interdit toute catégorisation fondée exclusivement sur la position ou la qualité de la personne qui reçoit la confession56. Statuant sur un pourvoi logé à l’encontre d’un jugement de culpabilité relativement à des accusations de trafic de cannabis et de possession en vue de trafic, la Cour d’appel du Québec, dans LSJPA-165, écarte la décision de la juge de première instance de ne pas reconnaître le directeur d’école comme une personne en situation d’autorité57. Comme il incombe à l’accusé d’établir qu’il y a des éléments de preuve à l’appui de sa croyance que le directeur d’école avait « quelque pouvoir ou influence sur les poursuites qui pourraient être engagées contre lui58 », il suffira, dans la plupart des cas, « que l’accusé démontre qu’il connaissait l’existence d’un lien de mandataire ou d’une étroite collaboration entre le directeur et la police ou les autorités chargées des poursuites59 ». Le directeur d’école qui interroge un étudiant de 16 ans soupçonné d’être en possession de stupéfiants avec la volonté de transférer le dossier à la police, peut donc être considéré comme une personne en situation d’autorité

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si, à la lumière des circonstances de l’affaire (utilisation dans le cours de l’enquête d’un policier à la retraite comme maître chien, appel à la police dans les cas de violations graves du code de vie de l’école, etc.60), l’étudiant croyait raisonnablement en l’existence d’un lien suffisamment étroit entre le directeur d’école et la police61. Il en va également des déclarations recueillies par un

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agent de sécurité embauché par une école62 ou une entreprise privée. Si l’intervention de l’agent de sécurité ne se limite pas à l’application d’une sanction disciplinaire ou d’une procédure alternative (p. ex. : lettre de demande de recouvrement au civil), mais peut se traduire, conformément à l’usage ou à une procédure habituelle, par un signalement à la police, il y a un lien suffisamment étroit avec les autorités chargées des poursuites pour que la personne soit en situation d’autorité.

20. Ainsi, sous réserve des policiers et des gardiens de prison en uniforme, il n’existe pas de catégories d’individus correspondant d’emblée à cette définition. L’analyse, rappelons-le, est

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contextuelle et exclut toute conclusion fondée uniquement sur la qualité ou le statut de la personne63. Qu’il s’agisse d’un « parent »

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ou d’un « médecin », d’une « ambulancière »64 ou d’un « enseignant », d’un « employeur » ou d’une « travailleuse sociale65 », importe peu. Ce qui compte est la perception raisonnable de l’accusé selon laquelle l’individu est « un allié des autorités étatiques pouvant influencer l’enquête ou les poursuites le visant66 ». Si l’accusé s’acquitte de son fardeau de présentation, le ministère public doit alors prouver que l’accusé ne croyait pas raisonnablement que son interlocuteur était une personne en situation d’autorité ou, s’il le croyait, que la déclaration était volontaire au sens de la règle des confessions67.

2) Le caractère volontaire de la déclaration incriminante

21. À l’image d’une équation dont les facteurs pertinents constituent les variables, le caractère volontaire de la déclaration incriminante transparaît à travers les circonstances qui président à

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son obtention. L’analyse est contextuelle. Elle vise « à déterminer, en tenant compte de toutes les circonstances, si la volonté de l’accusé a été subjuguée par les autorités au point de vicier le caractère volontaire de sa déclaration68 ». Ainsi, mis à part les cas les plus flagrants de menaces, de promesses ou d’oppression, chaque cas est unique et doit être apprécié à la lumière des faits de l’affaire. Plus l’action reprochée aux policiers est en mesure d’ébranler la volonté du suspect, plus la déclaration obtenue sera susceptible d’être écartée. Une contravention moins significative peut également justifier l’exclusion de la confession si, une fois combinée à d’autres facteurs pertinents, la déclaration n’était pas volontaire. De façon générale, les causes pouvant miner le caractère volontaire de la déclaration sont a) les menaces ou promesses, b) l’existence d’un climat d’oppression, c) l’absence d’un état d’esprit conscient et d) l’utilisation des autres ruses policières pouvant compromettre l’intégrité du système de justice pénale69. Voyons brièvement en quoi consistent ces facteurs d’appréciation.

22. a) Les menaces ou promesses : Les déclarations obtenues « par crainte d’un préjudice ou dans l’espoir d’un avantage70 » occupent le premier rang des causes d’involontaire en droit pénal canadien. S’il est évident que la torture ou les menaces de recourir à la force vicient le caractère volontaire de la déclaration, qu’en est-il des menaces plus subtiles, des encouragements qui, en opérant sur l’esprit de l’agent, minent également son choix de parler ou non aux policiers. Sur ce point, les tribunaux sont catégoriques : les déclarations obtenues « par crainte d’un préjudice ou dans l’espoir d’un avantage » sont inadmissibles en droit pénal canadien

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lorsqu’elles privent l’individu de sa volonté de parler ou non aux policiers. La crainte d’un préjudice, tout d’abord, puisque l’enquêteur qui explique à une femme soupçonnée d’avoir infligé des blessures à son bébé de deux mois qu’elle pourrait ne plus revoir son enfant en l’absence d’une explication vraisemblable quant aux blessures subies par ce dernier agit à ses risques et périls71. Il en va de même du policier qui affirme à un suspect dans une affaire de meurtre que s’il ne donne pas sa version de l’histoire72, le jury

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sera informé du fait qu’il ne se préoccupe pas du défunt et refuse tout simplement d’en parler. Encore une fois, l’analyse est contextuelle. La simple présence de menaces de préjudice ou de représailles n’est pas toujours suffisante en soi pour vicier le caractère volontaire de la déclaration. Dans ce cas, le tribunal doit considérer l’ensemble des faits et déterminer, à la lumière des circonstances de l’affaire, si l’effet cumulatif des facteurs pertinents ayant mené à l’obtention de la déclaration a privé l’accusé du choix de parler ou non aux policiers. Sans être déterminantes à tous coups, les menaces proférées à l’endroit de l’accusé peuvent constituer une cause active (operating factor) et contributive (causally related) dans l’obtention d’une confession. Cela est particulièrement vrai lorsque les menaces ont joué un rôle décisif dans la décision de l’accusé de parler au policier et sont contemporaines à l’obtention de la déclaration incriminante.

23. En ce qui concerne les déclarations obtenues dans « l’espoir d’un avantage », le même principe s’applique. La perspective de clémence qui subjugue la volonté de l’agent rend sa déclaration inadmissible. On n’a qu’à penser au policier qui promet au suspect de réduire les accusations de meurtre à un homicide involontaire coupable s’il confesse son crime73 (réduction des accusations), à celui qui affirme au prévenu qu’il va obtenir une peine réduite s’il parle tout de suite74 (diminution de la peine) ou à l’enquêteur qui

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laisse entendre à deux jeunes hommes qu’aucune accusation ne sera portée contre eux en échange de leur collaboration75 (influencer le cours de la poursuite). Dans tous ces cas, la volonté de l’accusé est ébranlée et la perspective de clémence, à elle seule ou combinée à d’autres facteurs, pourra miner le caractère volontaire de la déclaration. En sens contraire, le policier qui répète à l’accusé que la responsabilité de déterminer la nature des accusations qui seront portées contre lui revient à la poursuite ou qui explique que la décision du ministère public de poursuivre pour un meurtre ou

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un homicide involontaire coupable n’est pas encore prise, n’agit pas illégalement s’il ne laisse pas miroiter à l’accusé la possibilité d’influencer ce choix en retour d’une confession76. Cette conclusion s’applique également aux explications se rapportant aux différents niveaux de responsabilité lorsqu’une personne décède77. À cet égard, il est évident que la décision de parler peut influencer le choix final du procureur et le policier qui souligne ce fait, sans promettre quoi que ce soit en retour, n’agit pas illégalement78. En

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somme, « le fait pour les policiers d’offrir explicitement au suspect de lui obtenir un traitement clément en retour d’une confession est manifestement un encouragement très puissant et justifiera l’exclusion de la confession, sauf dans des circonstances exceptionnelles79 ».

24. Sera également considérée comme une forme d’encouragement, l’offre d’aide ou d’assistance psychiatrique faite à un accusé dans le cours normal d’un interrogatoire policier. Sur ce point, les tribunaux distinguent selon que l’offre d’assistance est conditionnelle ou non à l’obtention d’une déclaration. Le policier qui mentionne à l’accusé qu’il a « besoin d’aide80 », que « vider son sac est une étape importante de la thérapie81 », que des professionnels de la santé « pourraient l’aider82 » ou qu’il est prêt à lui « fournir l’assistance nécessaire83 », ne promet rien à

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l’accusé84. Il en va ainsi de l’enquêteur qui, après avoir invité le suspect à « vider son cœur », lui dit qu’il serait prêt à l’aider à régler son problème si dans le futur il avait besoin d’aide avec sa situation85. Comme cette proposition n’implique aucune contrepartie, celle-ci ne pose pas de difficulté aux tribunaux. Il en va autrement de l’offre du policier de fournir de l’aide psychologique à l’accusé

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en retour d’une confession. L’offre d’assistance étant conditionnelle à l’obtention de l’aveu, le tribunal devra déterminer si l’encouragement, à lui seul ou combiné à d’autres facteurs, a eu pour effet de subjuguer la volonté de l’accusé en jouant un rôle décisif dans sa décision de parler aux policiers. L’offre d’assistance conditionnelle qui amène le suspect à parler aux policiers, sans toutefois le dérober de sa volonté86, doit donc être examinée à la lumière des autres facteurs de pondération. En effet, « bien qu’il s’agisse clairement d’un encouragement, une telle offre n’a pas autant de poids qu’une offre de clémence et il faut, dans un tel cas, tenir compte des circonstances87 ». Il est donc plutôt rare que ce facteur entraîne à lui seul l’exclusion de la preuve.

25. Les « menaces » ou « promesses » qui sont dirigées à l’endroit des membres de la famille de l’accusé ou de ses proches peuvent également vicier le caractère volontaire de la déclaration88.

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L’agent de police qui menace le suspect d’arrêter sa fiancée s’il ne confesse pas son crime exerce une pression sur la volonté du sujet qui peut l’amener à s’auto-incriminer indépendamment de la fiabilité de sa déclaration. Si la présence d’une « contrepartie constitue un facteur important pour établir l’existence d’une menace ou d’une promesse, c’est l’importance des encouragements offerts, eu égard à l’individu et à la situation dans laquelle il se trouve, qu’il faut prendre en considération dans l’analyse contextuelle globale du caractère volontaire de la déclaration89 ». Plus la promesse ou la menace visant un tiers est forte, plus les chances qu’elle subjugue la volonté de l’accusé sont élevées. Une menace portant sur un objet moins compromettant peut également ébranler la volonté du suspect si ce dernier se trouve dans une situation psychologique précaire. La contrepartie est donc importante, sans être nécessaire ou déterminante. L’agent qui promet au suspect qu’aucune accusation ne sera portée contre sa conjointe s’il passe aux aveux (promesse), qui laisse miroiter la perspective d’un traitement plus clément pour celle-ci en échange d’une confession (promesse), qui mentionne à l’accusé que sa conjointe ira en prison s’il ne collabore pas à l’enquête90 (menace) ou qui affirme que sa mère sera accusée à moins qu’il admette la possession de l’arme du crime (menace) offre une contrepartie dont la nature et l’incidence sur la volonté de l’accusé sont sans équivoque91. Il en va autrement des « encouragements de moindre importance », de ces

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promesses qui, tout en exerçant une pression sur la volonté du sujet, ne sont généralement pas suffisantes pour miner son choix de parler ou non aux policiers92. C’est l’exemple de l’inspecteur qui mentionne au suspect qu’il pourra rencontrer sa petite amie qu’après avoir confessé son crime93, ou qui l’informe de l’inutilité d’enquêter plus à fond ou d’interroger sa fiancée s’il passait aux aveux. S’agissant d’encouragements de moindre importance, il est peu probable que leur présence soit suffisante en soi pour écarter une déclaration. Quant aux encouragements, sans offre de contrepartie, qui font appel aux sentiments de l’accusé pour sa famille ou un proche, ils demeurent également soumis à l’analyse contextuelle développée par la Cour suprême dans R. c. Spencer. On n’a qu’à penser au policier qui mentionne à l’accusé que ses propos permettront de faire la lumière sur l’affaire et seront pris en compte dans l’enquête menée sur sa fiancée. Même si les policiers ont fait appel aux sentiments de l’accusé, les encouragements n’étaient pas suffisants, en l’espèce, pour subjuguer sa volonté94. Il en va ainsi de l’enquêteur qui suggère au meurtrier de sa propre mère de passer aux aveux afin d’aider son père à comprendre ce qui s’est passé95, du policier qui mentionne à l’accusé que lui et sa famille

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se porteront mieux s’il passe aux aveux96 et, enfin, de l’inspecteur qui affirme au suspect de plusieurs incendies que sa « fiancée le respecterait pour avoir admis qu’il avait un problème97 ». Bien qu’il s’agisse clairement d’encouragements à parler, les exhortations se rapportant aux sentiments de l’accusé pour les membres de sa famille ou ses proches ne suffisent généralement pas à le priver de sa volonté98, même s’il arrive parfois que de tels encouragements, une fois combinés à d’autres facteurs, puissent empêcher la poursuite de s’acquitter de son fardeau de preuve99. Quant aux encouragements plus subtils, comme le fait de placer une photo de la fille du suspect dans la salle d’interrogatoire et de faire appel à

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son obligation morale d’être honnête et de faire les bonnes choses, ceux-ci ne posent aucune difficulté aux tribunaux100.

26. En laissant présager la présence de conséquences négatives, l’emploi d’expressions telles que « il vaudrait mieux que tu te mettes à table », « il vaut mieux tout nous dire », « la meilleure chose que tu puisses faire est de nous dire la vérité » et « je te conseille de dire la vérité » peut affecter le caractère volontaire de la déclaration incriminante101. S’agissant de menaces d’un préjudice futur non précisé, il est plutôt rare que de telles paroles entraînent l’exclusion de la confession. Utilisées dans le cadre d’un interrogatoire agressif, hostile et manipulateur, les menaces voilées peuvent toutefois s’avérer dangereuses, surtout lorsque le suspect se trouve dans un état psychologique ou émotionnel précaire. Généralement insuffisante à elle seule pour entraîner l’exclusion de la preuve, l’utilisation de menaces verbales non précisées peut parfois miner la volonté du sujet. Cela est particulièrement vrai lorsque l’emploi de telles expressions, combiné à d’autres facteurs, joue un rôle décisif dans la décision de l’accusé de parler aux policiers. L’aveu sera par contre admis lorsque les expressions de ce genre n’ont pas amené l’accusé à parler102. Sans être explicite,

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l’objet de la menace doit donc être réel pour affecter le caractère volontaire de la déclaration. En effet, « les remarques du type “il vaudrait mieux” ne commandent l’exclusion de la confession que dans les cas où les circonstances révèlent une menace ou promesse implicite103. »

27. Contrairement aux menaces de préjudice futur non précisé, les commentaires voulant que le silence de l’accusé diminuera sa crédibilité aux yeux du jury constituent à la fois une menace et une incitation, dans la mesure où ils laissent entrevoir des conséquences négatives s’il ne parle pas et positives s’il passe aux aveux104. Ce principe s’applique également à la personne soupçonnée d’avoir participé à un meurtre à la suite d’un cambriolage commis lors d’une invasion de domicile. Le policier ayant dit à

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l’accusé qu’il serait déclaré coupable d’un meurtre au premier degré qu’il n’a pas commis s’il ne parlait pas, le tribunal a tenu compte de ce facteur dans l’évaluation du caractère volontaire de sa déclaration105. En ce qui concerne l’enquêteur qui mentionne à un accusé qui nie catégoriquement sa participation dans le crime que sa version des faits est importante pour la suite de l’enquête et qu’elle pourrait probablement l’exonérer de tout blâme, aucun reproche ne peut lui être adressé, dans la mesure où sa remarque s’inscrivait naturellement dans la version des faits soutenue par l’accusé106.

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28. L’utilisation d’encouragements moraux ou spirituels faisant appel à la conscience, aux sentiments ou au caractère de l’accusé est une autre technique de persuasion policière relativement efficace. La contrepartie offerte étant inexistante, les encouragements spirituels mènent rarement à l’exclusion de la confession. L’enquêteur qui dit au suspect qu’il se sentira mieux s’il passe aux aveux107, qu’il serait préférable de parler « que de vivre avec un tel secret108 », qu’il devrait dévoiler « où se trouve le corps de la victime pour que son épouse puisse avoir un enterrement digne et que sa famille immédiate puisse savoir ce qu’il en est109 », qu’il est là pour l’aider et qu’une confession soulagerait sa conscience en lui permettant de prendre ses responsabilités n’offre rien à l’accusé110. Il en va de même du policier qui mentionne à un

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suspect d’origine autochtone qu’une confession lui ferait du bien et lui permettrait probablement d’être pardonné plus facilement par sa communauté111. Certes, il y a un encouragement, mais celui-ci se rapporte à la personne de l’accusé et plus précisément à la manière de se voir, de vivre avec son crime ou d’en accepter la responsabilité. C’est ainsi qu’il faut envisager la décision des policiers de faire jouer un enregistrement au cours duquel la mère de la victime supplie l’accusé de confesser son crime. En faisant appel aux sentiments de l’accusé, les policiers tentent tout simplement de le convaincre qu’il est dans son intérêt de passer aux aveux, d’où son absence d’impact sur le caractère volontaire de la déclaration incriminante.

29. Minimisation de la gravité du crime : Appliquée en conjonction ou non avec l’utilisation d’encouragements moraux ou spirituels, la minimisation de la gravité de l’infraction est un autre moyen efficace de faire parler un suspect. Sur ce point, il convient de distinguer la minimisation de la culpabilité morale de l’accusé en rapport avec la commission du crime, de celle touchant les conséquences juridiques de l’infraction. Au Canada, « le fait de minimiser la portée morale de l’infraction est un aspect courant et habituellement acceptable des interrogatoires policiers112 ». L’inspecteur qui dit à la personne soupçonnée d’avoir incendié la voiture de sa fiancée qu’il ne s’agit pas d’un crime très grave, ou qu’il n’est pas un vrai criminel, ne fait aucune menace, ni promesse à

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l’accusé113. On peut en dire autant de l’enquêteur qui mentionne au suspect d’un vol d’essence « qu’il n’y a rien là et qu’il n’est pas le premier à faire ça ». La présentation d’un scénario comportant une hypothèse compromettante et une autre visant à minimiser la culpabilité morale de l’accusé est une technique efficace de persuasion policière qui, une fois jumelée à l’existence d’une preuve solide ou à la conviction du policier qu’il ne reste plus qu’à savoir pourquoi le suspect a commis le crime, peut inciter ce dernier à passer aux aveux114. L’enquêteur qui mentionne à l’individu soupçonné d’avoir secoué son bébé qu’il n’est pas un « mauvais père », mais une personne normale qui a perdu le contrôle de ses émotions offre une porte de sortie « honorable » à l’accusé. Il en va ainsi de l’inspecteure qui suggère à la personne soupçonnée d’avoir agressé sexuellement une jeune fille de 13 ans qu’il n’est pas un « violeur » ou un « prédateur sexuel », mais une personne normale qui a noué une relation intime qui est allée trop loin115. Dans la mesure où la

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minimisation de la gravité de l’infraction se limite à la culpabilité morale du délinquant, la preuve obtenue par la police sera admissible, comme provenant de la volonté du suspect.

30. Cette conclusion sera différente si la minimisation reprochée se rapporte aux conséquences juridiques découlant de la commission d’une infraction. C’est l’exemple du policier qui obtient une déclaration incriminante après avoir mentionné à un individu soupçonné d’incitation à des contacts sexuels sur un enfant âgé de moins de 16 ans, qu’il ne risquait pas de faire de la prison. Comme le policier a dit au suspect « qu’en faisant la déclaration et en lui promettant qu’il ne recommencerait plus, tout irait bien », la cour, après avoir souligné que cette infraction comportait une peine minimale d’emprisonnement obligatoire, « considère que l’accusé a fait cette déclaration en recevant des promesses qui dans le contexte l’ont incité à signer ce document116 ». Certes, les policiers peuvent minimiser la portée morale des crimes reprochés, mais il est interdit de « laisser entendre à l’accusé qu’une confession de sa part aurait pour effet d’atténuer les conséquences juridiques de ses crimes117 ».

31. Bien que pertinente, la question de savoir si l’individu est considéré comme un « témoin » ou un « suspect » n’est pas déterminante en soi. Il en va également de la mise en garde de la

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part des policiers118. La véritable question étant de savoir si la déclaration était volontaire dans les circonstances119, c’est le choix de l’accusé de parler ou non au policier qui compte. C’est ainsi qu’il faut envisager l’admissibilité de la déclaration faite par une personne qui avait été invitée à se présenter au poste de police pour discuter d’une affaire de fraude. Puisque l’accusée avait librement « accepté d’accompagner les policiers pour faire une déclaration, qu’elle a consulté un avocat, qu’elle n’était pas détenue et que la

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rencontre s’est déroulée dans un climat de coopération », la validité de la déclaration n’avait pas été affectée par le fait qu’elle pouvait être considérée comme « suspecte » et non simple « témoin » du crime120. Sans être déterminant à tout coup, il est évident que l’impact de l’absence de mise en garde sur le choix de l’individu de parler ou non à la police sera moins important lorsque l’accusé savait dans les faits qu’il n’avait pas à répondre aux questions des policiers et que sa déclaration pouvait être utilisée contre lui121.

32. b) L’oppression : Mise en place afin de briser les résistances de l’accusé, l’instauration d’un climat d’oppression est à l’origine de plusieurs fausses déclarations122. Parmi les facteurs

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les plus souvent cités, mentionnons l’intoxication de l’accusé, son mauvais état de santé, sa fragilité psychologique, sa fatigue123, la privation de sommeil, de vêtements chauds, d’eau et de nourriture, l’absence de soins médicaux et le déni systématique de son droit de garder le silence. Les conditions de détention peuvent être minimales, sans être oppressives124. Un interrogatoire prolongé, hostile

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et manipulateur peut également contribuer à créer un climat d’oppression125. Il en va autrement des questions qui, tout en étant persistantes, ne sont pas excessivement agressives ni intimidantes126. Encore une fois, aucun facteur n’est généralement suffisant à lui seul. L’individu qui souffre de problèmes de santé mentale et qui est soumis à un interrogatoire agressif et prolongé peut passer aux aveux s’il croit, en raison des propos ou du comportement des policiers, qu’il n’a pas d’autres choix que de parler. Les options offertes à l’accusé étant claires (il peut maintenir son innocence et demeurer en détention ou confesser son crime et être remis en liberté127), il faut distinguer la persuasion policière, de la mise

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en place de conditions si désagréables qu’elles inciteront tôt ou tard l’accusé à parler. La première confession est admissible comme provenant de la volonté du suspect, alors que la seconde est irrecevable comme découlant de son absence de liberté. C’est donc l’ensemble des facteurs à l’origine de la création du climat d’oppression qu’il faut prendre en considération dans l’analyse globale du caractère volontaire de la déclaration128. Une personne vulnérable et inexpérimentée peut s’avérer plus fragile à certains facteurs d’oppression qu’une personne mature et en pleine possession de ses facultés129. Il en va ainsi de la personne malade,

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intoxiquée ou excessivement fatiguée. Quant au suspect qui n’est pas à ses premiers démêlés avec la justice, celui-ci peut parfois démontrer une plus grande résistance aux facteurs d’oppression ou aux ruses des policiers.

33. La dernière source possible d’oppression menant à l’obtention d’une déclaration incriminante est l’utilisation d’éléments de preuve inexistants, fabriqués ou inadmissibles. Comme l’indique l’ensemble des jugements sur la question, il s’agit d’un facteur de persuasion extrêmement efficace qui, en forçant le suspect à s’expliquer, permet de contourner ses barrières psychologiques. Appliquée à des personnes plus vulnérables, l’utilisation de faux éléments de preuve peut amener un individu à croire qu’il a commis le crime ou que ses protestations d’innocence, même si elles sont vraies, demeureront futiles. Si le seul fait de mettre le suspect en présence d’éléments de preuve inadmissibles, ou même fabriqués, ne constitue pas nécessairement un facteur d’exclusion, il s’agit d’un élément qui, une fois envisagé à la lumière d’autres facteurs pertinents, peut affecter le caractère volontaire de la déclaration. De façon générale, les éléments de preuve pouvant participer à l’instauration d’un climat d’oppression et miner la volonté du suspect sont regroupés en trois catégories distinctes : (i) les éléments de preuve inexistants (mensonges, preuves fabriquées, etc.); (ii) l’exagération de la fiabilité ou de l’importance de la preuve à charge et (iii) l’utilisation de scénarios ou de questions hypothétiques amenant le suspect à s’expliquer.

34. (i) Les éléments de preuve inexistants (mensonges, preuves fabriquées, etc.) : Cette rubrique recouvre les éléments de

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preuve inexistants ou fabriqués, qu’ils soient de nature matérielle ou testimoniale, soumis au suspect afin d’obtenir une déclaration incriminante. Sans entraîner automatiquement le rejet de la confession, cette pratique est à l’origine de plusieurs contestations judiciaires. On distingue généralement les éléments de preuve inexistants selon qu’ils privent ou non l’individu de sa liberté de parler aux policiers. L’utilisation d’une preuve inexistante qui détruit le caractère volontaire de la confession se produit lorsqu’elle persuade l’accusé de sa culpabilité, ou l’amène à croire que toute protestation d’innocence sera futile dans les circonstances. Lorsqu’elle persuade l’accusé de sa culpabilité, tout d’abord, puisqu’une fausse preuve incriminante peut amener un individu plus fragile ou se trouvant dans des conditions psychologiques précaires à confesser un crime qu’il n’a pas commis. Sur ce point, citons la décision de la Cour suprême du Canada, dans R. c. Evans130. Après être devenu le principal suspect d’un double meurtre, l’accusé, un jeune déficient intellectuel léger, fut soumis à un interrogatoire serré au cours duquel l’enquêteur prétendit faussement avoir retrouvé ses empreintes digitales sur les lieux du crime. Ayant confessé l’assassinat brutal des deux victimes, l’accusé fut placé dans une cellule à côté d’un agent banalisé. Au cours d’une conversation avec le policier, l’accusé a reconnu avoir avoué la commission des crimes, mais nié avoir tué les deux jeunes femmes. Dans

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un passage qui laisse planer un doute sur sa culpabilité, l’accusé déclara : « Tu sais, c’est étrange, je ne me rappelle pas les avoir tuées. Ouais. Ordinairement je n’oublie pas des choses comme celles-là131. » Bien que l’arrêt Evans s’intéresse davantage au droit à l’assistance d’un avocat, cette décision souligne les dangers associés à l’utilisation d’une fausse preuve (p. ex. : empreintes digitales) dans un contexte révélant la présence de facteurs subjectifs pouvant fragiliser la volonté de l’accusé (p. ex. : déficience intellectuelle)132.

35. L’utilisation d’éléments de preuve inexistants amenant l’individu à croire que toute protestation d’innocence sera futile se produit généralement lorsque la preuve alléguée est si forte qu’elle subjugue la volonté du suspect. Dans R. c. Hammerstrom, le tribunal s’interrogea sur l’admissibilité d’une confession obtenue à la suite de fausses allégations laissant croire à l’individu que le meurtre de sa petite amie avait été capté sur bandes vidéo133. En réalité, les vidéos de surveillance ne montraient aucune image de M. Hammerstrom, ni des lieux où le corps de la victime fut retrouvé. Convaincu que les policiers étaient en possession d’images incriminantes, qu’une confession ne ferait aucune différence et que l’entrevue n’était qu’une formalité, l’accusé admit la commission du crime. L’affirmation de l’enquêteur à l’effet qu’il savait qu’il avait commis le meurtre jumelée à sa conviction que sa participation au crime avait été filmée l’ont persuadé qu’il était pris et que l’interrogatoire continuerait jusqu’au moment de sa confession. Compte tenu de la nature et de la gravité de la preuve fabriquée et de son impact significatif sur la décision du suspect de parler aux policiers, le tribunal conclut que les fausses allégations ont contribué, de concert avec d’autres facteurs, à la création

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d’un climat d’oppression qui aurait miné sa volonté et précipité sa confession134. D’où son inadmissibilité. Plus le lien entre les preuves inexistantes et l’obtention de la déclaration incriminante est étroit, plus il y a de chances que la confession soit écartée. Cela est particulièrement évident lorsque d’autres facteurs pouvant contribuer au climat d’oppression s’ajoutent afin d’ébranler la volonté du suspect. Sur ce point, citons la décision R. c. Ciliberto dans laquelle l’accusé fut arrêté pour le meurtre au deuxième degré de son ami d’enfance135. Souffrant de troubles mentaux, le suspect fut soumis à un interrogatoire agressif au cours duquel il fut réuni avec sa famille puis confronté aux parents du défunt. Profitant des sentiments d’affection qu’il avait envers ses parents, les policiers ont affirmé au suspect qu’il devait parler afin de dissiper les doutes qu’ils entretenaient à l’égard de leur participation possible au meurtre. En plus de recourir à ces tactiques douteuses, les policiers ont menti sur la valeur et l’existence de la preuve à charge. En effet, selon la police, (1) les agents auraient retrouvé l’ADN de l’accusé sur l’arme du crime; (2) des témoins auraient identifié sa camionnette au moment du meurtre; (3) l’accusé aurait regardé des

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personnes qui pouvaient l’identifier et, enfin, (4) un commerçant se rappelait lui avoir vendu un téléphone cellulaire qui aurait été utilisé lors de la commission du meurtre136. En réalité, toutes ces allégations étaient fausses. Ainsi, compte tenu de l’état mental du suspect, des déclarations de la police à l’effet que le silence de l’accusé pourrait impliquer criminellement ses parents, de l’utilisation de faux éléments de preuve et de la prétention voulant qu’une confession lui permettrait de ne plus être considéré comme un meurtrier au sang-froid (« cold blood killer »), le juge conclut à la présence d’un doute raisonnable sur le caractère volontaire de la déclaration incriminante. Si l’existence d’un lien étroit entre les facteurs d’oppression et l’obtention de la confession milite en faveur de son exclusion, l’utilisation d’éléments de preuve inexistants qui ont peu ou pas d’incidence sur le choix de l’accusé de parler aux policiers n’affectera pas la validité de l’aveu137. Il en

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va ainsi quand l’accusé nie sa participation au crime138, met en doute la véracité de la preuve fabriquée139 ou conteste sa pertinence ou sa valeur probante140. Comme la police ne peut connaître à l’avance l’impact des faux éléments de preuve sur la volonté du suspect (est-ce que l’accusé va se sentir piégé par les faux éléments de preuve et abandonner toute forme de résistance ou décider simplement de parler afin de clarifier sa situation ?), l’utilisation de telles tactiques demeure fort problématique et ne devrait pas être encouragée141. Enfin, mentionnons que la valeur et l’importance des autres éléments de preuve peuvent parfois amener le tribunal à conclure que les faux éléments de preuve n’ont pas subjugué la

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volonté du suspect, ni joué un rôle décisif dans sa décision de parler aux policiers142.

36. (ii) L’exagération de la fiabilité ou de l’importance de la preuve : D’après le juge Iacobucci, dans l’arrêt Oickle, les policiers peuvent exagérer la fiabilité ou l’importance de la preuve sans nécessairement compromettre l’admissibilité de la déclaration incriminante. Encore une fois, l’analyse est contextuelle. S’il est évident que la simple exagération ne rend pas la confession involontaire, il est plus difficile de se prononcer sur celle qui s’approche du mensonge ou se confond pratiquement avec lui. Tout est une question de degré. À l’extrémité inférieure de l’échelle de gravité se trouve la simple exagération découlant de l’amplification naturelle de la fiabilité ou de l’importance de la preuve. L’inspecteur qui prétend, dans une affaire d’agression sexuelle, que tous les résultats de l’enquête tendent à démontrer la culpabilité du suspect alors qu’il n’a recueilli que la déclaration de la victime exagère l’importance de la preuve à charge sans mentir à l’accusé143. Il en va ainsi de l’enquêteur qui obtient une confession après avoir confronté l’employé d’un magasin soupçonné d’y avoir allumé un

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incendie, à l’aide d’images captées par une caméra de surveillance144. Même si la vidéo ne montre aucune image de l’accusé en train d’y mettre le feu (on voit le suspect ramper vers un étalage de marchandise situé à l’avant du commerce, regarder au plafond et autour de lui, fixer la caméra, s’affairer à faire quelque chose près du sol pour ensuite s’en aller en rampant quelques minutes avant l’incendie), l’inspecteur a mentionné au suspect qu’il avait visionné la vidéo et qu’il n’y avait aucun doute sur sa culpabilité. D’après le juge Gray, les prétentions du policier constituent, en l’espèce, une simple exagération de l’importance de la preuve145. Cette tactique, qui n’a généralement rien de répréhensible, n’a pas pour effet de rendre les confessions involontaires ou inadmissibles.

37. L’exagération de la preuve qui s’approche du mensonge, sans nécessairement se confondre avec lui, est la seconde source d’amplification de la preuve. De façon générale, plus l’exagération s’approche du mensonge, plus il est important qu’elle s’appuie sur d’autres éléments de preuve. Pour s’en convaincre, citons la décision du juge Rempel, dans R. c. Swain146. Soupçonné d’avoir poignardé à mort un individu et d’en avoir blessé un autre, l’accusé fut arrêté puis interrogé par la police. Selon l’enquêteur au dossier, les images captées par la caméra de surveillance située à proximité des lieux du crime montraient clairement que l’accusé avait poignardé les deux victimes. En fait, les bandes vidéo permettaient uniquement de voir un homme brandissant un couteau sans pouvoir distinguer clairement si c’était l’accusé. Or, comme le détective était convaincu, à la lumière des déclarations obtenues de certains témoins et du visionnement du vidéo, que Swain (1) était sur les lieux du crime au moment des événements en question, (2) qu’il était intervenu afin de protéger son cousin impliqué dans une altercation et (3) qu’il avait confessé son crime à une amie qui avait rapporté à la police sa déclaration, le tribunal, après avoir considéré l’ensemble des circonstances, conclut à l’absence d’un climat

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d’oppression147. Il en va également du policier qui affirme au suspect d’une agression être convaincu de sa culpabilité après avoir parlé à sa femme et à plus de 20 témoins148. Comme l’épouse de l’accusé avait affirmé ne pas savoir ce qui s’était passé et que seulement un témoin avait fait des déclarations impliquant l’accusé, il s’agissait, en l’espèce, d’une grossière exagération de la preuve qui s’approchait dangereusement du mensonge. Bien que l’utilisation d’un tel stratagème fut condamnée par la cour, la durée de l’interrogatoire et la nature des questions posées amenèrent le tribunal à conclure à l’admissibilité de la preuve.

38. (iii) L’utilisation de scénarios et de questions hypothétiques : L’utilisation de scénarios et de questions hypothétiques se rapportant aux événements reprochés est une technique d’interrogatoire très efficace qui consiste à semer le doute dans l’esprit de l’accusé quant à la preuve à charge et à l’amener à fournir une explication ou à préciser sa situation. De manière générale, les questions des policiers sont posées sous forme conditionnelle. C’est l’exemple de l’individu soupçonné d’agression sexuelle à qui on demande d’expliquer pourquoi on retrouverait des traces d’ADN sur les petites culottes de la victime. Ici, l’enquêteur ne dit pas au suspect qu’il a une preuve d’ADN contre lui, mais l’invite simplement à expliquer pourquoi les policiers pourraient retrouver des traces d’ADN sur les sous-vêtements de la victime. Bien que l’utilisation de scénarios ou de questions hypothétiques soit répandue, sa proximité avec la fabrication d’une preuve inexistante est souvent fort préoccupante. Ce danger est particulièrement évident lorsque la question hypothétique s’appuie sur une preuve fabriquée, un faux scénario ou un mensonge. Pour s’en convaincre, citons,

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encore une fois, l’arrêt R. c. Evans. Discutant d’une perquisition qui avait eu lieu chez l’appelant entre le premier et le deuxième interrogatoire, l’inspecteur Spring a tenu les propos suivants : « Puis nous avons trouvé quelques petites choses que je crois importantes qui peuvent aussi indiquer que c’est peut-être toi qui a commis le crime la nuit dont on a parlé. Pourquoi ... ne peux-tu pas expliquer ou peux-tu nous dire pourquoi on aurait tes empreintes digitales dans la maison ?149 » Les policiers n’ayant trouvé aucune empreinte digitale correspondant à celles de l’accusé, ce dernier a fait une déclaration incriminante qu’il a par la suite niée à un agent banalisé. Sans être fatale à tout coup, l’utilisation de cette technique peut amener l’accusé à croire en l’existence de la preuve présentée et à la futilité de toute prétention d’innocence. Ici, l’enquêteur agit à ses risques et périls, car il y a peu de moyens pour lui de déterminer si la combinaison de la preuve fabriquée et du scénario hypothétique va ébranler la volonté du suspect au point d’abandonner toute forme de résistance.

39. En ce qui concerne la confession obtenue suite à l’utilisation de scénarios hypothétiques qui s’inscrivent dans le cours normal d’une enquête policière, rien ne s’oppose à son admission au procès. La commission d’un meurtre en plein jour dans une rue achalandée d’une banlieue de Montréal pourrait, par exemple, amener un enquêteur à demander à l’accusé s’il est possible qu’une personne l’ait vue en train d’agresser la victime. Il en va ainsi de l’individu qui poignarde à mort une personne dans un bar où se trouvent plusieurs caméras de surveillance. Bien que la caméra qui était située devant les lieux du crime ne fonctionnait pas et que les autres bandes vidéo n’étaient pas concluantes, l’enquêteur a demandé au suspect si une personne qui lui ressemble pourrait être vue à la caméra150. Ce qui ne constituait pas un problème en l’espèce compte tenu de la preuve recueillie et des circonstances de l’affaire.

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40. Bien qu’elle soit fréquente, l’utilisation de questions hypothétiques demeure dangereuse. Sa proximité avec la preuve fabriquée peut parfois être si forte qu’elle se confond tout simplement avec elle. Pour s’en convaincre, citons la décision R. c. Wiegand dans laquelle le tribunal s’interrogea sur l’admissibilité d’une déclaration obtenue à la suite de questions hypothétiques posées à un individu soupçonné d’incendie criminel151. Au cours de l’interrogatoire, l’inspecteur demanda à l’accusé de lui expliquer pourquoi ses empreintes digitales se trouveraient sur le panneau électrique de la maison (« Can you tell me why your finger prints would be on those breaker switches ? ») et un peu plus loin, pourquoi l’un des voisins pourrait l’avoir vu en train de mettre des outils dans la poubelle située dans la ruelle ? (« Okay. Can you tell me why one of your neighbours, okay, would see you putting the tools in the garbage can in the back alley ? How do you think we found them ? »). Le juge ayant assimilé ces deux questions à des éléments de preuve fabriqués, il conclut que l’utilisation de faux éléments de preuve n’est pas suffisante en soi pour exclure les confessions, mais peut, lorsqu’elle s’ajoute à d’autres facteurs pouvant affecter la volonté du sujet (comme la conviction renforcée par les propos du policier que ces fausses preuves seront présentées au tribunal), soulever un doute quant à son caractère volontaire152.

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41. c) L’état d’esprit conscient : S’appuyant sur le caractère volontaire de la déclaration, la règle des confessions exige la présence d’un état d’esprit conscient. En effet, la volonté, écrit saint Thomas d’Aquin, ne se trouve que chez les êtres doués d’un minimum d’intelligence et de liberté. Ce principe, qui ne fait plus aucun doute en matière de responsabilité pénale, s’incarne dans la mise en place d’un critère fonctionnel de l’état d’esprit conscient, fondé sur la capacité de l’accusé de savoir ce qu’il dit et qu’il s’adresse à des policiers qui pourraient s’en servir contre lui153. L’exigence est minimale. L’état d’esprit conscient de l’accusé se limite à la connaissance du contenu de la déclaration (comprendre ce qu’il dit) et de ses conséquences juridiques (comprendre que sa déclaration peut servir de preuve contre lui)154. « Il n’est donc pas

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nécessaire de déterminer si l’accusé est en mesure de faire un choix qui soit bon ou sage, ou qui soit dans son intérêt155. » Si la consommation d’alcool ou de drogues ne prive pas automatiquement le suspect de son état d’esprit conscient156, certains degrés très élevés d’intoxication peuvent miner la connaissance de l’accusé et vicier le caractère volontaire de sa déclaration157. Il en va également d’un trouble mental affectant la cognition du suspect ou d’un état de choc menant à un effondrement émotionnel complet. Dans tous les cas, le critère d’incapacité est exigeant et il est plutôt rare que les déclarations obtenues dans de telles conditions soient écartées, faute de volonté158. Voyons brièvement en quoi consistent ces trois facteurs d’incapacité.

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42. (i) La prise d’alcool ou de drogues : À l’image des symptômes qui l’accompagnent, l’intoxication de l’accusé peut être légère, avancée ou extrême159.

43. L’intoxication légère se caractérise par l’apparition d’un sentiment de bien-être, l’augmentation des tendances instinctuelles (affectivité ou irritabilité) et « le relâchement des inhibitions et du comportement socialement acceptable160 ». Comme la prise d’alcool est un facteur influent dans la prédisposition et le déclenchement de conduites criminogènes, il peut arriver que l’interrogatoire qui précède ou suit l’arrestation d’un suspect se déroule malgré la faible intoxication de ce dernier. La cognition du sujet n’étant pas affectée, l’admissibilité d’une déclaration ne sera pas compromise. Il en va également des effets normaux d’une intoxication aux drogues et autres substances qui, sans dérober l’accusé de ses facultés cognitives, peuvent affecter son comportement161.

44. À plus grande concentration, l’alcool engendre de nouveaux symptômes et de nouveaux déficits. Les facultés intellectuelles, qui jusque-là semblaient relativement intactes, commencent à s’assombrir. Quant aux symptômes physiques qui accompagnent la détérioration progressive du jugement de l’individu et de sa perception des conséquences naturelles de ses actes, ceux-ci deviennent de plus en plus visibles : langage émoussé, faible coordination, perte d’équilibre (démarche titubante), yeux rougis et injectés de sang complètent le tableau clinique des symptômes d’une intoxication avancée. À ce stade, la forte odeur d’alcool jumelée à l’apparence générale du suspect et de son comportement rendent son

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intoxication manifeste aux yeux de tous162. Malgré les signes d’ébriété évidents, l’individu est généralement capable de répondre à des questions163. Il interagit avec son environnement et demeure en mesure d’adopter des comportements relativement complexes. Discutant de l’état d’esprit d’un individu fortement intoxiqué qui avait fait une déclaration incriminante aux policiers qui étaient venus l’interpeller, le juge Reid déclare : « Although there was evidence of unsteadiness, there was never a time when Mr. Maracle was “falling down drunk” or when he could not manage to move from place to place independently, albeit when he was in police custody they were present to assist him. His ability to walk does not indicate a very high degree of intoxication. In the cells, he had no physical difficulty removing his pants and handing them over

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as requested164. » En troublant le jugement de l’individu, l’intoxication avancée peut empêcher ce dernier de faire un choix qui soit « bon ou sage », ou qui soit dans son intérêt, sans affecter sa capacité cognitive de comprendre ce qu’il dit et que sa déposition pourra être utilisée dans des procédures engagées contre lui165. Quant à sa mémoire des événements en question, l’alcool empêche le transfert d’informations de la mémoire à court terme à la mémoire à long terme ce qui occasionne une amnésie consécutive à l’intoxication qui n’est pas suffisante pour priver le suspect de son état d’esprit conscient166.

45. Des niveaux d’alcool dans le sang encore plus élevés peuvent causer une diminution de la conscience et de la cognition nécessaires à la présence d’un état d’esprit conscient. Désormais, le sujet éprouve de la difficulté à parler, à marcher ou à se tenir debout. Il s’endort partout ou tombe par terre. La confusion qui

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accompagne la détérioration significative des facultés intellectuelles est particulièrement à redouter. Ainsi, à moins d’urgence, il est conseillé aux enquêteurs de reporter à plus tard l’interrogatoire du suspect. En effet, « as a matter of common sense, a person who is in a state of extreme intoxication may not meet the requirement of having an operating mind. A decision on whether because of extreme intoxication the person is not aware of what he is saying, that he is saying it to police officers and that it can be used to his detriment, is necessarily based on the particular circumstances of the case167 ». Parmi les facteurs militant en faveur d’un état d’esprit conscient, mentionnons la nature des réponses données aux policiers ainsi que la qualité de l’interaction entre le suspect et les enquêteurs au dossier. En sens contraire, des paroles incompréhensibles ou incohérentes prononcées par une personne confuse, semi-consciente ou qui n’est plus en contact avec la réalité peuvent laisser planer un doute sur le caractère volontaire de la déclaration incriminante168. Malgré l’ampleur des déficits physiques et neurologiques observés chez l’accusé, les tribunaux demeurent exigeants quant au degré d’incapacité requis. Dans R. c. Peters, le tribunal confirme l’admissibilité d’une série de déclarations faites par un conducteur au policier à la suite d’un accident d’automobile169. Le conducteur, qui était dans un état d’ivresse très avancé, fut retrouvé endormi au volant de sa voiture endommagée. L’accusé est décrit par les policiers comme fortement intoxiqué, incapable de marcher seul, confus et désorienté. Comme l’accusé savait qu’il s’adressait aux policiers et que ses déclarations pouvaient être utilisées contre lui, celles-ci demeuraient admissibles dans les circonstances. Des niveaux d’intoxication très élevés peuvent empêcher l’individu de savoir ce qu’il dit ou de comprendre les conséquences qui s’y rattachent. Dans une décision récente, le juge Fragomeni écarte la déclaration faite par un individu complètement

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ivre qui venait d’être impliqué dans un accident de voiture170. Ses difficultés à se tenir debout, ses paroles incohérentes, son comportement erratique et l’absurdité de plusieurs réponses fournies aux policiers soulevèrent un doute raisonnable quant à son état d’esprit conscient. Sans être exceptionnelles, les décisions écartant les déclarations obtenues d’un individu en état d’ivresse sont plutôt rares. Comme la règle recourt à un test cognitif, « il faudrait un état d’ébriété très avancé pour qu’une telle déclaration soit inadmissible171 ». Ce que confirme d’ailleurs la jurisprudence subséquente.

46. En ce qui concerne l’interaction de l’alcool avec les drogues et autres substances, la règle demeure la même172. L’intoxication qui obscurcit le jugement de la raison, sans éclipser complètement la cognition, n’est pas suffisante pour détruire l’état d’esprit conscient de l’accusé. La question ici n’est pas de savoir si l’alcool et les médicaments interfèrent avec la capacité d’analyse du suspect, mais si la synergie des deux substances altère ses fonctions cognitives au point de détruire sa connaissance de ce qu’il dit et des conséquences qui s’ensuivent. Les médicaments ou les drogues qui accentuent les effets de l’alcool en diminuant « la mémoire, les émotions, la capacité d’abstraction, d’anticipation et de planification173 » ne suffisent donc pas à ce stade174. Il en va également de la médication administrée dans le cadre d’une chirurgie comportant une anesthésie générale lorsque celle-ci ne comporte pas d’effets prolongés (courte vie)175.

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47. Cette analyse des effets de l’alcool ou des drogues sur l’état d’esprit conscient de l’individu ne serait pas complète sans dire un mot des troubles psychotiques induits par une substance. D’après l’Association américaine de psychiatrie, dans sa dernière édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, les troubles psychotiques induits par une substance se caractérisent par la présence d’idées délirantes et/ou d’hallucinations prononcées dues aux effets physiologiques d’une substance. Bien qu’elle soit difficile à distinguer d’une intoxication par substance, la psychose toxique entraîne une perte de contact avec la réalité dont les symptômes et les effets sur l’état d’esprit conscient du suspect ne sont pas différents d’un délire toxique.

48. (ii) Les troubles mentaux : S’il est évident que les troubles de l’humeur176, de la personnalité ou des émotions ne suppriment pas l’état d’esprit conscient du suspect, qu’en est-il des troubles psychotiques, des maladies qui altèrent le contact avec la réalité en produisant chez l’individu des idées délirantes et/ou des hallucinations visuelles ou auditives ? La question est difficile. Elle fut abordée par la Cour suprême dans R. c. Whittle177. Arrêté à la suite de l’exécution d’un mandat d’incarcération pour non-paiement

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d’amende, l’accusé, qui souffrait de schizophrénie, fut amené au poste de police pour être interrogé. Peu de temps après avoir été placé en cellule, l’accusé a admis la commission de trois vols qualifiés et d’un meurtre. Informé de ses droits à l’avocat et de garder le silence, l’accusé a conduit les policiers à l’endroit où il avait caché l’arme du crime. Lors de son transport, ce dernier n’a pas cessé de parler du meurtre, ponctuant ses nombreuses déclarations de propos bizarres. De retour au poste de police, l’accusé a affirmé, au cours d’un entretien avec son avocat, qu’il « entendait des voix dans sa tête, qu’il devait parler, qu’il ressentait une douleur à la tête et qu’il pouvait voir le visage de bébés morts dans le ciment. L’appelant a dit à Me Nuttall qu’il avait besoin de parler à la police pour que les voix cessent178 ». L’admissibilité des déclarations étant contestée, les deux psychiatres appelés à témoigner au procès ont déclaré que l’accusé souffrait de schizophrénie. La schizophrénie est une maladie grave dont l’une des manifestations est la présence d’hallucinations auditives et/ou visuelles. D’après le psychiatre de la défense, l’accusé entendait des voix dans sa tête au moment de sa déclaration incriminante. Bien que ces voix ne l’empêchaient pas d’être conscient des conséquences de ses déclarations, celles-ci l’ont poussé à confesser ses crimes. Statuant sur l’appel du jugement ayant annulé le verdict d’acquittement et ordonné la tenue d’un nouveau procès, la Cour suprême confirma l’admissibilité des déclarations faites par l’accusé. D’après le juge Sopinka, l’exigence d’un état d’esprit conscient « n’implique pas un degré de conscience plus élevé que la connaissance de ce que l’accusé dit et qu’il le dit à des policiers qui peuvent s’en servir contre lui179 ». En effet :

« Dans la mesure où les voix intérieures incitaient l’appelant à parler sans tenir compte, apparemment, de la recommandation de son avocat et à son détriment, parce qu’il ne se souciait pas des conséquences ou qu’il estimait qu’il ne pouvait résister à ces voix, elles ne peuvent justifier l’exclusion. La contrainte intérieure, due à la conscience ou à un autre facteur, ne peut supplanter une conclusion à l’existence d’un état d’esprit conscient sauf lorsqu’il

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est déterminé, à la lumière de la conduite d’une personne en autorité, qu’une déclaration est involontaire180. »

49. Ainsi, mis à part les maladies qui affectent la cognition du sujet (p. ex. : démence, delirium, retard mental181, etc.), les troubles mentaux ne sont généralement pas suffisants pour détruire son état d’esprit conscient. Pour s’en convaincre, citons la décision R. c. Rackham dans laquelle le tribunal confirma l’admissibilité des déclarations faites par l’accusé quelques instants avant son arrestation pour voies de faits et autres infractions182. D’après la police, l’accusé prétendait être Dieu et avoir frappé le Diable afin de l’expulser de sa maison. Comme l’accusé savait ce qu’il disait et qu’il s’adressait à des policiers qui pouvaient s’en servir contre lui, les déclarations furent admises au procès. En effet, le ministère public n’a pas à prouver un degré plus élevé de capacité « cognitive ». L’exposé d’un mobile tout à fait irrationnel n’affecte pas la validité de la déclaration incriminante. Il s’agit d’une analyse portant sur la cognition de l’individu (sur ce qu’il dit, à qui il le dit et

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sur les conséquences qui s’ensuivent au point de vue juridique) et non sur les raisons ayant précipité la confession ou le passage à l’acte (ce pourquoi il l’a dit ou fait). Les idées délirantes de persécution183 (p. ex. : l’accusée croit que des personnes entrent dans sa chambre la nuit par un passage secret dans la garde-robe afin de l’endormir avec du chloroforme et que sa mère, la victime, fait partie d’une opération la forçant à se prostituer184); de grandeur et de référence (p. ex. : l’individu croit qu’il est un génie ou qu’il est voué à un destin phénoménal) ne peuvent, malgré leur bizarrerie, empêcher l’admissibilité d’une déclaration incriminante. Sur ce point, citons la décision R. c. Hosack dans laquelle une personne, qui prétendait être à l’origine d’inventions pouvant transformer le monde et valant plusieurs milliards de dollars, avait avoué le meurtre sordide d’un individu qui avait tenté de s’emparer de l’une de ses inventions185. Dans un passage souvent cité, le juge Schultes confirme l’admissibilité de la preuve contestée. D’après ce dernier : « In essence his delusions of worldly importance and creative genius seem to have been walled off from the bulk of his other cognitive abilities which, as the interviews clearly demonstrate, were not impaired. I am therefore satisfied beyond a reasonable doubt that he had an operating mind when he gave the statement186. » La maladie qui détruit la raison et précipite le passage

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à l’acte n’est pas suffisante pour supprimer l’état d’esprit conscient de l’accusé, lorsqu’elle n’interfère pas avec sa capacité de savoir ce qu’il dit et qu’il le dit à des policiers qui peuvent s’en servir contre lui187.

50. Si la contrainte intérieure, due à la présence d’hallucinations auditives ordonnant à l’accusé d’avouer son crime, n’affecte pas l’admissibilité de sa déclaration, il en va autrement des idées délirantes qui induisent chez le malade la croyance fausse mais fixe que la police va s’en prendre physiquement à lui s’il ne confesse pas son crime. C’est du moins ce que reconnait le juge Kilpatrick, dans R. c. Partridge188. D’après ce dernier, la déclaration obtenue par crainte d’un préjudice découlant de la présence d’idées délirantes doit être écartée par le tribunal. Même si cette croyance puise sa source dans les symptômes de la maladie, son impact sur la volonté du sujet est aussi fort que si des menaces avaient bel et bien été proférées contre lui. Contrairement à l’arrêt Whittle, la contrainte à l’origine de la confession de l’accusé ne provenait pas d’une voix dans sa tête lui commandant de confesser ses crimes, mais de la peur irrationnelle que les policiers aient

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recours à la force s’il ne collaborait pas à l’enquête. Bien que l’accusé savait qu’il s’adressait à des policiers et que ses propos pourraient être utilisés contre lui, sa déclaration découlait essentiellement de la crainte d’un préjudice. La confession obtenue par crainte d’un préjudice n’étant pas fiable, ni volontaire, celle-ci fut, par conséquent, jugée inadmissible189.

51. Comme la poursuite doit démontrer que les déclarations de l’accusé proviennent d’un état d’esprit conscient et qu’elles sont volontaires, il arrive parfois qu’une personne souffrant de déficience intellectuelle conserve une capacité cognitive suffisante pour comprendre ce qu’elle dit (état d’esprit conscient), tout en n’étant pas en mesure de faire une déclaration volontaire en raison de l’incompréhension de son droit au silence résultant de son retard mental (caractère involontaire de la déclaration). L’incapacité de l’accusé de saisir la portée réelle de son droit au silence étant évidente, les policiers doivent redoubler de précautions et s’assurer que ce dernier comprenne bien son droit190.

52. En ce qui concerne finalement le traumatisme crânien subséquent à un choc à la tête, celui-ci peut priver l’accusé de son état d’esprit conscient lorsqu’il y a des signes évidents que sa conscience ou sa cognition est affectée. Dans le cas contraire, la déclaration de l’accusé sera admissible même si son état l’empêche de faire un choix qui soit bon ou sage d’un point de vue rationnel191.

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53. (iii) L’état de choc de l’accusé : Comme la commission d’une infraction et l’arrestation qui s’ensuit comportent une charge émotive particulièrement élevée, il arrive parfois – souvent même – que le suspect soit dans un état psychologique ou émotionnel précaire lors de son interrogatoire. Dans R. c. Ward192, la Cour suprême confirme l’inadmissibilité de déclarations obtenues d’un individu à la suite d’un accident d’automobile. Trente minutes après avoir été réanimé, l’accusé fut interpellé par les policiers alors qu’il marchait à proximité du véhicule accidenté. Placé dans une auto-patrouille, l’accusé a eu une conversation avec deux policiers au cours de laquelle il fit une déclaration incriminante. Comme l’individu venait tout juste de reprendre conscience et qu’il était « en état de choc » au moment de sa déclaration, celle-ci fut écartée, faute d’un « état d’esprit totalement conscient193 ». Sur ce point, il faut distinguer l’effondrement émotionnel complet du stress découlant des événements en question. Si le premier peut dérober l’accusé de son état d’esprit conscient, le second se situe dans le cours normal des choses194. Ce n’est donc pas parce qu’une personne

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pleure ou est agitée au moment de l’intervention des policiers qu’elle n’est plus en mesure de répondre volontairement aux questions. Il en va également du stress et de la fatigue qui accompagnent une déclaration faite lors d’une rencontre visant à comprendre les événements entourant le transport d’un bébé à l’hôpital195. Les émotions qui ne privent pas le suspect de son état d’esprit conscient n’affectent pas la validité de sa déclaration.

54. d) Les autres ruses policières : Malgré leur rattachement au caractère volontaire de la déclaration, les ruses policières font l’objet d’une analyse visant à préserver l’intégrité du système judiciaire196. En effet, « [i]l faut se rappeler qu’une enquête en matière

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criminelle et la recherche des criminels ne sont pas un jeu qui doive obéir aux règles du marquis de Queensbury. Les autorités, qui ont affaire à des criminels rusés et souvent sophistiqués, doivent parfois user d’artifices et d’autres formes de supercherie, et ne devraient pas être entravées dans leur travail par l’application de la règle. Ce qu’il faut réprimer avec vigueur, c’est, de leur part, une conduite qui choque la collectivité197 ». Une déclaration obtenue sans menaces ni promesses de la part des policiers, dans un climat exempt d’oppression, peut donc être exclue si son obtention découle d’une pratique si indigne qu’elle ternirait l’image de la justice. Quant aux ruses policières qui ne sont pas odieuses ou répugnantes, celles-ci ne choquent pas la collectivité. Comme l’indique la Cour d’appel de l’Ontario, dans R. c. Miller, « evidence procured by means of a mere “trick” will be admissible, whereas evidence obtained by means of a “dirty trick” will not be admissible198 ». Parmi les exemples connus de ruses policières pouvant choquer la collectivité, mentionnons le policier qui se fait passer pour un avocat de l’aide juridique afin d’obtenir une déclaration incriminante, celui qui administre une injection de sodium de penthotal (sérum de vérité) à un suspect diabétique au lieu de sa dose quotidienne d’insuline ou qui prétend être l’aumônier d’une prison afin de recueillir la confession d’un suspect. Dans ce dernier cas, il est important de distinguer la consultation qui a lieu dans le cadre d’une relation spirituelle ou religieuse, de celle qui s’inscrit dans un but purement fallacieux ou criminel. La « communication qui serait motivée par des considérations religieuses et faite pour satisfaire un besoin, ou répondre à [un] objectif, spirituel199 » n’est pas admissible en preuve, alors que la déclaration faite pour échapper

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à la justice criminelle ou tenir les autorités policières en échec est admissible. Sur ce point, citons la décision R. c. Rowe dans laquelle la Cour d’appel de l’Ontario s’interrogea sur l’admissibilité d’une déclaration faite par un individu impliqué dans la commission d’un vol de banque et d’un meurtre200. Rappelant que l’accusé avait rencontré l’informateur de la police, un guide spirituel reconnu dans la communauté jamaïcaine, dans le but d’échapper à la justice, le Tribunal admit la déclaration incriminante. En effet, « Rowe does not go to Carty for any religious purpose such as forgiveness for sinning. [...] Rowe does not ask for absolution, he does not ask for forgiveness, he does not ask for spiritual cleansing. He does not even say he is sorry. This is not a religious experience at all. [...] Money, escape and protection are what was on Rowe’s mind201 . » Comme la nature spirituelle de la rencontre s’inscrivait dans la poursuite d’un but purement criminel, la preuve fut admise au procès202.

55. Souvent ingénieuses, parfois douteuses, mais rarement odieuses, les ruses qui ne choquent pas la collectivité constituent un instrument d’enquête très efficace. L’inspecteur qui dépose sur la table de la salle d’interrogatoire les cassettes « vidéos de surveillance » de la scène du crime, qui montre à l’accusé des photos de cadavres afin de le « sensibiliser sur l’importance de retrouver le corps avant qu’il ne soit dans l’état reproduit sur les photos203 », qui prétend écrire un rapport pour la cour afin de déterminer le degré de dangerosité de l’accusé204 ou qui propose à ce dernier

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d’écrire une lettre à la famille de la victime205 agit de façon légitime, sans ternir l’image de la justice. Il en va également des policiers qui placent à la vue du suspect, qui la réclame immédiatement, une casquette de baseball qui fut retrouvée près de la voiture utilisée pour commettre un vol. La ruse, précise le juge Taylor de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique, dans R. c. Corak, « was an entirely passive one, a device of the sort that police officers are certainly expected to employ in the normal course of investigation206 ». Les tribunaux, rappelle le juge Lamer dans R. c. Rothman, « doivent se garder de ne pas entraver indûment le travail des policiers207 ». On n’a qu’à penser à l’enquêteur qui n’informe pas le suspect de la mort de sa principale complice208, ou à celui qui affirme que la victime, qui est en fait décédée, a repris conscience

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et sera en mesure de l’identifier209. Dans tous ces cas, le policier retient des informations ou ment au suspect sans nécessairement choquer la collectivité. D’où l’admissibilité de la preuve obtenue en conséquence.

56. Si les ruses policières qui ne « choquent pas la collectivité » ne compromettent pas l’intégrité du système judiciaire, elles peuvent participer, avec d’autres facteurs, à l’instauration d’un climat d’oppression ayant pour effet de subjuguer la volonté de l’accusé en le persuadant de sa culpabilité ou de la futilité de ses protestations d’innocence210. Comme la ruse qui ne choque pas la collectivité ne menace pas l’intégrité du système judiciaire, sa présence ne peut miner, à elle seule, le caractère volontaire de la déclaration, même si elle persuade la personne de parler aux policiers.

Deuxième sous-section : Le droit de garder le silence garanti par l’article 7 de la Charte

57. Contrairement à la règle des confessions qui s’applique à toutes les fois qu’un suspect croit raisonnablement qu’il s’adresse

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à une personne en situation d’autorité, le droit de garder le silence garanti par l’article 7 n’entre en jeu qu’après la mise en détention du suspect211. Cette disposition, mise de l’avant afin de protéger le détenu du pouvoir coercitif de l’État, est assujettie aux deux conditions impératives que sont : (1) l’intervention d’un agent de l’État et (2) l’existence d’une conduite irrégulière à l’origine de la négation du choix du détenu de parler ou non aux autorités. Regardons brièvement en quoi consistent ces deux conditions d’ouverture.

58. Le droit de garder le silence garanti par l’article 7 de la Charte fut étudié par la Cour suprême dans l’arrêt R. c. Hebert212. Après avoir été arrêté pour la commission d’un vol qualifié, l’accusé fut informé de son droit d’avoir recours à l’assistance d’un avocat puis transporté au quartier général de la GRC pour être interrogé. Ne pouvant rien soutirer du suspect, M. Hebert fut placé en cellule avec un policier habillé en civil213. Le policier ayant engagé la conversation avec l’accusé, ce dernier fit différentes déclarations l’impliquant dans le vol qualifié. Les déclarations ayant été écartées par le juge de première instance, la Cour d’appel annula l’acquittement et ordonna la tenue d’un nouveau procès. Dans un jugement d’une importance fondatrice, la Cour suprême

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accueillit le pourvoi et rétablit l’acquittement de l’accusé. D’après la juge McLachlin, « [l]es dispositions de la Charte qui se rapportent au droit d’une personne détenue de garder le silence en vertu de l’art. 7 semblent indiquer que ce droit doit être interprété de manière à garantir à la personne détenue le droit de faire un choix libre et utile quant à la décision de parler aux autorités ou de garder le silence. [...] Si le suspect choisit de faire une déclaration, il peut le faire. Mais si le suspect choisit de ne pas en faire, l’État ne peut utiliser son pouvoir supérieur pour faire fi de la volonté du suspect et nier son choix214. » C’est donc le choix de l’accusé de parler ou non aux autorités qui compte. L’appelant ayant choisi de ne pas parler aux policiers, ces derniers ne pouvaient utiliser un artifice pour contourner activement son choix de garder le silence. S’il a parlé, c’est qu’il croyait s’adresser à un compagnon de cellule et non à des policiers. En interrogeant le détenu sur ses activités, l’agent banalisé ne s’est pas contenté d’observer le suspect, mais a joué un rôle actif dans l’obtention des renseignements compromettants. Ce qu’interdit catégoriquement le droit de garder le silence conféré par l’article 7 de la Charte.

59. La distinction entre le recours à des agents banalisés pour observer le suspect et l’usage d’un artifice afin d’obtenir activement des renseignements fut reprise et développée par la Cour suprême dans les arrêts Broyles215 et Liew216. Soupçonné du meurtre de sa grand-mère, M. Broyles fut l’objet d’une enquête policière qui piétinait. Jugeant que les preuves obtenues contre l’accusé n’étaient pas suffisantes, les policiers ont organisé une rencontre entre l’appelant et son ami afin que ce dernier lui soutire des renseignements concernant le décès de la victime. Bien que l’accusé n’ait pas admis la commission du crime, il a fourni certaines informations pouvant l’incriminer. L’appelant ayant été

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reconnu coupable de meurtre au deuxième degré, la Cour suprême accueillit l’appel et ordonna la tenue d’un nouveau procès. D’après la Cour, l’examen du droit de garder le silence comporte deux volets. Tout d’abord, le tribunal doit déterminer si la preuve a été obtenue par un représentant de l’État. Dans l’affirmative, le juge devra examiner si la preuve a été obtenue de façon irrégulière, c’est-à-dire en contravention du droit du suspect de choisir de garder le silence ou de parler aux policiers. À la première étape, le tribunal s’intéresse au statut de la personne qui a recueilli les renseignements compromettants, aux liens qui existent entre elle et l’État. S’il est évident que les policiers et les gardiens de prison constituent des représentants de l’État, qu’en est-il des « informateurs recrutés par la police ?217 » Sur ce point, le Tribunal propose le critère suivant : « L’échange entre l’accusé et l’indicateur aurait-il eu lieu, de la même façon et sous la même forme, n’eût été l’intervention de l’État ou de ses représentants ?218 » Les compagnons de cellule, qui agissent sous les ordres ou recommandations de la police, constituent donc généralement des représentants de l’État

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au sens de l’article 7. Cette conclusion s’applique, peu importe que l’indicateur soit rémunéré ou non par les autorités, ou qu’il ait fait l’objet d’une promesse de clémence sous la forme d’une accusation réduite ou d’une peine diminuée. Quant à l’ami de Broyles, celui-ci était clairement un représentant de l’État. La rencontre entre lui et l’accusé ayant été organisée par la police, celle-ci n’aurait jamais eu lieu ou se serait déroulée différemment sans l’intervention de l’État. La première condition remplie, le Tribunal passe à la seconde étape de l’analyse : Est-ce que la preuve a été obtenue de façon irrégulière, en contravention du droit du suspect de choisir de garder le silence ou de parler aux policiers ? Pour répondre à cette question, la Cour identifie deux groupes de facteurs à considérer219. Le premier se rapporte à « la nature de l’échange entre l’accusé et le représentant de l’État220 ». En effet, « le représentant de l’État a-t-il cherché de façon active à obtenir des renseignements de sorte que l’échange puisse être considéré comme un interrogatoire, ou a-t-il mené sa part de la conversation comme l’aurait fait l’interlocuteur que l’accusé croyait avoir devant lui ?221 ». Le deuxième ensemble de facteurs s’intéresse aux rapports entre l’interlocuteur et l’accusé222 : « Le représentant de l’État a-t-il exploité quelque aspect de ces rapports pour arracher la déclaration ? La confiance régnait-elle entre le représentant de l’État et l’accusé ? L’accusé se sentait-il vulnérable face au représentant de l’État ou obligé envers lui ? Le représentant de l’État a-t-il manipulé l’accusé pour le rendre mentalement plus susceptible de parler223 ? » Comme la conversation au cours de laquelle l’ami de Broyles lui a soutiré des renseignements compromettants avait été menée essentiellement

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sous forme d’interrogatoire et que ce dernier avait profité de ses liens d’amitié pour dénigrer le travail de l’avocat et l’amener plus facilement à parler, la Cour conclut que les déclarations incriminantes ont été obtenues en violation du droit de l’accusé de garder le silence.

60. L’arrêt Liew est la troisième décision de la Cour suprême consacrée à l’obtention d’une déclaration incriminante à la suite d’un artifice. Dans cette affaire, l’accusé et un agent banalisé, qui avait participé à une opération secrète de vente de stupéfiants, furent réunis dans une salle d’interrogatoire après avoir été arrêtés à la suite d’une descente qui avait mal tournée. L’appelant ayant amorcé la conversation en faisant référence aux circonstances de l’arrestation, le policier lui aurait demandé « ce qui s’était passé » pour ensuite l’informer du fait que les policiers avaient relevé ses empreintes digitales sur la drogue saisie. L’accusé ayant répondu « Lee et moi aussi », la défense s’est opposée à l’admission de sa déclaration. La Cour d’appel ayant ordonné la tenue d’un nouveau procès à la suite de l’acquittement de l’accusé, la Cour suprême confirma la décision de la Cour d’appel et conclut à l’absence de violation du droit de garder le silence. D’après le juge Major, qui s’exprimait alors pour la majorité, les questions et commentaires formulés par l’agent banalisé s’inscrivaient parfaitement dans le cours normal de la conversation initiée par l’accusé. L’arrêt Hebert, rappelle-t-il, n’interdit pas le recours à des artifices permettant d’obtenir des renseignements du suspect. L’usage d’un tel procédé viole le droit de l’accusé de garder le silence uniquement lorsque les policiers tentent activement de soutirer des informations compromettantes224. « Il importe peu, en effet, que le policier ait usé

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d’artifices, qu’il ait permis qu’on se trompe sur son identité, ou qu’il ait menti, tant que les réponses de l’appelant n’ont pas été obtenues de façon active ou n’étaient pas le résultat d’un interrogatoire225. » Comme l’accusé a engagé lui-même la conversation au sujet de la transaction avortée et que le policier a poursuivi la discussion comme l’aurait fait une personne normale qui venait de participer à un marché de vente de stupéfiants, le Tribunal conclut que le prévenu a agi à ses risques et périls en choisissant de parler à l’agent banalisé226.

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61. La portée et les limites du droit de garder le silence dans le cadre d’un interrogatoire policier furent examinées par la Cour suprême, dans R. c. Singh227. Arrêté pour le meurtre d’un passant innocent tué par une balle perdue, l’accusé a été informé de son droit de garder le silence et d’avoir recours à l’assistance d’un avocat. Après avoir discuté en privé avec son avocat, l’appelant fut interrogé par la police. Malgré « ses affirmations répétées qu’il souhaitait garder le silence228 » et mettre fin à la discussion, l’inspecteur a poursuivi l’interrogatoire après avoir mentionné à M. Singh qu’il n’était pas obligé de parler et qu’il désirait simplement lui exposer la preuve qu’il possédait. Même si l’accusé n’a pas confessé son crime, il a reconnu certains faits permettant son identification. La preuve ayant été admise par le juge du procès et la Cour d’appel de la Colombie-Britannique, la Cour suprême s’interrogea sur la portée et les limites du droit de garder le silence conféré par l’article 7 de la Charte. Selon la majorité de la Cour, qui s’exprimait alors sous la plume de la juge Charron, le droit de garder le silence est antérieur à la Charte. Ce principe, issu de la common law, donne le droit à une personne de garder le silence et « non le droit de ne pas se faire adresser la parole par les autorités229 ». En effet, « les détenus qui ont invoqué leur droit de garder le silence ont le droit de changer d’avis. “Un refus initial peut être suivi d’une crise de conscience, d’une impulsion inconsciente à passer aux aveux – ou, simplement, d’un changement d’avis sincère” : Timm c. La Reine, 1998 CanLII 12523 (QC CA), [1998] R.J.Q. 3000 (C.A.), p. 3021. Cependant, on ne peut pas les contraindre à changer d’avis en persistant à faire fi de leur choix230 ». Comment distinguer les

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moyens de persuasion légitimes, de la négation pure et simple du droit de l’accusé de garder le silence ? Voilà la question. M. Singh ayant mentionné à plus de 18 reprises qu’il ne voulait pas parler aux policiers, la décision de l’enquêteur de poursuivre l’interrogatoire malgré la volonté expresse de l’accusé viole-t-elle le droit de garder le silence garanti par l’article 7 ? La réponse est non. Fidèle à l’approche contextuelle développée dans les arrêts Hebert, Oickle et Spencer, la Cour suprême réitère l’importance du libre choix de l’accusé dans la décision de parler ou non aux policiers. Résultat : « La persuasion policière qui ne prive pas le suspect de son droit de choisir ni de son état d’esprit conscient ne viole pas le droit de garder le silence231. » Quant à l’accusé qui invoque à plus de 22 reprises son droit au silence, il ne peut contester la validité de la déclaration qu’il a donnée librement après avoir visionné un vidéo qui l’incriminait directement dans la commission du crime232. Même si l’accusé prétend être passé aux aveux pour que « ça finisse », c’est plutôt le fait « qu’il a compris qu’il ne pouvait s’en sortir », qui l’a convaincu de parler au policier233. Encore une fois, l’analyse est contextuelle et tient compte des caractéristiques personnelles de l’accusé qui affectent sa capacité de choisir de parler ou non aux autorités, de la conduite des policiers et des circonstances menant à sa déclaration incriminante234.

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62. L’importance des caractéristiques personnelles de l’accusé, tout d’abord, puisqu’une personne dont la condition psychologique est précaire en raison d’un retard mental, d’un trouble physique, psychique ou neuropsychique peut ne pas être en mesure d’user de son libre arbitre. C’est du moins ce qu’indique la Cour d’appel du Québec, dans R. c. Otis235. L’accusé, qui souffrait de troubles cognitifs et d’un retard mental léger, fut arrêté par la police à la suite du décès de la fille de sa conjointe. Bien qu’il ait invoqué à quatre reprises son désir de garder le silence, l’enquêteur a poursuivi ses questions en confrontant l’accusé à la déclaration de sa conjointe et en l’invitant à lui dire ce qui s’était passé. L’intimé ayant fourni des renseignements compromettants, la juge de première instance écarta la déclaration incriminante, puis l’acquittement fut prononcé à la suite d’un procès devant jury. La cause ayant été portée en appel, la Cour rejeta le pourvoi et conclut à la violation du droit de l’accusé de garder le silence. D’après le juge Proulx, la capacité de l’individu de résister à la persuasion policière constitue un facteur pertinent dans l’analyse contextuelle du droit de garder le silence236. En effet, le retard mental ou la fragilité psychologique qui n’est pas suffisant pour priver le suspect de son état d’esprit conscient peut, une fois combiné à d’autres éléments pertinents, empêcher ce dernier d’exercer son libre choix de parler ou non aux policiers. Il en va également de l’épuisement et de toutes autres conditions pouvant affecter la capacité de choix de l’accusé237.

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63. La conduite des policiers est le second facteur dont il faut tenir compte au moment d’apprécier le choix de l’accusé de parler ou non aux autorités. Sur ce point, la Cour suprême est catégorique : « l’État ne peut utiliser son pouvoir supérieur pour faire fi de la volonté du suspect et nier son choix [de ne pas parler aux policiers]238 ». Si le nombre de fois que l’accusé invoque son droit au silence n’est pas déterminant en soi239, les enquêteurs ne peuvent ignorer complètement le choix de l’accusé ou agir comme si sa décision n’avait aucune importance. C’est que « le droit ne permet pas aux policiers de passer outre à la liberté du détenu de choisir de parler ou non, comme on le prétend. Tant en vertu des règles de la common law que de celles de la Charte, il se peut bien que la persistance des policiers à poursuivre l’interrogatoire, malgré les affirmations répétées du détenu qu’il souhaitait garder le silence, permette de faire valoir sérieusement que toute déclaration obtenue par la suite ne résultait pas d’une libre volonté de parler aux autorités240 ». Il ne faut pas confondre ici la persuasion policière qui ne prive pas l’accusé de son choix de garder le silence241

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avec le mépris flagrant à l’égard de l’intention de l’accusé242. Comme l’indique le juge Fish dans R. c. Timm : « Detention until confession is an unacceptable form of persuasion243. » Le tribunal doit garantir « un juste équilibre entre le droit de l’individu de choisir de parler ou non aux autorités et l’intérêt qu’a la société à découvrir la vérité dans le cadre des enquêtes criminelles244 ». Cette situation est d’autant plus évidente lorsque l’ignorance du choix de l’accusé s’ajoute au dénigrement du rôle de l’avocat. En effet, la conduite qui a pour résultat de « miner la confiance de l’accusé envers son avocat, de briser le lien de confiance entre eux245 » ou de minimiser l’importance et la valeur de ses conseils246 peut, une fois combinée aux souhaits maintes fois répétés de l’accusé de garder le silence, priver ce dernier de son choix utile de parler ou non aux policiers247. Comme la règle des confessions subsume le

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droit de garder le silence dans les cas où le suspect s’adresse à une personne en situation d’autorité, la poursuite de l’interrogatoire malgré l’intention de l’accusé de garder le silence et le dénigrement du rôle et des conseils de l’avocat constitue un facteur qui, une fois surajouté à d’autres circonstances pertinentes, doit également être considéré dans l’analyse du caractère volontaire de la déclaration de l’accusé248. L’analyse, rappelons-le, est contextuelle et s’enracine dans les faits de chaque affaire.

Troisième sous-section : La preuve matérielle obtenue à la suite d’une déclaration involontaire ou d’une violation du droit de garder le silence (preuve dérivée)

64. L’admissibilité d’une preuve matérielle obtenue à la suite d’une déclaration involontaire fut abordée par la Cour suprême

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dans l’arrêt R. c. Wray249. Arrêté pour le meurtre d’un employé d’une station-service, l’accusé fut transporté au bureau de la Sûreté, à Peterborough, où il fut interrogé par un enquêteur privé agissant pour le compte de la police. Le suspect ayant signé une déclaration écrite dans laquelle il indiquait l’endroit exact où se trouvait l’arme du crime, le tribunal, après avoir refusé la déclaration involontaire signée par l’accusé, écarta la production de la carabine et la preuve de la participation de l’accusé dans la découverte de l’arme du crime. L’acquittement ayant été confirmé en appel, le plus haut tribunal s’interrogea sur l’admissibilité des éléments de preuve contestés. D’après la Cour suprême, l’exclusion automatique des déclarations involontaires que prévoit la règle des confessions repose sur l’absence de fiabilité de la preuve obtenue. Or, les éléments matériels découverts à la suite d’une déclaration involontaire sont fiables250. Donc la preuve matérielle obtenue suite à une telle déclaration est recevable en droit criminel.

65. Cette conclusion, qui fut confirmée récemment par la Cour suprême dans R. c. Grant251, mérite d’être nuancée afin de

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tenir compte de l’équité du processus d’enquête252 et du principe interdisant l’auto-incrimination253. Le tribunal, en effet, conserve toujours son pouvoir discrétionnaire d’écarter les éléments de preuve qui entraîneraient un procès inéquitable254. Dans l’exercice

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de ce pouvoir, le tribunal doit rechercher à établir un équilibre entre la protection des droits individuels et le devoir de l’État d’enquêter sur les crimes255. On n’a qu’à penser au policier qui torture un suspect afin d’obtenir une déclaration incriminante menant à la découverte de l’arme du crime. Comme la conduite du policier est grave et que l’arme du crime n’aurait pu être obtenue autrement, cette preuve a pour effet, à notre avis, de rendre le procès inéquitable. Il en serait autrement d’une violation moins sérieuse menant à l’obtention d’une preuve très probante256. Malgré son bien-fondé,

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cette position ne semble pas s’imposer pour l’instant, les tribunaux préférant réitérer les principes développés dans l’arrêt Wray. En effet :

« Nous avons vu précédemment que les confessions involontaires sont inadmissibles en common law. Cette exclusion automatique des déclarations involontaires procède de la perception qu’il est injuste de mobiliser une personne contre elle-même et, surtout, du doute au sujet de la fiabilité des déclarations forcées. Toutefois, la common law n’a pas étendu l’inadmissibilité automatique aux éléments de preuve matérielle découverts grâce aux renseignements tirés de ces déclarations. La règle des confessions s’étant articulé surtout autour de la notion de fiabilité, l’intérêt du public à ce que la vérité soit établie au moyen d’une preuve fiable a, en common law, primé sur les préoccupations relatives à l’autoincrimination : Wray et R. c. St. Lawrence, 1949 CanLII 100 (ON SC), [1949] O.R. 215 (H.C.J.)257. »

66. Citée à l’appui de l’admissibilité de la preuve matérielle découverte à la suite d’une déclaration involontaire, le principe énoncé dans l’arrêt R. c. St. Lawrence258 doit également être lu à la lumière des changements apportés à la règle des confessions et

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des valeurs véhiculées par la Charte259. D’après ce principe, « [Traduction] [l]orsque la découverte du fait confirme la confession – c’est-à-dire lorsqu’il faut conclure à la véracité de la confession en raison de la découverte du fait – alors la partie de la confession que confirme la découverte du fait est recevable en preuve260 ». Mise de l’avant par les tribunaux à une époque où la fiabilité de la déclaration présidait au développement de la règle des confessions261, la règle énoncée dans l’arrêt R. c. St. Lawrence doit tenir compte également du principe interdisant l’auto-incrimination et du besoin de préserver l’intégrité du processus judiciaire262.

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Comme l’a fait remarquer fort justement le Conseil privé, dans R. v. Lam Chi-ming : « The privilege against self-incrimination is deep rooted in English law and it would make a grave inroad upon it if the police were to believe that if they improperly extracted admissions from an accused which were subsequently shown to be true they could use those admissions against the accused for the purpose of obtaining a conviction263. » Sans écarter automatiquement la portion de la déclaration contestée, nous croyons que le juge possède le pouvoir discrétionnaire d’exclure tous les éléments de preuve dont l’admission rendrait le procès inéquitable264. En effet, « si l’État avait la faculté de simplement corroborer des déclarations obtenues de force, il n’y aurait pas grand-chose qui l’inciterait à s’abstenir d’appliquer des moyens d’enquête répréhensibles. Voilà pourquoi la règle des confessions écarte automatiquement les déclarations involontaires, indépendamment de leur véracité265 ».

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Bien que nous sommes entièrement d’accord avec les propos du juge Cory, dans R. c. Hodgson, cette décision ne se prononce pas sur la validité de la règle énoncée dans l’arrêt R. c. St. Lawrence, mais sur l’admissibilité d’une déclaration faite par un suspect à la victime et aux autres membres de sa famille.

67. Comme l’obtention d’une déclaration involontaire faite par une personne détenue viole également le droit de garder le silence, et que la règle développée dans R. c. St. Lawrence n’a pas encore été écartée par le plus haut tribunal du pays, nous croyons, à la suite du juge Rosenberg dans R. c. Sweeney, qu’il s’agit d’une situation où le droit de garder le silence garanti par l’article 7 vient compléter la common law266. L’admissibilité en common law d’une confession involontaire dont la fiabilité a été établie par l’obtention d’une preuve dérivée n’ayant pas pour effet de limiter la protection garantie par l’article 7, le sort de la déclaration incriminante obtenue en violation du droit en question devra être déterminé en vertu du par. 24(2) de la Charte267. En effet :

« Les mécanismes d’application dont disposent les juges en common law ne sont pas comparables à ceux prévus par l’art. 24 de la Charte, particulièrement le pouvoir d’écarter une preuve en application du par. 24(2). On ne règle donc pas le problème de la violation du droit de garder le silence en affirmant que la confession qui en résulte ou la preuve dérivée aurait été admise en

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common law : nous n’appliquons pas ici la common law. L’admissibilité est maintenant régie par le par. 24(2) de la Charte. Ne définir les droits reconnus par la Charte qu’en conformité avec l’efficacité ultime de ceux qui les ont précédés en common law ou dans les lois écrites serait nier la suprématie de la Constitution268. »

68. Si la preuve matérielle découverte à la suite d’une déclaration involontaire est admissible en common law, il en va autrement de celle obtenue en contravention du droit de garder le silence269. Conformément au par. 24(2), le juge appelé à se prononcer sur la recevabilité de la preuve dérivée se demandera si son utilisation est susceptible de déconsidérer l’administration de la justice270. Pour ce faire, il devra, tout d’abord, se pencher sur la gravité de la conduite des agents de l’État. Plus les gestes reprochés aux policiers sont graves, plus le besoin de se dissocier d’une telle conduite sera grand. L’admission d’éléments de preuve obtenus à la suite d’une violation flagrante et délibérée de la Charte (p. ex. : emploi de la force physique ou menaces d’y recourir) aura pour effet d’ébranler sérieusement la confiance du public envers l’administration de la justice et militera en faveur de l’exclusion de la preuve matérielle. Quant à l’incidence de la violation sur les droits en question, il convient de distinguer la preuve matérielle qui aurait été obtenue sans la déclaration incriminante de celle qui n’aurait pas été découverte de manière indépendante. La première étant moins susceptible de porter atteinte aux droits de l’accusé garantis par la Charte que la seconde. S’agissant d’une preuve matérielle découverte à la suite d’une violation du droit de garder le silence, « sa fiabilité est généralement moins problématique, et l’intérêt du

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public à ce qu’un procès soit instruit sur le fond favorisera donc habituellement son utilisation271 ». La preuve matérielle découverte grâce à une déclaration obtenue à la suite d’une violation flagrante et délibérée du droit de l’accusé de garder le silence sera généralement écartée lorsque la preuve n’aurait pu être découverte autrement.

69. Comme la preuve matérielle découverte grâce aux renseignements tirés d’une confession involontaire est admissible en common law, le tribunal devra s’enquérir de la violation du droit de garder le silence (qui s’impose naturellement à l’esprit en raison de la conclusion antérieure du juge selon laquelle la déclaration du détenu n’était pas volontaire), puis de la recevabilité des éléments de preuve obtenus à la suite d’une telle violation272. Si la common law offre une « meilleure protection » contre l’admission de déclarations involontaires, l’article 7 possède, pour sa part, une « utilité supplémentaire » à l’égard de l’utilisation de la preuve dérivée et de la validité de la portion de la déclaration irrecevable qui fut confirmée par la découverte d’un élément matériel. Une analyse en deux étapes (règle des confessions/droit de garder le silence) serait donc généralement appropriée dans les circonstances.

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Quatrième sous-section : La règle des confessions dérivées

70. Contrairement à la preuve matérielle découlant d’une déclaration involontaire, la règle des confessions dérivées permet de déterminer l’admissibilité d’une déclaration subséquente à une déclaration involontaire273. D’après la Cour suprême, dans R. c. I.

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(L.R.) et T. (E.), l’obtention d’une confession involontaire ne contamine pas automatiquement la seconde déclaration recueillie par la police ou par d’autres personnes en situation d’autorité274. C’est le degré de connexité entre les deux déclarations qui compte. Plus le lien qui existe entre la première et la seconde déclaration est étroit, plus le risque de contamination est grand275. En sens contraire, des déclarations qui auraient peu ou pas de rapports entre elles risquent moins de s’influencer mutuellement. Parmi les facteurs permettant de déterminer le degré de connexité entre les deux déclarations, mentionnons la période de temps qui sépare l’obtention des aveux276, « la présence des mêmes policiers au cours des deux interrogatoires277 », « la similitude des circonstances et des

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procédés employés par la police278 », « les allusions à la déclaration antérieure pendant l’interrogatoire279 », la découverte de renseignements supplémentaires après l’obtention de la première déclaration280, etc. « Si on applique ces facteurs, une confession subséquente serait involontaire si les caractéristiques ayant vicié la première confession existaient toujours ou si la première déclaration était un facteur important qui a incité à faire la seconde déclaration281. » La réunion des deux conditions n’est pas obligatoire282. La persistance des facteurs viciateurs peut se produire, par exemple, lorsque des enquêteurs obtiennent deux confessions à quelques jours d’intervalle à la suite de menaces à peine voilées. Quant à la confession obtenue en raison de la première déclaration inadmissible, celle-ci ne requiert pas nécessairement la persistance des facteurs ayant vicié le caractère volontaire de la déclaration initiale. L’exemple de la personne soupçonnée de fraude qui est passée aux aveux après avoir été convoquée au poste de police à la suite d’une déclaration incriminante qu’elle avait faite à un enquêteur privé dans un climat d’oppression et sous le coup d’une promesse de clémence, illustre bien cette situation283. D’après l’appelant, « j’ai fait celle-là [la seconde déclaration] parce que j’avais pas le choix, quand j’ai vu celle-là [la première], je me suis dit “Je suis cuit. Je vais faire tout de suite ma déclaration”284 ». Bien qu’il s’était écoulé sept mois entre les deux déclarations, la confession obtenue au

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poste de police fut donnée seulement cinq jours après que l’accusé ait été informé par un inspecteur qu’il avait en main la déclaration faite à l’enquêteur privé. Comme la seconde déclaration suivait de près la mention de la première, il existait un lien temporel suffisamment étroit entre les deux confessions pour entraîner son exclusion. Ici l’axiome « après cela, donc à cause de cela » trouve sa pleine justification dans la mesure où la seconde déclaration résultait directement de la première jugée inadmissible. Encore une fois, l’approche est contextuelle. Son application exige un examen du lien existant entre les deux déclarations tel que perçu à travers le prisme des circonstances de l’affaire285. Ces circonstances, précise le juge Bastarache dans R. c. G.(B.), doivent révéler la présence d’une connexité suffisante entre les deux déclarations afin d’atteindre le degré de contamination nécessaire à l’exclusion de la confession dérivée286. En somme, d’après le juge Watt, dans R. c. M.D., « the inquiry required when the derived confessions rule is invoked to exclude a subsequent statement is essentially a

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causation inquiry that involves a consideration of the temporal, contextual, and causal connections between the proffered and earlier statements287 ».

71. En ce qui touche la déclaration secondaire recueillie par une personne qui n’est pas en situation d’autorité, nous croyons que l’exclusion ne peut s’appliquer en raison de l’absence de pouvoir ou d’influence des personnes ordinaires sur l’instance rendant l’examen du caractère volontaire de la déclaration nécessaire288.

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Comme l’indique la juge McLachlin, dans R. c. G.(B.), « cette doctrine s’attache au caractère volontaire des déclarations, question qui ne se pose que dans le cas de confessions faites à des personnes en situation d’autorité289 ». Le suspect qui répète à un ami un aveu arraché par des policiers à la suite de menaces ou de promesses n’a pas à craindre ou espérer un tel traitement de la part de son ami. Il en va de même si la première déclaration avait été obtenue dans un climat d’oppression, sans esprit conscient ou à la suite d’une ruse qui choque la collectivité. La conclusion serait différente, par contre, si l’accusé croyait raisonnablement que son ami était en situation d’autorité, car dans ce cas la règle des confessions dérivées s’appliquerait avec autant de célérité.

72. Si la règle des confessions dérivées s’intéresse au lien qui unit la déclaration incriminante et la confession involontaire qui l’a précédée, l’admissibilité d’une déclaration faite à la suite

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d’une première déclaration obtenue en violation d’un droit garanti par la Charte est régie par le par. 24(2). C’est l’exemple de l’enquêteur qui réussit finalement à faire parler un suspect après l’avoir confronté à une déclaration incriminante que ses collègues avaient obtenue en raison d’une violation flagrante de son droit à l’assistance d’un avocat290. Comme la déclaration faite par l’accusé à l’enquêteur « après plus de quatre heures de résistance, [...] a suivi immédiatement la mention de la première déclaration irrecevable291 », il existait un « lien temporel » et « causal » suffisamment étroit entre les deux déclarations pour conclure que la preuve avait été obtenue dans des conditions qui portaient atteinte aux droits garantis par la Charte292. Le policier ayant sciemment utilisé une déclaration obtenue en violation du droit à l’assistance d’un avocat

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pour arracher l’aveu désiré, son admission aurait pour effet de déconsidérer l’administration de la justice.

Cinquième sous-section : Les opérations « Monsieur Big »

73. Issues de l’imagination fertile des policiers canadiens293, les opérations « Monsieur Big » ont permis la condamnation de plusieurs individus soupçonnés de crimes graves demeurés jusque-là non résolus. Cette technique, qui consiste à gagner la confiance d’un suspect afin de l’amener à se joindre à une organisation criminelle fictive, culmine avec la rencontre du chef de l’organisation, « Monsieur Big ». La rencontre ayant généralement pour but d’offrir à l’accusé une place au sein de l’organisation criminelle294, une position plus élevée ou des responsabilités accrues, ce dernier est appelé à dissiper les doutes ou inquiétudes de « Monsieur Big » quant au crime reproché. Sans obéir à une formule unique, le but de l’opération demeure toujours le même : obtenir un aveu relativement au crime sous enquête. Parmi les procédés les plus souvent utilisés, mentionnons la promesse faite à l’accusé de le protéger s’il avoue son crime ou celle de faire disparaître, grâce au concours d’agents corrompus ou à l’élimination d’un témoin gênant, des éléments de preuve incriminants295. Les policiers peuvent également

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mentionner au suspect que sa persistance à nier la commission du crime sera perçue comme un manque de confiance à l’égard de l’organisation criminelle, ou simplement le mettre au défi de prouver sa capacité de commettre des actes violents296. Malgré les particularités propres à chaque affaire, la technique demeure sensiblement la même : écarter les protestations d’innocence du suspect, lui démontrer que sa culpabilité est établie et insister pour que ce dernier avoue son crime pour le bien de l’organisation. Vu sous cet angle, il est évident que les opérations « Monsieur Big » sont d’une efficacité redoutable et ne peuvent être écartées sans risquer de nuire aux enquêtes criminelles et à la découverte de la vérité297.

74. En plus d’être efficaces, les opérations « Monsieur Big » échappent à l’application de la règle des confessions ainsi qu’au

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droit de garder le silence garanti par l’article 7298. En effet, l’individu qui parle au chef d’une organisation criminelle ne sait pas qu’il s’adresse à un policier. La condition se rapportant à une personne en situation d’autorité n’étant pas remplie, la poursuite n’a pas à prouver le caractère volontaire de la déclaration. Quant à la protection offerte par la Charte, « la jurisprudence relative au droit de garder le silence n’a jamais étendu à la période qui précède la détention la protection contre les artifices utilisés par les policiers299 ». Efficaces, les opérations « Monsieur Big » le sont certainement. Dangereuses, elles le sont également puisqu’en raison de leur nature particulière (risques d’aveux non dignes de foi, de preuve préjudiciable et d’abus policiers) et de l’absence de protections adéquates, elles peuvent mener à des condamnations injustifiées.

75. Consciente des risques associés aux opérations « Monsieur Big », la Cour suprême, dans R. c. Hart300, est venue baliser le recours à cette technique d’enquête et encadrer l’admissibilité des aveux ainsi obtenus. En l’espèce, l’accusé, qui était soupçonné d’avoir noyé ses deux enfants, a affirmé aux policiers

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qui l’ont interrogé que l’une des victimes avait échappé à sa supervision alors qu’il était en proie à une crise d’épilepsie. Confus et désorienté, l’accusé serait retourné chez lui afin de chercher son épouse, oubliant ainsi l’autre jeune fille sur le quai. Convaincue de sa culpabilité, mais possédant peu de preuves contre lui, la police a mis sur pied une opération secrète au cours de laquelle l’intimé fut approché par deux policiers en civil. Après avoir gagné sa confiance, le suspect fut amené à participer à des activités criminelles simulées contre rémunération. S’étant rapidement lié d’amitié avec les deux agents, ces derniers lui ont proposé une « affaire importante qui assurerait sa sécurité financière301 ». Comme sa participation à l’opération criminelle était conditionnelle à l’accord de Monsieur Big, une rencontre entre les deux individus fut organisée. Questionné sur la mort de ses deux jeunes filles, le suspect a maintenu sa version des faits et réitéré le caractère accidentel des événements reprochés. Les explications n’ayant pas convaincu son interlocuteur, ce dernier somma l’accusé « de ne pas mentir ». Devant l’insistance de Monsieur Big, le suspect avoua finalement le double meurtre et admit avoir poussé les victimes dans le lac afin d’éviter que leur garde soit confiée à son frère. La Cour d’appel ayant cassé le verdict de culpabilité rendu en première instance et ordonné la tenue d’un nouveau procès, la Cour suprême devait déterminer l’admissibilité des aveux obtenus à la suite de l’opération « Monsieur Big ». Soulignant l’absence de protection suffisante offerte à l’accusé, la Cour suprême proposa « une démarche à deux volets pour contrer les risques liés à la fiabilité, au préjudice et au comportement policier répréhensible que comporte pareille opération302 ».

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76. Le premier volet de la démarche proposée par le juge Moldaver et la majorité dans l’arrêt Hart consacre l’existence, en common law, d’une nouvelle règle de preuve selon laquelle l’aveu recueilli dans le cadre d’une opération « Monsieur Big » est présumé inadmissible. Pour être repoussée, cette présomption impose à la poursuite la charge d’établir, selon la prépondérance des probabilités, « que la valeur probante de l’aveu l’emporte sur son effet préjudiciable303 ». La valeur probante de l’aveu obtenu à la suite d’une opération « Monsieur Big » suppose un examen de sa fiabilité telle que perçue à travers le prisme des circonstances de l’affaire304 et de la qualité de l’aveu ainsi obtenu305. Des circonstances de

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l’affaire, tout d’abord, puisque « la durée de l’opération, le nombre d’interactions entre les policiers et l’accusé, la nature de la relation qui s’est tissée entre les agents et l’accusé, la nature des incitations et leur importance, le recours à des menaces, la conduite de l’interrogatoire, ainsi que la personnalité de l’accusé, y compris son âge, ses connaissances et son état de santé mentale »306 permettront de déterminer s’il y a lieu de mettre en doute la fiabilité de l’aveu et, « si oui, dans quelle mesure307 ». En pratique, la fiabilité d’un aveu peut être mise en doute notamment par la présence d’une incitation financière si forte qu’elle prive l’accusé de « sa rationalité et de sa capacité de faire des choix308 »; d’une dépendance de nature à subjuguer sa volonté ou l’empêcher « d’exprimer librement et correctement sa pensée309 »; de l’emploi de scenarios de violence relevant de « tactiques coercitives inacceptables310 » et d’intimidation découlant de menaces de violence ou d’un autre préjudice sérieux. La conclusion du juge selon laquelle l’accusé n’est pas « une personne facilement intimidable, que les allusions à certains avantages monétaires n’étaient pas de nature à l’aveugler et que l’entrevue avec “Monsieur Big” ne contenait pas de menace d’une possible atteinte à son intégrité physique ou à celle d’autrui311 » contribue donc à augmenter la fiabilité des aveux.

77. Après avoir examiné les circonstances entourant l’obtention de la déclaration incriminante, le tribunal doit rechercher, dans l’aveu même, ce qui contribue à augmenter ou démontrer sa fiabilité312. Pour ce faire, le juge doit tenir compte de la nature des

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informations révélées dont notamment le détail et l’exhaustivité des renseignements obtenus, le fait qu’ils ont permis ou non la découverte d’éléments de preuve indépendants313, qu’ils ont révélé des modalités du crime jusqu’alors inconnues du public314 ou des informations que l’accusé aurait ignorées s’il n’avait pas commis

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le crime315. Sans être nécessaire, l’existence d’une preuve corroborante augmente considérablement la fiabilité de l’aveu. Cela est d’autant plus important lorsque les circonstances ayant mené à son obtention demeurent incertaines.

78. L’évaluation de l’effet préjudiciable de l’aveu est généralement plus simple que la détermination de sa valeur probante.

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En raison de sa nature particulière, l’admission de l’aveu obtenu dans le cadre d’une opération de type « Monsieur Big » risque de causer à l’accusé un préjudice moral ou un préjudice par raisonnement. Un préjudice moral, tout d’abord, puisque le jury découvrira que l’accusé souhaitait adhérer à une organisation criminelle pour laquelle il s’est livré à des activités illégales simulées. « Au bout du compte, l’accusé n’aura d’autre choix que de convaincre le jury qu’il a menti à Monsieur Big lorsqu’il s’est vanté de la perpétration d’un crime très grave parce qu’il souhaitait ardemment se joindre au gang316. » Sur ce point, il est évident que la participation de l’accusé à des actes de violence et la révélation de ses antécédents judiciaires au cours de l’enquête augmenteront le préjudice moral découlant de l’obtention de l’aveu317. Quant au préjudice par raisonnement, l’adhésion de l’accusé à une organisation criminelle et sa participation à des activités illégales qu’il croyait être réelles risquent fortement d’influencer le jury en détournant son attention sur la personnalité de l’individu et sa propension à commettre des crimes. Pour contrer ce danger, il serait souhaitable d’exclure certains détails particulièrement préjudiciables dont la pertinence à la compréhension des faits est plutôt secondaire.

79. Après avoir soigneusement soupesé la valeur probante de l’aveu et son effet préjudiciable, le tribunal doit déterminer si le ministère public a prouvé, selon la prépondérance des probabilités, que « la valeur de l’aveu (force probante) l’emporte sur le coût de son obtention (effet préjudiciable)318 ». Si la réponse est négative, l’aveu doit être écarté. Dans le cas contraire, l’aveu sera admis en preuve à moins que son obtention découle d’un abus de procédure et plus précisément d’une conduite de l’État qui compromet l’équité des procès ou l’intégrité du système judiciaire. C’est le second volet de la démarche analytique préconisée par la

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Cour suprême, dans R. c. Hart. Parmi les facteurs pouvant mener à un abus de procédure, mentionnons (1) l’emploi de la force contre le suspect ou des menaces d’y recourir afin d’obtenir un aveu319 et (2) l’exploitation des caractéristiques personnelles de l’accusé qui le rendent plus vulnérable à la manipulation telles que la jeunesse ou l’inexpérience, sa fragilité psychologique, sa dépendance à l’alcool ou aux drogues, son isolement social, sa pauvreté et ses

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liens familiaux320. C’est donc la contrainte ou l’exploitation de la vulnérabilité de l’accusé qui le prive de sa volonté qui compte321. L’utilisation de subterfuges, d’incitations et de ruses n’est pas interdite322. En effet, les tactiques qui exercent une pression sur la

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volonté de l’agent « sans venir à bout de sa volonté et à le contraindre ainsi à avouer » (« overcome the will of the accused and coerce a confession ») sont permises323. Dans tous les cas, il appartiendra à l’accusé de prouver l’abus de procédure324. Comme la présence d’un abus de procédure « rendra inutile la mise en balance de la valeur probante et de l’effet préjudiciable325 », le tribunal commencera souvent son analyse par la question de l’abus de procédure326.

80. Appliquée aux faits de l’espèce, il est évident que la valeur probante des aveux obtenus de M. Hart ne l’emportait pas sur leur caractère préjudiciable. Avant de rencontrer les policiers, l’intimé était sans amis, sans-le-sou et sans emploi. L’opération lui a permis de travailler, de gagner de l’argent et de nouer des liens d’amitié avec des agents qu’il considérait comme des « frères ». Son désir de conserver son nouveau train de vie, jumelé à la peur de perdre une bonne opportunité d’affaires et de ne plus travailler pour l’organisation, l’ont poussé à avouer la commission des crimes qu’on lui reprochait. Ces aveux, arrachés dans des conditions qui font douter de leur véracité, ne comportent aucun indice de fiabilité

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pouvant les rendre plus dignes de foi. En effet, les incohérences relevées dans les aveux recueillis et l’absence de preuve de corroboration ne permettent pas de vérifier leur véracité. Ces lacunes, une fois combinées aux risques de préjudice découlant de la participation active de l’accusé à des activités illégales simulées et du fait qu’il s’était vanté d’être à l’origine de la mort de ses filles afin de conserver son statut au sein de l’organisation criminelle, empêchent la poursuite de réfuter la présomption d’inadmissibilité applicable en l’espèce. Comme « ces aveux ne valent pas le risque qu’ils font courir327 », la première étape n’est pas franchie et il n’y a pas lieu de déterminer si le comportement des policiers a constitué un abus de procédure.

81. Lorsqu’un aveu obtenu dans le cadre d’une opération « Monsieur Big » est recevable en preuve, le tribunal doit donner au jury des directives permettant de contenir les risques liés à son utilisation328. Sans retenir une formule précise, le juge « doit communiquer au jury les éléments dont il a besoin pour tenir compte de la non-fiabilité éventuelle des aveux et du préjudice susceptible de découler de ceux-ci329 ». Ainsi, pour déterminer si l’aveu obtenu est digne de foi, le juge doit examiner avec les jurés les circonstances ayant mené à son obtention ainsi que les indices de fiabilité qu’il contient. Sur ce point, le juge Gagnon, dans Béliveau c. R., est catégorique : « Les éléments liés à la non-fiabilité éventuelle de l’aveu obtenu à l’occasion d’une opération “Monsieur Big” sont plus nombreux et raffinés que les seuls cas de traitements inhumains, dégradants ou violents330. » Parmi les facteurs pertinents à cette question, mentionnons, encore une fois, « la durée de

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l’opération, le nombre d’interactions entre les policiers et l’accusé, la nature des relations qui se sont tissées entre les agents et l’accusé, la nature des incitations et leur importance, le recours à des menaces, la conduite de l’interrogatoire ainsi que la personnalité de l’accusé331 ». Le juge n’est pas tenu d’expliquer en détail tous les éléments de preuve se rapportant à la question de la fiabilité. « Sa fonction consiste simplement à attirer l’attention des jurés sur la non-fiabilité éventuelle de l’aveu et à leur signaler les facteurs pertinents pour se prononcer à ce sujet332. » En ce qui concerne la preuve de mauvaise moralité que comporte l’aveu obtenu dans le cadre d’une opération de type « Monsieur Big », le juge doit mentionner au jury qu’elle ne peut fonder, à elle seule, une déclaration de culpabilité et que la participation de l’accusé aux activités criminelles simulées découle d’un stratagème de la police mis en place afin d’encourager ce dernier à y prendre part.

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Sixième sous-section : Les déclarations d’un accusé à des personnes ordinaires

82. Si la déclaration faite à une personne en situation d’autorité suppose la tenue d’un voir-dire au cours duquel le ministère public devra prouver son caractère volontaire, il en va autrement des aveux recueillis par des personnes ordinaires, tels des amis, collègues de travail, parents ou proches de la victime. Comme la règle des confessions exige que la déclaration soit faite à une personne en situation d’autorité et que le droit de garder le silence garanti par l’article 7 ne s’applique qu’après la mise en détention du suspect, les aveux recueillis par ces personnes « sont admissibles comme preuve de la véracité de leur contenu333 ». Malgré son bien-fondé, cette exception à la règle du ouï-dire n’est pas sans dangers334. Les déclarations incriminantes pouvant être soutirées au

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moyen de l’emploi de la force ou des menaces d’un tel emploi, elles comportent des risques importants quant à leur fiabilité. C’est l’exemple de l’individu qui arrache des aveux de l’agresseur de son fils à la pointe d’un couteau. Le père ayant menacé le suspect de le tuer s’il n’avouait pas son crime, il est évident que la fiabilité de la déclaration incriminante peut être remise en question. Il en va ainsi des aveux soutirés par suite de chantages, de pressions psychologiques ou de menaces se rapprochant de la contrainte morale. Pour contrer les risques associés à de telles pratiques, la Cour suprême, dans R. c. Hodgson, propose les directives suivantes :

« Il est possible qu’une déclaration obtenue par suite d’un traitement inhumain ou dégradant ou le recours à la violence ou à des menaces de violence ne soit pas l’expression de la volonté librement exercée de confesser ses actes. Au contraire, elle peut n’être que le résultat de la contrainte ou de la crainte d’un tel traitement. Si c’est le cas, il se peut fort bien que la déclaration ne soit pas vraie ou qu’elle ne soit pas fiable. Par conséquent, si vous concluez que la déclaration a été obtenue par une telle contrainte, il faut ne lui accorder que très peu de poids, voire pas du tout335. »

83. Pertinentes lorsque l’aveu soutiré à l’accusé par une personne ordinaire a été admis en preuve, les directives proposées par le juge Cory, dans R. c. Hodgson, s’avèrent inutiles dans les cas ou l’admissibilité de l’aveu obtenu au moyen d’un traitement dégradant ou inhumain rendrait le procès inéquitable. En effet, « le juge du procès demeure toujours investi d’un pouvoir discrétionnaire qui lui permet d’écarter l’élément de preuve dont l’admission

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compromettrait l’équité du procès336 ». Un aveu à première vue admissible en preuve peut donc être écarté lorsque les circonstances entourant son obtention sont si odieuses que son utilisation nuirait à la tenue d’un procès équitable. Il en serait ainsi dans les cas d’aveux arrachés à la suite de tortures ou de traitements inhumains ou dégradants, ou soutirés à la suite d’une contrainte irrésistible337.

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Deuxième section : L’obligation de divulgation de la preuve du ministère public (le droit à une défense pleine et entière)

84. L’obligation du ministère public de communiquer à l’accusé tous les renseignements pertinents, non protégés, qu’il a en sa possession ou sous son contrôle occupe une place très importante en droit pénal canadien338. Malgré la solidité de ses assises constitutionnelles, la mise en application de l’obligation de divulgation n’est ni simple ni facile. Son traitement exige une analyse attentive (1) de ses fondements juridiques, (2) de sa portée et de ses limites, (3) de la procédure applicable, (4) de la violation et de la réparation du droit en question et (5) des exceptions qu’elle contient. Compte tenu de son régime spécifique, une rubrique sera consacrée à la communication des dossiers personnels du plaignant ou d’un témoin dans les instances relatives à certaines infractions d’ordre sexuel (6).

1) Les fondements juridiques

85. L’arrêt de principe en matière de divulgation de la preuve est R. c. Stinchcombe339. D’après la Cour suprême, le ministère public doit communiquer à l’accusé tous les documents qu’il a en sa possession ou sous son contrôle, qu’ils soient inculpatoires ou disculpatoires, sauf s’il s’agit de renseignements privilégiés ou

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manifestement non pertinents340. Cette obligation puise sa source dans l’article 7 de la Charte341, et plus précisément dans :

« ... la crainte prépondérante que la non-divulgation n’empêche l’accusé de présenter une défense pleine et entière. Ce droit reconnu par la common law a acquis une nouvelle vigueur par suite de son inclusion parmi les principes de justice fondamentale visés à l’art. 7 de la Charte canadienne des droits et libertés. [...] Le droit de présenter une défense pleine et entière constitue un des piliers de la justice criminelle, sur lequel nous comptons grandement pour assurer que les innocents ne soient pas déclarés coupables342. »

86. La pertinence d’un document doit être évaluée en fonction de son utilité pour la défense. S’il y a « une possibilité raisonnable que le renseignement soit utile à l’accusé pour présenter une défense pleine et entière343 », il est pertinent et doit, par conséquent, être communiqué à l’accusé. Dans le cas contraire, l’obligation de divulgation ne s’applique pas et le renseignement n’a pas à être transmis à la défense. L’obligation du ministère public de divulguer

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tous les documents pertinents qui ne sont pas privilégiés a pour corolaire le droit de l’accusé à la communication de tous les renseignements qui sont pertinents344. Comme l’indique le juge Rowe, au nom de la majorité, dans l’arrêt R. c. Gubbins : « La communication a pour objet de protéger le droit à une défense pleine et entière conféré par la Charte à l’accusé, droit auquel il est porté atteinte lorsqu’il existe une possibilité raisonnable que les renseignements non divulgués [aient] été utilisés pour réfuter la preuve du ministère public, pour présenter un moyen de défense ou, par ailleurs, pour prendre une décision qui aurait pu avoir une incidence sur la façon de présenter la défense345. » Comme un renseignement peut être pertinent sans avoir un impact négatif sur l’issue ou l’équité globale du procès, l’omission de produire ce document peut porter atteinte à l’obligation de divulgation sans affecter pour autant le droit de l’accusé à une défense pleine et entière. En l’absence d’un tel préjudice, rien ne justifie la tenue d’un nouveau procès346.

87. Au-delà de ses assises constitutionnelles, l’obligation de divulgation reflète le rôle particulier du substitut du procureur général dans la poursuite et la répression du crime. Le but d’une

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poursuite, rappelons-le, n’est pas d’obtenir une condamnation à tout prix, mais de présenter tous les éléments de preuve admissibles à l’appui de la poursuite engagée contre l’accusé. Comme le souligne le juge Rand, dans Boucher c. The Queen, « le rôle du poursuivant exclut toute notion de gain ou de perte de cause; il s’acquitte d’un devoir public, et dans la vie civile, aucun autre rôle ne comporte une plus grande responsabilité personnelle347 ». La poursuite doit donc s’acquitter de sa tâche avec fermeté, mais aussi avec toute la dignité et le sens de la justice que commande une telle entreprise348. Quant aux documents et autres renseignements révélés par l’enquête, ils ne sont pas la propriété du ministère public qui peut s’en servir à sa guise afin d’obtenir une condamnation, mais celle du public qui doit veiller à ce qu’ils soient employés dans le respect de la loi et l’intérêt de la justice349. L’altérité qui caractérise le rôle de la poursuite et de la défense explique, en grande partie, l’absence d’obligation réciproque pour la défense. Ainsi, sous réserve des exceptions applicables en matière d’alibi et de contre-expertise, la défense n’est pas tenue de communiquer des éléments de preuve à la poursuite. Son rôle, qui est d’obtenir l’acquittement de son client par tous les moyens légaux, s’oppose à la reconnaissance d’une obligation correspondante et milite en faveur du maintien d’une position de simple adversaire350.

2) Le contenu de l’obligation de divulgation (portée et limites)

88. Une fois l’obligation du ministère public reconnue, il convient de s’attarder au contenu de l’obligation de divulgation.

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Sur ce point, la Cour suprême est catégorique : le ministère public a l’obligation de communiquer tous les renseignements pertinents et non protégés qu’il a en sa possession ou sous son contrôle. L’intention du ministère public d’utiliser ou non ces renseignements contre l’accusé est indifférente351. On l’ignore au profit d’une analyse centrée sur la pertinence de la preuve et sur la capacité de l’accusé de présenter une défense pleine et entière. En effet, « le juge qui effectue le contrôle doit déterminer si l’accusé peut raisonnablement utiliser la communication des renseignements pour réfuter la preuve et les arguments du ministère public, pour présenter un moyen de défense ou autrement pour parvenir à une décision susceptible d’avoir un effet sur le déroulement de la défense comme, par exemple, de présenter ou non une preuve352 ». Le ministère public a donc l’obligation de divulguer tous les renseignements qui peuvent « raisonnablement aider » l’accusé à présenter une défense pleine et entière353. C’est pourquoi la

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déclaration d’un individu qui contredit la version des faits de certains témoins de la poursuite, qui remet en doute leur crédibilité, qui ébranle la thèse du ministère public quant au déroulement des événements en question ou qui permet d’explorer de « nouvelles pistes d’enquête » doit être communiquée à la défense, même si le ministère public n’entend pas citer cette personne comme témoin à charge354. Comme il n’est pas toujours possible d’anticiper la stratégie de la défense, le ministère public doit agir avec diligence et ne pas conclure trop rapidement à l’absence de pertinence. Le critère n’étant pas très sévère, le ministère public devrait être encouragé à divulguer même les déclarations qui ne semblent pas

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pertinentes à première vue355. En effet, peu de renseignements échappent à la règle et tout doute concernant la pertinence d’un document doit être tranché en faveur de l’accusé356. Bien que la poursuite ait l’obligation de divulguer tous les renseignements pertinents, non protégés, qu’elle a en sa possession ou sous son contrôle, elle n’est pas tenue d’examiner personnellement tous les

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renseignements utilisés ou figurant dans le dossier d’enquête. La poursuite, précise la Cour d’appel de l’Alberta dans R. c. Siemens, peut compter sur les enquêteurs pour lui prêter main-forte dans l’accomplissement de sa tâche357.

89. Mise de l’avant afin de protéger les droits de l’accusé, l’obligation de divulgation de la preuve est assujettie au pouvoir discrétionnaire du ministère public de refuser de divulguer certains

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renseignements ou de retarder le moment de la divulgation358. Le pouvoir de refuser de divulguer certains renseignements, tout d’abord, puisque la poursuite n’est pas tenue de communiquer les informations qui ne satisfont pas au critère de « pertinence » établi dans l’arrêt Stinchcombe. L’obligation de divulgation n’est pas absolue, mais se limite aux documents raisonnablement susceptibles d’aider l’accusé à présenter une défense pleine et entière. En ce qui concerne les renseignements confidentiels ou privilégiés, le ministère public doit respecter la règle du privilège relatif aux indicateurs de police. Cette règle, qui empêche la divulgation du nom de l’indicateur et de tout renseignement susceptible d’en révéler l’identité, peut être écartée seulement pour démontrer l’innocence de l’accusé. Le procureur doit également s’abstenir de communiquer tout « renseignement faisant l’objet d’un privilège ou d’une interdiction de communication en vertu de la loi ou de la common law359 ». Dans ce cas, la poursuite doit informer « la défense de l’existence d’une preuve pertinente, sans en préciser la teneur, pour que celle-ci puisse agir en conséquence, notamment en présentant les requêtes nécessaires360 ». En plus du pouvoir de refuser la communication de renseignements non pertinents ou privilégiés, le ministère public peut retarder la divulgation d’informations ou décider de la forme qu’elle revêtira lorsque cela est

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nécessaire afin de protéger des témoins contre le harcèlement ou des représailles361. Il en va également de la préservation de l’intérêt

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public362. La question n’est donc pas de savoir si les renseignements doivent être divulgués, mais plutôt quand et comment devront-ils l’être363. Quant à la possibilité de repousser la communication de renseignements afin de terminer une enquête, celle-ci n’est pas encouragée bien qu’elle soit parfois tolérée364. Enfin, mentionnons que la poursuite peut utiliser sa discrétion afin de décider sous quelle forme, par exemple, la photographie d’un aide inspecteur âgé

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de 16 ans impliqué dans la vente illégale de tabac à un mineur peut être divulguée afin de protéger son identité en tant que témoin365.

90. Subordonnée à la règle de la pertinence, l’obligation de divulgation s’étend à tous les renseignements raisonnablement susceptibles d’aider l’accusé à présenter une défense pleine et entière. Parmi les éléments de preuve couverts par cette obligation figurent, au premier rang, les déclarations verbales ou écrites du plaignant, des témoins de l’infraction et de toutes autres personnes ayant fourni des renseignements pertinents aux autorités chargées de l’enquête, que le ministère public ait l’intention ou non de les faire témoigner366. Des notes ou copies devront être produites en l’absence de la déclaration367. À défaut, la poursuite devra fournir le nom, l’adresse et l’occupation du témoin, ainsi que tous les renseignements relatifs aux éléments de preuve pertinents qu’il

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pourrait avoir en sa possession368. Doivent également être communiqués à la défense, les notes d’enquête prises par les policiers au cours de l’interrogatoire de l’accusé369, la dénonciation assermentée d’un policier dans le but d’obtenir un mandat de perquisition370, un résumé de conversations interceptées, les synthèses se rapportant à la crédibilité d’un témoin principal de la poursuite371, les documents des banques de données policières qui concernent les témoins collaborateurs, les dossiers consultés pour la confection de rapports d’enquête, les notes et rapports des événements liés à l’enquête, la correspondance et les communications ayant servies à la confection d’un rapport d’expert, etc. En ce qui concerne le

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mode de divulgation retenu, la poursuite possède une discrétion dont l’exercice est assuré en vue de permettre à un accusé une défense pleine et entière. En somme, « il s’agira toujours de déterminer si l’accusé a pu, matériellement, se servir adéquatement des renseignements ayant fait l’objet d’une communication pour repousser la preuve et les arguments du ministère public et prendre toutes les décisions qui s’imposent dans la mise en œuvre de son droit à une défense pleine et entière372 ». L’utilisation de CD-Rom est répandue en droit pénal canadien. Chaque cas étant unique, « l’organisation matérielle de la preuve » et le support utilisé pour communiquer l’information constituent des facteurs pertinents au moment de déterminer le respect du droit en question373.

91. Si le ministère public possède toujours les originaux des documents couverts par l’obligation de divulgation, il doit les produire ou permettre leur consultation. Dans le cas contraire, une explication satisfaisante permettra au ministère public de s’acquitter de son obligation, à moins que la conduite à l’origine de la destruction ou de la perte des documents originaux soit suffisamment grave pour justifier une réparation en vertu de la

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Charte374. La défense, rappelle la Cour suprême dans l’arrêt R. c. Stinchcombe (2), n’a pas un droit absolu à la production des originaux, mais à la communication de tous les renseignements pertinents, non protégés, contenus dans ces documents375. L’obligation de divulgation a donc « comme corollaire l’obligation de conservation de la preuve376 ». La destruction délibérée de documents pertinents par la police pour faire obstacle à leur divulgation empêche le ministère public de s’acquitter de son obligation et contrevient au droit constitutionnel de l’accusé. L’arrêt des procédures, qui s’applique uniquement dans « les cas les plus manifestes », peut s’avérer nécessaire lorsqu’il est « impossible de remédier au préjudice causé au droit de l’accusé à une défense pleine et entière ou lorsque la continuation de la poursuite causerait à l’intégrité du système judiciaire un préjudice irréparable377 ». Quant à la perte ou à la destruction par inadvertance des documents faisant l’objet de l’obligation de divulgation, comme le ministère public est tenu de conserver tous les fruits de l’enquête, il doit justifier la non-divulgation des renseignements pertinents378. Sur

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ce point, la Cour d’appel est catégorique : « Il suffit à l’accusé d’établir la possibilité réaliste d’une atteinte à son droit de présenter une défense pleine et entière pour donner ouverture au droit de demander un remède approprié en vertu de l’article 24(1) de la Charte. Une fois cette preuve faite, il incombe à la Couronne d’établir soit l’absence totale de pertinence de la preuve matérielle détruite ou perdue, soit l’absence d’une négligence grossière ou inacceptable379 ». L’absence totale de pertinence de la preuve matérielle détruite ou perdue, tout d’abord, puisqu’une preuve qui n’est pas pertinente n’a pas à être divulguée. Quant à la preuve jugée utile pour la défense, le ministère public doit « convaincre le juge du procès que la preuve n’a été ni détruite ni perdue par suite d’une négligence inacceptable380. » Plus l’information est pertinente, plus on s’attend à ce que la police ou le ministère public fasse preuve de diligence dans la conservation des renseignements faisant l’objet de la demande381. La police, rappelons-le, ne peut conserver toutes les informations qu’elle consulte dans le cours d’une enquête. Une information inutile ou secondaire à la question sous enquête n’a

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pas à être conservée indéfiniment dans l’attente qu’elle puisse un jour devenir pertinente382. Il en va également des dossiers clos ayant fait l’objet d’un acquittement ou d’un verdict de culpabilité383. Pourquoi la preuve a-t-elle été détruite ou perdue ? Les

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explications sont légion. Du simple accident à la mauvaise foi du policier, en passant par l’erreur de bonne foi, l’absence de diligence, la négligence grossière et l’insouciance; la conduite sera plus ou moins blâmable suivant les circonstances de l’affaire, la nature de la preuve détruite ou disparue et les mesures prises afin d’en préserver l’existence ou l’intégrité. La violation de l’obligation de divulgation n’exige pas la mauvaise foi ou l’intention d’entraver les procédures judiciaires. En effet, la négligence inacceptable ou l’insouciance à l’égard de la conservation de la preuve ou de l’importance de l’obligation en question porte atteinte au devoir de divulgation de la preuve384. Quant à la simple négligence,

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celle-ci n’est pas suffisante à ce stade385. L’erreur étant humaine, l’employé chargé de la conservation des éléments de preuve peut détruire par inadvertance des objets ou des documents sans que l’on puisse conclure pour autant à sa négligence grossière ou à son intention délibérée386.

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92. Lorsque les explications du ministère public ne convainquent pas le juge du procès que « la preuve n’a été ni détruite ni perdue par suite d’une négligence inacceptable », l’obligation de divulgation n’a pas été respectée et il y a violation du droit à l’article 7 de la Charte387.

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93. La perte ou la destruction d’un élément de preuve peut également provenir d’un abus de procédure lorsqu’elle découle d’une conduite qui choque le sens du franc-jeu et de la décence de la société. Il en va ainsi lorsque les policiers détruisent délibérément des éléments de preuve afin de nuire à la défense ou font preuve d’une négligence si grossière qu’elle ne pourrait être tolérée sans porter atteinte à l’intégrité du système judiciaire.

94. Si « la perte ou la destruction de la preuve est le résultat d’une négligence inacceptable ou d’un abus de procédure », un arrêt des procédures s’avère approprié uniquement dans les « cas les plus manifestes », lorsqu’« une atteinte au droit de l’accusé à un procès équitable ou à l’intégrité du système de justice “sera révélé[e], perpétué[e] ou aggravé[e] par le déroulement du procès ou par son issue”388 ». En outre, il ne doit pas y avoir d’autres types de réparation permettant de remédier au préjudice en question389.

95. Comme l’obligation de divulgation du ministère public ne constitue qu’une composante du droit à une défense pleine et entière, il arrive parfois que les explications fournies par le ministère public convainquent le tribunal qu’il a pris des mesures raisonnables pour conserver les documents perdus, donc qu’il s’est acquitté de son obligation de divulgation, mais que la perte du document rende le procès inéquitable en privant l’accusé d’une défense pleine et entière390. Dans ce cas, l’accusé doit démontrer que la perte ou la destruction de l’élément de preuve cause « un

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préjudice concret à son droit à une défense pleine et entière391 ». Comme le rappelle si bien le juge Kasirer dans Simard c. R. :

« Je retiens de La et Kociuk l’enseignement suivant : s’il est établi que la perte n’est pas le résultat d’une négligence inadmissible ou d’un abus de procédures, le fardeau revient à l’accusé qui doit démontrer l’existence d’un préjudice concret à son droit à une défense pleine et entière. Comme le juge Doyon l’a écrit récemment dans Cartier : “Il faut toutefois souligner la possibilité que, même en présence d’une explication raisonnable, la preuve perdue ou détruite soit si importante que le droit à une défense pleine et entière est violé, ce qui entraînerait un procès inéquitable et pourrait justifier un arrêt des procédures.” Le juge Doyon ajoute, en s’appuyant sur les mêmes paragraphes de l’arrêt La cités plus haut, que “cela ne pourra toutefois se produire que dans des situations exceptionnelles”392 ».

96. Plus la valeur probante et la fiabilité de la preuve perdue ou détruite sont élevées, plus le préjudice subi par l’accusé sera important. En sens contraire, une preuve dont la valeur probante est faible tend à diminuer le degré de préjudice allégué393. Il en va ainsi, par exemple, lorsque l’absence d’ADN de l’accusé sur les

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objets détruits n’a aucune incidence sur sa culpabilité394. Quant à l’arrêt des procédures, celui-ci s’impose uniquement si « la preuve perdue ou détruite est si importante que le droit à une défense pleine et entière est violé, ce qui entraînerait un procès inéquitable » et que « l’arrêt des procédures serait le seul remède approprié395 ». S’agissant d’un remède exceptionnel, l’arrêt des procédures n’est pas indiqué lorsque la perte ou la destruction de la preuve peut être supplée à l’aide d’autres moyens appropriés pouvant diminuer le préjudice subi par l’accusé396.

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97. Si l’État qui a le contrôle ou la possession d’un renseignement pertinent est obligé de conserver et de communiquer le document à la défense397, il en va autrement des dossiers en la

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possession d’un tiers398. Ainsi, sous réserve de son obligation de s’informer et de tenter raisonnablement d’obtenir les renseignements pertinents qui sont portés à sa connaissance399, le ministère public n’est pas tributaire des actes posés à son insu. On n’a qu’à penser à la destruction des feuilles de présence et des registres de mobilité tenus par une maison de transition que fréquentait une personne soupçonnée de vol. Comme les documents avaient été détruits conformément à une politique en vigueur à l’époque et que les policiers ignoraient que le suspect habitait dans la maison de transition au moment des événements reprochés, l’obligation de la poursuite de conserver et de communiquer les documents pertinents qu’elle a en sa possession ou sous son contrôle ne s’appliquait pas en l’espèce. En ce qui touche l’atteinte au droit à une défense pleine et entière découlant de la perte des documents en question, « s’il est établi que la perte n’est pas le résultat d’une négligence inadmissible ou d’un abus de procédures, le fardeau revient à l’accusé qui doit démontrer l’existence d’un préjudice concret à son droit à une défense pleine et entière400 ».

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98. En tant qu’officier de justice, responsable des poursuites criminelles, l’avocat du ministère public qui est informé de la présence de renseignements « potentiellement pertinents » a l’obligation de se renseigner suffisamment auprès des autres organismes ou ministères de la Couronne ayant participé à l’enquête et de tenter raisonnablement de les obtenir, le cas échéant401. Les enquêtes relevant de la police, et non du ministère public, les « fruits de l’enquête » doivent être communiqués au ministère public en vue de poursuites éventuelles. En effet : « Il est bien établi et reconnu par tous, y compris les policiers, que la police, même si elle fonctionne indépendamment de l’avocat du ministère public, est tenue de lui communiquer tous les renseignements pertinents découverts pendant l’enquête sur un crime, y compris les renseignements susceptibles d’aider l’accusé402. » À l’obligation du ministère public de divulguer toute la preuve pertinente qui se trouve en sa possession ou sous son contrôle, s’ajoute donc celle de la police de communiquer à la poursuite tous les renseignements pertinents, qu’ils soient favorables ou non à l’accusé, découverts pendant l’enquête sur un crime (fruits de l’enquête)403. D’après le

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juge Rowe, dans R. c. Gubbins, « les “fruits de l’enquête” renvoient aux dossiers d’enquête de la police, par opposition aux dossiers opérationnels ou aux renseignements sur les antécédents404 ». Ces documents contiennent des informations recueillies au cours ou à la suite d’une enquête concernant les crimes reprochés à l’accusé. En raison de leur nature, les « fruits de l’enquête » sont visés par « le régime de communication applicable à la partie principale selon l’arrêt Stinchcombe, car ils comprennent probablement405 » :

« [Traduction] de l’information pertinente non protégée qui se rapporte aux éléments de preuve que le ministère public entend produire contre un accusé ainsi que toute information pouvant raisonnablement aider l’accusé à exercer son droit à une défense pleine et entière. L’information peut porter sur le déroulement des faits importants, la crédibilité des témoins ou la fiabilité de la preuve susceptible de faire partie du dossier du ministère public.

Dans son sens ordinaire, naturel et courant, l’expression “fruits de l’enquête” suppose un lien entre l’objet recherché et l’enquête à l’origine des accusations portées contre un inculpé. (R. c. Jackson, 2015 ONCA 832, 128 O.R. (3d) 161, par. 92-93)406. »

99. En plus des informations contenues dans le dossier d’enquête, « la police devrait communiquer au poursuivant tous les renseignements additionnels qui se rapportent manifestement à la poursuite engagée contre l’accusé407 ». Ces renseignements, précise la Cour suprême dans R. c. Gubbins, ne font pas partie des

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« fruits de l’enquête », mais doivent être communiqués en raison de leur impact sur la possibilité pour l’accusé de contrer la preuve de la poursuite, de soulever un moyen de défense ou de conduire autrement sa défense408. Pour s’en convaincre, citons la décision de la Cour suprême dans R. c. McNeil409. À la suite de sa déclaration de culpabilité pour différentes infractions relatives aux stupéfiants, mais avant le prononcé de sa peine, l’accusé a appris que l’agent de police qui était responsable de son arrestation faisait l’objet de procédures disciplinaires internes et d’accusations criminelles concernant une inconduite grave liée à la drogue. Comme l’agent Hacket était à la fois le témoin principal de la poursuite, le seul policier ayant attesté des motifs raisonnables à l’appui de l’arrestation de M. McNeil et celui qui avait recueilli l’admission du prévenu, la défense a requis la réouverture du procès afin de présenter des éléments de preuve se rapportant à l’inconduite de M. Hackett. La demande ayant été annulée, l’accusé porta sa déclaration de culpabilité en appel. Dans une demande préliminaire adressée à la Cour d’appel de l’Ontario, l’accusé réclama la communication de tous les renseignements relatifs à l’inconduite de M. Hackett. Le service de police de Barrie et l’avocat du ministère public provincial qui était en charge des poursuites pénales s’étant opposés à la demande, la Cour d’appel de l’Ontario annula les déclarations de culpabilité prononcées contre l’accusé. Le ministère public ayant décidé de ne pas poursuivre à nouveau M. McNeil, le pourvoi devenait théorique, mais néanmoins essentiel à la clarification de certaines questions concernant la production de dossiers disciplinaires de la police et de dossiers d’enquêtes criminelles relativement à un tiers accusé. Sur ce point, le Tribunal distingue selon que la police agit à titre de partie principale ou

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tiers au litige. Lorsque l’inconduite d’un policier se rapporte à l’arrestation de l’accusé ou aux circonstances entourant sa mise en accusation, la police doit divulguer les renseignements touchant les mesures disciplinaires entreprises ou découlant de cette inconduite. Ici, la police agit à titre de partie principale et non en tant que tiers au litige. On n’a qu’à penser au policier accusé en vertu d’une loi provinciale d’avoir utilisé une force excessive pour procéder à l’arrestation du suspect. Comme l’inconduite du policier se rapporte au fait à l’origine de l’accusation portée contre l’accusé, ce renseignement est pertinent et doit être communiqué à la poursuite. En ce qui concerne l’inconduite d’un policier qui « n’est pas directement liée à l’enquête relative à l’accusé410 », mais qui peut se rapporter à la poursuite engagée contre ce dernier, cette information doit également être transmise au poursuivant. En somme, « les dossiers sur les conclusions d’inconduite grave de policiers chargés de l’enquête visant l’accusé sont à bon droit compris dans les renseignements que la police doit remettre au ministère public à titre de “partie principale” quand l’inconduite en question est liée à l’enquête ou quand il est raisonnable de penser qu’elle risque d’avoir des répercussions sur la poursuite engagée contre l’accusé. Le ministère public doit à son tour communiquer les renseignements à l’accusé selon l’obligation qui lui incombe aux termes de Stinchcombe411. » À l’obligation de divulgation de la poursuite, s’ajoute donc l’obligation correspondante des policiers de communiquer au poursuivant (1) les informations se trouvant dans le dossier d’enquête « fruits de l’enquête », ainsi que (2) « les renseignements additionnels qui se rapportent manifestement à la

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poursuite engagée contre l’accusé412 ». Bien que l’arrêt McNeil traite de dossiers disciplinaires, l’obligation de divulgation s’applique à tous les renseignements que possède la police et qui se rapportent manifestement à la poursuite engagée contre l’accusé413. Quant aux autres dossiers, ils ne font pas partie des documents que doit communiquer la police en tant que partie principale et sont assujettis au régime de communication de renseignements en la possession de tiers établi dans l’arrêt O’Connor.

100. Les demandes de production de dossiers en la possession de tiers comportent deux étapes414. À la première étape de

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l’analyse, l’auteur de la demande a le fardeau de convaincre le tribunal que les renseignements recherchés sont « vraisemblablement pertinents ». C’est le critère de la « pertinence vraisemblable ». Selon cette règle, il doit y avoir « une possibilité raisonnable que les renseignements aient une valeur logiquement probante relativement à une question en litige ou à l’habilité à témoigner d’un témoin415 ». Une « question en litige » se rapporte aux faits à l’origine de l’accusation portée contre l’accusé, à la crédibilité des témoins ainsi qu’à la fiabilité des autres éléments mis en preuve. Comme il est souvent impossible de démontrer l’utilité précise de renseignements qui n’ont pas encore été consultés, le fardeau qui repose sur les épaules du demandeur n’est pas très onéreux à ce stade416. La décision du juge de rejeter trop rapidement la demande peut donc lui être reprochée417. On n’a qu’à penser au policier accusé d’homicide involontaire coupable et de négligence criminelle

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causant la mort après avoir fait feu sur une personne qui s’enfuyait au volant d’une voiture volée418. Comme le policier croyait que le fuyard se dirigeait vers lui, la défense a demandé, sans succès, la communication de rapports d’enquête liés à trois événements impliquant la victime (introduction par effraction dans un commerce, homicide et vol). La demande ayant été rejetée faute de renseignements vraisemblablement pertinents, la Cour d’appel cassa la décision de la juge de première instance. Même si le policier ne connaissait pas la victime, la preuve de son caractère violent demeurait pertinente à la question de savoir si le policier était justifié d’avoir agi ainsi et permettait de corroborer sa version des faits selon laquelle le fuyard fonçait sur lui419. Puisque la décision d’écarter des renseignements vraisemblablement pertinents à la première étape de l’analyse a porté atteinte au droit de l’accusé à une défense pleine et entière et que l’examen plus en profondeur des documents recherchés aurait peut-être pu soulever un doute

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raisonnable sur sa culpabilité, la Cour ordonna la tenue d’un nouveau procès420.

101. Si l’auteur de la demande satisfait à l’exigence minimale de pertinence, le juge peut ordonner au tiers « de produire les renseignements pour que la cour en fasse l’examen et décide s’ils devraient être communiqués à l’accusé421 ». C’est la deuxième étape de l’analyse établie dans l’arrêt R. c. O’Connor. À ce stade des procédures, le tribunal doit soupeser le droit de l’accusé de présenter une défense pleine et entière et celui du tiers à la protection du droit à sa vie privée. Comme la détermination de l’existence d’une attente résiduelle en matière de protection de la vie privée est un exercice qui peut être long et fastidieux, les tribunaux sont invités à évaluer, tout d’abord, la « pertinence véritable » du dossier pour l’accusé. Si la prétention de « pertinence vraisemblable » qui a été établie à la première étape de l’analyse ne s’avère pas fondée (ce qui est possible puisque l’accusé n’a jamais vu le dossier), la demande de production sera rejetée. Si, au contraire, l’analyse plus poussée des dossiers par la cour démontre que la prétention de « pertinence vraisemblable » est suffisamment étayée, « le droit de l’accusé à une défense pleine et entière fera, à quelques exceptions près, pencher la balance pour le prononcé d’une ordonnance de production422 ». Cette conclusion ayant pour effet de classer les dossiers en la possession de tiers « dans la même catégorie, pour les besoins de la communication, que les fruits de l’enquête contre l’accusé qui se trouvent en la possession du ministère public suivant Stinchcombe423 », la cour pourra se demander s’il existe une

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exception qui permettrait à la poursuite, en tant que partie principale, de ne pas divulguer la preuve à l’accusé ? Si la réponse est négative, il n’y a aucune raison de conclure autrement relativement aux renseignements en possession de tiers au sens de l’arrêt O’Connor. Même si le droit à une défense pleine et entière l’emporte sur les droits résiduels à la protection de la vie privée, des aménagements ou suppressions peuvent être apportés afin d’éviter toute atteinte indue au droit à la vie privée.

102. La demande de communication de documents en la possession de tiers (demande de type O’Connor) dans le but de contester la délivrance d’une autorisation d’écoute électronique (demande de type Garofoli) fut examinée récemment par la Cour suprême, dans Groupe de la Banque mondiale c. Wallace424. Le Groupe de la Banque mondiale est une organisation internationale chargée notamment de financer des projets et des travaux dans des pays en développement. Le Groupe ayant prêté 1,2 milliard$ US au gouvernement du Bangladesh pour la construction d’un pont enjambant le fleuve Padma, l’entreprise SNC-Lavalin a soumissionné afin d’obtenir le contrat de supervision des travaux de construction du pont. En 2010, la vice-présidence chargée des questions d’intégrité (« INT »), une division autonome qui a la mission d’enquêter pour le Groupe, a reçu plusieurs courriels indiquant que des employés de SNC-Lavalin complotaient en vue de soudoyer des fonctionnaires bangladais chargés de l’attribution des contrats. L’INT ayant communiqué à la GRC les rapports d’enquête et les courriels provenant des informateurs, la police a obtenu la délivrance d’autorisations leur permettant d’intercepter des communications privées en vue de recueillir des éléments de preuve impliquant les accusés dans les manœuvres frauduleuses. Comme le sergent qui a rédigé l’affidavit à l’appui de la demande s’est appuyé en grande partie sur les informations transmises par l’INT, la défense demanda la production des documents en possession des enquêteurs seniors du Groupe. D’après les juges Muldover et Côté, qui ont rédigé le jugement au nom de la Cour, une

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autorisation d’écoute électronique peut être contestée pour deux raisons : le dossier au soutien de la demande ne respectait pas les conditions préalables à la délivrance de l’autorisation, ou le dossier ne reflétait pas « ce que le déposant savait ou aurait dû savoir et, s’il avait constitué un reflet fidèle, n’aurait pas justifié l’autorisation425 ». L’accusé qui soutient que des renseignements se trouvant en la possession de tiers sont pertinents pour sa demande de type Garofoli doit établir « qu’il est raisonnablement probable que ces documents auront une valeur probante quant aux questions que soulève sa demande. Le fait que les documents soient susceptibles de démontrer des erreurs ou omissions dans l’affidavit ne suffit pas à miner l’autorisation. Ils doivent aussi permettre de démontrer que le déposant connaissait ou aurait dû connaître l’existence des erreurs ou des omissions. Si les documents dont la communication est sollicitée ne peuvent étayer cette inférence, ils ne sont pas pertinents dans le cadre de la demande de type Garofoli (Pires, par. 41)426 ». Comme il n’est pas raisonnablement probable que les documents demandés auront une valeur probante quant à la question de savoir si le déposant savait ou aurait dû savoir que les renseignements cités à l’appui de l’affidavit contenaient des erreurs ou omissions, la pertinence des documents n’a pas été démontrée à l’égard de la demande de type Garofoli.

103. Le contenu et l’application des deux régimes de communication de la preuve furent analysés récemment par la Cour suprême, dans R. c. Gubbins427. Après avoir fourni des échantillons d’haleine qui indiquaient une alcoolémie supérieure à la limite permise, les appelants ont été accusés de conduite avec facultés affaiblies et de conduite avec une alcoolémie « supérieure à 80 mg ». L’analyse des échantillons d’haleine ayant été effectuée à l’aide d’un « alcootest approuvé », la poursuite cita au procès un expert afin d’expliquer le fonctionnement de l’appareil ainsi que les précautions prises au moment de procéder à chaque

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prélèvement d’échantillon d’haleine. La demande des appelants afin d’obtenir les registres d’entretien des alcootests ayant été refusée pour le motif qu’il s’agissait de documents en possession de tiers, la Cour devait déterminer, tout d’abord, le régime de communication applicable aux registres en question, puis ensuite, si l’un des pourvois rencontrait les exigences préliminaires en matière de communication de la preuve. Pour déterminer lequel des régimes s’appliquait en l’espèce, le tribunal doit « se poser les deux questions suivantes [...] : (1) les renseignements demandés se trouvent-ils en la possession ou sous le contrôle du poursuivant ? et (2) les renseignements recherchés sont-ils d’une nature telle que la police ou l’autre entité étatique qui les a en sa possession ou sous son contrôle aurait dû les transmettre au poursuivant ?428 ». Si le tribunal répond positivement à l’une ou l’autre de ces questions, le registre de communication de la preuve par la partie principale s’appliquera. À défaut, le dossier sera soumis au régime de communication de renseignements en la possession de tiers. La première question reçoit une réponse négative. Les registres d’entretien ne sont pas en la possession du ministère public, mais de la GRC et d’autres tiers. La seconde question n’est pas plus favorable à la thèse des appelants. Les registres d’entretien ne font pas partie des « fruits de l’enquête ». Il s’agit plutôt de « dossiers opérationnels » qui ne se rattachent pas spécifiquement à une enquête429. Ces dossiers, poursuit la Cour, ne sont pas pertinents à l’égard de la fiabilité des appareils. En effet, « la seule question à laquelle il faut répondre est celle de savoir si les machines fonctionnaient bien lors de l’alcootest – et pas avant ni après. Les relevés établis au moment des analyses répondent directement à cette question. Mais, d’après la preuve d’expert, tel n’est pas le cas des registres d’entretien430 ». Comme les renseignements demandés ne sont pas en possession de la poursuite, qu’ils ne font pas partie des « fruits de l’enquête » et qu’ils ne sont pas « manifestement pertinents », le Tribunal conclut que les registres d’entretien sont assujettis aux règles gouvernant la production des dossiers en la possession de

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tiers énoncées dans l’arrêt O’Connor. La défense n’ayant pas démontré que les registres d’entretien des appareils utilisés étaient « vraisemblablement pertinents » quant à la fiabilité des résultats contestés, il n’y a pas lieu de passer à la seconde étape de la demande et d’évaluer la pertinence véritable des renseignements en question431.

104. Contrairement aux registres d’entretien des alcootests, la poursuite qui s’appuie sur les résultats d’un appareil permettant de mesurer la vitesse (radar de contrôle routier ou cinémomètre) pour établir la commission d’une infraction doit divulguer, sur demande, la procédure d’exploitation et de vérification établie dans le manuel d’instruction du manufacturier. La police a donc l’obligation correspondante de fournir à la poursuite les passages pertinents du manuel d’instruction afin qu’elle puisse s’acquitter de son obligation de divulgation à titre de partie principale432. Comme les alcootests, les renseignements concernant la procédure d’exploitation et de vérification « ne sont pas générés au cours ou à la suite d’une enquête donnée concernant les accusations portées contre

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l’accusé433 ». Bien qu’ils ne fassent pas partie des « fruits de l’enquête », ces renseignements sont « manifestement pertinents » dans la mesure où ils se rapportent à la capacité de l’accusé de contester la prétention du ministère public quant à la fiabilité de la vitesse captée par l’appareil radar et de réfuter la preuve du ministère public434. Les extraits du manuel d’utilisation contenant la procédure d’exploitation et de vérification de l’appareil sont donc soumis au régime de communication par la partie principale.

105. De ce qui précède, nous pouvons conclure que le ministère public a l’obligation de communiquer à l’accusé tous les renseignements pertinents, non protégés, qu’il a en sa possession ou sous son contrôle. Pour les fins de la divulgation de la preuve,

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le ministère public se limite au poursuivant et ne s’étend pas aux autres composantes de l’État, telles que la police et les différentes agences étatiques435. Bien que la police doive communiquer sans demande préalable tous les renseignements concernant l’enquête de l’accusé ainsi que ceux se rapportant manifestement à la poursuite engagée contre ce dernier, le ministère public doit prendre les mesures raisonnables qui s’imposent dans les circonstances dont il a alors connaissance pour s’assurer que la police ou d’autres agences étatiques ont divulgué tous les renseignements pouvant s’avérer utiles pour la poursuite ou la défense436. Le ministère public, précise la juge Karakatsanis dans l’arrêt Quesnelle, a

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« l’obligation de faire des vérifications raisonnables et d’obtenir les éléments susceptibles d’être pertinents et la police de transmettre au ministère public les renseignements et les éléments de preuve pertinents437 ». Cette obligation n’oblige pas la poursuite à consulter tous les services d’enquête étatiques pouvant être en possession de dossiers concernant la poursuite engagée contre l’accusé. On s’attend, en effet, à des vérifications raisonnables et non à une enquête systématique auprès de chaque ministère du gouvernement provincial et fédéral438. Comme l’obligation du ministère public est subordonnée à la connaissance de l’existence de renseignements potentiellement pertinents, l’aveuglement volontaire ne dégage pas la poursuite de son obligation de procéder à des vérifications raisonnables439. Quant à la direction que doit

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prendre l’enquête, celle-ci n’est pas laissée aux caprices et aux exigences de la défense. En effet, le droit de l’accusé à une défense pleine et entière n’inclut pas le droit de diriger l’enquête dont il fait l’objet. Certes, la police doit vérifier les renseignements importants qui n’ont pas été abordés ou approfondis suffisamment lors de l’enquête, mais c’est aux policiers que revient ultimement la tâche d’effectuer l’enquête440.

3) Les aspects procéduraux

106. Reconnue par la common law, consacrée par la Charte, l’obligation de divulgation de la preuve fait suite à une demande présentée par l’accusé ou en son nom, après le dépôt des accusations. La communication initiale de la preuve doit généralement se faire avant que l’accusé choisisse son mode de procès ou

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présente son plaidoyer441. Au Québec, cela signifie que la communication initiale devrait avoir lieu au moment de la comparution. À titre d’indication et sans prétendre à l’exhaustivité, l’accusé doit s’attendre à cette étape à recevoir les documents suivants : « la dénonciation; un rapport résumant les faits reprochés, écrit par le policier responsable de l’enquête; les déclarations écrites des témoins de l’infraction; la liste des objets saisis par les policiers durant l’enquête; les notes des policiers ayant participé à l’enquête ou l’arrestation; un cédérom de preuve si la preuve est volumineuse ou comprend des enregistrements audio ou vidéo; les documents ayant justifié une demande de mandat de perquisition et les antécédents judiciaires du prévenu, le cas échéant442 ». Comme le délai entre l’arrestation et la comparution est plutôt court, l’accusé

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dispose de peu de temps pour examiner les éléments de preuve avec son avocat. Bien que la communication initiale doit se faire avant que l’accusé soit appelé à choisir son mode de procès ou à présenter son plaidoyer, l’obligation de divulgation est continue et se prolonge jusqu’à l’épuisement des recours d’appel443. En effet, le ministère public doit produire tous les renseignements qui peuvent « raisonnablement aider l’appelant à faire valoir sa thèse en appel444 ». Quant à l’enquête, celle-ci pouvant se poursuivre jusqu’à la fin du procès, les éléments de preuve découverts entretemps doivent être communiqués à la défense qui devra disposer du temps nécessaire pour prendre connaissance des nouveaux renseignements et les incorporer à sa stratégie, lorsque cela est possible445.

107. Si le ministère public possède un pouvoir discrétionnaire relativement au contenu, au moment et à la forme de la divulgation, la défense peut, de son côté, demander au juge du procès de contrôler cette discrétion. La règle étant la divulgation de tous les renseignements pertinents, le ministère public devra alors justifier son refus en invoquant l’absence de pertinence ou les règles

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en matière de privilège446. L’avocat qui découvre, à partir des documents fournis par le ministère public, l’absence de certains renseignements doit faire preuve de diligence et agir rapidement de manière à permettre au juge de remédier à la situation447. Le défaut de ce faire dès qu’il a ou aurait dû avoir connaissance de l’inaction de la poursuite pourrait l’empêcher d’obtenir un nouveau procès, le cas échéant.

108. De façon générale, les situations donnant lieu à un contrôle judiciaire se présentent lorsque la défense affirme (1) que des renseignements qui ont été invoqués et qui existent auraient dû être communiqués et (2) que des renseignements dont l’existence n’est pas admise auraient dû être produits.

109. Lorsque l’existence des renseignements est établie, le ministère public doit justifier son omission en démontrant (1) qu’il n’a plus ces renseignements sous son contrôle, (2) que ces renseignements sont manifestement non pertinents ou (3) qu’ils tombent sous le coup d’un privilège448. Le ministère public est tenu de

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présenter des éléments de preuve à l’appui de sa décision de ne pas communiquer ces renseignements. Un voir-dire au cours duquel des arguments seront présentés et des déclarations et autres documents seront examinés, avec ou sans témoignages de vive voix, sera généralement nécessaire pour régler la question. Si le document en possession et sous le contrôle du ministère public s’avère pertinent, il doit être communiqué à la défense. Quant au privilège relatif aux indicateurs de police, la règle est la non-divulgation des renseignements, soumise à l’exception relative à l’innocence de l’accusé. La divulgation de certaines informations peut donc s’avérer nécessaire afin de préserver le droit de l’accusé de présenter une défense pleine et entière.

110. Lorsque l’existence des renseignements est contestée ou mise en doute, le ministère public n’a pas à justifier la non-divulgation des renseignements. C’est à la défense plutôt d’établir la présence de motifs permettant au juge de conclure à l’existence de renseignements pouvant être pertinents449. L’existence des documents doit être « assez clairement établie » afin de permettre au juge d’apprécier la nature des informations contestées et de décider si elles satisfont au critère de pertinence de l’arrêt Stinchcombe.

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D’après le juge Sopinka, la tenue d’un voir-dire n’est pas nécessaire lorsque les observations orales de l’avocat de la défense s’avèrent suffisantes pour trancher la question. Dans le cas contraire, la tenue d’un voir-dire sera conseillée afin de traiter plus à fond de la demande. Si la défense s’acquitte de son obligation en établissant les fondements des renseignements contestés, il reviendra au ministère public de justifier la non-divulgation des informations en sa possession ou sous son contrôle.

4) La violation du droit à la divulgation

111. La violation du droit à la divulgation de la preuve comprend deux considérations, celle du non-respect de l’obligation de divulgation du ministère public et celle de la réparation consécutive à cette violation450. Regardons brièvement en quoi consistent ces deux aspects du droit à la divulgation de la preuve.

112. Comme nous le savons, le ministère public a l’obligation de divulguer à l’accusé tous les renseignements pertinents, non protégés, qu’il a en sa possession ou sous son contrôle. Cette obligation donne naissance, en retour, à la reconnaissance d’un droit constitutionnel pour l’accusé à la communication de tous les renseignements qui satisfont au critère de pertinence établi dans l’arrêt Stinchcombe. Comme l’obligation du ministère public s’applique chaque fois qu’il y a un renseignement susceptible d’aider l’accusé à présenter une défense pleine et entière, l’omission de ce faire porte atteinte au droit à la divulgation reconnu par la Charte451.

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113. Naturellement, la notion de pertinence est large et certains documents peuvent satisfaire au critère préliminaire établi dans l’arrêt Stinchcombe, sans nécessairement influer sur l’issue du litige. Dans ce cas, le renseignement doit être divulgué, mais l’omission du ministère public n’empêchera pas l’accusé de présenter une défense pleine et entière. Comme l’indique le juge Cory, dans R. c. Dixon : « Le droit à la divulgation n’est qu’une composante du droit à une défense pleine et entière. Bien qu’il puisse y avoir violation du droit à la divulgation, il se peut qu’il n’y ait aucune atteinte au droit à une défense pleine et entière par suite de cette violation452. » Un document peut donc être pertinent tout en n’ayant qu’une « importance secondaire par rapport aux questions fondamentales en litige453 ». Lorsque l’absence de divulgation des renseignements est examinée avant ou pendant le procès, le juge en charge de l’instance doit évaluer, conformément au critère préliminaire établi dans l’arrêt Stinchcombe, la pertinence des documents allégués. Si les documents s’avèrent pertinents, l’obligation du ministère public s’impose et il y aura violation du droit de l’accusé à la divulgation de la preuve454. Une ordonnance de production jumelée ou non à un ajournement permettant à la défense de prendre connaissance des documents en question et de décider

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de la suite des choses constitue généralement une réparation appropriée pour ce type de violation455. « S’il doit suspendre pendant le

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procès, le juge peut accorder la possibilité de rappeler les témoins pour poursuivre ou reprendre le contre-interrogatoire à la lumière de la preuve divulguée456. » L’avortement du procès peut s’avérer nécessaire lorsque la non-divulgation a nui considérablement à la conduite de la défense et qu’une longue suspension ne peut lui permettre d’apporter les correctifs nécessaires. Lorsque le ministère public s’est acquitté tardivement de son obligation de divulgation, l’exclusion de la preuve ne peut être accordée que « lorsque la communication tardive rend le procès inéquitable et qu’il ne peut être remédié à cette iniquité grâce à un ajournement et à une ordonnance de communication, ou lorsque l’exclusion est nécessaire pour maintenir l’intégrité du système de justice457 ». Comme l’exclusion d’un élément de preuve nuit à la fonction de recherche de vérité du procès, ce remède n’est pas approprié lorsque le tribunal peut recourir à une autre mesure réparatrice qui ne compromet pas l’équité du procès ou l’intégrité du système judiciaire458.

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Quant à l’arrêt des procédures, celui-ci s’impose uniquement lorsque la continuation de la poursuite causerait un préjudice irréparable au droit de l’accusé à une défense pleine et entière ou à l’intégrité du système judiciaire. Ce qui n’est pas le cas, par exemple, lorsque le contenu des notes qui n’ont pas été communiquées à la défense n’a pas été entièrement dévoilé au juge du procès459.

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114. Si l’absence de divulgation est examinée après une déclaration de culpabilité, la cour d’appel devra se demander si les renseignements qui n’ont pas été communiqués satisfont au critère préliminaire de l’arrêt Stinchcombe et si l’absence de divulgation a porté atteinte au droit de l’accusé à une défense pleine et entière460. C’est à l’accusé de convaincre le tribunal que la violation du droit à la divulgation a porté atteinte à son droit à une défense pleine et entière461. La défense s’acquitte de son fardeau « lorsqu’il

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y a une possibilité raisonnable que la non-divulgation ait influé sur l’issue ou l’équité globale du procès462 ». Sur l’issue du procès, tout d’abord, puisque l’omission du ministère public de divulguer à l’accusé des renseignements pertinents peut avoir un impact sur le résultat contesté463. « Pour évaluer le bien-fondé du résultat, il faut examiner les renseignements non divulgués pour déterminer l’incidence qu’ils auraient pu avoir sur la décision de rendre un verdict de culpabilité464. » Cet exercice, rappelle la Cour, suppose une analyse globale de la nouvelle preuve et s’oppose à une approche fragmentée des différents éléments de preuve. S’il y a une possibilité raisonnable que les renseignements non divulgués influent, à première vue, sur le bien-fondé du verdict de culpabilité, l’atteinte au droit à une défense pleine et entière est établie et

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un nouveau procès devra être ordonné. En l’absence d’une telle possibilité, la Cour d’appel devra examiner l’impact de la non-divulgation sur l’équité globale du procès. C’est la seconde étape du test proposé par la Cour suprême, dans R. c. Dixon. Évidemment, s’il y a une possibilité raisonnable que les renseignements non divulgués aient nui à l’équité globale du procès, un nouveau procès sera ordonné. À cette étape de l’analyse, c’est l’utilité potentielle ou raisonnablement possible des renseignements « non divulgués aux fins de l’enquête et de la cueillette d’éléments de preuve » qui compte465. Est-ce que la non-divulgation a privé l’accusé de certains moyens de preuve ou d’enquête ? Pour répondre à cette question, la Cour doit évaluer « les questions qui auraient pu être posées aux témoins ou les possibilités de recueillir d’autres éléments de preuve que la défense aurait pu avoir si les renseignements pertinents avaient été divulgués466 ». C’est donc l’« utilité potentielle » des éléments de preuve non divulgués qui doit être examinée467. On regardera, par exemple, si la nouvelle preuve aurait pu être utilisée par la défense afin de poser d’autres questions aux témoins468, de contre-interroger un agent civil

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d’infiltration469, de miner la crédibilité des témoins de la poursuite470, de découvrir d’autres témoins, d’ébranler la thèse de la poursuite, d’explorer de nouvelles pistes d’enquêtes, de soulever un moyen de défense ou de découvrir de nouveaux éléments de preuve471. L’analyse, encore une fois, est globale et contextuelle472. Elle suppose un examen général de la preuve « telle qu’elle aurait été présentée au procès » si le ministère public n’avait pas omis de respecter son obligation de divulgation. Lorsque la pertinence des renseignements qui n’ont pas été communiqués est très élevée à

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première vue, un nouveau procès devrait être ordonné. Quant aux renseignements dont la pertinence est plus faible, voire peu élevée, le tribunal devra déterminer si la défense a perdu des possibilités réalistes de recueillir d’autres éléments de preuve. La diligence dont fait preuve l’avocat de la défense est un facteur à considérer. Le procureur qui sait ou devrait savoir, sur la base de documents déjà divulgués, que des renseignements pertinents n’ont pas été communiqués ne peut rester les bras croisés. En effet, il ne faut pas confondre la passivité avec la diligence raisonnable. L’inaction, qui découle de la négligence ou d’une décision tactique, s’oppose à la conclusion que l’omission du ministère public a rendu le procès inéquitable.

115. La divulgation de renseignements qui se produit après une déclaration de culpabilité fut examinée récemment par la Cour d’appel dans L’espérance c. R.473. En l’espèce, l’accusé, qui avait été déclaré coupable de plusieurs infractions à caractère sexuel commises sur des mineures, prétendait que « les rapports médicaux et thérapeutiques, la liste de médicaments ainsi que les documents scolaires produits par le ministère public lors des observations sur la peine474 » ne lui avaient pas été remis suffisamment tôt, le privant ainsi de la possibilité d’ébranler la crédibilité de la preuve de la poursuite ou d’adapter son interrogatoire des plaignantes. S’il est vrai que les renseignements contenus dans ces documents renvoient à des événements qui ont eu lieu avant le procès, la grande majorité des dossiers ont été rédigés après le verdict de culpabilité. Ces documents n’étaient pas en possession de la poursuite ou des enquêteurs lors du procès et ont été remis le jour des observations sur la peine. Bien que le rapport psychiatrique fut rédigé avant le procès, sa préparation fait suite à une requête de l’IVAC relativement à une demande d’indemnisation présentée par la plaignante. Comme la plupart, sinon la quasi-totalité, des documents n’étaient pas disponibles au moment du procès, aucun reproche ne peut être formulé à l’endroit de la poursuite et des enquêteurs. À cela s’ajoute le fait que le contre-interrogatoire de l’une des victimes lors de

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l’enquête préliminaire et du procès, avait permis d’apprendre que cette dernière, qui avait souffert de dépression, prenait des médicaments et avait consulté un psychologue. L’appelant était donc bel et bien au courant des questions relatives à la santé mentale de certaines plaignantes et sa décision de ne pas explorer plus en profondeur cette avenue ne peut être imputée à l’omission de la poursuite. Comme l’accusé doit établir, tout d’abord, la violation du droit à la divulgation, le Tribunal considère que l’accusé n’a pas démontré une possibilité raisonnable que les renseignements contenus dans les documents lui auraient été utiles pour présenter une défense pleine et entière. De plus, même en supposant que la poursuite ait enfreint son obligation de divulgation, ce qui est loin d’être établi aux dires du juge Sansfaçon, l’appelant n’a pas convaincu le Tribunal, selon la balance des probabilités, « qu’il y avait une possibilité raisonnable que la non-divulgation ait influé sur l’issue ou l’équité globale du procès [...], ou en d’autres mots, que leur communication aurait changé quoi que ce soit au déroulement ou à l’issue du procès475 ». L’appel du verdict fut donc rejeté.

116. Mesure de derniers recours476, l’arrêt des procédures consécutif à l’omission de divulguer des éléments de preuve qui privent l’accusé d’une défense pleine et entière n’est ordonné que « dans les cas les plus manifestes477 », c’est-à-dire lorsqu’un préjudice irréparable a été causé (1) à l’équité du procès de l’accusé; ce sont les cas appartenant à la catégorie « principale », ou (2) à l’intégrité du processus judiciaire; ce sont les cas relevant de la catégorie « résiduelle478 ». Le test permettant de déterminer si

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l’arrêt des procédures est nécessaire dans les circonstances s’applique aux deux catégories visées et suppose la rencontre des trois exigences suivantes :

« (1) Il doit y avoir une atteinte au droit de l’accusé à un procès équitable ou à l’intégrité du système de justice qui « sera révélé[e], perpétué[e] ou aggravé[e] par le déroulement du procès ou par son issue » (Regan, par. 54);

(2) Il ne doit y avoir aucune autre réparation susceptible de corriger l’atteinte;

(3) S’il subsiste une incertitude quant à l’opportunité de l’arrêt des procédures à l’issue des deux premières étapes, le tribunal doit mettre en balance les intérêts militant en faveur de cet arrêt, comme le fait de dénoncer la conduite répréhensible et de préserver l’intégrité du système de justice, d’une part, et “l’intérêt que représente pour la société un jugement définitif statuant sur le fond”, d’autre part (ibid., par. 57)479. »

117. Appliquée à la catégorie « principale », la première exigence consiste à déterminer si l’omission de la poursuite rend le procès inéquitable et si cette atteinte sera « perpétuée par le déroulement du procès », le cas échéant. C’est donc la « continuité » ou la « persistance » de l’atteinte au droit de l’accusé qui compte à ce stade. On n’a qu’à penser à l’employée d’un Centre d’aide aux victimes d’agression sexuelle qui a supprimé toutes les notes qu’elle avait prises à la suite d’un entretien au cours duquel la plaignante prétendait avoir été victime d’attouchements sexuels. Le dossier de la plaignante ayant été délibérément détruit dans le but de le soustraire à une ordonnance de production éventuelle, l’arrêt des procédures fut ordonné en raison de l’impossibilité de

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contre-interroger la plaignante sur ses déclarations antérieures. L’omission de tenir compte des avertissements formulés par la cour et des mesures de réparation imposées afin de corriger les irrégularités, peut également amener le tribunal à conclure que la conduite reprochée se poursuivra ou sera aggravée dans le futur480.

118. Quant à l’atteinte à l’intégrité du système de justice (catégorie « résiduelle »), il s’agit de déterminer si le comportement de l’État choque la décence et les règles de franc-jeu qui gouvernent l’enquête et le déroulement des procédures judiciaires, et si la tenue d’un procès, en dépit de la conduite reprochée, causerait un préjudice à l’intégrité du système de justice. La fin ne justifie pas les moyens, précisent les tribunaux. Et il arrive, parfois, que la conduite de la police ou du ministère public soit si choquante que la tenue ou la poursuite d’un procès – même équitable – laisserait croire que « le système de justice cautionne une conduite heurtant le sens du franc-jeu et de la décence qu’a la société481 », ce qui manifestement porte atteinte à l’intégrité du système judicaire. Des atteintes délibérées, répétées et inexpliquées se prolongeant sur une longue période de temps malgré les avertissements et mises en garde des tribunaux peuvent donc affecter à la fois l’équité du procès et l’intégrité du système de justice. Dans ce cas, le test demeure le même pour les deux catégories de préjudice.

119. La seconde étape de l’analyse vise à déterminer s’il est possible de corriger la situation en ayant recours à une réparation moins draconienne. La tenue d’un nouveau procès ou l’adoption d’une autre mesure réparatrice doit être envisagée lorsqu’elle permet de rétablir le droit de l’accusé à un procès équitable. Il en va de même lorsque le remède proposé permet de corriger le préjudice causé à l’intégrité du système de justice. L’arrêt des

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procédures, prévient la Cour, n’est possible qu’en l’absence d’autres mesures réparatrices482. Lorsque la conduite de l’État compromet l’équité du procès, la possibilité d’incorporer les éléments de preuve faisant l’objet des procédures peut ne pas être suffisante si la production de ces nouvelles informations suppose un changement drastique de la stratégie de la défense élaborée depuis longtemps et la multiplication de demandes ou de requêtes relativement aux nouveaux éléments de preuve. C’est du moins ce qu’indique le juge Brunton, dans Berger c. R., en ordonnant l’arrêt des procédures intentées contre quatre membres des Hells Angels483. D’après le juge Brunton, « ces demandes ou requêtes exigeraient du temps important pour les considérés, alors que quatre des requérants sont déjà incarcérés depuis six ans et demi. De suspendre les audiences devant jury pour des longues périodes de temps pour permettre la considération de ces questions rendra le procès inéquitable484 ». L’arrêt des procédures peut également s’imposer compte tenu du stade avancé de l’instance485 ou des

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délais déjà écoulés486. En ce qui concerne la catégorie « résiduelle », la réparation doit se rapporter au préjudice causé à l’intégrité du système de justice. Comme le précise le juge Moldaver, dans R. c. Babos : « [l]’objectif n’est pas d’accorder réparation à l’accusé pour un tort qui lui a été causé auparavant. L’accent est plutôt mis sur la question de savoir si une autre réparation, moindre que l’arrêt des procédures, permettra au système de justice de se dissocier suffisamment à l’avenir de la conduite reprochée à l’État487 ». Ayant ces principes à l’esprit, le juge Brunton estime que la communication tardive des éléments de preuve, leur importance relativement à la nature des accusations portées et l’absence d’explications fournies par l’intimé, démontrent la volonté du ministère public de gagner à tout prix au détriment des droits fondamentaux de l’accusé488. Ces nombreux manquements contreviennent « aux principes fondamentaux qui sous-tendent le sens de décence et de franc-jeu de la collectivité, et, en conséquence, [ont] porté préjudice à l’intégrité du système judiciaire489 ». Comme l’arrêt des procédures se rapportant uniquement à un chef en particulier, l’avortement du procès ou une longue suspension afin d’intégrer les nouveaux éléments de preuve dans la stratégie de la défense n’est pas susceptible, en l’espèce, de corriger l’atteinte au droit de l’accusé à un procès équitable ou à l’intégrité du système de justice. Le tribunal accueille donc la requête et ordonne l’arrêt des procédures. Cette décision n’est pas sans analogie avec celle rendue par le juge Huot, dans Harvey c. R.490. La Sûreté du Québec

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ayant volontairement choisi de camoufler des renseignements permettant d’ébranler fortement la crédibilité du témoin principal, le Tribunal, après avoir relevé l’ignorance délibérée des enquêteurs dans le traitement de ce dossier, conclut que la conduite des policiers et de la poursuite a non seulement porté atteinte à l’équité du procès, mais également à la décence et aux règles de franc-jeu qui gouvernent les procédures judiciaires. Cette conduite, toujours selon la Cour, est si choquante qu’elle ne peut être excusée sans porter préjudice à l’intégrité du système de justice491.

120. Si après avoir considéré les deux premières étapes, le tribunal conserve un doute sur la pertinence de l’arrêt des procédures, il doit soupeser, d’une part, les intérêts en faveur de cet arrêt, comme la dénonciation de la conduite reprochée et la préservation de l’intégrité du système de justice, et, d’autre part, l’intérêt de la société à ce que l’affaire soit jugé au fond. Cette mise en balance des intérêts opposés s’impose particulièrement lorsque la conduite reprochée risque de miner l’intégrité du processus

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judiciaire (catégorie « résiduelle »). Le tribunal ayant le choix entre l’arrêt des procédures ou la tenue d’un procès malgré le comportement reproché, il tiendra compte de la nature et de la gravité de la conduite alléguée, de la situation de l’accusé, des accusations qui sont portées contre lui492 et de l’intérêt de la société à ce que l’affaire soit jugée au fond. Plus la conduite des policiers ou du ministère public est grave, plus le tribunal devra s’en dissocier. Placé devant une conduite qui choque le sens du franc-jeu et de la décence de la société, il est évident que le besoin de dénoncer la conduite répréhensible et de préserver l’intégrité du système de justice pénale l’emportera sur l’intérêt de la société à ce que l’affaire soit jugée au fond. Lorsque la conduite de l’État compromet l’équité du procès de l’accusé et qu’il est possible de remédier à la situation (catégorie « principale »), le tribunal doit envisager une réparation moins drastique que l’arrêt des procédures. Dans les cas où l’atteinte au droit à la tenue d’un procès équitable est permanente, la mise en balance s’avère peu utile dans la mesure où la société « n’a aucun intérêt dans la tenue de procès inéquitables493 ».

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5) L’exception relative aux indicateurs de police

121. Les indicateurs de police jouent un rôle très important dans la découverte, la poursuite et la répression du crime. Compte tenu des risques élevés de représailles auxquels ils s’exposent, le droit garantit depuis longtemps la confidentialité des indicateurs de police494. Naturellement, ce ne sont pas toutes les personnes qui fournissent des renseignements à la police qui sont des « indicateurs confidentiels495 ». En effet, « la question du privilège se pose lorsque, dans le cadre d’une enquête, un policier garantit la protection et la confidentialité d’un indicateur éventuel en échange de renseignements utiles qu’il lui serait difficile ou impossible d’obtenir autrement496 ». Si la promesse de préserver la

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confidentialité de l’informateur peut être explicite497, elle peut également être implicite498. Il y a promesse implicite de confidentialité quand une personne ordinaire placée dans la même situation que l’indicateur potentiel conclurait, à la lumière de la conduite des policiers et des circonstances de l’affaire, qu’elle a des motifs raisonnables de croire que son identité demeurera confidentielle. Est-ce que l’informateur potentiel croyait raisonnablement qu’il s’était vu confier le rôle d’indicateur de police ? Le critère est objectif et tient compte des circonstances de l’affaire. « Il peut y avoir promesse implicite relative au privilège de l’indicateur même lorsque la police n’a pas l’intention d’attribuer ce statut ou de considérer la personne comme un indicateur, dès lors que la conduite des policiers dans l’ensemble des circonstances aurait pu donner lieu à une attente raisonnable en matière de confidentialité499. » Évidemment, il sera plus facile pour le ministère public de démontrer que l’informateur est un indicateur de police si les policiers lui ont expressément confié ce rôle. Quant à la simple déduction découlant des rapports entre l’informateur et les policiers, « on pourrait soutenir qu’en cas de menace de danger important ce privilège pourrait s’appliquer même en l’absence des éléments de nature contractuelle d’offre et d’acceptation500 ». Le privilège ne s’applique pas lorsque l’indicateur agit à titre d’agent double ou comme agent provocateur501. En effet, si l’indicateur ne se contente pas de

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donner des informations à la police, mais joue un rôle actif dans la perpétration du crime, le privilège s’éteint et son identité peut être révélée à l’égard des événements pour lesquels il a agi comme un agent de police502. Il ne faut pas confondre un indicateur de police avec un agent provocateur. La personne qui fournit des informations sur les activités de l’accusé est protégée par le privilège, tandis que celle qui l’incite à perpétrer une infraction ne l’est pas503. Cette exception ne s’applique que dans les cas où

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l’informateur outrepasse les limites de son rôle et se comporte comme un agent de police. Dans les autres cas, le privilège demeure entier et l’identité de l’indicateur ne peut être révélée504.

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122. L’exception relative aux indicateurs de police fut examinée par la Cour suprême dans R. c. Leipert. À la suite de renseignements obtenus d’un informateur anonyme, la Greater Vancouver Crime Stoppers Association, une organisation privée de type « Échec au crime », a contacté la police pour l’informer que l’appelant, Richard Leipert, cultivait de la marijuana dans son sous-sol. Un policier, accompagné d’un chien renifleur, s’est rendu au domicile de l’appelant afin de vérifier le sérieux des allégations. Une fois sur place, l’agent et son chien ont décelé plusieurs indices suggérant la présence d’activités illicites liées à la culture du cannabis. Ces indices ayant permis l’obtention d’un mandat de perquisition qui s’est avéré fructueux par la suite, la défense a demandé au policier s’il avait le document d’Échec au Crime dans lequel était consigné les renseignements provenant de l’indicateur. Bien que le policier avait bel et bien le document en sa possession, le ministère public s’est opposé à sa production sur la base du privilège relatif aux indicateurs de police. Après avoir supprimé tous les passages se rapportant à l’identité de l’informateur, le juge du procès a ordonné sa production. Le ministère public ayant demandé, sans succès, d’examiner la légalité du mandat sans tenir compte de l’information provenant de l’indicateur, la poursuite a mis un terme à la présentation de la preuve et un acquittement fut prononcé. Discutant de la décision du juge du procès d’ordonner la divulgation du document après avoir supprimé toute mention de l’identité de l’informateur, la Cour suprême réitère l’importance du privilège relatif aux indicateurs de police et plus particulièrement le besoin de protéger les personnes qui collaborent à l’enquête en fournissant des informations confidentielles505. À cette fin, le

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privilège interdit non seulement de divulguer le nom de l’indicateur, mais également tout renseignement susceptible de révéler son identité. À première vue insignifiantes, certaines informations, connues seulement par quelques personnes, peuvent trahir l’identité d’un informateur. Ainsi, lorsque l’indicateur est connu des policiers, ces derniers peuvent communiquer avec lui afin de s’assurer qu’aucun renseignement ne puisse révéler son identité506. Dans ce cas, le tribunal peut permettre la divulgation après s’être assuré d’avoir supprimé tous les renseignements pouvant révéler l’identité de l’informateur. Si l’identité et la situation de l’indicateur sont inconnues des policiers, le tribunal doit refuser de produire le document. La présence de détails pouvant trahir l’identité de l’informateur ne pouvant être vérifiée auprès de ce dernier, le privilège s’applique à tout le document. Cette règle, poursuit la Cour, n’est soumise qu’à une seule exception, celle relative à la « démonstration de l’innocence » de l’accusé507. Pour invoquer

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cette exception, « la preuve doit révéler l’existence d’un motif de conclure que la divulgation de l’identité de l’indicateur est nécessaire pour démontrer l’innocence de l’accusé508 ». Une simple supposition que l’information pourrait être utile à la défense ne suffit pas à ce stade. Le droit à la communication de la preuve qui satisfait au critère préliminaire de l’arrêt Stinchcombe ou à celui d’une défense pleine et entière ne permet pas de lever l’interdiction en question509. Le privilège, précise le juge Bastarache, dans Personne désignée c. Vancouver Sun, sera écarté uniquement si la

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divulgation de l’identité de l’indicateur de police est « le seul moyen pour l’accusé de faire la preuve de son innocence510 ». Si la preuve révèle un motif de conclure que la divulgation de l’identité de l’indicateur est nécessaire à la « démonstration de l’innocence » de l’accusé, le tribunal procédera à l’analyse de l’information afin de déterminer si elle est « effectivement nécessaire pour prouver l’innocence de l’accusé511 ». Dans l’affirmative, le tribunal doit divulguer uniquement les renseignements essentiels à la démonstration de l’innocence de l’accusé. La poursuite qui ne consent pas à la production des renseignements peut alors ordonner l’arrêt des procédures ou simplement demander au tribunal d’exclure les informations fournies par l’indicateur de police dans l’examen de la demande de mandat de perquisition faisant l’objet des procédures. Le droit d’une personne de démontrer son innocence l’emporte sur la confidentialité de l’informateur dans les cas suivants :

(1) Lorsque l’indicateur est un témoin essentiel du crime512. La divulgation de l’identité d’un indicateur qui possède des

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informations importantes sur la participation de l’accusé au crime ou sur son état d’esprit lors de la commission de l’infraction peut être nécessaire afin de corroborer les prétentions d’innocence de l’accusé ou d’étayer la défense mise de l’avant par ce dernier.

(2) Lorsque l’accusé entend démontrer que la délivrance d’un mandat de perquisition n’était pas fondée sur la présence de motifs raisonnables. Encore une fois, la divulgation de l’identité de l’informateur doit être « absolument essentielle » à la démonstration de l’innocence de l’accusé. « Ce pourrait être le cas, par exemple, lorsqu’il y a des éléments de preuve qui portent à croire que les biens saisis en exécution du mandat sont le fruit d’un coup monté. Pour établir que l’indicateur est à l’origine du coup monté ou qu’il détient des renseignements sur la façon dont le coup a été monté, l’accusé pourrait à bon droit demander la divulgation de renseignements qui peuvent incidemment révéler l’identité de l’indicateur513. »

123. Si la preuve n’établit aucun motif permettant de conclure que la divulgation de l’identité de l’indicateur est nécessaire pour prouver l’innocence de l’accusé, l’identité de l’informateur demeurera confidentielle. Il s’agit, en effet, d’un privilège quasi absolu514.

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Le juge n’a aucune discrétion515. La protection sera mise de côté seulement si l’innocence de l’accusé est « manifestement en jeu516 ».

124. L’étendue du privilège relatif aux indicateurs de police fut étudiée récemment par la Cour suprême dans l’arrêt R. c. Brassington517. Cette décision est particulièrement intéressante dans la mesure où les accusés, des policiers qui avaient été impliqués dans une enquête concernant des homicides liés à des gangs, souhaitaient discuter avec leurs avocats de renseignements susceptibles de révéler l’identité d’indicateurs de police. La poursuite

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s’étant opposée à la demande sur la base du privilège de l’indicateur et de l’absence de preuve pouvant satisfaire au critère relatif à la « démonstration d’innocence », la Cour devait déterminer si les policiers pouvaient discuter avec leurs avocats de « renseignements protégés par le privilège de l’indicateur en l’absence d’une décision judiciaire ayant conclu que l’exception de “l’innocence en jeu” » s’appliquait518. Pour répondre à cette question, la Cour rappelle tout d’abord l’importance du privilège de l’indicateur de police et le caractère limité de l’exception relative à la « démonstration de l’innocence de l’accusé », telle que définie par le juge Major, dans l’arrêt McClure. En effet, « le privilège devrait être levé seulement si des questions fondamentales touchant la culpabilité ou l’innocence de l’accusé sont en cause ou s’il y a un risque véritable qu’une déclaration de culpabilité injustifiée soit prononcée519 ». Les demandes de type McClure, rappelle la Cour, sont généralement soumises après que la preuve soit terminée afin de s’assurer que le privilège ne soit mis de côté que lorsqu’il est « strictement nécessaire520 ». Quant à la demande en tant que telle, celle-ci obéit à deux étapes. Ainsi, après avoir établi que les renseignements visés par le privilège ne peuvent être obtenus autrement et qu’il n’y a pas d’autre façon de soulever un doute raisonnable, l’accusé doit présenter « des éléments de preuve permettant de conclure à l’existence d’une communication qui pourrait susciter un doute raisonnable quant à sa culpabilité521 ». Si tel est le cas, le juge du procès doit, à la lumière de l’ensemble de la preuve à sa disposition, « examiner la communication afin de déterminer si elle suscitera probablement un doute raisonnable522 ». Les explications sont pertinentes, mais non déterminantes, car les policiers

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ne prétendent pas, en l’espèce, que la divulgation des renseignements relatifs aux indicateurs est nécessaire pour démontrer leur innocence, mais plutôt que les renseignements « pourraient » être pertinents et qu’ils souhaiteraient dès lors en discuter avec leurs avocats. Ces derniers étant, selon les accusés, liés à la fois par le secret professionnel et le privilège relatif aux indicateurs de police, l’interdiction de discuter de ces renseignements entraverait leur droit à des communications « illimitées » avec leurs avocats. L’argument est intéressant, mais pas convaincant. Pour trancher la question, la Cour doit déterminer, tout d’abord, « qui se trouve dans le “cercle” du privilège relatif aux indicateurs de police523 ». D’après la juge Abella, seul l’indicateur anonyme, la police, la Couronne et les tribunaux ont « accès aux renseignements visés par le privilège de l’indicateur et sont liés par celui-ci524 ». Les avocats de la défense n’entrent pas dans le « cercle du privilège ». La divulgation des renseignements aux avocats de la défense doit donc satisfaire au critère de la « démonstration d’innocence ». En effet, le secret professionnel de l’avocat protège les communications de l’accusé avec son avocat contre la divulgation et l’obligation de production, mais ne permet pas à l’accusé de divulguer l’identité d’un indicateur de police525. « Autrement dit, bien que le secret professionnel de l’avocat constitue un bouclier presque impénétrable protégeant les communications avec les avocats, il ne saurait être utilisé

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comme une épée pour percer une brèche dans le privilège de l’indicateur526. » Quant à l’argument voulant que les renseignements puissent être « pertinents » ou « utiles », il ne peut justifier la divulgation de tels renseignements en l’absence d’une démonstration que l’innocence de l’accusé est en jeu.

125. C’est à la police, à la poursuite et aux tribunaux de veiller à l’application du privilège relatif aux indicateurs de police527. Quant à la défense, rien n’empêche l’accusé, son procureur ou un enquêteur privé de tenter de découvrir le nom d’un indicateur de police528. Même s’il ne satisfait pas aux exigences relatives à la démonstration d’innocence, l’accusé peut tenter de découvrir l’identité d’un informateur s’il a recours à des moyens légaux et que sa démarche s’inscrit dans la poursuite d’une fin légitime. Dans le cas contraire, ses actions pourront mener à des accusations pour entrave à la justice si elles sont accomplies dans le but de nuire aux procédures criminelles intentées contre lui, ou

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d’extorsion lorsqu’elles sont au cœur de menaces proférées dans le but d’obtenir le retrait des accusations. L’utilisation de moyens illicites ou la poursuite d’une fin illicite contamine la légalité des démarches entreprises et expose la personne concernée à des poursuites criminelles.

126. Comme le ministère public peut ne pas être en mesure de justifier l’autorisation judiciaire demandée en l’absence des renseignements supprimés ou non communiqués, il peut, conformément à l’étape six de l’arrêt Garofoli, « demander au juge du procès de tenir compte des éléments supprimés dans la mesure nécessaire pour justifier l’autorisation529 ». Le juge du procès ne devrait accepter que « s’il est convaincu que l’accusé est suffisamment conscient de la nature des éléments écartés pour les contester dans sa plaidoirie ou par la preuve530 ». À cette fin, le tribunal fournira à la défense un résumé judiciaire des informations caviardées. Ce résumé doit permettre à l’accusé de contester la validité du mandat tout en protégeant l’identité de l’informateur policier. « Il va sans dire que si le ministère public est en désaccord sur l’étendue de la divulgation et estime que l’intérêt public en subira un préjudice, il peut retirer la preuve recueillie par l’écoute électronique531. »

127. En terminant, soulignons que le privilège relatif aux indicateurs de police appartient au ministère public et à l’informateur. Si la poursuite ne peut divulguer l’identité de l’informateur,

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ce dernier ne peut renoncer, de son propre chef, à la protection qui lui a été accordée532.

6) La communication d’un dossier personnel se rapportant au plaignant ou à un témoin dans des affaires d’agression sexuelle (le régime de l’arrêt Mills)

128. Le régime de l’arrêt Mills détermine la communication à l’accusé d’un dossier contenant des renseignements personnels sur un plaignant ou un témoin dans les instances relatives à certaines infractions d’ordre sexuel. Ce régime, prévu aux articles 278.1 et suivants du Code criminel, vise à affirmer le droit de l’accusé à une défense pleine et entière tout en protégeant le droit à la vie privée, à l’égalité et à la sécurité du plaignant ou du témoin533.

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(1) Les documents visés par la mesure législative

129. Aux termes de l’article 278.1 du Code criminel, les restrictions imposées à la communication d’un dossier personnel se rapportant au plaignant ou à un témoin d’une infraction relative à une agression sexuelle s’appliquent à tous les documents contenant « des renseignements personnels pour lesquels il existe une attente raisonnable en matière de protection de la vie privée ». Sont couverts notamment par cette définition, le « dossier médical, psychiatrique ou thérapeutique, le dossier tenu par les services d’aide à l’enfance, les services sociaux ou les services de consultation, le dossier relatif aux antécédents professionnels et à l’adoption, le journal intime et le document contenant des renseignements personnels et protégé par une autre loi fédérale ou une loi provinciale ». Cette liste n’étant pas exhaustive, elle s’étend à tous les dossiers qui confèrent au plaignant ou à un témoin une attente raisonnable en matière de protection de la vie privée. Sont exclus de la définition, les dossiers qui sont produits « par un responsable de l’enquête ou de la poursuite relativement à l’infraction qui fait l’objet de la procédure ». Quant au rapport de police qui implique la plaignante ou un témoin dans un événement qui n’a pas de lien avec la poursuite engagée contre l’accusé, celui-ci doit faire l’objet d’une demande de communication conformément au régime de l’arrêt Mills. Pour déterminer si un document constitue un dossier au sens de l’article 278.1, le tribunal doit se demander s’il contient des informations personnelles pour lesquelles il existe une attente raisonnable en matière de protection de la vie privée. L’approche est contextuelle et tient compte de l’ensemble des circonstances parmi lesquelles figurent au premier rang la nature du document allégué. Ce n’est donc pas parce qu’un renseignement n’a pas été consigné dans le cadre « d’une relation confidentielle, thérapeutique ou fondée sur la confiance », que le plaignant ou un témoin ne peut s’attendre raisonnablement à la protection de sa vie privée. En effet, un rapport de police peut contenir des renseignements intimes et personnels sur l’état matrimonial d’une personne, sur sa condition mentale, son mode de vie, sa consommation d’alcool ou de drogues, sur ses démêlés avec la police, sur la présence d’allégations antérieures ou d’événements se rapportant à des

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agressions sexuelles, etc.534 En raison de la nature des renseignements personnels qu’ils contiennent, la plaignante peut s’attendre raisonnablement à ce que les informations se trouvant dans les rapports de police qui la concernent, mais qui n’ont pas de lien avec la cause de l’accusé demeurent généralement confidentielles. On n’a qu’à penser à la personne accusée d’agression sexuelle sur une prostituée qui souhaite obtenir la communication de rapports de police rédigés dans le cadre d’événements antérieurs auxquels était mêlée la plaignante. Comme ces rapports relèvent de l’arrêt Mills, la défense devra présenter une demande de communication en application de l’article 278.3 du Code. Contrairement aux dossiers qui n’ont pas de lien avec la poursuite engagée contre l’accusé, « le rapport de police dressé lors de l’enquête sur l’infraction qui fait l’objet de la procédure doit être communiqué suivant les règles de l’arrêt Stinchcombe535 ».

(2) Les dossiers de tiers en la possession du ministère public

130. Aux termes de l’article 278.2(2), le régime de l’arrêt Mills s’applique également aux dossiers personnels en la possession ou sous le contrôle du poursuivant, sauf si le plaignant ou le témoin visé par le document a « expressément renoncé » à la protection de la loi. Pour être valide, la renonciation doit être volontaire. Le plaignant ou le témoin doit donc être au courant des protections offertes par la loi et des conséquences de sa renonciation sur ses droits. Quant à la forme que peut emprunter la renonciation, celle-ci peut se faire verbalement au moyen des déclarations du plaignant ou autrement à travers la remise du dossier à la police ou au ministère public. En somme, « on peut conclure qu’il y a renonciation lorsque le plaignant ou le témoin, qui sait que la mesure législative protège son droit au respect du caractère privé

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des dossiers en cause, indique par ses paroles ou par sa conduite qu’il renonce à ce droit536 ». Lorsque le plaignant ou le témoin communique volontairement un dossier contenant des renseignements personnels au ministère public, il renonce à son attente raisonnable de vie privée à l’égard de l’utilisation de ce document et à la protection que lui confère la mesure législative. Si la police ou le ministère public prend possession du dossier « à l’insu ou sans le consentement » du plaignant ou du témoin, le droit à la protection de la vie privée demeure entier et la communication des renseignements doit se faire conformément aux règles de l’arrêt Mills, et non de l’arrêt Stinchcombe.

131. Comme le ministère public peut se trouver en possession de documents privés n’ayant pas fait l’objet d’une renonciation, le poursuivant doit informer la défense de la situation sans lui communiquer toutefois le contenu du dossier. Cette obligation d’information « permet à l’accusé de prendre connaissance de l’existence du dossier et de présenter une demande de communication537 ». À cette fin, le ministère public doit lui fournir des renseignements quant à la date et au contexte du document en question. Ces renseignements, précisent les juges McLachlin et Iacobucci, dans l’arrêt Mills, doivent permettre d’identifier suffisamment le document pour fournir à l’accusé un motif qui lui permet de croire que le dossier est pertinent relativement à un point en litige ou à l’habileté d’un témoin à témoigner.

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(3) La procédure à suivre

132. L’accès aux dossiers personnels d’un plaignant ou d’un témoin dans des affaires d’agression sexuelle est assujetti à deux étapes, d’origine législative. Tout d’abord, l’accusé doit demander que le document contenant des renseignements confidentiels soit communiqué au juge. À cette étape, le juge peut ordonner à la personne qui a le dossier en sa possession ou sous son contrôle de le communiquer, en tout ou en partie, au tribunal pour examen, s’il est convaincu que le dossier est « vraisemblablement pertinent » quant à un point en litige ou à l’habileté d’un témoin à témoigner et que la communication du dossier sert les intérêts de la justice. Une fois en possession du dossier, le juge devra l’examiner afin de décider s’il y a lieu de communiquer le document à l’accusé. Regardons brièvement en quoi consistent ces deux étapes.

Première étape : La communication au juge

133. Les dossiers faisant l’objet de la demande de production peuvent être communiqués au juge pour qu’il les examine lorsqu’il est convaincu que le document est « vraisemblablement pertinent quant au point en litige ou à l’habileté d’un témoin à témoigner » et que sa communication « sert les intérêts de la justice538 ». Un dossier est vraisemblablement pertinent lorsqu’il y a

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« une possibilité raisonnable que les renseignements aient une valeur logiquement probante relativement à une question en litige ou à l’habileté à témoigner d’un témoin539 ». Le par. 278.3(4) identifie un certain nombre d’« affirmations » insuffisantes « en soi » pour établir qu’un dossier est vraisemblablement pertinent relativement au point en litige ou à l’habileté d’un témoin à témoigner. Il ne s’agit pas d’une interdiction complète, mais bien d’une réitération du principe voulant que de telles affirmations ne soient pas suffisantes, à elles seules, pour établir la pertinence vraisemblable. Une simple affirmation de la part de l’accusé que le dossier pourrait se rapporter à la crédibilité de la plaignante ou à la véracité de son témoignage compte tenu du fait qu’elle suit une thérapie ou un traitement psychiatrique, ne permet donc pas de démontrer que le dossier est vraisemblablement pertinent en l’absence d’éléments de preuve précis ou de renseignements spécifiques pouvant étayer les prétentions de l’accusé et établir le seuil de pertinence requis540.

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Il en va autrement du dossier qui se rapporte à un traitement médical, lorsque la plaignante allègue que ses blessures au dos ont été causées par les nombreuses agressions sexuelles dont elle fut victime et que les résultats des radiographies indiquent plutôt une fusion des vertèbres541. La preuve doit démontrer « quelque chose

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de plus » qu’une simple affirmation listée à l’article 278.3(4)542. Bien qu’elle soit nécessaire, l’existence d’éléments de preuve ou de renseignements à l’appui d’une affirmation énumérée à l’article 278.3(4) n’est pas décisive dans tous les cas. Le juge conserve sa discrétion au moment de décider si l’accusé a démontré que le dossier est vraisemblablement pertinent quant à un point en litige ou à l’habileté d’un témoin à témoigner.

134. En ce qui concerne l’exigence supplémentaire que la communication du dossier serve « les intérêts de la justice », celle-ci oblige le juge à tenir compte de l’impact de la décision sur le droit de l’accusé à une défense pleine et entière et sur les droits à la vie privée, à l’égalité et à la sécurité du plaignant, du témoin et de toute autre personne à laquelle le dossier se rapporte. Parmi les facteurs à considérer, mentionnons : « a) la mesure dans laquelle le dossier est nécessaire pour permettre à l’accusé de présenter une défense pleine et entière; b) sa valeur probante; c) la nature et la portée de l’attente raisonnable au respect de son caractère privé; d) la question de savoir si sa communication reposerait sur une croyance ou un préjugé discriminatoire; e) le préjudice possible à la dignité ou à la vie privée de toute personne à laquelle il se rapporte; f) l’intérêt qu’a la société à ce que les infractions d’ordre sexuel soient signalées; g) l’intérêt qu’a la société à ce que les plaignants, dans les cas d’infractions d’ordre sexuel, suivent des traitements; et h) l’effet de la décision sur l’intégrité du processus judiciaire543 ». La pertinence n’est donc pas l’unique facteur à considérer à ce stade. Un dossier contenant des renseignements très personnels peut être écarté s’il porte sur une question secondaire au litige et ne prive pas l’accusé de son droit à une défense pleine et entière544.

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À l’inverse, « si le juge conclut qu’il est nécessaire d’examiner les documents en cause pour déterminer s’ils devraient être communiqués à l’accusé afin de lui permettre de présenter une défense pleine et entière, la communication au juge “sert [alors] les intérêts de la justice”545 ». Le risque de condamner un innocent étant au cœur des préoccupations de la Cour546, le juge qui n’est pas certain que la production d’un dossier vraisemblablement pertinent est nécessaire à la présentation d’une défense pleine et entière doit tout de même ordonner sa communication aux fins d’examen547. Le doute doit bénéficier à l’accusé548. Comme le juge n’est pas en possession des documents, ce dernier ne peut procéder à une évaluation exhaustive et détaillée des facteurs énumérés549. « La nature des dossiers550 » faisant l’objet de la demande et « la manière dont ils ont été constitués551 » permettent généralement de renseigner suffisamment le juge pour tenir compte des facteurs énumérés au par. 278.5(2)552.

Deuxième étape : La communication à l’accusé

135. Si après avoir examiné le dossier faisant l’objet des procédures, le juge est convaincu que les renseignements qu’il contient sont « vraisemblablement pertinents quant à un point en litige ou à l’habileté d’un témoin à témoigner et que sa production sert les intérêts de la justice », il peut ordonner sa communication

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en tout ou en partie553. Pour rendre sa décision, le juge doit tenir compte, encore une fois, des conséquences positives et négatives de sa décision sur le droit de l’accusé à une défense pleine et entière et sur « le droit à la vie privée et à l’égalité du plaignant ou du témoin, selon le cas, et à la sécurité de leur personne ». Bien qu’il doive tenir compte des facteurs mentionnés aux alinéas 278.5(2) a) à h), le juge n’est pas obligé de soupeser individuellement chaque facteur à considérer. Sa fonction est plutôt de tenir compte des facteurs prévus au par. 278.5(2) pour déterminer si la communication du dossier sert les intérêts de la justice554. Comme « il n’est pas dans l’intérêt de la justice qu’un accusé se voit refuser le droit à une défense pleine et entière », tout doute relativement à cette question devra bénéficier à l’accusé et militer en faveur de la communication du document. La communication du dossier peut être ordonnée en tout ou en partie. Sa production peut être assujettie à différentes conditions visant à protéger l’intérêt de la justice et les droits du plaignant ou du témoin à la vie privée, l’égalité et la sécurité555. À cet effet, le juge pourrait ordonner, par exemple, la production d’une version révisée du dossier556 ou d’une copie de l’original557. Il peut décider d’interdire à l’accusé et à son avocat de divulguer le contenu du dossier à un tiers558, d’examiner son contenu à l’extérieur du greffe du tribunal559, de copier le document ou simplement d’en limiter le nombre de copies qui peut en être

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faite560. Le juge pourrait également supprimer tout renseignement permettant de contacter ou de retracer des personnes dont le nom figure dans le dossier561.

Conclusion

136. Si le droit de garder le silence est l’expression « du droit général dont jouit toute personne de ce pays de faire ce qui lui plaît, de dire ce qui lui plaît ou de choisir de ne pas dire certaines choses à moins que la loi ne l’y oblige562 », l’obligation de divulgation incarne la notion d’équité et de justice ainsi que le droit à une défense pleine et entière563.

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Notes de bas de page

7. Renvoi sur la Motor Vehicle Act (Colombie-Britannique) s. 94(2), 1985 CanLII 81 (CSC), [1985] 2 R.C.S. 486, par. 23 :

« Dans le cadre d’une analyse qui vise à déterminer l’objet de la garantie accordée par l’art. 7 et les “intérêts qu’il ... vise ... à protéger” (R. c. Big M Drug Mart Ltd., précité), il me semble clair que les intérêts que les mots “il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale” de l’art. 7 visent à protéger sont la vie, la liberté et la sécurité de la personne. Les principes de justice fondamentale, d’autre part, constituent non pas un intérêt protégé, mais plutôt un modificatif du droit de ne pas se voir porter atteinte à sa vie, à sa liberté et à la sécurité de sa personne. »

8. Renvoi sur la Motor Vehicle Act (Colombie-Britannique) s. 94(2), 1985 CanLII 81 (CSC), [1985] 2 R.C.S. 486, par. 62 :

« Les articles 8 à 14 visent des atteintes spécifiques au “droit” à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne, qui contreviennent aux principes de justice fondamentale et qui, en tant que telles, violent l’art. 7. Ils constituent donc des illustrations du sens, en droit pénal ou criminel, de l’expression “principes de justice fondamentale”; ils représentent des principes reconnus, en vertu de la common law, des conventions internationales et de l’enchâssement même dans la Charte, comme des éléments essentiels d’un système d’administration de la justice fondé sur la foi en la dignité et la valeur de la personne humaine et en la primauté du droit. »

9. Renvoi sur la Motor Vehicle Act (Colombie-Britannique) s. 94(2), 1985 CanLII 81 (CSC), [1985] 2 R.C.S. 486, par. 62.

10. R. c. Jones, 1994 CanLII 85 (CSC), [1994] 2 R.C.S. 229, par. 31.

11. R. c. White, 1999 CanLII 689 (CSC), [1999] 2 R.C.S. 417, par. 44 :

« Il ressort clairement de la jurisprudence de notre Cour que le principe interdisant l’auto-incrimination est un principe prépondérant dans notre système de justice criminelle, duquel émanent un certain nombre de règles issues de la common law et de la Charte, comme la règle des confessions et le droit de garder le silence, parmi tant d’autres. Ce principe peut aussi être la source de nouvelles règles en temps opportun. Dans la Charte, le principe interdisant l’auto-incrimination se retrouve dans plusieurs protections procédurales plus précises, comme, par exemple, le droit à l’avocat selon l’al. 10b), le droit à la non-contraignabilité selon l’al. 11c) et le droit à l’immunité contre l’utilisation de la preuve selon l’art. 13. La Charte prévoit également une protection résiduelle de ce principe par son art. 7. »

12. R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405, par. 8 :

« [D]ans le cas où le détenu qui subit un interrogatoire policier sait qu’il s’adresse à une personne en situation d’autorité, les deux critères sont fonctionnellement équivalents. Il s’ensuit que, lorsqu’une déclaration a résisté à un examen approfondi du caractère volontaire, la demande fondée sur la Charte dans laquelle l’accusé allègue que cette déclaration a été obtenue en violation du droit de garder le silence avant le procès, garanti par l’art. 7, ne saurait être accueillie. À l’inverse, dans le cas où l’accusé peut démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la déclaration a été obtenue en violation de son droit constitutionnel de garder le silence, le ministère public sera incapable d’établir le caractère volontaire hors de tout doute raisonnable. Cependant, comme je vais l’expliquer, cela ne signifie pas que la protection résiduelle dont le droit de garder le silence bénéficie en vertu de l’art. 7 de la Charte ne complète pas la common law dans d’autres contextes. »

Voir également au par. 37 :

« [S]i le ministère public établit le caractère volontaire hors de tout doute raisonnable, il sera alors impossible de conclure à une violation du droit de garder le silence garanti par la Charte en ce qui concerne la même déclaration. L’inverse est également vrai. Dans le cas où un accusé peut prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il y a eu violation de son droit de garder le silence, le ministère public ne sera pas en mesure de satisfaire au critère du caractère volontaire. »

13. R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405, par. 32 :

« Bien que la règle des confessions s’applique peu importe que le suspect soit détenu ou non, la common law reconnaissait, là encore bien avant l’avènement de la Charte, que la situation du suspect est très différente après sa mise en détention. (Comme nous le verrons, la protection résiduelle accordée au droit de garder le silence par l’art. 7 de la Charte n’entre en jeu qu’après la mise en détention.) Après la mise en détention, les autorités de l’État ont la situation en main et le détenu, qui ne peut pas simplement s’esquiver, se trouve dans une position plus vulnérable. Le risque d’abus de pouvoir de la part des policiers est plus élevé. Le seul fait d’être détenu peut avoir un effet important sur le suspect et l’amener à se sentir contraint de faire une déclaration. »

14. R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 30.

15. R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 30.

16. R. c. Hebert, 1990 CanLII 118 (CSC), [1990] 2 R.C.S. 151, par. 67.

17. R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405, par. 25 :

« Par conséquent, dans le contexte de l’interrogatoire d’un détenu par une personne qui est de toute évidence en situation d’autorité, la Cour d’appel a eu raison de mettre en doute l’utilité d’un [Traduction] “critère d’admissibilité à deux volets”. En outre, du fait qu’il incombe au ministère public d’établir le caractère volontaire hors de tout doute raisonnable et que l’exclusion est automatique si ce critère n’est pas respecté, la common law offre une plus grande protection à l’accusé et il est inutile de procéder à un examen distinct fondé sur l’art. 7. »

18. R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405, par. 40.

19. R. c. Erven, 1978 CanLII 19 (CSC), [1979] 1 R.C.S. 926, par. 5.

20. R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449, par. 29 :

« La dernière phrase citée reflète l’état actuel du droit au Canada. La règle des confessions, notamment l’obligation qu’a le ministère public de prouver hors de tout doute raisonnable le caractère volontaire de la déclaration, est soigneusement calibrée pour tenir en échec le pouvoir de coercition de l’État et pour préserver le principe de la protection contre l’auto-incrimination. »

Voir également R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405, par. 21 :

« Même si, autrefois, la règle des confessions s’attachait davantage à la fiabilité des confessions qu’à la protection contre l’auto-incrimination, ce n’est plus le cas depuis l’entrée en vigueur de la Charte. La règle des confessions et le droit constitutionnel de garder le silence sont des manifestations du principe interdisant l’auto-incrimination. »

21. R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449, par. 24 :

« En d’autres mots, c’est la crainte de représailles ou l’espoir d’obtenir la clémence de personnes en situation d’autorité, sentiments associés à la qualité officielle de ces personnes, qui peuvent amener une personne à faire une déclaration involontaire. La règle ne vise généralement pas les conversations qu’ont de simples citoyens et qui pourraient être indicatives de culpabilité, puisque ces conversations ne sont pas influencées par le pouvoir coercitif de l’État. Cette restriction est appropriée puisque la plupart des enquêtes criminelles sont faites par l’État et que c’est dans cette situation qu’un accusé est le plus vulnérable à la coercition de l’État. »

22. R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449, par. 16 :

« Cette définition peut être élargie pour viser également les personnes qui sont réputées être des personnes en situation d’autorité par suite des circonstances dans lesquelles la déclaration a été faite. »

23. R. c. S.G.T., 2010 CSC 20 (CanLII), [2010] 1 R.C.S. 688, par. 22 :

« Une personne en autorité est habituellement quelqu’un qui “participe officiellement à l’arrestation, à la détention, à l’interrogatoire ou à la poursuite de l’accusé” : Hodgson, par. 32. Détail important, nul n’est automatiquement considéré comme une “personne en autorité” du seul fait de son statut. »

24. R. c. Berger, (1975) 1975 CanLII 1250 (BC CA), 27 C.C.C. (2d) 357 (C.A. C.-B.), aux pp. 385 et 386 (cité en français dans R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449, par. 33).

25. R. c. S.G.T., 2010 CSC 20 (CanLII), [2010] 1 R.C.S. 688, par. 20 :

« Les déclarations d’un accusé à des personnes ordinaires, tels des amis ou des membres de sa famille, sont présumées admissibles sans voir-dire. C’est seulement lorsque l’accusé fait une déclaration à une “personne en autorité” que le ministère public doit prouver le caractère volontaire de la déclaration pour que celle-ci soit admise en preuve. »

26. R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449, par. 34.

27. R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449, par. 34; R. c. Randall, [2020] A.J. No. 153, par. 41 (C.A. Alb.) :

« We agree with the trial judge that at the time the statements were made by Mr. Randall to Ms. Schriver and Ms. Baxter they could not have been persons in authority by virtue of having become agents of the state in that they did not meet the criteria set out in R v. MRM, 1998 CanLII 770 (CSC), [1998] 3 SCR 393, paras 28, 29 and 58, 129 CCC (3d) 361. There is no evidence that at the time of Mr. Randall’s statements to them there was any agreement between either of the sisters and Cpl. Doornbos, or any police officer, that they would formally assist the police in the detention and arrest of Mr. Randall, nor is there anything to indicate that either of the sisters were at the time of Mr. Randall’s statements to them under the direction or instructions of Cpl. Doornbos. The evidence further demonstrates that these conversations would have taken place and would not have been materially different had there been no later police involvement : R v. Broyles, 1991 CanLII 15 (CSC), [1991] 3 SCR 595, 608, 68 CCC (3d) 308. »

28. R. c. S.G.T., 2010 CSC 20 (CanLII), [2010] 1 R.C.S. 688, par. 22.

29. R. c. S.G.T., 2010 CSC 20 (CanLII), [2010] 1 R.C.S. 688, par. 23 :

« Comme la Cour l’a indiqué dans Hodgson, “[d]ans la très grande majorité des cas, l’accusé s’acquittera de ce fardeau de présentation en prouvant qu’il connaissait l’existence du lien entre la personne recevant la déclaration et la police ou les autorités chargées des poursuites” (par. 38). Par conséquent, lorsque la personne qui reçoit la déclaration est de toute évidence un représentant de l’État – un agent de police, par exemple – il suffit à l’accusé d’établir qu’il connaissait le statut de cette personne au moment de la déclaration pour s’acquitter de sa charge de présentation. Lorsqu’il ressort clairement de la preuve qu’il y a lieu de tenir un voir-dire sur l’admissibilité d’une déclaration, le juge du procès doit le faire même en l’absence de demande à cet effet, sauf, bien sûr, si la défense y renonce et consent à l’admission en preuve de la déclaration. »

30. R. c. S.G.T., 2010 CSC 20 (CanLII), [2010] 1 R.C.S. 688, par. 23 :

« Lorsque celui qui reçoit une déclaration n’est pas une personne en autorité habituelle ou que ce statut n’est pas évident, il incombe généralement à l’accusé, conformément à la charge de présentation, de soulever la question et de demander la tenue d’un voir-dire. »

31. R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449, par. 46 :

« Si la preuve établit l’existence d’un tel lien, le juge du procès doit demander si la défense est prête à s’acquitter du fardeau de présentation relativement à la question de la personne en situation d’autorité ou si elle renonce à la tenue d’un voir-dire sur cette question. En conséquence, la preuve de l’existence d’un lien étroit avec les autorités pourrait entraîner la tenue d’un voir-dire, mais l’examen effectué au cours de celui-ci visera encore principalement à déterminer si, du point de vue de l’accusé, la personne qui a reçu la déclaration était une personne en situation d’autorité, et, en dernière analyse, si la déclaration a été faite volontairement. Toutefois, plus la personne qui a reçu la déclaration s’éloigne de la définition “classique” de personne en situation d’autorité, moins il y a de chance que la preuve attire l’attention du juge du procès sur la nécessité de tenir un voir-dire, auquel cas plus grande est l’obligation de l’accusé de soulever cette question. »

32. R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449, par. 36.

33. R. c. Rothman, 1981 CanLII 23 (CSC), [1981] 1 R.C.S. 640.

34. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 79.

35. R. c. Grandinetti, 2005 CSC 5 (CanLII), [2005] 1 R.C.S. 27.

36. R. c. Grandinetti, 2005 CSC 5 (CanLII), [2005] 1 R.C.S. 27, par. 44.

37. R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405, par. 40.

38. R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449.

39. R. c. S.G.T., 2010 CSC 20 (CanLII), [2010] 1 R.C.S. 688.

40. R. c. Wells, 1998 CanLII 799 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 517.

41. R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449, par. 5.

42. R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449, par. 50.

43. R. c. S.G.T., 2010 CSC 20 (CanLII), [2010] 1 R.C.S. 688.

44. R. c. S.G.T., 2010 CSC 20 (CanLII), [2010] 1 R.C.S. 688, par. 26.

45. R. c. Wells, 1998 CanLII 799 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 517.

46. R. c. Wells, 1998 CanLII 799 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 517, par. 6.

47. R. c. Wells, 1998 CanLII 799 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 517, par. 6.

48. Sur la situation juridique de la mère de la victime qui confronte, sous les recommandations de la police, le suspect du meurtre de sa fille dans la salle d’interrogatoire, voir R. c. Calnen, [2015] N.S.J. No. 437, par. 55 et 56 :

« Sgt. Vardy said Ms. Jordan and her husband, Warren Jordan, were brought into the detachment on the morning of June 18. He recalled the officers discussing with the Jordans who would be best to “go in” and it was decided to be Donna. Sgt. Vardy said he gave her, “a brief run down... there were to be no threats or promises... I told her to be herself... I didn’t tell her sentences to say”.

On the basis of the evidence of Sgt. Vardy and Cpl. Hurley, I find Ms. Jordan was assisted and instructed by the police. Further, given her role in the interview room, she acted as an agent of the state. »

49. R. c. Kelly, [2016] B.C.J. No. 804, par. 21.

50. R. c. Glessman, 2013 ABCA 86 (CanLII), [2013] A.J. No. 204, par. 11 (C.A. Alb.); R. c. H.R., [2014] O.J. No. 4539, par. 71 :

« In my view, subsequent cases must be assessed in light of the principles reviewed by Cory J. in Hodgson. Critical to a finding that the recipient of a statement is a person in authority is knowledge on the part of the accused that that person had a close relationship to the authorities or was acting as an agent of the authorities. The statements “I will call the police if you do not tell me”, or even “I will not call the police if you tell me” are not enough.

By themselves, such statements do not imply that the recipient is acting on behalf of the police or prosecuting authorities. While it is true that the accused may believe that the recipient of a statement will not go to the police if a statement is made, the police may nevertheless find out about the alleged offence in other ways. Objectively, there is no reason to believe that the recipient of the statement is an agent of the police. »

51. En sens contraire, voir R. c. Harrison, [2007] O.J. No. 3523, par. 89 et 90 :

« There was an abundance of evidence that T.R. was a person in authority in the eyes of the appellant, that that position was objectively reasonable, and provided a solid evidentiary basis upon which the trial judge, applying Hodgson, could have found she was a person in authority. All of the telephone discussions revolved around what it would take to make sure T.R. did not go to the police – that there would not be a prosecution. There was evidence that in the appellant’s mind he believed T.R. had it in her hands to decide whether the police would ever learn of the allegations in regards to K.L. In Hodgson, Cory J. found that when the complainant and her family confronted the accused, there was nothing to suggest they had spoken to police or were even considering making a complaint. Here, there was no dispute that T.R. was considering going to the police.

Cory J. also found that a person was capable of being a person in authority if that person became “sufficiently involved in the arrest, detention or prosecution of an accused”. It is difficult to see how T.R., who was deciding whether to involve the police, could not be viewed as one “involved” in the prosecution when she would decide whether the police were told about K.L.’s allegations. Clearly, she had the power to influence the proceedings and was closely connected with the prosecution in the sense that from the appellant’s perspective she could reasonably be regarded as controlling whether there would be a prosecution. Indeed, applying the Hodgson criteria, it is difficult to see how the Crown could meet the burden of satisfying a court beyond a reasonable doubt that T.L. alone, in conjunction with the judge or viewing the judge as her agent were not persons in authority. »

52. R. c. S.G.T., 2010 CSC 20 (CanLII), [2010] 1 R.C.S. 688, par. 24.

53. R. c. Glessman, 2013 ABCA 86 (CanLII), [2013] A.J. No. 204, par. 11 (C.A. Alb.) :

« She did not find that the complainant could not be a person in authority simply because of her status as a complainant. Rather, the trial judge examined the evidence. While the appellant may have believed that the complainant had the ability to influence the proceedings against him, in the sense that she could decline to report the incident to the police and ensure that proceedings were never initiated, there was no indication that the appellant believed the complainant was connected to the police or the prosecution. In fact, he did not know at that time that the incident had even been reported, and the complainant testified that he specifically asked her not to contact the police. The appellant did not testify on the voir dire, so there was no direct evidence that he believed her to be a person in authority, and the balance of the evidence did not compel that inference. Accordingly, the trial judge did not err in concluding that the appellant failed to meet his evidential burden of establishing that he reasonably believed that the complainant was connected to the state. »

Voir cependant R. c. Downey, [1976] N.S.J. No. 467, par. 33 et 34 :

« In the present case there can be no doubt that the appellant considered Mrs. Ernst to have some control over the proceedings. This is graphically illustrated in her evidence where she says that the last thing the appellant told her after his conversation with her was “if I dropped all the charges against him, he’d come down to work for us forever.”

If the subjective test were to be applied then on the facts of this case it would appear that Mrs. Ernst was a person in authority, vis-a-vis the appellant. Even if the objective test were to be applied I am of the opinion that she should still be categorized as a person in authority on the ratio of Regina v. Wilson; Regina v. Marshall-Graham, supra. »

54. R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449, par. 34.

55. R. c. Wells, [2003] B.C.J. No. 927, par. 5. (C.A. C.-B.).

56. LSJPA – 165, [2016] J.Q. No. 5192, par. 19 et 26 (C.A.) :

« Ainsi, un directeur d’école pourra, dans une situation donnée, être qualifié de personne en situation d’autorité alors qu’un autre agissant au même titre, dans une situation différente, ne le sera pas nécessairement. Le contexte et les circonstances de chaque affaire seront déterminants.

[...]

Le directeur d’école ne peut donc être considéré, dans tous les cas et peu importent les circonstances, comme une personne en autorité au sens de l’article 146 (2) LSJPA. Il revient à l’accusé de présenter une preuve pour que celui-ci puisse être ainsi qualifié. Il y a là une certaine obligation, mais le fardeau de l’accusé n’en est pas un de persuasion mais bien de présentation. »

57. LSJPA – 165, [2016] J.Q. No. 5192 (C.A.).

58. LSJPA – 165, [2016] J.Q. No. 5192, par. 27 (C.A.).

59. LSJPA – 165, [2016] J.Q. No. 5192, par. 27 (C.A.).

60. Voir également LSJPA – 0949, [2009] J.Q. No. 13808, par. 20 et 21 (C.A.) (proximité géographique des policiers avec l’accusé et lien étroit qu’entretient la personne concernée avec les autorités policières dans le cadre de ses fonctions); R. c. Ermine, [2014] S.J. No. 171, par. 23 et 24 :

« In this case, the accused has met the evidentiary burden. She testified that despite the fact that Mr. Bradley had already found the marijuana in her purse, she still had to go to his office where he questioned her behind closed doors for over an hour. Throughout the questioning he was adamant that they were going to get to the bottom of this and that he needed to know if she was selling at school and who she got her drugs from. She tried to leave and he told her to sit down. She denied selling drugs at school more than once but he would not accept that answer. He made it clear to her that if she did not admit that she was selling and who she got her drugs from, he would call the police and she would spend the weekend in jail. He suggested it would go better for her with the police if she cooperated with him and later he made it clear to her that given the quantity of drugs she had he was going to call the police and pass that information on to them. She was scared about going to jail for the weekend and felt that her only option to get out of Mr. Bradley’s office was to tell him what he wanted to hear. This is some evidence that the accused believed Mr. Bradley was acting as an agent of the police or in concert with them sufficient to shift the burden to the Crown. I am also satisfied that her belief in this regard was reasonable. In this case, Vice-Principal Bradley had found drugs and drug paraphernalia in the accused’s purse before he ordered her to his office for questioning. He had a basis to suspend her from school and to report the contraband to the police. He kept the purse, the drugs and the drug paraphenalia. He did not have to do anything more than give the police the items he seized, provide a statement to them and let the police investigate and lay the appropriate charges. Instead, he chose to question the accused further. There was no reason for him to do this. I was not presented with any evidence that it made any difference to the school if she was in possession of drugs on school property or if she was selling drugs on school property. The only inference I can draw is that Mr. Bradley was attempting to get information to give to the police to justify a more serious trafficking charge. »

61. LSJPA – 165, [2016] J.Q. No. 5192, par. 41 et 46 (C.A.) :

« Dans les circonstances, la preuve fait voir qu’il y avait un lien suffisamment étroit entre le directeur, qui a reçu la déclaration de l’appelant, et les autorités chargées des poursuites pour en faire une question litigieuse. Par ailleurs, la croyance de l’accusé que la personne recevant sa déclaration faisait équipe avec la police et pouvait donc influer sur la suite des choses ne relevait pas du fantasme et avait un fondement raisonnable.

[...]

Ainsi, la juge erre lorsqu’elle conclut que l’intervention du directeur ne visait qu’une sanction disciplinaire au plan scolaire et non d’éventuelles poursuites contre l’appelant. À partir du moment où il ne s’agissait pas d’un simple cas de consommation sans “substance comme telle”, il y avait nécessairement un continuum entre l’intervention scolaire et la prise du relais par les policiers. Et même s’il revient au ministère public de porter des accusations, l’exercice de cette discrétion est en relation étroite avec les éléments de preuve qui ont été préalablement recueillis. Or, en raison précisément de la déclaration originelle faite par l’appelant et des éléments de preuve trouvés sur la foi de celle-ci, la preuve à charge est accablante. »

Voir également LSJPA – 1470, [2014] J.Q. No. 16917, par. 15 (C.A.) :

« Comment ne pas voir dans ces circonstances une situation qui correspond à ce que le juge Cory décrivait au paragraphe [39] de l’arrêt Hodgson, précité ? Le directeur de l’école est objectivement investi d’une autorité interne qui peut mener à une sanction disciplinaire ou se traduire, et se traduira ici dans les faits, par un signalement aux autorités policières. »

62. LSJPA – 0949, [2009] J.Q. No. 13808, par. 16 (C.A.) :

« Il faut souligner que la situation en l’espèce est particulière et que l’on ne saurait empêcher les autorités scolaires de voir à instaurer une surveillance disciplinaire dans leurs écoles. Cependant, existe au dossier un facteur déterminant, soit qu’au moment de la prise des déclarations de l’intimé, le 13 juin 2007, M. A, l’officier de sécurité, avait déjà rencontré la victime et sa mère le 11 juin, jour de l’incident, et cette dernière l’avait informé de son intention de porter plainte auprès des policiers. Cette information à elle seule plaçait M. A dans une situation où il poursuivait en quelque sorte une enquête afin de recueillir des éléments de preuve, d’autant que la procédure habituelle suivie était de remettre à l’agent de liaison du poste de police, agissant à titre d’”intervenant jeunesse”, les déclarations obtenues dans le cas où une plainte était déposée. De plus, lors de la prise de la déclaration de l’intimé par M. A, des policiers étaient présents. »

63. R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449, par. 35 et 36 :

« Au fil des ans, les tribunaux ont établi à quel moment et dans quelles circonstances une personne est réputée être une personne en situation d’autorité pour l’application de la règle des confessions. Voir, p. ex., R. c. Trenholme (1920), 1920 CanLII 461 (QC CA), 35 C.C.C. 341 (B.R. Qué.) (il a été jugé que le père du plaignant est une personne en situation d’autorité lorsqu’il a un certain pouvoir sur les poursuites contre l’accusé); R. c. Wilband, 1966 CanLII 3 (SCC), [1967] R.C.S. 14 (un psychiatre n’est pas une personne en situation d’autorité lorsqu’il n’a ni pouvoir ni influence sur le déroulement des procédures); R. c. Downey (1976), 1976 CanLII 1450 (NS SC), 32 C.C.C. (2d) 511 (C.S.N.-É., Div. app.) (la victime est une personne en situation d’autorité si l’accusé croyait raisonnablement qu’elle avait un certain pouvoir sur les procédures); A.B., précité, (le père ou la mère ne sont pas, en droit, des personnes en situation d’autorité s’il n’y a aucun lien étroit entre la décision d’appeler les autorités et l’encouragement donné à un enfant pour qu’il fasse une déclaration); R. c. Sweryda (1987), 1987 ABCA 75 (CanLII), 34 C.C.C. (3d) 325 (C.A. Alb.) (une travailleuse sociale est une personne en situation d’autorité si l’accusé savait qu’elle enquêtait sur des allégations de mauvais traitements infligés à des enfants et croyait que cela pouvait entraîner son arrestation). Ces décisions n’ont pas dérogé à la règle directrice qui définit la personne en situation d’autorité en fonction de la perception qu’a l’accusé du rôle que joue, dans l’enquête ou la poursuite du crime, la personne à laquelle il fait la déclaration; et elles n’ont pas non plus défini la personne en situation d’autorité en fonction uniquement de l’autorité personnelle que cette personne peut exercer sur l’accusé. Dans les cas où les tribunaux ont jugé que la personne qui avait reçu la déclaration était une personne en situation d’autorité, ils ont systématiquement conclu que l’accusé croyait que cette personne était un allié des autorités étatiques et pouvait influencer l’enquête ou les poursuites le visant.

Le facteur important à souligner dans toutes ces affaires est que, hormis les agents de la paix et les gardiens de prison, il n’existe aucune liste de personnes qui sont considérées d’office comme des personnes en situation d’autorité du seul fait de leur qualité. Un parent, un médecin, un enseignant ou un employeur peuvent tous être considérés comme des personnes en situation d’autorité si les circonstances le justifient, mais leur qualité, ou le simple fait qu’ils peuvent exercer une certaine autorité personnelle sur l’accusé, ne suffit pas à faire d’eux des personnes en situation d’autorité pour l’application de la règle des confessions. Comme l’a fait remarquer le procureur général du Canada intervenant, l’exigence relative à la personne en situation d’autorité a évolué d’une manière qui évite l’application d’une approche formaliste ou légaliste aux interactions entre de simples citoyens. Au contraire, elle commande un examen au cas par cas de la croyance de l’accusé au sujet de la capacité de la personne qui reçoit sa déclaration d’influencer l’enquête ou la poursuite du crime. En d’autres mots, le juge du procès doit déterminer si l’accusé croyait raisonnablement que la personne qui a reçu la déclaration agissait pour le compte de la police ou des autorités chargées des poursuites. Cette conception de l’exigence relative à la personne en situation d’autorité reste inchangée. »

64. R. c. Anderson, [2011] A.N.-B. No. 389, par. 53 :

« Même si elle avait établi qu’elle a cru subjectivement que les ambulancières étaient des représentantes de l’État, une telle croyance ne pouvait pas être raisonnablement entretenue. À mon avis, les circonstances dans lesquelles la déclaration a été faite ne permettent pas de conclure que Mme Anderson pouvait raisonnablement croire que l’une des ambulancières, ou les deux, agissaient de concert avec la police ou les poursuivants ou en étaient les représentantes. Je conclus que les questions posées à Mme Anderson par les ambulancières avaient pour but de favoriser son traitement médical. »

65. R. c. Matchim, [2011] N.J. No. 134.

66. LSJPA – 165, [2016] J.Q. No. 5192, par. 32 (C.A.) (citant la juge de première instance).

67. R. c. Carter, [2011] O.J. No. 6299, par. 7 :

« When a statement is received by a conventional state actor – such as a police officer or a prison guard – his or her status as a person in authority will usually be quite obvious. When the receiver of a statement is a private citizen, that person will not be treated as a person in authority unless there is evidence of a real or a reasonably perceived connection between that person and the prosecution. The defence will bear the evidential onus of making that person’s status a live issue. If that evidential burden is discharged, it will fall to the prosecution to prove beyond a reasonable doubt that the receiver is not a person in authority or, if this burden cannot be discharged, that the statement was made voluntarily. »

68. LSJPA – 1840, [2018] J.Q. No. 11200, par. 41 (C.A.).

69. R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 69 : « Si la déclaration est involontaire pour l’une ou l’autre de ces raisons, elle est inadmissible. »

70. Ibrahim v. The King, [1914] A.C. 599 (C.P.), à la p. 609 (cité en français dans R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 24) :

« [Traduction] C’est une règle formelle du droit criminel anglais depuis longtemps établie qu’aucune déclaration d’un accusé n’est recevable contre lui à titre de preuve, à moins que l’accusation ne prouve qu’il s’agit d’une déclaration volontaire, c’est-à-dire qui n’a pas été obtenue par crainte d’un préjudice ou dans l’espoir d’un avantage dispensés ou promis par une personne en situation d’autorité. »

71. R. c. R.W., [2013] O.J. No. 1993, par. 34 :

« The second threat/inducement is found in the statements quoted above at paragraphs 22 and 23 herein and the follow up remarks quoted above at paragraph 25 clearly represent a threat containing a quid pro quo – effectively – if you do not tell us the truth, or an explanation that we are prepared to accept as plausible, you may not see your child again. It is almost impossible to conceive of a threat to the mother of a new born that would be more powerful or more likely to utterly destroy, let alone overbear, her free will. The inculpatory admissions of Ms. R.W. follow shortly after (within 20 pages – most of which constitutes a monologue by Detective McKenzie) the utterance of the threat. I am satisfied that the threat and the inculpatory confession are causally related. »

72. R. c. Perovic, [2004] B.C.J. No. 3037, par. 55, 56 et 70 :

« Furthermore, and more significantly, the approach taken by Horton, that this was the defendant’s opportunity to provide evidence that would be considered by the jury, and that it could be used to offset the earlier component of the statement or other evidence that the accused appeared to be uncaring, was improper and offensive. In fact, the defendant was legally entitled to choose to say nothing about the offence. Horton, by his presentation, brought pressure to bear upon the defendant, suggesting that if he did not “give his side of the story, tell how concerned he was”, then the portion of the statement where he had elected to say nothing would be shown to a jury. The intimation is that, if he didn’t take this opportunity to say something, the jury would be presented with evidence of the accused apparently not caring about the deceased and simply refusing to discuss the matter. In my view, this was a form of threat; it was an improper attack upon the defendant’s right to remain silent, and it was a strategy that was likely to be effective because the defendant did not have the benefit of legal advice to appreciate the true effect of the representations that the officer had made. As Oickle makes clear, the mere presence of a threat or inducement will not necessarily vitiate the voluntariness of a statement. The analysis must consider the effect of the threat, promise or inducement. In the present matter, as I have attempted to explain above, the threat was one of a number of pressures applied to the defendant at the point in time he was repeatedly and adamantly asserting that he did not wish to discuss the matter with the police and that he wanted to speak to his lawyer first. Strikingly, after the threat in question had been made, the defendant abandoned his insistence upon silence and it was at that point that he began to cooperate with the interviewers. While the threat is not the only factor which is observed to precede his change in heart, applying a functional analysis, I am driven to conclude that it was probably an operating factor. »

73. R. c. Nugent, [1988] N.S.J. No. 186 :

« Against that background, Constable Cleary referred to the Druhan case. Constable Cleary made it crystal clear that Druhan was convicted of manslaughter and escaped life imprisonment because he had cooperated with the police and had given a statement. The inference was clear that if Nugent confessed the police might be able to assist him in a similar way. Shortly after that Nugent gave an oral statement admitting the killing. In my view, that statement was induced by hope of advantage held out by the police and was clearly inadmissible under the tests in Rothman. With respect the learned trial judge erred in failing to hold that these were inducements. »

74. R. c. Bourassa, [2013] J.Q. No. 24584, par. 27 :

« Informé de son droit de communiquer avec un avocat, il répond qu’il n’en connaît pas. Selon lui, l’enquêteur lui a rétorqué “de toute façon, t’sais si tu vas parler tout de suite, tu vas avoir une sentence moins élevée de qu’est-ce qui était supposé. Après ça, tu pourras en chercher un si tu veux”. »

Voir également R. c. Lazure, [1959] O.J. No. 475, par. 2 (C.A. Ont.) :

« John had made a statement and Gerry Brown (one of the police officers) said, “I’m not going to call John a liar, in fact I don’t think he is a liar, and I think if you would sign a statement the magistrate might see fit to levy a fine or a suspended sentence”. »

75. R. c. Sachs, [2008] O.J. No. 1953, par. 37 :

« I am also satisfied that these three gentlemen were of the understanding from one or both COs, prior to their statements being given, that if they cooperated with the officers neither Andrew Sachs nor Darren Hachey would be charged. This too amounts to a quid pro quo promise. »

Voir également R. c. Kalashnikoff, [1981] B.C.J. No. 276 (C.A. C.-B.);

R. c. Assing, [2008] O.J. No. 3356, par. 33 et 34 :

« On the whole, notwithstanding the police having ignored Mr. Assing’s assertion that he did not want to speak with them, the different stratagem and techniques taken individually were not improper, with one exception in my view. I have grave concerns as to the effect of Detective Wilson having stated to Mr. Assing that she and her partner could make recommendations to the court if he offered a display of remorse. Clearly, the display of remorse that the officers were seeking from Mr. Assing was a confession. A reasonable inference that could be taken from such an assertion was that they could make recommendations that would affect how he would be dealt with by the court if he displayed remorse by confessing.

Unfortunately, in my view, the imputation of such remarks amounts to more than the “empty formalism” commented on in Oickle at para. 80 to the effect that things would be better if he simply confessed. In this instance there is an insinuation of a quid pro quo. If you confess we will help you out at sentencing. I note that in the circumstances of this case, up until that point in the interrogation, Mr. Assing had asserted unequivocally his right not to say anything and thereafter he ceased to do so. Detective Wilson continued to invoke the image of a disapproving or disbelieving Court and Judge. The invocation of an intimidating specter of the reaction of the court to whether the subject co-operated with the police by providing an admission or not should not have played any role as a stratagem used by the officers to encourage the subject to speak against his expressed desire not to do so. In this instance, the line was crossed. »

76. R. c. Ryle, [2012] M.J. No. 14, par. 26 et 27 :

« It is true that at the beginning of Coaster’s interview, MacInnis indicated to Coaster that the Crown Attorney would be deciding whether to charge him with murder and manslaughter. He further referred to the difference between the two and Novakoski urged Coaster on several occasions to help himself out by putting forward his version of events. I recognize that an inducement to elicit a confession may be express or implicit. But the police never expressly or impliedly held out that they would take steps to procure a reduced charge if Coaster confessed – only that his statement would be considered by the Crown Attorney. Coaster was repeatedly told that the determination of charges was a matter for the Crown Attorney and the police did not indicate that they could or would control what charges would be laid. Nor do I take their words as promising or holding out that a confession would lead to a lesser charge. They never offered to do anything in return for a confession. Coaster acknowledged in cross-examination that the police never indicated that they would recommend a lesser charge if he spoke. So I do not believe that the interrogating officers made any quid pro quo offers to Coaster.

Even if the police efforts to convince Coaster to speak was an inducement, not every inducement by a police interviewer is necessarily fatal to a finding of voluntariness. If there was an inducement, it was subtle and insufficient to raise a reasonable doubt about whether the will of the accused was overborne. »

77. Hester c. R., [2019] Q.J. No. 3909, par. 28 (C.A.) :

« Officer Prieur did explain to the appellant that there were different possible levels of responsibility when a victim dies. There is nothing fundamentally reprehensible in providing such an explanation during a police interview insofar as it does not constitute, in the circumstances of the interview, an implicit promise of leniency if the accused confesses. Each case must be decided on the basis of its own facts and circumstances. In this case, the trial judge implicitly found that the police officer’s explanation did not constitute an improper inducement to the appellant. There is nothing in the evidence which would lead to the conclusion that the trial judge committed an overriding and palpable error in so finding. »

78. Hester c. R., [2019] Q.J. No. 3909, par. 33 (C.A.) :

« As for the reference to the evidence as a whole, officer Prieur clearly stated to the appellant that he was not in a position to provide promises. He simply explained the process for determining the charge that could be laid. In so doing, he also explained that the appellant’s statement would be taken into account in the prosecutor’s decision with respect to the nature of the charge. He thus emphasized the importance of telling the truth so as to put forward the appellant’s explanation of the events at the earliest possible stage of the proceedings. »

79. R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 49.

80. R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 78.

81. R. c. Godon, [2010] J.Q. No. 944, par. 14 :

« Cette manifestation d’empathie constitue une forme d’encouragement pour l’amener à faire une déclaration. Le policier ne lui a toutefois rien offert en retour. Il n’y a pas eu de contrepartie qui aurait pu soulever un doute raisonnable quant à la question de savoir si on a subjugué la volonté du suspect : voir Oickle, précité, paragr. 56. Par exemple, on ne lui a pas dit qu’il recevrait de l’aide thérapeutique s’il passait aux aveux. »

82. R. c. Brazeau, [2006] J.Q. No. 14718, par. 90 :

« Que l’on ait mentionné à l’accusé que des professionnels de la santé pouvaient venir en aide à des gens comme lui ne constitue pas en l’espèce une promesse en ce sens qu’il n’y avait aucun engagement relié à ces propos. L’idée de contrepartie est ici complètement absente. »

83. R. c. Biggar, [2005] S.J. No. 758, par. 19, 32 et 33 :

« At various stages of the interviewing officer states “because I am here to help” (page 26);” You had mentioned earlier that you were wanting to go over to the psych ward. What’s that all about ... you think you are going to go there and get some help ... I wanna offer you help too. I want to help you out ... you need some help and I want to offer you some help too and, and, that help can be taking responsibility an then getting the help you need so that it doesn’t happen again (page 48);” “and yeah, you’re going to need help for that, to work through all that. But I want to help you so that doesn’t happen again. You know. ...” (page 51). “And there’s lots of people to help ... and get you the help that you need okay ? (Page 52). if there is anything I can do to help you with that, I will do that, okay” (in answer to Crystal’s comments “Only that I am scared of what my parents are gonna think”). On Page 58, in response to Crystal’s request “could you just put me on the third floor”, the officer replies “and that may be an option here we’ll be looking at, okay”. “I will put in a word for you, too” (page 61). Crystal repeats on several occasions that she wants to go to the psych ward (page 61, 63, 64, 67, 72).

In this case, it was the accused who first raised the issue of psychiatric help and, while Constable Rice did convey his desire to help her, he did not make the offer “conditional upon receiving a confession.” Rather, Constable Rice displayed a genuine concern for the accused’s well-being and wanted nothing more than to see that she received any medical treatment that she required.

Therefore, even if Constable Rice’s offer was on inducement to the accused “it was not a factor in the suspect’s decision to confess.” »

84. R. c. Klaric, [2017] O.J. No. 3209, par. 41 :

« The argument that Sgt. Ashbaugh made a specific promise of personally getting some psychiatric help for the accused which somehow was an inducement sufficient to raise reasonable doubt about the voluntariness of the statement is without merit and I reject it. It is clear in my view that Sgt. Ashbaugh was not holding out a personal promise of medical help in exchange for a confession. There is nothing in the interview to indicate that the accused thought such a quid pro quo was being offered. It is clear to the court that the officer was simply advising the accused that there was help for him in the future within the correctional system and such help had nothing to do with the interview. There is absolutely nothing in the interview after this exchange to suggest the accused’s mind was overborne by these comments of the officer or that this was some sort of inducement or promise in exchange for a confession. »

85. R. c. R.A.O., [2011] A.N.-B. No. 74, par. 50 :

« Il est exact que les enquêteurs lui mentionnent à plusieurs reprises de vider son cœur car c’est une étape importante de la thérapie. Il lui a aussi dit si dans le futur il avait besoin de l’aide avec sa situation qu’il serait prêt de l’aider dans ce sens. Cette manifestation d’empathie constitue une forme d’encouragement pour l’amener à faire une déclaration. Les policiers ne lui ont toutefois rien offert en retour. Il n’y a pas eu de contrepartie qui aurait pu soulever un doute raisonnable quant à la question de savoir si on a subjugué la volonté du suspect : voir Oickle, précité, paragraphe 56. »

86. R. c. Ewert, 1992 CanLII 35 (CSC), [1992] 3 R.C.S. 161, infirmant R. c. Ewert, [1991] B.C.J. 3394 (C.A. C.-B.).

87. R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 50.

88. Regina c. Jackson, 1977 CanLII 287 (BC CA), [1977] B.C.J. No. 1117, par. 11 (C.A. C.-B.) :

« [Traduction] [Chaque affaire] doit être examinée à la lumière des faits qui lui sont propres. À mon avis, pour qu’un avantage promis à une personne autre que l’accusé vicie une confession, l’avantage doit être d’une nature telle que, envisagé à la lumière du lien qui existe entre cette personne et l’accusé, et de toutes les circonstances de la confession, il tendrait à amener l’accusé à faire une fausse déclaration, car c’est le danger qu’une personne puisse être incitée, par des promesses, à faire une telle déclaration qui est à l’origine de la règle de l’exclusion. » [Cité en français dans R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 51]

Dans cette affaire, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique, sous la plume du juge McIntyre, refuse de reconnaître un tel lien entre l’accusé et son complice. Voir sur ce point les commentaires du juge McIntyre au par. 14 :

« Furthermore, in my opinion, it would not be realistic to consider that the relationship between the appellant and Winn, in so far as it can be determined from the evidence, was such that the case even approaches the mother and daughter illustration given by Lorti Reid in the Harz case, supra. These men met in prison about a year before the trial. They commenced a new criminal association on their release from prison. This offence occurred only a few days after the appellant’s release. Neither Winn, who gave evidence both before and on the voir dire, nor the appellant, who did not testify at all, gave evidence which would justify any inference, nor does one emerge from the evidence of other witnesses before or on the voir dire, or for that matter after it, that the immunity of one was of such vital concern to the other that he would untruthfully confess to preserve it. This was no mother and daughter case. »

89. R. c. Spencer, 2007 CSC 11 (CanLII), [2007] 1 R.C.S. 500, par. 15.

90. R. c. Umenwoke, 2013 ONSC 1554 (CanLII), [2013] O.J. No. 1188, par. 20 :

« Clearly the information from Det. Entwistle about his girlfriend was the trigger; there is no dispute that before the girlfriend was mentioned that Mr. Umenwoke repeatedly denied any involvement in the offence and that immediately after he was told of her arrest that he said he would cooperate and he began to talk. Furthermore Det. Entwistle did not respond to his statement that clearly suggested that he believed he could keep her out of jail by cooperating. »

91. Voir également l’exemple proposé dans Commissioners of Customs and Excise c. Harz, [1967] 1 A.C. 760 (H.L.), à la p. 821 (« le fait de dire à une mère que sa fille ne serait pas accusée de vol à l’étalage si la mère avouait avoir commis une infraction similaire »).

92. R. c. Brown, [2016] O.J. No. 1534, par. 47.

93. R. c. Spencer, 2007 CSC 11 (CanLII), [2007] 1 R.C.S. 500.

94. R. c. Heatley, [2015] B.C.J. No. 1675, par. 56 (C.A. C.-B.) :

« Accepting the trial judge’s finding of fact, I conclude that as in Spencer, the police interviews in this case did not cross the line between proper investigative techniques and improper inducement; that no threat or promise was held out as a quid pro quo for his statements; and that although the police used Mr. Heatley’s relationship with his girlfriend in applying moral suasion, the exploitation was not of such a nature that his will was overborne. The evidence supports the conclusion that like the respondent in Spencer, Mr. Heatley decided voluntarily to “clean his slate”. »

Voir également R. c. Bishop, [2013] B.C.J. No. 3040, par. 37 :

« In my view, the only incriminating statements made by Mr. Bishop were induced by his own feelings of guilt for what had happened to his family members. The statements were not induced by anything said or done by Constable Louie that was improper. While Constable Louie played on Mr. Bishop’s nature as a man who holds family values in high esteem, as well as Mr. Bishop’s close relationship with his mother and brother, the Constable did not promise any kind of benefit would be forthcoming if there was a confession, nor did he make veiled threats that things would get worse for them if he did not confess. »

95. R. c. Boukhalfa, [2013] O.J. No. 849.

96. R. c. Foerster, 2014 BCSC 544, par. 81 et 83 :

« I find that there is no merit in Mr. Foerster’s argument that by satisfying Mr. Foerster’s desire to speak to Mr. Hangartner [his half-brother], the police manufactured in Mr. Foerster an obligation to make inculpatory statements. I have come to that conclusion because throughout the interview, the police were careful to say to Mr. Foerster that if he took responsibility for his actions both he and his family would feel better and that he should take the opportunity afforded to him in the interview to make that happen. Never did anyone suggest to Mr. Foerster that if he confessed, he would then be allowed to see Mr. Hangartner or any other member of his family...

The inducements that the police did put to Mr. Foerster to make a confession were to his conscience, his moral compass, and to his sense of responsibility to the emotional well-being of his family. The police had no control over the impact that a confession would have on Mr. Foerster’s conscience or his family. Mr. Foerster must be taken to have understood that to be the case. It follows that Mr. Foerster could not have understood that the appeals by the police to his conscience were actually offers to make a bargain. Mr. Foerster must be taken to have understood that the police were doing nothing more than guessing that he and his family would feel better if he confessed. There is nothing improper in the police making an appeal such as this. »

Voir également R. c. Calnen, [2015] N.S.J. No. 437, par. 59.

97. R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 79.

98. R. c. Griffin, [2013] N.W.T.J. No. 61, par. 38 :

« There is no question that as part of her interrogation technique, Constable Foley used Mr. Griffin’s affection for Ms. C to try to get him to admit that he had done these things to her, the things that C. said he had done. But she did so largely by appealing to his conscience, by focusing on the importance of protecting her and on his affection for her. She talked about accountability, she talked about honesty. She emphasized that a fair bit. And as she started to get more and more admissions from Mr. Griffin, understandably she began to question him and to probe further, continuing to appeal to his honesty and underscoring accountability. »

99. R. c. Ciliberto, [2005] B.C.J. No. 3013.

100. R. c. Lavallée, [2018] A.J. No. 1183 (C.A. Alb.).

101. R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 53-55. Voir également R. c. Ryle, [2010] M.J. No. 192; Hester c. R., [2019] Q.J. No. 3909, par. 33 (C.A.) :

« The suggestion by a police officer that it would be better to tell the truth will warrant excluding a statement “only where the circumstances reveal an implicit threat or promise”. Though words such as “better tell the truth” are best avoided, in the overall circumstances of this case the defence has failed to establish that officer Prieur’s comments constituted an implied threat or promise. Nor has the defence established that these words actually affected the voluntariness or reliability of the appellant’s statements. In any event, the words of the police officer were uttered towards the latter part of the interview and could not have affected the thrust of the appellant’s main statements, which had, for the most part, been made earlier in the interview. »

102. R. c. Williamson, 2011 ONSC 6584 (CanLII), [2011] O.J. No. 5161, par. 108-111 :

« Detective Cahill’s use of these words was in the context of it would be better for Mr. Williamson if the police had Mr. Williamson’s perspective, and it would be better if he came clean than for the police, upon further investigation, to confirm the complainant’s version of events.

I find that the use of these words in the circumstances of this interview do not raise a reasonable doubt as to the voluntariness of Mr. Williamson’s statement. I find him to be an articulate, intelligent person who is thoughtful and well able to reason in the situation of the police interview. He was very careful to admit to certain details namely : that he performed fellatio on the complainant, that he put his penis between the complainant’s thighs and then the complainant moved up and down. [...] I find Mr. Williamson was in control of the interview and that he determined when and in what words his admissions would be revealed. His admissions and denials are precise and matter of fact, without emotion. The questioning was not intense or prolonged and it was not preceded by authority imposed hardship such as extended incarceration, sleep deprivation or deprivation of necessities. I find that motivation for Mr. Williamson’s admissions comes in large part from the burden of shame he has borne over the past 30 years as a result of these activities. He makes such a statement on four occasions within the interview. To the extent Mr. Williamson could have understood the detective to mean he will feel better morally or spiritually if he confesses, such questioning tactic is expressly permitted in Oickle.

The Court concludes its examination of this factor by pointing out police efforts to convince the suspect that it is in his or her best interests to confess are only improper when the inducements, whether standing alone or in combination with other factors, are strong enough to raise a reasonable doubt about whether the will of the subject has been overborne. I specifically find the will of Mr. Williamson was at no time overborne by the questioning of Detective Cahill. »

103. R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 55.

104. R. c. Othman, [2018] O.J. No. 6751, par. 17 (C.A. Ont.) :

« In our view, the interviewing officer’s comments, as set out above, constituted both a threat and an inducement as they suggested negative legal consequences if the appellant failed to speak and positive consequences if he spoke. »

105. R. c. Wabason, 2018 ONCA 187 (CanLII), [2018] O.J. No. 1012, par. 21 (C.A. Ont.) :

« In light of the application judge’s errors, it falls to this court to assess whether the appellant’s statement was voluntarily made despite the inducements and threats. I am not persuaded beyond a reasonable doubt that the statement was voluntarily made, taking into account the appellant’s age, his personal circumstances, his futile assertions of the right to silence, his requests to return to his cell, and the impact upon him of the officer’s repeated statements that, unless the appellant spoke up, he was going to take the fall for a first degree murder he had not committed. »

106. R. c. Sundman, [2018] B.C.J. No. 3674, par. 52-54 :

« In fact, that is not the way I construe the circumstances. The reality is this : Mr. Martin initially took the position that he was not involved in the murder and accordingly he was being charged with an offence for which he was not responsible. In the face of that, the officer indicated to Mr. Martin that, if that were the case, that is, if Mr. Martin was truly not responsible for the murder, that would be important to the police in the course of their investigation and would presumably entitle Mr. Martin to be exonerated from blame.

It was on this basis that Mr. Martin continued to offer further details. It seems to me that, where an interview subject elects to provide information to the interviewer denying any responsibility, it is not unreasonable to expect that the interviewer could represent to the interviewee that, if what he says is so, that would impact the proceedings going forward. In my respectful view, that is a natural consequence of the tack that the interview subject, in this case Mr. Martin, elects to follow. »

Voir également Tshitenge Masuku c. R., [2017] J.Q. No. 14622, par. 60 et 61 (C.A.) :

« L’appelant tente de repousser sa déclaration après sa comparution. À ce moment, le détective lui indique qu’il s’agit de sa seule chance de faire une déclaration qui ne serait pas teintée par la divulgation de la preuve et qu’il ne serait alors plus sous le contrôle de la police, mais bien du poursuivant. Il s’agissait d’une tactique visant à exercer une certaine pression sur l’appelant. Malgré tout, le juge détermine que l’accusé fait sa déclaration librement et volontairement. L’accusé avait eu ses droits. Il se livre lui-même pour libérer sa conscience. Le détective répète à plusieurs reprises à l’accusé que c’est son choix de faire une déclaration ou non et qu’il a les “mains sur le volant”. »

107. R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 79 :

« Les policiers ont laissé entendre à l’intimé qu’il se sentirait mieux après avoir confessé ses crimes, que sa fiancée et les membres de la collectivité le respecteraient pour avoir admis qu’il avait un problème (par. 120) et qu’il pourrait plus facilement résoudre son problème évident de pyromanie s’il faisait une confession (par. 122). Cependant, compte tenu du contexte dans lequel elles ont été faites, aucune de ces déclarations ne comportait de menace ou promesse implicite. Il s’agissait plutôt de simples encouragements moraux suggérant à l’intimé qu’il se sentirait mieux s’il confessait ses crimes et commençait à résoudre ses problèmes. De fait, après la confession, le caporal Deveau a demandé à l’intimé [Traduction] “[a]lors, comment te sens-tu maintenant, Richard ?” Ce dernier a répondu “[m]ieux”. »

108. R. c. Gaudette, [2002] J.Q. No. 1526 .

109. R. c. Gaudette, [2002] J.Q. No. 1526.

110. Voir sur ce point R. c. Morris, [2016] O.J. No. 4759, par. 13 :

« The accused points to remarks made to him by Cst. Fairburn in his interview, that the accused should “save himself” by speaking to police. [...] Such language in the interview is nothing more than a “moral inducement”, and suggests no “quid pro quo” that could vitiate the statement. »

Voir également R. c. W.B., [2013] S.J. No. 7, par. 32 et 33 :

« Cpl. Hovdestad repeatedly encouraged W.B. to deal with events from his past so that he could move forward. He reminded W.B. that he was a young man growing up and that opening “the closet” and dealing with what was in there was “part of being a man”. He suggested he was giving W.B. an opportunity to do these things.

In accordance with Oickle, I am satisfied that Cpl. Hovdestad’s comments of this nature are in the nature of moral or spiritual inducements. These are not inducements which will generally render a confession involuntary because they, in fact, do not offer the accused anything; there is no quid pro quo. They are an appeal to conscience, or to character, and may provide a motive to give a statement or make a confession but will not render it involuntary. »

111. Hester c. R., [2019] Q.J. No. 3909, par. 31 (C.A.) :

« Though officer Prieur did appeal to the appellant’s moral values and to forgiveness, such appeals are not impermissible during a police interview nor, in the circumstances of this case, do they constitute oppression or trickery. As again noted by Justice Iacobucci in Oickle, “confessions which result from spiritual exhortations or appeals to conscience and morality, are admissible in evidence, whether urged by a person in authority or by someone else.” The mere suggestion that a confession would make the appellant feel better and that members of the community would be more likely to forgive him if he did so are not problematic if they contain no implied threat or promise. »

112. R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 74 (citant le juge de la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse).

113. R. c. Godon, [2010] J.Q. No. 944, par. 16 :

« À plusieurs reprises, l’enquêteur lui mentionne que ce n’est pas le crime du siècle, pas le geste de la fin du monde, qu’il n’est pas un tueur, pas un gros criminel. L’enquêteur utilise la technique de minimisation de la gravité du crime pour obtenir une confession. »

114. Conformément aux enseignements de la technique Reid, l’étape du développement du thème consiste à « offrir des excuses morales au suspect dans le but de minimiser la culpabilité du suspect ».

115. R. c. Charteris, [2010] O.J. No. 4014, par. 52 et 54 :

« As I read the transcript and, again, having reviewed the videotape of the interview, the overall tenor of the officer’s approach was to suggest that the accused was not a bad or dangerous person, but that he had developed a relationship with the Complainant that went too far. Essentially that he is a good person who made a mistake. [...]

In my view, Detective Stephenson did no more than downplay the moral culpability of the offence. Clearly Mr. Charteris understood that he was charged with a serious criminal offence. His concern about jail time supports the conclusion that Mr. Charteris knew there may be serious consequences, including jail time, if he was convicted of the offence. »

Il en va également de l’enquêteur qui explique à la personne soupçonnée du meurtre de sa femme qu’il a fait une erreur, qu’il a agi par impulsion, sans réflexion ni préméditation : R. c. Gaudette, [2002] J.Q. No. 1526, par. 147 :

« Beaulieu décide alors de passer en revue ce qui s’est passé et un long monologue s’engage où pendant plus de deux heures il indique à l’accusé :

– il lui présente que l’incident est comme un accident, ce n’est qu’une grosse erreur comme pour le cas où un parent tue un enfant en le brassant parce qu’il pleure trop. Il lui parle des crimes commis par impulsion avec exemples à l’appui par opposition à ceux commis intentionnellement (pp. 23-25-26-38-40);

– il lui représente qu’il veut savoir ce qui s’est passé et d’ailleurs il dira : “Ça une mauvaise réaction là, ça s’explique et ça se comprend” (p. 23) et il lui fera valoir qu’il devra vivre avec ce qui est arrivé toute sa vie (pp. 24-25-32-33);

– il lui fera valoir qu’il a dans le passé toujours été un bon citoyen selon les personnes rencontrées au cours de l’enquête et que dans son cas à lui, il s’agit d’une impulsion du moment, une mauvaise réaction et une erreur de jugement (pp. 25-27-28-31-37). »

116. R. c. Daneau, [2013] J.Q. No. 15792, par. 50.

117. R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 77.

118. R. c. Goulet, [2018] J.Q. No. 6864, par. 16 :

« Par ailleurs, l’absence de mise en garde de la part des policiers est également un facteur pertinent. Les policiers sont généralement bien avisés de faire une mise en garde avant de recueillir une déclaration dans le cadre d’une enquête criminelle. Cependant, la véritable question est de savoir si le libre arbitre de Mme Goulet a été enfreint par la conduite des enquêteurs (R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 RCS 405, par. 32-36). »

R. c. Tessier, [2020] A.J. No. 826, par. 44 (C.A. Alb.) :

« The nature of police questioning and the interviewee’s status as a suspect might change throughout the interaction, potentially triggering the need for a mid-stream caution. As always, no one factor is determinative. The advice given in Singh and other cases about when police should administer a caution is just that – advice. Whether police suspect an interviewee of having committed a crime, or ask her pointed questions, is not determinative of the voluntariness of the individual’s statement. »

R. c. Pearson, [2017] O.J. No. 2530, par. 19 (C.A. Ont.) :

« Secondly, whether or not the appellant was a suspect, the applicable appellate authority makes clear that, although the absence of a caution is a factor to be considered on the voluntariness inquiry, it is not determinative : R. v. Singh, 2007 SCC 48, [2007] 3 S.C.R. 405, at para. 31. This proposition applies regardless of whether the police do or ought to regard the person being questioned as a suspect. »

R. c. E.B., 2011 ONCA 194 (CanLII), [2011] O.J. No. 1042, par. 88 (C.A. Ont.) :

« We do not think much turns, in these circumstances, on whether N.K. was a “suspect” or someone more benignly viewed by the police. Even where a person is a suspect, the absence of the standard caution is only one factor to be considered in the voluntariness analysis – just as the presence of such a caution does not automatically lead to the conclusion that a statement is voluntary. As the trial judge noted, “[h]ard and fast rules are incapable of accounting for the myriad circumstances that may vitiate voluntariness,” and all the circumstances must be scrutinized carefully : see R. v. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 S.C.R. 3, at paras. 47 and 71. »

119. R. c. Goulet, [2018] J.Q. No. 6864, par. 14 :

« Il reste que la véritable question qui doit être décidée par le Tribunal est de déterminer si la déclaration de Mme Goulet était volontaire, compte tenu de l’ensemble des circonstances. La question de savoir si Mme Goulet était témoin ou suspecte (ou peut-être les deux à la fois) n’est qu’un élément parmi d’autres devant être considérés. »

120. R. c. Goulet, [2018] J.Q. No. 6864, par. 15 :

« Selon la preuve sur voir-dire, laquelle fut non contredite, il ne fait aucun doute que Mme Goulet comprend parfaitement sa situation et qu’elle choisit librement de parler lorsque les enquêteurs sollicitent sa déclaration. Elle sait qu’elle parle à des policiers qui participent à une enquête criminelle sur une affaire de fraude à laquelle elle est liée. Même en considérant, pour fins de discussions, qu’elle est alors suspecte, sa volonté n’est aucunement niée, viciée ou subjuguée par les enquêteurs. Mme Goulet accepte librement d’accompagner les enquêteurs et de répondre à leurs questions. Il est manifeste qu’elle collabore volontiers. Selon la preuve, Mme Goulet n’est d’aucune façon victime d’une ruse policière abusive qui a pu affecter sa volonté ou qui a porté atteinte à l’intégrité du système de justice (voir : R. c. Branconnier, 2017 QCCA 116). »

121. R. c. Tessier, [2020] A.J. No. 826, par. 59 et 60 (C.A. Alb.) :

« Several Canadian decisions have held that police statements made before an accused was detained and without a police caution were nevertheless voluntary : R v. Pepping, 2016 ONCA 809 at paras 4-6; R v. Boothe, 2016 ONCA 987 at paras 18-21; R v. Blackmore, 2017 BCSC 2682 at paras 106-107. In those cases, the courts found the statements voluntary despite the absence of a caution because the defendants knew they did not have to answer police questions and that their statements might be used to prosecute them for an offence. In other words, the defendants already knew the bulk of the information conveyed by a normal police caution.

In light of the reviewable errors noted above, a new trial is required to consider whether, in the absence of a caution, Mr. Tessier made a meaningful choice to speak to the police, as that concept is properly understood. As indicated, it is always a case-specific, contextual analysis. »

122. R. c. Hoilett, 1999 CanLII 3740 (ON CA), [1999] O.J. No. 2358, par. 24 et 25 (C.A. Ont.) :

« Oppressive conduct by the police, in and of itself, will not in every case render a statement of an accused inadmissible as involuntary. There may be circumstances where an accused person has the self-confidence to withstand the more subtle intimidation that is communicated by the police through an atmosphere of oppression. Or an accused may have his or her own reasons for believing that it is in their interests to speak to the police so that oppressive police conduct may not have the effect of making a statement involuntary.

However, as the trial judge clearly recognized, many individuals, and I would suggest virtually everyone, would have their state of mind and their will to say no to the police significantly influenced by the spectre of receiving inhumane treatment at their hands for failure to co-operate, a spectre created not by direct threat but by an atmosphere of oppression. »

123. R. c. Tétreault, [2017] J.Q. No. 19897, par. 119 et 121 :

« L’entrevue avec l’accusé, bien que ponctuée de pauses, s’étend sur plus de 12 heures. On continue à l’interroger la nuit malgré l’absence d’urgence. Il dit déjà manquer de sommeil en raison de son travail. L’aveu a été soutiré alors que l’accusé était dans un état d’épuisement physique et psychologique.

[...]

Tous ces éléments pris isolément n’étaient pas de nature à créer un climat d’oppression. Toutefois, l’ensemble des circonstances convainc le Tribunal que la déclaration a été faite avec une technique d’enquête qui a été de nature à créer un climat oppressif de nature à vicier la confession. Le ministère public ne s’est pas déchargé de son fardeau de prouver, hors de tout doute raisonnable, le caractère libre et volontaire de la déclaration de l’accusé. »

124. Hester c. R., [2019] Q.J. No. 3909, par. 21 et 22 (C.A.) :

« Nevertheless, the appellant submits that the trial judge erred by not concluding that the conditions of his detention rendered the interview oppressive. The appellant argues that placing him in a cell which did not have a proper bed (only a mattress) and then in a second cell with a bed, but without a blanket, amounted to oppression. The appellant further argues that the duration of the interview also contributed to this oppression.

The conditions of incarceration were not ideal, but they were far from oppressive. The police officers responded to all of the appellant’s requests. He was provided with a blanket and t-shirt and with food and coffee. Perhaps the officers should have provided the blanket earlier, but the evidence does not show that the appellant had requested a blanket sooner nor that it had been withheld in order to oppress him. Though both detention cells were cool, there was no evidence that they were unacceptably cold. The evidence indicated, rather, that it was at the request of detainees, after complaints about the summer heat, that the cells were kept cool. Overall, the evidence does not support the conclusion that the trial judge erred in finding that the conditions of detention were not oppressive and that they did not affect the voluntariness of the statements. »

125. R. c. Chapple, 2012 ABPC 229 (CanLII), [2012] A.J. No. 881, par. 130 :

« I find the interrogation was aggressive, prolonged and psychologically manipulative. It created an atmosphere of oppression that overcame the accused’s free will. On that basis, I am not satisfied beyond a reasonable doubt that the confession of May 5, 2011, was voluntary. »

126. R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 2 : « Leurs questions, bien que persistantes et souvent accusatrices, n’étaient jamais hostiles, agressives ou intimidantes. »

Voir également Tshitenge Masuku c. R., [2017] J.Q. No. 14622, par. 41 (C.A.).

127. R. c. States, [2012] N.S.J. No. 594, par. 55, 57-59 :

« When I consider the circumstances and everything which had taken place, Mr. States’ options were clear. He could either maintain his innocence and stay in custody, or confess to something and be released. He had been subjected to hours of monologues that set out the dichotomy I referred to earlier. The accused was repeatedly told that the police knew he killed Antonio. What they wanted to find out was whether he was a good person who did a bad thing or whether he was a “madman” or “Charles Manson”.

On approximately 30 occasions Mr. States indicated to the officers that he did not wish to speak to them.

Mr. States is an unsophisticated 26 year old. He described himself as slow, and this self-description is consistent with his presentation during the hours of interviews that were conducted. At times he did not comprehend what the officers were saying to him; his ability to communicate was not what one might expect from someone his age – for example : “I like to be nice”; “I used to be bad”; “I don’t understand big words and stuff like that”; not understanding what “thorough investigation” meant; “The questions that you guys asked me, I told you. I can’t process them that quick.” (Tab 2 p. 174) “I pood myself” – (Tab 5 p. 63)

I find that an atmosphere of oppression existed. Waiting three hours for a pair of pants, having to wait after requesting bathroom breaks, the lengthy detention which exceeded the maximum time allowable under the Criminal Code, and being subjected to long interviews that compelled Mr. States to listen to the officers for a prolonged period of time, created an atmosphere of oppression. »

Voir également R. c. Hailemolokot, [2011] M.J. No. 187, par. 23 et 24 :

« This accused is a young adult with no prior involvement with the police. He had been in police custody for seven hours without food. He was obviously cold during the police interview. He was shivering at times and even told Detective Friesen that he was shaking because he was cold. He had been sick, throwing up at least five times earlier in the morning, which may or may not have been related to the alcohol he drank the night before. The officers who question him should have known all of this before the interview, but admit they did not. In all of the circumstances the comments of Detective Huyghe may well have been perceived as a threat by the accused. He was told that they were not going to leave him alone and the clear message was that he had no choice; he would have to talk or they would not leave him alone. In spite of refusing to answer for a long time, he gave in at the end. Given Halefom Kyriakakos’ personal circumstances that night, the comment “were not going anywhere” and the inescapable conclusion that the officers would not leave until he admitted guilt, amount to an “atmosphere of oppression”.

When assessing all of the circumstances before and during the giving of this particular statement, including the facts that he was detained for seven hours while ill, seemingly without food or drink but for a cup of coffee, the Court finds that the Crown has not satisfied the burden of proving beyond a reasonable doubt that this statement was voluntary. »

128. R. c. Spencer, 2007 CSC 11 (CanLII), [2007] 1 R.C.S. 500, par. 15. Voir par exemple R. c. George, [2019] B.C.J. No. 108, par. 90 :

« I cannot be satisfied beyond a reasonable doubt that the admissions Mr. George made while obviously physically uncomfortable, in circumstances when his detention had gone on for 14 hours with no explanation why and where police did not pause the interview to allow him access to a bathroom, were not the product of oppression. I am not satisfied his statement was voluntary and it will not be admitted in evidence. »

129. R. c. Paternak, 1995 ABCA 356 (CanLII), [1995] A.J. No. 795, par. 28 (C.A. Alb.) :

« [Traduction] Pour qu’un détenu par ailleurs mature et bien portant soit privé de sa capacité de faire un véritable choix, je suis porté à croire que l’influence qu’il a subie doit l’avoir subjugué à un point tel que l’on puisse dire qu’il a perdu toute possibilité significative de choisir lui-même de garder le silence, et qu’il est devenu un simple instrument dans les mains de la police. [En italique dans l’original.] » Cité en français dans R. c. Spencer, 2007 CSC 11 (CanLII), [2007] 1 R.C.S. 500, par. 18.

Voir également R. c. Lucier, [2008] B.C.J. No. 2162, par. 28 :

« A man in a distinctly weakened state is more susceptible to oppression than would be a man in a healthy and robust state. This is a relevant consideration when deciding whether a confession may be “stress-compliant” and the result of oppression : see Oickle at para. 71. »

130. R. c. Evans, 1991 CanLII 98 (CSC), [1991] 1 R.C.S. 869. Voir également R. c. Armishaw, 2011 ONSC 5624 (CanLII), [2011] O.J. No. 4662, par. 66 :

« There is much discussion in the cases about manufactured evidence, false evidence and fabricated evidence. The Crown has argued that no actual misrepresentation of fact was made; no false pretence can be proved against Staff Sergeant Smyth. All he has done, it is argued, is to exaggerate the effect of the evidence he has. In the context of this interview, I reject that argument. Staff Sergeant Smyth’s reference to the evidence that he had surpassed mere exaggeration by a country mile. He had in fact no evidence of identification of the perpetrator. Period. That was a fact. He told Mr. Armishaw repeatedly that the expert, medical, scientific and/or CSI evidence accumulated by police over a lengthy investigation, identified him as the perpetrator beyond the shadow of a doubt. That was a lie. It was meant to be a lie. It does no credit to Staff Sergeant Smyth’s testimonial honesty that he refused to admit that it was a lie. Oickle makes it clear that the mere presence of trickery or an allusion to false evidence is not necessarily fatal to admissibility. Oickle also makes it clear that the technique is dangerous; that the use of such techniques can easily cross the line of what is permissible. The analysis is a contextual one. It is fact-specific. »

131. R. c. Evans, 1991 CanLII 98 (CSC), [1991] 1 R.C.S. 869, par. 19.

132. Voir également R. c. Smith, [2007] O.J. No. 963, par. 37 :

« The lengthy interview and the statements given to Sergeant Loam must also fail the test of legal voluntariness based on the use of non-existent evidence at various stages throughout the interview process. The intruder was not identified by any of the occupants of the home at 4 Burd Street. Nevertheless, at various points throughout the interview, Sergeant Loam suggested or alluded to the fact that there were identification witnesses who could place Mr. Smith in the home. »

133. R. c. Hammerstrom, [2006] B.C.J. No. 3188.

134. R. c. Hammerstrom, [2006] B.C.J. No. 3188, par. 105-108 :

« I find that the police trickery in this case had a uniquely central role in creating an atmosphere of oppression, and contributes significantly to my finding that the Crown has not proven voluntariness beyond a reasonable doubt. There was explicit deceit in representing the contents of the tapes to Mr. Hammerstrom. The evidence falsely represented had significant impact. It was not vague or tentative. If it had existed, it would have provided incontrovertible proof of Mr. Hammerstrom’s presence at the crime scene. There was a clear causal relationship between the false evidence and the decision to confess. I base this last finding on Mr. Hammerstrom’s evidence at trial, corroborated by the manner in which he reacted to the information about the tapes during the interrogation.

I conclude that the police representation that they had incontrovertible evidence linking him to the crime scene was central to creation of an atmosphere of oppression that led Mr. Hammerstrom to abandon his volition and confess. That representation was false.

I find the oppression that caused Mr. Hammerstrom’s loss of volition was also contributed to by his emotional state, his increasing despondency, the fact he believed he could not leave, and persistent questioning that contributed to his belief that he was trapped and the interrogation would continue until he confessed.

I find all of these factors contributed to a climate of oppression which, in the words of the principles established by Oickle, overbore Mr. Hammerstrom’s will to the point that he believed further protestations were futile. »

135. R. c. Ciliberto, [2005] B.C.J. No. 3013.

136. R. c. Ciliberto, [2005] B.C.J. No. 3013, par. 51 :

« Here, the police deliberately told Ciliberto repeatedly that they had a solid case against him. They illustrated this by listing off what was, in fact, false evidence. This includes that the police had found Ciliberto’s DNA on a gun found at the scene, that witnesses could identify his particular truck as at the murder site at the relevant time, that he had looked at witnesses and that they could identify him, that a store clerk who sold a cellular telephone connected to the crime remembered selling it to Ciliberto. All of these suggestions were false. In a general way, the police repeated the untrue claim about evidence many times using such expressions as “over the top”, “overwhelming”, and “a mountain of evidence” to buttress their theme that Ciliberto was “so caught” and that all that was missing was an explanation as to why. »

137. R. c. Grouse, [2004] N.S.J. No. 346, par. 62 (citant le juge de première instance) :

« While acknowledging that the tactics used by the police during this investigation, which he characterized as “oppressive” and involving trickery could induce some people to confess, the judge found that Mr. Grouse was not intimidated or oppressed by the trickery and misstatements by the police or by the intense, persistent questioning. Mr. Grouse, found the judge, continued to make conscious choices when providing information and responses, maintained the option to provide or withhold information and freely chose to give truthful or dishonest answers. »

R. c. Riley, [2001] B.C.J. No. 1618, par. 60 :

« In my view the false statement made by Cpl. Campbell was insufficient to convince the accused that protestations of innocence, even if true, would be futile. »

138. R. c. Fabas, [2008] B.C.J. No. 983, par. 53 et 55 :

« Mr. Fabas did not confess after Constable McIntosh referred to the DNA, fingerprint and witness evidence. In fact, after Constable McIntosh referred to that evidence, Mr. Fabas denied that he committed the robbery. What seems to have provoked the confession was the fact that the cheque was found in Mr. Fabas’ possession and he had no credible explanation for that. »

R. c. J.C.L., [2002] A.J. No. 1291, par. 22 :

« In the circumstances of this case, Detective Bildfell’s implication that there was existing DNA evidence did not elicit any response from the Accused, other than a denial. In relation to the statement as a whole, this fabrication does not undermine the voluntariness of it. »

139. R. c. Charteris, [2010] O.J. No. 4014.

140. R. c. Hosack, [2012] B.C.J. No. 2976, par. 102 :

« I have kept in mind the decision of Madam Justice Neilson, then a member of this Court, R. v. Hammerstrom, 2006 BCSC 1700, in which misleading statements by the police interviewer about the accused being captured on surveillance videos played a pivotal role in the finding of an atmosphere of oppression. However, in that case there was a clear link found between the accused’s belief that he was caught on the tape and his subsequent confession in response to aggressive police questioning. I have found no such link here, and the evidence actually shows that the misstatements had no effect on Mr. Hosack’s decision to speak. In fact, he explicitly questioned the officers’ claim about the link between the dirt on his boots and the location of Mr. Falardeau’s head. »

141. R. c. Hosack, [2012] B.C.J. No. 2976, par. 103 :

« Police misstate the existence of evidence during interviews at their peril, because there is no way for them to tell when they use this tactic whether a suspect will, like Mr. Hammerstrom, regard himself as inevitably caught by something that does not actually exist and abandon all resistance. The officers were fortunate in this case that their misstatements played no role in what Mr. Hosack eventually chose to say. »

142. R. c. A.B., 2003 BCSC 599 (CanLII), [2003] B.C.J. No. 1102, par. 98 et 99 :

« In this case no such dramatic trickery was employed. The purpose of the interview was to find out why Mr. Baker had committed the alleged offences not whether he was the perpetrator of the assaults. The circumstantial case against Mr. A.B. at the time, even in the absence of forensic evidence subsequently obtained, was very strong. Mr. A.B. was found in the apartment, covered in blood, and with no explanation for his presence there. In my view, the misinformation given to Mr. A.B. did not cause or contribute to the creation of any oppressive conditions. »

143. Voir sur ce point R. c. E.B.R., [2017] S.J. No. 558, par. 6 et 56 :

« Cpl. McCoombs was made aware of the alleged incident after speaking with S.B.’s mother. Cpl. McCoombs interviewed S.B. for over one hour. S.B. did not disclose any information to Cpl. McCoombs that would support any charges being laid.

[...]

Taking into consideration that the police were suggesting to E.B.R. that they knew what had happened when in fact they had no evidence to support what they believe occurred is distasteful. I am not however convinced that it would necessarily, standing alone, be enough to be considered trickery to the point where it was so offensive to render the statement involuntary. »

144. R. c. Watts, [2003] B.C.J. No. 2119.

145. R. c. Watts, [2003] B.C.J. No. 2119, par. 58.

146. R. c. Swain, [2014] M.J. No. 146.

147. R. c. Swain, [2014] M.J. No. 146, par. 43 :

« The case before me on the facts is distinguishable in several ways but most significantly because there was in fact a surveillance video in this case showing a person wielding a knife at the crime scene. Further, witnesses had given statements to the WPS not only placing Swain at the crime scene, but also his confessing to witnesses that he committed the crime. In these circumstances, it was entirely appropriate for the WPS to keep pressing Swain about him committing the crime and being the person wielding the knife on the video. »

148. R. c. Upward, [2016] O.J. No. 1476.

149. R. c. Evans, 1991 CanLII 98 (CSC), [1991] 1 R.C.S. 869, par. 17.

150. R. c. Tshitenge Masuku, [2011] Q.J. No. 15029, par. 67, conf. à [2017] J.Q. No. 14622, par. 55-57 (C.A.) :

« Au cours de l’interrogatoire, le détective Lafrance mentionne que des caméras de surveillance étaient en place au bar Tribe et demande à l’appelant ce qu’il dirait si les images montraient une personne lui ressemblant.

À ce moment, le détective sait que la caméra qui aurait pu filmer précisément la scène était hors d’usage lors de la commission du crime. D’autres caméras étaient cependant fonctionnelles et avaient capté les images de l’appelant alors qu’il entrait dans le bar Tribe. Le détective n’avait pas encore visionné ces images.

La question du détective sur les caméras n’était pas trompeuse et, comme le souligne le juge, la référence aux caméras était justifiée puisqu’elle visait à vérifier la présence de l’accusé sur les lieux du crime. De toute manière, il ne s’agit pas d’une ruse choquante ou inacceptable. »

151. R. c. Wiegand, [2003] A.J. No. 401.

152. R. c. Wiegand, [2003] A.J. No. 401, par. 27 et 34 :

« Clearly, the detective is painting a picture in the accused’s mind that, notwithstanding that there were reasonable explanations for how his fingerprints got on the circuit breaker and that there was no eyewitness who had observed him putting tools in the garbage cans on the morning of the fire, false evidence would be presented to the court and that the court would believe it. In the accused’s mind it was quickly becoming clear that as Mr. Justice Iacobucci put it, his “protestations of innocence are futile”.

Standing alone no single instance of trickery or oppression would be sufficient to exclude the confession made by the accused. However, when the entire situation is looked at and each questionable incidence or circumstance of the interview is added to the last, it raises a reasonable doubt with respect to the voluntariness of the accused’s confession. Consequently, I declare the statements made by the accused to be inadmissible. »

153. Sur le fardeau de preuve applicable en semblable matière, voir Ville de Laval c. Mercadante, [2017] J.Q. No. 7708, par. 36, 32 et 33 :

« Le Tribunal convient que lorsque la preuve de la poursuite démontre le caractère libre et volontaire, incluant la preuve d’un esprit conscient, hors de tout doute raisonnable, il appartient alors à la défense de contredire cet aspect de la question. Mais le fardeau initial demeure sur les épaules de la poursuite. Dans le dossier, la preuve est complètement muette sur l’état d’esprit de la défenderesse.

Il n’est pas demandé au policier, ici, la personne en situation d’autorité, d’établir un diagnostic sur l’état mental du défendeur, mais simplement d’établir, par ses observations, que la personne ayant donné une déclaration est consciente et bien orientée.

Cette preuve est relativement simple à établir et l’affaire Sorella, déposée par la poursuite, l’illustre. Le ministère public a démontré que, lors de ses déclarations, l’accusée était calme, sans signe de nervosité et semblait consciente. »

154. R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 63 :

« Notre Cour a récemment traité de cet aspect de la règle des confessions dans l’arrêt Whittle, précité, et il n’est pas nécessaire que je le refasse. En résumé, le juge Sopinka a expliqué que la théorie de l’état d’esprit conscient “n’implique pas un degré de conscience plus élevé que la connaissance de ce que l’accusé dit et qu’il le dit à des policiers qui peuvent s’en servir contre lui” (p. 936). Je souscris à cette explication et j’ajouterais simplement que, tout comme l’oppression, la théorie de l’état d’esprit conscient ne doit pas être considérée comme une enquête distincte, complètement dissociée du reste de la règle des confessions. »

Ville de Laval c. Banakayi Mukuna, [2017] J.Q. No. 1580, par. 7 :

« Autrement, la notion d’état d’esprit conscient est un critère qui concerne une facette de la règle des confessions, comportant un élément psychologique limité selon lequel l’accusé doit avoir une capacité cognitive suffisante pour comprendre ce qu’il dit et ce qui est dit. »

155. R. c. Whittle, 1994 CanLII 55 (CSC), [1994] 2 R.C.S. 914, par. 45.

156. R. c. Ward, [2010] N.S.J. No. 266, par. 31 :

« Although there is some evidence both through the police witnesses and the videotape of Mr. Ward’s interview that Mr. Ward was intoxicated, such intoxication does not automatically render his statement inadmissible. It does not follow that because Mr. Ward was intoxicated he could not make a voluntary statement. The fact that Mr. Ward may have been intoxicated is a factor to be taken into consideration when deciding whether he possessed all of his faculties to the extent that he could appreciate the consequences of his statement : Regina v. Hartridge, 1966 CanLII 347 (SK CA), [1967] 1 C.C.C. 346 (Sask. C.A.). »

157. R. c. Deboo, [2014] B.C.J. No. 2565, par. 58 :

« Evidence of intoxication or mental illness may raise a reasonable doubt as to whether an accused person has sufficient cognitive capacity to satisfy the operating mind criterion. As to the former, a high degree of intoxication will typically be required to render a statement inadmissible on this basis. Statements made to persons in authority by intoxicated individuals often meet the operating mind test and are, therefore, ruled admissible. In each case, as previously noted, the inquiry is highly fact-sensitive : R. v. Groves, 2013 BCCA 446. »

158. Si l’intoxication qui altère le jugement ou la raison de l’accusé sans détruire son état d’esprit conscient ne supprime pas le caractère volontaire de la déclaration, sa preuve peut être soumise au jury afin d’apprécier le poids et la fiabilité de la confession. Voir sur ce point R. c. Anderson, [2011] N.B.J. No. 389, par 43 :

« Although I have concluded that all of the statements given by Ms. Anderson were the product of an operating mind, the evidence of impairment can properly be put before the jury for its assessment of the weight to be accorded the statements. »

159. Les principes développés dans cette rubrique s’appliquent autant à la consommation d’alcool que de drogues. Voir R. c. Quattrocchi, [2016] S.J. No. 378, par. 27 (crystal meth).

160. R. c. Daviault, 1994 CanLII 61 (CSC), [1994] 3 R.C.S. 63, par. 59.

161. R. c. Miller, [2011] B.C.J. No. 760, par. 19 :

« Ms. Miller testified also that the crack cocaine she had smoked that day had the effect of making her nervous and agitated. »

162. R. c. Turpin, [2005] B.C.J. No. 839, par. 55 :

« In oral submissions, the defence did not take the position that Mr. Turpin did not have an operating mind. Indeed, notwithstanding the various indicia of intoxication noted by the police, such as odour of liquor on his breath, slurring of his speech, unsteadiness on his feet, dishevelled appearance, and his sliding down the wall when being questioned in the hallway, the actual responses Mr. Turpin gave to the police officers’ questions clearly show that he possessed an operating mind throughout. They demonstrate not only that he understood their questions, but also that he was able to think about and make decisions about how to reply. »

163. R. c. Groves, [2011] B.C.J. No. 2809, par. 16; R. c. Hall, [2011] O.J. No. 5115, par. 16 :

« I find that the Crown has proven beyond a reasonable doubt that Mr. Hall had an operating mind when he made the statements on May 20 and May 25. I conclude that Mr. Hall had the cognitive ability to understand what he was saying. Mr. Hall provided clear and comprehensible answers to Constable Collymore’s three questions in the backyard. The booking video, which was recorded about 40 minutes after Constable Collymore first arrived on scene, displays Mr. Hall’s ability to answer numerous questions regarding the allegations against him, his mental and physical health, his right to counsel, and the amount of alcohol he had consumed that day. None of Mr. Hall’s answers were difficult to understand. Staff Sergeant Greenaway testified that Mr. Hall had “absolutely no” difficulty following what he was saying, and the staff sergeant in turn had no difficulty understanding Mr. Hall’s answers. This is confirmed by the objective evidence of the video itself. On the video, I found Mr. Hall to be lucid, in control, and able to answer questions posed by Staff Sergeant Greenaway without difficulty. Though the video was recorded about 40 minutes after the statements in the backyard were given, I find that it represents an accurate portrayal of Mr. Hall’s mental and emotional capacity when Constable Collymore asked him questions. »

164. R. c. Maracle, [2015] O.J. No. 381, par. 37.

165. R. c. Swain, 2015 MBQB 182 (CanLII), [2015] M.J. No. 344, par. 13 et 18 :

« The supervising sergeant testified that it was obvious that the accused had been drinking but he was not drunk. As he testified, the accused could function, he knew what was going on and he understood. The sergeant had no concern about his level of sobriety and directed him to the investigators. He stated that he would not assign an investigator to interview the accused if he thought the accused was intoxicated. [...]

Detective Williston testified that while the accused appeared to have been drinking, it was a pretty low level of intoxication. The accused understood what was going on and that the answers were appropriate to the questions asked. Accordingly, he had no concerns with proceeding with the interview. The officer testified that since there was no rush to conduct the interview, the interview could have been delayed if there was a concern over the state of the accused’s sobriety. At the same time, there was no reason to wait any longer to conduct the interview. »

R. c. Fagnan, 2015 MBQB 144 (CanLII), [2015] M.J. No. 211, par. 27 :

« The evidence all points to the fact that the accused, although intoxicated, was of an operating mind and therefore, from this perspective, his statements were voluntary. »

166. R. c. Pelletier, [2015] N.B.J. No. 33, par. 52 :

« The only evidence of Ms. Pelletier’s intoxication comes from her own testimony given during the voir dire. The question is not whether the accused now, remembers or not, having given the statement. We know she gave the statement; we have it on DVD. The question is whether she had an operating mind that morning and while she was giving her statement. »

167. R. c. Maracle, [2015] O.J. No. 381, par. 28.

168. R. c. Amey, 2013 ONSC 5108 (CanLII), [2013] O.J. No. 3789, par. 85 :

« Amey was highly intoxicated. He was noted by the officers as stumbling, having slurred speech, repeating himself, and asking to go home to his mother. His cognitive ability in my view is in question where his statements are nonsensical, contradictory and there is a concern about their reliability. »

169. R. c. Peters, [2009] M.J. No. 338.

170. R. c. Dudar, [2016] O.J. No. 457.

171. R. c. Clarkson, 1986 CanLII 61 (CSC), [1986] 1 R.C.S. 383, par. 27.

172. Pour un exemple de déclaration inadmissible en raison de la combinaison d’alcool, de médicaments et de drogues, voir R. c. Smith, [2007] O.J. No. 963, par. 28-34.

173. R. c. Mysliakovskaia, [2013] J.Q. No. 7830, par. 110.

174. R. c. Mysliakovskaia, [2013] J.Q. No. 7830; R. c. Mallaley, [2002] N.B.J. No. 453.

175. R. c. Lafleur, [2017] J.Q. No. 6926, par. 101 et 102 :

« À cet égard, les témoignages entendus à l’audience de l’anesthésiste Simon Lévesque, du chirurgien ORL Jean-Philippe Vézina ainsi que du pharmacien, Martin Darveau, convainquent le Tribunal que la médication n’a pas affecté l’état de conscience de l’accusé pour comprendre les différentes mises en garde qui lui ont été données et pour se soumettre à l’interrogatoire auquel il a été convié à la Centrale de police le 15 août, après sa sortie de l’hôpital. Eu égard à ce qui précède, le Tribunal retient que monsieur Lafleur a participé à l’interrogatoire alors qu’il était bien orienté, avec un esprit conscient. »

176. R. c. Godon, [2010] J.Q. No. 944, par. 11-13 (dépression sévère et médication); R. c. Curnew, [2016] N.J. No. 113, par. 27 (bipolaire et attaque de panique); R. c. Cardinal, [2015] A.J. No. 197, par. 29 :

« I find that the accused’s statement beginning with “He got what he deserved” through to “I’ll kill them all” is voluntary. On the evidence before me the accused was cognizant of his surroundings and that he was dealing with police officers. There is no evidence to suggest that he was confused. He clearly knew based on his response to the caution that he was not required to say anything. He chose to speak notwithstanding that he was not questioned. He was angry but he was coherent. The mere mention of a bipolar condition and AISH without evidence to explain how such a condition would support the submission that the accused lacked an operating mind at the time that he spoke to Cst. Frey fails to raise a reasonable doubt as to voluntariness in my mind. I find the statement made to Cst. Frey as above described was voluntary and admissible in evidence. »

177. R. c. Whittle, 1994 CanLII 55 (CSC), [1994] 2 R.C.S. 914.

178. R. c. Whittle, 1994 CanLII 55 (CSC), [1994] 2 R.C.S. 914, par. 9.

179. R. c. Whittle, 1994 CanLII 55 (CSC), [1994] 2 R.C.S. 914, par. 37.

180. R. c. Whittle, 1994 CanLII 55 (CSC), [1994] 2 R.C.S. 914, par. 54.

181. Le retard mental ayant différents degrés d’incapacité, seules les personnes n’ayant pas les facultés cognitives suffisantes pour satisfaire aux exigences de l’état d’esprit conscient pourront échapper à la règle. En ce qui concerne la personne souffrant de déficience intellectuelle qui conserve la capacité cognitive limitée de savoir ce qu’elle dit et qu’elle le dit à des policiers qui peuvent s’en servir contre lui, elle possède un état d’esprit conscient. Sur ce point, voir R. c. Biggar, [2005] S.J. No. 758, par. 34-38.

182. R. c. Rackham, [2012] B.C.J. No. 2812, par. 51-53 :

« The case law makes it clear that the fact a person may be insane or suffer from some other mental incapacity or disability is not, in and of itself, the basis for finding a statement to be involuntary. It is clear in this case from the evidence of the two officers that Mr. Rackham’s comments appeared nonsensical and did not make a lot of sense.

I do not believe it is appropriate for me to speculate, at this juncture, whether Mr. Rackham was delusional or neurotic. I only need to address whether he understood what he was saying, whether he knew he was speaking to a police officer, and whether he understood that in speaking to the police officer and making those statements, the statements could be used against him.

In all of the circumstances, I am satisfied the statements made by Mr. Rackham during the course of the interaction with the two constables, Cullingworth and Chernoff, were the products of an operating mind as that term has been interpreted by the Supreme Court of Canada. »

183. R. c. Reeves, [2011] B.C.J. No. 2117, par. 23 :

« In applying the principles to be deduced from the law to the case at bar, a careful review of the whole of the statement which took place over an hour and a half must be undertaken. A review of the content of the whole call indicates that Mr. Reeves was oriented in time and place and relationships. He knew he was talking to an RCMP officer. Mr. Reeves appeared to be intelligent and very self-absorbed. He also appeared to suffer from paranoid-type delusions. He seemed to be possessed of a number of delusions or delusional explanations for various and severe aches and pains involving burning sensations in his feet and other parts of his body, severe headaches, arthritis and gastrointestinal problems. He had grievances against the government and some minor ones against his step-father who he had allegedly stabbed to death. I find he did say the words – I killed Brian – within a minute or two of the beginning of the telephone communications. However, unlike either Whittle or Partridge, his delusional thinking had no causal relation to either why he may have killed his step-father, nor why he was speaking openly to the police officer. »

184. R. c. G.C.Z., [2015] B.C.J. No. 2351.

185. R. c. Hosack, [2012] B.C.J. No. 2976.

186. R. c. Hosack, [2012] B.C.J. No. 2976, par. 90.

187. R. c. Brothers, [2004] N.J. No. 378, par. 9 :

« The test, in effect, then is whether or not Mr. Brothers knew he was speaking to the police, and whether he knew the statement could be used against him, and whether he could communicate with counsel and understand the function of counsel as well as his right to counsel. Although I accept the fact that the accused was psychotic at the time, a clear viewing of the video shows that he had sufficient cognitive capacity to understand who he was speaking to and understand that he did not have to speak to the police and that he clearly had a right to counsel. I agree that the analytical capacity of not appreciating the nature and consequences was probably present, but that is not a factor in determining the voluntariness of this statement and whether there was a Charter breach. The advantages of a video in this case cannot be over-emphasized. It must be remembered that although I have decided that the statement is admissible, it is still up to the jury as to what weight they will put to that statement and that can best be determined when it is presented to the jury along with the expert evidence as to his state of mind. I might add that if the video had not been present, I may have decided otherwise. I am satisfied from the viewing of the video, especially with the explanations given by Mr. Brothers in the video as to his rights, that the statement should be admitted subject to, obviously, a caution to the jury as to how much weight they should give it. »

188. R. c. Partridge, [2007] Nu.J No. 17.

189. R. c. Partridge, [2007] Nu.J No. 17, par. 26-30.

190. R. c. Nadeau, [2019] J.Q. No. 636, par. 58 et 59.

191. R. c. Lambert, [2018] N.J. No. 217, par. 11 (C.A. T.-N.) :

« In assessing the voluntariness of the statements made to the police officer while Mr. Lambert was in the ambulance, the trial judge found that the statements could not be taken as “rational”, that they suggest “impractical reasoning”, and that the third statement “appears less irrational” (transcript of oral decision, at paragraphs 57, 56 and 59, respectively). This language indicates a failure by the trial judge to apply the appropriate test which, as set out in Oickle and Whittle, excludes consideration of whether the accused is capable of making a good, wise or rational choice as long as he has the “limited degree of cognitive ability to understand what he or she is saying and to comprehend that the evidence may be used in proceedings against [him]” (paragraph 8, above). »

R. c. Baptiste, [2020] Q.J. No. 1547, par. 351 et 352 :

« The operating mind criterion is not particularly onerous. It suffices that the accused have a limited degree of cognitive ability. It is limited to an awareness of what he is saying and that he is saying it to police officers who can use it to his detriment. It is not necessary that the accused possess analytical ability.

As explained by the Newfoundland Court of Appeal in R. v. Lambert, the standard does not require that the accused be capable of making a “good, wise or rational choice” as to whether or not he will speak. Even if the accused exercises poor judgment in speaking to the officer, he may still satisfy the legal test for an operating mind. »

192. R. c. Ward, 1979 CanLII 14 (CSC), [1979] 2 R.C.S. 30.

193. R. c. Ward, 1979 CanLII 14 (CSC), [1979] 2 R.C.S. 30, par. 23.

194. R. c. Grenier, [2004] J.Q. No. 11118, par. 82 et 95 :

« Le Tribunal mentionne le caractère disculpatoire de la déclaration, uniquement parce qu’il n’a jamais noté que l’accusé se soit “effondré émotionnellement avant de passer aux aveux”. L’accusé a certes pleuré à quelques reprises, mais uniquement lorsqu’il expliquait comment il a tenté de réanimer la victime et plus particulièrement lorsqu’il décrit avoir aspiré ses vomissures. Même lorsque l’accusé a pleuré, il ne s’est jamais “effondré émotionnellement”, ni autrement. Sa réaction me semble, au contraire, très normale dans les circonstances. Malgré ses pleurs, il est toujours resté en parfait contrôle de lui-même et de ce qu’il voulait dire.

Le Tribunal a aussi noté que l’accusé a informé le policier au début de la prise de la déclaration qu’il avait mal aux poumons et que, lorsqu’il est stressé, il avait encore plus mal. Le Tribunal a aussi noté que l’accusé a mentionné être sous le choc de ce qui s’était passé dans la journée. Cela, à mon avis, ne l’a jamais empêché d’être conscient de la nature des échanges entre l’enquêteur et lui-même. Il semblerait que le stress que l’accusé vivait provenait de la situation elle-même, de la nature de l’accusation qui pesait contre lui et cela ne l’empêchait pas de comprendre la nature de l’interrogatoire. »

Voir également R. c. Chamberlain, [2003] M.J. No. 326; R. c. Carroll, [2009] O.J. No. 3993; R. c. Tollefsen, [2015] N.J. No. 83, par. 14 :

« While by all accounts Ms. Tollefsen was very upset and distraught over the well-being of Ms. McWilliams I am not satisfied that her emotional state was such as to deprive her of an operating mind. Ms. Tollefsen testified that she was aware that she was being charged when arrested by Constable Davison and that she heard and understood the rights and caution when these were read to her. Further, she had the wherewithal to then request a lawyer. While Ms. Tollefsen testified that earlier in the day she had consumed six ounces of alcohol and two beers, but was adamant that this had “no effect” on her memory of the events. Indeed, in her testimony she was able to corroborate in all material respects the evidence of Constable Davison concerning her emotional state and the circumstances of her arrest. While Ms. Tollefsen denied making the comment that she “stabbed” Ms. McWilliams, I am satisfied that whatever utterances may be attributed to her were voluntary, in the sense that they came from an operating mind. While her emotional state was such as to contribute to the alleged remarks, it was not such as to deprive Ms. Tollefsen of an understanding of the circumstances in which she found herself, and that these remarks might be used against her. »

195. P.G. c. R., [2020] J.Q. No. 3106 (C.A.).

196. R. c. Ward, [2016] A.N.-B. No. 74, par. 34 :

« La ruse, considérée isolément, nécessite un examen distinct parce que l’appréciation de la question de savoir si la conduite de la police a franchi cette limite tout à fait nette a pour objet d’empêcher que l’administration de la justice ne se rende complice d’un processus qui la discrédite en fermant les yeux sur une inconduite flagrante de la part de la police et en admettant des éléments de preuve viciés. La ruse, considérée isolément, par opposition à un facteur qui serait inextricablement ou autrement lié aux autres principes qui sous-tendent la règle du caractère volontaire, doit être examinée à la deuxième étape du processus qui régit l’admissibilité afin de déterminer si l’on a enfreint la règle voulant que toutes les déclarations faites à des personnes légalement en autorité soient volontaires. »

197. R. c. Rothman, 1981 CanLII 23 (CSC), [1981] 1 R.C.S. 640, par. 113.

198. R. c. Miller, 1991 CanLII 2704 (ON CA), [1991] O.J. No. 2010, par. 18 (C.A. Ont.).

199. R. c. Welsh, 2013 ONCA 190 (CanLII), [2013] O.J. No. 1462, par. 104 (cité en français dans R. c. Ward, [2016] A.N.-B. No. 74, par. 35).

200. R. c. Rowe, 2006 CanLII 14235 (ON CA), [2006] O.J. No. 1752.

201. R. c. Rowe, 2006 CanLII 14235 (ON CA), [2006] O.J. No. 1752, par. 61 (citant le juge de première instance).

202. Voir à ce sujet R. c. Welsh, 2013 ONCA 190 (CanLII), [2013] O.J. No. 1462, par. 104.

203. R. c. Gaudette, [2002] J.Q. No. 1526, par. 178.

204. R. c. Rafferty, [2012] O.J. No. 2137, par. 36 :

« The first is that Officer Loam pretended to be writing a report for the court to determine what the risk level of the accused was. He wanted to determine whether this was a situation where the accused “just snapped” and committed this crime, or whether it was something that he had planned for many months and got some enjoyment out of the planning. Presumably, he would be considered to be less dangerous if the former were true rather than the latter. »

205. R. c. Labbe, [2002] B.C.J. No. 3041, par. 38 :

« With reference to the use by the Crown of the letter written to the family of Ms. Martin, it is well settled law that the authorities may, and frequently do, resort to tricks and deceit in obtaining evidence for use during a criminal prosecution. Unless the conduct is such as to “shock the community” it will not be excluded. Here, while implying that the letter the accused wrote would go to the family, the police were evasive but did not expressly mislead the accused. In any event, it is clear from the wording in the letter that the accused was alert to the fact the police may read and use the letter. This conduct is not such as would shock the community : R. v. Oickle, supra; see also R. v. Riley, [2001] B.C.J. No. 1618; 2001 BCSC 1169. »

Voir également R. c. Ward, [2016] A.N.-B. No 74, par. 36.

206. R. c. Corak, [1994] B.C.J. No. 629, par. 13 (C.A. C.-B.).

207. R. c. Rothman, 1981 CanLII 23 (CSC), [1981] 1 R.C.S. 640, par. 113; R. c. Oickle, 2000 CSC 38 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 3, par. 66.

208. R. c. J.C.L., [2002] A.J. No. 1291, par. 29; R. c. Branconnier, [2014] J.Q. No. 11555, par. 98 et 101 :

« Même s’il lui était permis de le faire, le sergent Lapointe n’a pas directement menti à l’accusé. Il a simplement laissé celui-ci sous l’impression que Solange Alarie était toujours vivante et pouvait, de ce fait, l’incriminer dans d’éventuelles procédures. On ne peut certainement pas qualifier cette stratégie de “regrettable, répugnante ou inconvenante”.

[…]

Considérée objectivement et dans son ensemble, la conduite de l’enquêteur n’est certainement pas de nature à choquer la collectivité. »

Cette décision fut confirmée par la Cour d’appel dans Branconnier c. R., [2017] J.Q. No. 432, par. 35 et 36 (C.A.) :

« À mon avis, le juge s’est bien dirigé en fait et en droit en concluant qu’il ne s’agissait pas d’une ruse répréhensible et choquante. Bien qu’elle eût un effet sur l’appelant, elle n’était pas de nature à subjuguer sa volonté. L’interrogatoire s’est déroulé calmement, l’appelant confirmant sa présence sur les lieux du crime à son retour d’une pause, tel qu’il appert de l’écoute de l’enregistrement vidéo mis en preuve.

En somme, la ruse utilisée ne porte pas atteinte à l’intégrité du système de justice pénale. Les autorités n’ont jamais “fait ou dit une chose qui ait pu amener l’accusé à faire une déclaration qui soit ou qui puisse être fausse”. Elle n’a pas le caractère odieux requis pour justifier l’intervention des tribunaux. »

209. R. c. Alward, [1976] N.B.J. No. 220.

210. R. c. M.R., [2019] A.J. No. 1354, par. 88 :

« Even if evidence is not excluded on the basis of the “police trickery” distinct inquiry, the use by police of deception such as lies, mis-information and deceit can, in some circumstances, be a factor to be considered when assessing the voluntariness of a statement. This is because deception by police, in combination with other factors, can give rise to oppression and may undermine voluntariness, thus rendering the statement inadmissible : Oickle at para 67; Paciocco and Stuesser at page 356; Hammerstrom at para 62 to 65. »

211. Chaussé c. R., [2018] J.Q. No. 4723, par. 63 et 64 (C.A.) :

« Je rappelle que l’appelant n’était pas détenu lors des déclarations faites à son arrivée au poste de police. Il s’y s’est présenté de son propre chef. Les policiers ne le questionnaient pas – que ce soit de façon générale ou de façon à obtenir des aveux incriminants – et il n’était pas en état d’arrestation.

Le droit au silence n’entre donc pas en jeu à ce moment. C’est plutôt sous l’angle de la règle des confessions que doivent être analysées ses déclarations. Les déclarations de l’appelant sont libres et volontaires. Elles ont été faites de façon spontanée : il n’y a eu aucune menace ou promesse de la part des autorités; le climat n’est pas oppressant; rien n’indique que l’appelant n’est pas dans un état d’esprit conscient; et, aucune ruse policière n’est utilisée. »

212. R. c. Hebert, 1990 CanLII 118 (CSC), [1990] 2 R.C.S. 151.

213. R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405, par. 40 :

« Voilà un exemple où l’art. 7 offre une protection plus grande que la règle des confessions du fait que cette dernière n’entre pas en jeu dans des circonstances comme celles de l’affaire Hebert. La règle des confessions ne s’applique qu’à l’égard des déclarations faites à une personne en situation d’autorité. L’agent double, dont l’accusé ignore qu’il agit à titre d’autorité de l’État, ne fait pas partie de cette catégorie. »

214. R. c. Hebert, 1990 CanLII 118 (CSC), [1990] 2 R.C.S. 151, par. 80 :

« Le droit de garder le silence consiste essentiellement à accorder au suspect un choix; il s’agit tout simplement de la liberté de choisir – la liberté de parler aux autorités, d’une part, et la liberté de refuser de leur faire une déclaration, d’autre part. »

215. R. c. Broyles, 1991 CanLII 15 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 595.

216. R. c. Liew, 1999 CanLII 658 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 227.

217. R. c. Broyles, 1991 CanLII 15 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 595, par. 23, 25 et 26 :

« Dans certains cas, il est clair que la personne à qui les déclarations ont été faites était un représentant de l’État. Par exemple, si elles ont été faites à un policier ou à un employé d’un pénitencier, qu’il soit ou non en uniforme, il est certain que les déclarations ont été faites à un représentant de l’État.

Si l’on applique ce critère à une conversation entre un policier et un suspect détenu, il est certain que la conversation n’aurait pas eu lieu sans l’intervention de l’agent. S’il est appliqué à une conversation avec un codétenu qui n’avait pas eu de contact avec les autorités avant la fin de la conversation, il est également certain que les gestes des autorités n’ont eu aucun effet sur la conversation et que le droit de garder le silence garanti par l’art. 7 n’a pas été violé. Par contre, si le codétenu a parlé aux autorités avant d’entreprendre la conversation, il faudra déterminer si la conversation aurait eu lieu ou si elle se serait déroulée de la même façon si le codétenu n’avait pas eu de contacts avec les autorités.

J’aimerais ajouter qu’il est possible que, dans certaines circonstances, les autorités encouragent les indicateurs à soutirer des déclarations sans qu’il existe au préalable de rapports entre les autorités et les indicateurs. Par exemple, les autorités pourraient encourager l’obtention irrégulière de déclarations incriminantes en faisant savoir qu’elles paieront celui qui obtiendra ce genre de renseignements ou qu’elles diminueront les accusations portées contre l’indicateur. Il faut alors répondre à la même question : L’échange entre l’indicateur et l’accusé aurait-il eu lieu, n’eussent été les encouragements des autorités ? »

218. R. c. Broyles, 1991 CanLII 15 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 595, par. 24.

219. R. c. Liew, 1999 CanLII 658 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 227, par. 46.

« Comme il a été mentionné, les deux ensembles de facteurs exposés dans Broyles ont trait à la nature de l’échange et à la nature des rapports existant entre le représentant de l’État et l’accusé. Il convient de rappeler que ces facteurs ne sont ni exhaustifs ni concluants. Il s’agit plutôt de lignes directrices pour guider l’analyse des rapports existant entre le représentant de l’État et l’accusé afin de déterminer s’il y a un lien de causalité entre le comportement du représentant de l’État et la déclaration faite par l’accusé. »

220. R. c. Broyles, 1991 CanLII 15 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 595, par. 32.

221. R. c. Broyles, 1991 CanLII 15 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 595, par. 32.

222. R. c. Broyles, 1991 CanLII 15 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 595, par. 33.

223. R. c. Broyles, 1991 CanLII 15 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 595, par. 33.

224. R. c. Liew, 1999 CanLII 658 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 227, par. 41 :

« L’arrêt Hebert n’écarte pas le recours à des policiers banalisés. La question soulevée n’est pas l’usage d’artifices lui-même, mais l’usage d’artifices par lesquels on obtient activement des renseignements, violant le droit de l’accusé de garder le silence en le privant de la liberté de choisir de parler aux policiers ou de se taire. C’est précisément parce que le détenu conserve sa liberté à cet égard, que toutes ses paroles ne peuvent être automatiquement réputées involontaires simplement parce qu’il est détenu. L’arrêt Hebert autorise expressément les situations où, même si le détenu parle à un policier banalisé, ses paroles sont volontaires, en ce sens qu’il faut supposer qu’il a librement accepté le risque auquel l’exposent ses propres actes. Aucun autre point de vue n’est compatible avec la constitutionnalisation de son droit de choisir de parler ou de garder le silence. »

225. R. c. Liew, 1999 CanLII 658 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 227, par. 45.

226. R. c. Liew, 1999 CanLII 658 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 227, par. 47, 48 et 51 :

« L’appelant a engagé lui-même le bref échange en faisant directement mention des circonstances de son arrestation. Par sa première déclaration, “Lee est brûlé”, il aborde la question et établit le contexte de l’échange. Par conséquent, l’appelant seul a dirigé la conversation vers un sujet sur lequel les policiers cherchaient à obtenir des renseignements. Il était aussi libre de le faire que de garder le silence.

La question du policier, “Qu’est-ce qui s’est passé ?”, ne peut pas avoir permis de diriger ou de rediriger la conversation vers un sujet délicat. Cette question s’est insérée dans le cours de la conversation de façon si naturelle qu’il ne serait pas inexact de dire qu’elle a elle-même été amenée par la déclaration de l’appelant “Lee est brûlé”. Le policier a tout simplement continué la conversation concernant l’arrestation engagée par l’appelant. Dans ces circonstances, l’appelant ne peut pas prétendre que la question du policier “Qu’est-ce qui s’est passé ?” (c’est-à-dire “Comment avons-nous été arrêtés ?” ou “Qu’est-ce qui a cloché ?”), du seul fait qu’il s’agisse d’une question, peut équivaloir à une forme d’obtention de renseignements de façon irrégulière. Il est difficile d’imaginer une réponse moins indiscrète de la part du policier, à moins de ne rien dire ou d’avouer qu’en réalité il était un policier banalisé. Le policier ne peut pas être soumis à une telle obligation.

[...]

En conformité avec l’arrêt Broyles, le policier banalisé a mené sa partie de la conversation comme l’aurait normalement fait une personne placée dans la situation que l’appelant croyait être celle du policier. Dans les circonstances de l’espèce, le comportement du policier n’équivalait pas de fait à un interrogatoire. Le point essentiel n’est pas que le caractère approprié du rôle en lui-même aseptise l’échange, mais que le policier banalisé n’a pas orienté la conversation d’une manière qui aurait incité, encouragé ou amené l’appelant à répondre. La réponse de l’appelant n’a pas été “engendrée” par la déclaration du policier en ce sens qu’elle a privé l’appelant de sa liberté de choisir de parler ou de se taire. En répondant à la déclaration du policier, l’appelant a exercé sa liberté de le faire. »

227. R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405.

228. R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405, par. 50.

229. R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405, par. 28 :

« On ne saurait douter de l’importance que l’interrogatoire revêt dans le travail d’enquête des policiers. On comprendra aisément qu’il serait difficile pour la police d’enquêter sur un crime sans poser de questions aux personnes qui, selon elle, sont susceptibles de lui fournir des renseignements utiles. La personne soupçonnée d’avoir commis le crime à l’origine de l’enquête ne fait pas exception. Du reste, s’il a effectivement commis le crime, le suspect est vraisemblablement la personne ayant le plus de renseignements à fournir au sujet de l’épisode en question. La common law reconnaît donc aussi l’importance de l’interrogatoire policier dans les enquêtes criminelles. »

230. R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405, par. 95.

231. R. c. Hebert, 1990 CanLII 118 (CSC), [1990] 2 R.C.S. 151, par. 73. Voir également Alix c. R., [2010] J.Q. No. 5009 (C.A.).

232. Legault c. R., [2017] J.Q. No. 15781 (C.A.).

233. Legault c. R., [2017] J.Q. No. 15781, par. 7 (C.A.) :

« C’est après que le policier lui ait fait visionner les vidéos que l’appelant cesse d’invoquer son droit au silence et admet l’homicide, de même que la préméditation, ce qui est incompatible avec l’argument de l’effondrement psychologique causé par le climat d’oppression. En d’autres mots, comme l’écrit la juge, l’appelant a changé son discours à compter du moment où il a compris qu’il ne pouvait s’en sortir et il a alors décidé, librement, de parler. D’ailleurs, contrairement à ce qu’il affirme en témoignant, il ne dit pas au policier ce que ce dernier veut entendre. Par exemple, le policier lui suggère que ce pourrait être un geste spontané (ce qui serait à l’avantage de l’appelant), mais l’appelant dit plutôt que ce fut un geste prémédité. »

234. R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405, par. 36 :

« [L]’accent est mis sur le comportement de la police et sur l’incidence qu’il a eue sur la capacité du suspect d’user de son libre arbitre. Le critère est de nature objective. Cependant, les caractéristiques individuelles de l’accusé constituent, de toute évidence, des facteurs pertinents pour appliquer ce critère objectif. »

235. R. c. Otis, 2000 CanLII 11367 (QC CA), [2000] J.Q. No. 4320 (C.A.).

236. R. c. Poirier, [2009] J.Q. No. 8302, par. 97 :

« La Cour doit également tenir compte que madame Poirier est une personne dans une position d’impuissance et de vulnérabilité. En visionnant tout l’interrogatoire, il est assez évident que Madame n’était pas dotée d’une force de caractère capable de résister aux multiples exhortations de l’enquêteur. Tôt ou tard – devant le rapport de force inégale qui l’oppose à l’état – elle était pour s’écrouler et passer aux aveux. »

237. R. c. Côté, 2008 QCCS 3749 (CanLII), [2008] J.Q. No. 7951, par. 314 :

« L’ensemble du déroulement de l’enquête policière, le contexte général de celle-ci, les violations systématiques des droits constitutionnels de Mme Côté, la durée de sa détention, sa fatigue et son épuisement, sa claustrophobie, son insistance répétée à exercer son droit au silence, le dénigrement de son avocat par l’enquêteur et les conseils juridiques inappropriés de l’enquête soulèvent un doute raisonnable sur le caractère libre et volontaire de sa déclaration vidéo. »

238. R. c. Hebert, 1990 CanLII 118 (CSC), [1990] 2 R.C.S. 151, par. 65.

239. Voir sur ce point R. c. Lafleur, [2017] J.Q. No. 6926, par. 106, 119-122 (20 fois); Legault c. R., [2017] J.Q. No. 15781 (C.A.) (22 reprises); LSJPA – 1840, [2018] J.Q. No. 11200, par. 47 (C.A.) :

« Ce n’est pas le nombre de fois où une personne en état d’arrestation refuse de répondre à une question qui détermine le caractère volontaire ou non de sa déclaration. L’analyse est contextuelle et dépend de multiples facteurs. Après avoir dit “Je ne réponds pas” ou “Je ne sais pas” à certaines questions, de nouvelles questions du policier amènent l’appelant à poursuivre la discussion et à répondre, ou non, à ces autres questions, selon son libre arbitre. La lecture de la déclaration montre que l’appelant n’est pas contraint de répondre aux questions, mais qu’il le fait lorsqu’il le désire. »

240. R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405, par. 47.

241. R. c. Scott, [2016] M.J. No. 89, par. 4 et 5 (C.A. Man.) :

« The accused was interrogated after he was arrested, sobered up and had an opportunity to speak to counsel. On 18 occasions during the 3.5-hour interrogation he refused to answer police questioning and invoked his right to remain silent. Nevertheless, the two officers persisted in questioning him with appeals to his conscience to explain what happened.

I am not persuaded by the accused’s argument that he made it clear that he wished to remain silent, the police ignored him, and as a result his ability to make a meaningful decision of whether or not to discuss what happened was improperly overpowered. Police are not required to stop questioning a detainee merely because they invoke their right to silence. Whether police use of “legitimate means of persuasion,” in the face of repeated assertions of the right to remain silent makes a statement involuntary is a question of fact that turns on the individual circumstances (R v. Singh, 2007 SCC 48 at para 47, [2007] 3 SCR 405). »

R. c. W.B., [2015] O.J. No. 2312, par. 19 (C.A. Ont.) :

« In our view, the trial judge erred in law by failing to accurately set out and apply the test for assessing whether persistent police questioning will result in a breach of a detainee’s s. 7 Charter rights. The trial judge accurately noted that Singh states at para. 47 : “[P]olice persistence in continuing an interview, despite repeated assertions by the detainee that he wishes to remain silent, may well raise a strong argument that any subsequently obtained statement was not the product of a free will”. However, as noted above, in both Singh and Hebert, the Supreme Court also emphasized that police are entitled to use legitimate means of persuasion and that police persuasion, short of depriving a detainee of the ability to choose whether to speak, does not breach the right to silence. »

242. R. c. Bergevin, [2017] J.Q. No. 18784.

243. R. c. Timm, 1998 CanLII 12523 (QC CA), [1998] J.Q. No. 3168, par. 144 (C.A.).

244. R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405, par. 45.

245. R. c. Morasse, [2010] J.Q. No. 4560, par. 15.

246. R. c. Côté, 2008 QCCS 3749 (CanLII), [2008] J.Q. No. 7951, par. 307 :

« En plus d’avoir systématiquement violé son droit au silence, les policiers ont aussi dénigré le travail de l’avocat de la défense. En effet, ils ont dit à Mme Côté qu’elle avait plus d’expérience de la vie que son avocat, que la seule personne qui pouvait l’aider c’est elle et que les avocats peuvent dire n’importe quoi même s’ils peuvent avoir de bonnes raisons de dire n’importe quoi ! »

247. R. c. Verret, [2009] J.Q. No. 15688. Même si l’analyse proposée s’inscrit dans le cadre de la règle des confessions, les principes énoncés s’appliquent également au droit au silence garanti par l’article 7.

248. R. c. Lafleur, [2017] J.Q. No. 6926, par. 91 :

« Le respect des droits constitutionnels de l’accusé tels le droit au silence et le droit à l’assistance d’un avocat font aussi partie de l’examen du caractère volontaire d’une confession ».

Voir également R. c. Aykin, [2019] J.Q. No. 4190, par. 67 et 68 :

« De même, bien que la règle des confessions et le droit au silence soient distincts du droit à l’avocat, une atteinte à l’exercice de ce droit peut influer sur le caractère volontaire d’une déclaration, cela puisque le droit à l’avocat vise à permettre au prévenu d’obtenir des conseils juridiques pour lui permettre de faire un choix éclairé quant à sa décision de parler ou non avec la police (R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 RCS 405, par. 29; R. c. McCrimmon, 2010 CSC 36 (CanLII), [2010] 2 RCS 402, par. 26).

Dans la présente cause, il est vrai que M. Aykin participe à la conversation avec l’enquêteur sans y être forcé. Tel que mentionné précédemment, celui-ci est à l’aise au début de l’entrevue et il est d’emblée bavard. Ensuite, il soulève son droit au silence de manière sélective, à l’égard de certaines questions portant sur des sujets incriminants. Toutefois, les circonstances de la déclaration contestée, considérées dans leur ensemble, soulèvent un doute raisonnable sur son caractère volontaire. Il s’agit d’un jeune homme, arrêté brusquement, mis inutilement dans une cellule sèche durant de longues heures, privé injustement de son droit de consulter sans délai son avocat et soumis à un interrogatoire durant lequel on ignore et atténue la valeur des conseils juridiques qu’il a reçus. Dans ces conditions, la poursuite ne s’est pas déchargée de son fardeau d’établir le caractère volontaire de la déclaration hors de tout doute raisonnable. »

249. R. c. Wray, 1970 CanLII 2 (CSC), [1971] R.C.S. 272.

250. R. c. Wray, 1970 CanLII 2 (CSC), [1971] R.C.S. 272, par. 62 et 63 :

« Je souscris à la conclusion du Juge en chef Cartwright que nous ne devons pas nous écarter de l’arrêt Rex v. St. Lawrence, (1949), 1949 CanLII 100 (ON SC), 93 C.C.C. 376, [1949] O.R. 215, 7 C.R. 464. On y a étudié le droit appliqué depuis Rex v. Warwickshall, (1783), 1 Leach 263, et d’après lequel, même si une confession est irrecevable, le ministère public peut néanmoins mettre en preuve les faits découverts par suite de cette confession. Il y a eu ordinairement application de ce principe lorsqu’il s’agissait de la découverte d’objets reliés au crime. On peut mettre en preuve la découverte des objets même si la confession est irrecevable.

Pour justifier le rejet des confessions on invoque le fait qu’elles peuvent être d’une valeur douteuse si on les a obtenues dans certaines conditions. Cette règle ne s’applique aucunement à des faits incontestables, comme la découverte des objets. On prétend ici qu’il faudrait écarter cette preuve, bien qu’elle soit pertinente, recevable et très probante, parce que la recevoir serait inéquitable envers l’accusé et, d’après la Cour d’appel, discréditerait l’administration de la justice. »

251. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353.

252. R. c. Whittle, 1994 CanLII 55 (CSC), [1994] 2 R.C.S. 914, par. 29 :

« Bien que, selon la formulation traditionnelle de la règle des confessions, la raison d’être de cette règle soit d’assurer la fiabilité de la confession faite, il y a un fort courant sous-jacent qui justifie la règle en partie par l’équité du processus en matière criminelle. »

253. R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405, par. 21 :

« [...] La règle des confessions et le droit constitutionnel de garder le silence sont des manifestations du principe interdisant l’auto-incrimination. Ce dernier principe est une notion générale que le juge en chef Lamer a décrite utilement comme étant un “principe directeur général de droit criminel”, dont il est possible de tirer un certain nombre de règles : R. c. Jones, 1994 CanLII 85 (CSC), [1994] 2 R.C.S. 229, p. 249. De même, le juge Iacobucci a décrit le principe interdisant l’auto-incrimination dans l’arrêt R. c. White, 1999 CanLII 689 (CSC), [1999] 2 R.C.S. 417 :

Il ressort clairement de la jurisprudence de notre Cour que le principe interdisant l’auto-incrimination est un principe prépondérant dans notre système de justice criminelle, duquel émanent un certain nombre de règles issues de la common law et de la Charte, comme la règle des confessions et le droit de garder le silence, parmi tant d’autres. Ce principe peut aussi être la source de nouvelles règles en temps opportun. Dans la Charte, le principe interdisant l’auto-incrimination se retrouve dans plusieurs protections procédurales plus précises, comme, par exemple, le droit à l’avocat selon l’al. 10b), le droit à la non-contraignabilité selon l’al. 11c) et le droit à l’immunité contre l’utilisation de la preuve selon l’art. 13. La Charte prévoit également une protection résiduelle de ce principe par son art. 7. [Je souligne; par. 44.] »

254. R. c. Harrer, 1995 CanLII 70 (CSC), [1995] 3 R.C.S. 562, par. 21-23 :

« Je me dois d’ajouter que, si les circonstances avaient été telles que l’admission de l’élément de preuve aurait entraîné un procès inéquitable, je n’aurais eu aucune difficulté à l’écarter en vertu de la Charte. Je ne l’aurais pas fait en vertu du par. 24(2), qui permet d’écarter des éléments de preuve obtenus illicitement. Je ne l’aurais pas fait non plus en vertu du par. 24(1), qui habilite un tribunal compétent à accorder la réparation qu’il estime juste et appropriée à la personne dont les droits garantis par la Charte ont été violés. J’aurais plutôt écarté l’élément de preuve en me fondant sur le devoir qu’a le juge de première instance et qui est maintenant constitutionnalisé par suite de l’inscription, dans la Charte, du droit à un procès équitable d’exercer correctement son pouvoir discrétionnaire et d’écarter les éléments de preuve qui entraîneraient un procès inéquitable.

Toutefois, je vais tenter de préciser cette approche, parce qu’on a plaidé avec vigueur que, comme l’élément de preuve n’avait pas été obtenu en violation de la Charte, savoir le préalable à l’exercice du pouvoir d’écarter cet élément en vertu du par. 24(2) de la Charte, il n’existait aucun pouvoir, fondé sur la Charte, permettant de le faire. La difficulté que présente cet argument vient de ce qu’il ne tient pas compte de tous les aspects d’un procès équitable. Comme je l’ai mentionné, même si le par. 24(2) vise à écarter les éléments de preuve obtenus d’une manière qui porte atteinte à un droit garanti par la Charte, il ne s’applique que s’il y a eu violation de la Charte. La question qui nous intéresse en l’espèce n’est pas de savoir quelle réparation doit être accordée relativement à une violation, mais plutôt de quelle manière un procès doit être mené pour être équitable.

Bien que le droit de la preuve ait élaboré de nombreuses règles précises visant à prévenir l’admission en preuve d’éléments qui rendraient un procès inéquitable, le principe général que l’accusé a droit à un procès équitable ne peut pas être entièrement réduit à certaines règles précises. Dans l’arrêt R. c. Corbett, 1988 CanLII 80 (CSC), [1988] 1 R.C.S. 670, notre Cour a, à la majorité, clairement indiqué qu’un juge a le pouvoir discrétionnaire d’écarter des éléments de preuve qui, s’ils étaient admis, nuiraient à la tenue d’un procès équitable; voir aussi l’arrêt R. c. Potvin, 1989 CanLII 130 (CSC), [1989] 1 R.C.S. 525. De même, Sopinka, Lederman et Bryant, dans The Law of Evidence in Canada (1992), à la p. 401, concluent que [Traduction] “si l’utilisation de certains éléments de preuve compromettait l’équité du procès d’un accusé, il faudrait les écarter” (je souligne). »

255. R. c. Harrer, 1995 CanLII 70 (CSC), [1995] 3 R.C.S. 562, par. 45 :

« Le procès équitable est celui qui répond à l’intérêt qu’a le public à connaître la vérité, tout en préservant l’équité fondamentale en matière de procédure pour l’accusé. »

256. R. c. Williams, [2013] O.J. No. 987, par. 217-219, 223 :

« Indeed, it is interesting to note that for many years, notwithstanding the Crown’s failure to prove an accused’s statement voluntary, not only was evidence discovered through information revealed in the statement admissible (R. v. Wray, 1970 CanLII 2 (CSC), [1971] S.C.R. 272), the Crown was also entitled to adduce those portions of the statement itself that were confirmed to be true by facts extraneous to the statement : R. v. St. Lawrence (1949), 1949 CanLII 100 (ON SC), 93 C.C.C. 376 (Ont. H.C.J.). St. Lawrence was later expressly approved by the Supreme Court of Canada in Wray. The rule in St. Lawrence has, of course, been modified by R. v. Sweeney (2000), 2000 CanLII 16878 (ON CA), 50 O.R. (3d) 321 (C.A.), to make it Charter compliant, but Sweeney concerns itself only with the admissibility of the statement, not derivative evidence.

I recognize, of course, that the court in Sweeney went on to discuss, in a more general way, the gradual post-Charter demise of the rule in Wray. [...]

And, at paragraph 45, citing R. v. Harrer (1995), 1995 CanLII 70 (CSC), 101 C.C.C. (3d) 193 (S.C.C.), he refers to the recognition of a common law power to exclude evidence the admission of which would render the trial unfair, even though it was not obtained by a Charter breach.

Applying those principles to this case, the evidence of the telephone records is (i) probative of contact between the two accused at material times, (ii) potentially demonstrates, albeit in a roughhewn way, that Williams was in close proximity to the crime scene shortly after the shooting, and (iii) includes several text messages that are, arguably at least, highly inculpatory. In short, the records are highly probative. While the evidence is potentially very harmful to the accused, it is not prejudicial : R. v. (B.) (L.) (1997), 1997 CanLII 3187 (ON CA), 35 O.R. (3d) 35 (C.A.). I see no possibility for misuse of this evidence by the jury.

Third, even if I am wrong in holding that the records are not inadmissible by reason of the police learning the number from the accused in an involuntary statement, the telephone number, as I have discussed above, would inevitably have been discovered from examination of the device itself, which was lawfully seized in the search incident to arrest. »

257. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 117.

258. R. c. St. Lawrence, 1949 CanLII 100 (ON SC), [1949] O.R. 215 (H.C.), p. 391.

259. R. c. Sweeney, 2000 CanLII 16878 (ON CA), [2000] O.J. No. 3534 (C.A. Ont.); R. c. Frank, [2009] O.J. No. 5645.

260. R. c. St. Lawrence, 1949 CanLII 100 (ON SC), [1949] O.R. 215 (H.C.), p. 391 (cité en français dans R. c. Wray, 1970 CanLII 2 (CSC), [1971] R.C.S. 272, par. 12). Voir également la définition du juge Sopinka dans R. c. Hebert, 1990 CanLII 118 (CSC), [1990] 2 R.C.S. 151, par. 115 : « [L]a règle de l’arrêt R. v. St. Lawrence, [1949] O.R. 215 (H.C.), selon laquelle les parties d’une confession inadmissible, dont l’exactitude a été établie par l’obtention d’une preuve dérivée, deviennent admissibles. »

261. R. c. Sweeney, 2000 CanLII 16878 (ON CA), [2000] O.J. No. 3534, par. 42 (C.A. Ont.) :

« The St. Lawrence rule is an artifact of the decision of the Supreme Court of Canada in Wray. It is a product of a time when reliability was considered the sole rationale for the confession rule and when a trial judge had no residual discretion to exclude evidence because of the manner in which it was obtained. All of this has been overtaken by constitutional and judicial developments. »

262. R. c. Sweeney, 2000 CanLII 16878 (ON CA), [2000] O.J. No. 3534, par. 57 (C.A. Ont.) :

« To summarize, the Supreme Court has affirmed that reliability is not the sole basis for the confession rule. The court has identified the policy basis for the rule in broader concerns for the administration of justice, including deterrence of improper police conduct and fundamental principles of fairness such as the principle against self-incrimination. The fact that part of the statement has been confirmed by the finding of evidence cannot justify a rule based on these broader concerns. »

Voir également les commentaires intéressants du juge Cartwright dans R. c. Wray, 1970 CanLII 2 (CSC), [1971] R.C.S. 272, par. 17 :

« Bien qu’à mon avis cela soit un obiter dictum, il est difficile de ne pas en reconnaître la logique si le seul motif pour écarter une confession forcée est le risque qu’elle soit fausse. Si, par contre, l’exclusion d’une confession forcée se fonde aussi sur la maxime nemo tenetur seipsum accusare, la véracité ou la fausseté de la confession devient logiquement sans importance. Il serait vraiment étrange que la loi voulant qu’aucun accusé ne soit tenu de s’incriminer et ne puisse être contraint de témoigner à une enquête de coroner, à une enquête préliminaire ou à un procès, il soit quand même possible pour les policiers ou d’autres personnes ayant autorité de le forcer à faire une déclaration qui soit recevable en preuve contre lui. La solution qui semblerait s’imposer, si l’exclusion se fonde sur la maxime, serait qu’on ne peut aucunement se servir d’une confession forcée, même vérifiée par une preuve découverte subséquemment. »

263. R. v. Lam Chi-ming, [1991] 3 All E.R. 172, 179.

264. R. c. Sweeney, 2000 CanLII 16878 (ON CA), [2000] O.J. No. 3534, par. 60 (C.A. Ont.) :

« In my view, these comments from the Supreme Court represent a strong indication that using an involuntary confession is inconsistent with fundamental notions of trial fairness and the administration of justice. However, since the Supreme Court of Canada has not expressly overruled this aspect of Wray, in my view, it is not open to this court to disregard the basic holding that parts of an involuntary confession that are confirmed by the discovery of the fact are admissible. This court can only modify the Wray rule in light of the subsequent developments from the Supreme Court of Canada to acknowledge a discretion to exclude the evidence. »

265. R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449, par. 20. Voir également les commentaires du juge Cory au par. 19 :

« Le rapport qui existe entre ces deux préoccupations – fiabilité et équité – est particulièrement important. Il faut reconnaître que le but de la règle des confessions est d’écarter, non pas les confessions réellement peu fiables, mais les déclarations présumément peu fiables. En d’autres mots, la règle des confessions écarte les déclarations obtenues par la force, par la menace ou par des promesses parce qu’elles sont intrinsèquement peu fiables, mais elle ne s’attache pas à la véracité ou à la fausseté de la déclaration dans les faits. Si la règle des confessions avait vraiment pour objet la fiabilité de la déclaration, l’analyse du tribunal porterait alors sur la corroboration objective de la preuve découlant de la confession; si des éléments de preuve additionnels confirmaient l’exactitude de la déclaration, celle-ci devrait être admise en raison de sa fiabilité. »

266. R. c. Sweeney, 2000 CanLII 16878 (ON CA), [2000] O.J. No. 3534, par. 26 (C.A. Ont.) :

« To summarize, McLachlin J. held that, at a minimum, s. 7 includes protection against conduct that would, at common law, render a statement involuntary. Such conduct deprives the detainee of the right to choose. The fact that the statement would nevertheless be admissible at common law, because the judge had no discretion to exclude evidence on the basis of unfairness because of the pre-Charter decision in Wray, cannot limit the scope of the right to silence as understood under s. 7. »

267. R. c. Sweeney, 2000 CanLII 16878 (ON CA), [2000] O.J. No. 3534, par. 24 (C.A. Ont.) :

« Thus, if a statement were obtained under circumstances that would render it involuntary at common law, the accused’s rights under s. 7 would be violated. Whether the confession or any evidence obtained as a result of the confession would be inadmissible would depend upon application of s. 24(2) of the Charter. »

268. R. c. Hebert, 1990 CanLII 118 (CSC), [1990] 2 R.C.S. 151, par. 115.

269. R. c. Singh, 2007 CSC 48 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 405, par. 39 : « L’article 7 favorise aussi l’exclusion d’éléments de preuve dérivée qui auraient été admis en common law. »

270. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 118 :

« Le paragraphe 24(2) de la Charte a implicitement infirmé la pratique de common law consistant à toujours admettre les éléments de preuve dérivée fiables. Le juge doit désormais se demander si l’utilisation des éléments de preuve dérivée obtenus par suite d’une violation de la Charte serait susceptible de déconsidérer l’administration de la justice. »

271. R. c. Grant, 2009 CSC 32 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 353, par. 126.

272. R. c. Hammerstrom, [2006] B.C.J. No. 3187, par. 1 et 2 :

« This ruling is further to my earlier ruling on this blended voir dire that Mr. Hammerstrom’s confession was inadmissible, as the Crown had not proven voluntariness beyond a reasonable doubt. A primary basis for that ruling was the role that police trickery played in the loss of Mr. Hammerstrom’s volition. Although Mr. Hammerstrom had also argued this scenario was a violation of s. 7 of the Charter, I did not deal with that issue as it did not appear to be necessary, the statement having been ruled out under the confessions rule.

The defence, however, has now raised an issue as to whether information obtained by the police in the course of the statement should also be excluded as derivative evidence. Thus it becomes necessary to consider whether the circumstances also constituted a breach of s. 7. »

273. R. c. S.G.T., 2010 CSC 20 (CanLII), [2010] 1 R.C.S. 688, par. 30 :

« Il ressort clairement de ces principes que la “règle des confessions dérivées” est une émanation de la règle des confessions reconnue en common law. Il est donc manifeste que, tout comme la règle dont elle procède, elle s’applique aux confessions secondaires, c’est-à-dire aux déclarations faites à une personne en autorité qui sont suffisamment liées à une confession antérieure non volontaire pour être réputées non volontaires elles aussi. »

R. c. M.D., [2012] O.J. No. 5660, par. 53 et 57 (C.A. Ont.) :

« The derived confessions rule is a common law rule that governs the admissibility of a confession that has been preceded by an involuntary, thus inadmissible confession. The derived confessions rule is not a per se or bright line rule that excludes all subsequent confessions on the ground that they are tainted, irrespective of the degree of their connection to the prior inadmissible statement : R. v. I (L.R.) and T. (E.), [1993] 4 S.C.R. No. 504, at p. 526; and R. v. Hobbins, [1982] 1 S.C.R. No. 553, at p. 558.

[...]

Despite its origins as a common law rule where lack of voluntariness is the contaminating factor, the derived confessions rule is of more general application. The contaminating factor may be constitutional infringement, say a breach of s. 10(b) of the Charter. There, the subsequent statement is tainted if the breach and impugned statement can be said to be part of the same transaction or course of conduct. The admissibility analysis in these cases is performed under s. 24(2) of the Charter : R. v. Wittwer, 2008 SCC 33, [2008] 2 S.C.R. No. 235, at para. 21; Simon, at para. 69; and Plaha, at paras. 42-45. »

R. c. Manchulenko, 2013 ONCA 543 (CanLII), [2013] O.J. No. 3977, par. 67 (C.A. Ont.) :

« Sometimes, something of evidentiary value, considered alone, does not appear to fall foul of any admissibility rule. Nevertheless, the evidence, for example a confession of crime, may be sufficiently connected to an earlier involuntary (hence inadmissible) confession that it is considered involuntary by this association : R. v. T. (S.G.), 2010 SCC 20, [2010] 1 S.C.R. 688, at para. 28. The derived confessions rule excludes statements which, despite not being involuntary when considered alone, are sufficiently connected to an earlier involuntary confession to be rendered involuntary and hence inadmissible : T. (S.G.), at para. 28. Each subsequent confession may be involuntary if the tainting features that disqualified the first continued to be present, or if the fact the first statement was made, was a substantial factor contributing to the making of the second or subsequent statement : T. (S.G.), at para. 29; R. v. I. (L.R.) and T. (E.), 1993 CanLII 51 (CSC), [1993] 4 S.C.R. 504, at p. 526. Where the earlier contaminant is a Charter breach, s. 24(2) provides its own formula for exclusion : I. (L.R.) and T. (E.), at p. 532. (emphasis added) »

274. R. c. I. (L.R.) et T. (E.), 1993 CanLII 51 (CSC), [1993] 4 R.C.S. 504, par. 29 :

« Aucune règle générale n’excluait les déclarations subséquentes pour le motif qu’elles étaient entachées d’un vice indépendamment de leur degré de connexité avec la déclaration initiale admissible. À cet égard, j’adopte les propos suivants que tient le juge en chef Laskin, à la p. 558 de l’arrêt Hobbins, précité :

Il ne peut y avoir de règle absolue selon laquelle, simplement parce qu’on a jugé irrecevable une déclaration antérieure, une seconde déclaration recueillie par les mêmes policiers doit, elle aussi, être irrecevable. Ce sont les faits, y compris la similitude des circonstances et des procédés employés par la police ainsi que le laps de temps entre les deux déclarations, qui doivent être déterminants. »

275. R. c. G. (B.) [B.G.], 1999 CanLII 690 (CSC), [1999] 2 R.C.S. 475, par. 22 : « C’est en raison de la contamination qui existe entre la première confession et la seconde déclaration que cette dernière est inadmissible. »

276. R. c. I. (L.R.) et T. (E.), 1993 CanLII 51 (CSC), [1993] 4 R.C.S. 504, par. 29; R. c. Donard, [2014] S.J. No. 512, par. 18; R. c. Archer, [2014] O.J. No. 4750, par. 40 :

« There remains, however, a legitimate concern respecting the close nexus between the police station statement and the basement statement I have ruled inadmissible. The two statements are taken within an hour of each other, in similar circumstances and by the same officers. The focus of the inquiry is identical and the second interview repeats the inducements and references the contents of that earlier conducted in the basement. »

277. R. c. I. (L.R.) et T. (E.), 1993 CanLII 51 (CSC), [1993] 4 R.C.S. 504, par. 29; R. c. Leug, [2013] B.C.J. No. 3081, par. 81 :

« Given all the circumstances here – the change in location from Ms. Leung’s residence to the police station, the absence of Ms. Trinder and Cst. Demiris from the case at that point, the introduction of an entirely new officer, Detective Schell, the repeated explanations given to Ms. Leung that she was under arrest and had all her Charter rights, the two consultations with a lawyer, together with the intervening time period, I conclude the second statement was not simply a continuation of the first and could not have been perceived to be by Ms. Leung. »

278. R. c. Hobbins, 1982 CanLII 46 (CSC), [1982] 1 R.C.S. 553, par. 11.

279. R. c. I. (L.R.) et T. (E.), 1993 CanLII 51 (CSC), [1993] 4 R.C.S. 504, par. 29.

280. R. c. I. (L.R.) et T. (E.), 1993 CanLII 51 (CSC), [1993] 4 R.C.S. 504, par. 29.

281. R. c. I. (L.R.) et T. (E.), 1993 CanLII 51 (CSC), [1993] 4 R.C.S. 504, par. 30.

282. R. c. G. (B.), 1999 CanLII 690 (CSC), [1999] 2 R.C.S. 475, par. 23 :

« Le juge Sopinka indique clairement que la persistance des facteurs viciateurs ou l’importance de la première confession dans l’obtention de la seconde peuvent en établir le caractère dérivé. Bien que cela soit vrai dans les cas les plus clairs, il sera généralement plus facile d’établir ce caractère lorsque les deux conditions seront présentes dans une certaine mesure. En définitive, ce qui importe c’est que le tribunal soit convaincu que la connexité entre les deux déclarations est suffisante pour que la seconde ait été contaminée par la première. »

283. Mom c. R., [2018] J.Q. No. 8143 (C.A.).

284. Mom c. R., [2018] J.Q. No. 8143, par. 34 (C.A.).

285. R. c. Manchulenko, 2013 ONCA 543 (CanLII), [2013] O.J. No. 3977, par. 68 (C.A. Ont.) :

« In some circumstances, conduct by investigators prior to a second statement may sever the link between the original taint and the subsequent statement. In other words, investigators may attempt a “fresh start” in order to insulate the second statement from the taint that rendered the earlier statement inadmissible : R. v. Wittwer, 2008 SCC 33 (CanLII), [2008] 2 S.C.R. 235, at paras. 2-3. Where the antecedent taint is a Charter infringement, a fresh start may clearly sever the subsequent statement from the earlier Charter breach : R. v. Simon, 2008 ONCA 578 (CanLII), 269 O.A.C 259, at para. 69; Wittwer, at para. 3. Ultimately, the sufficiency of the connection between the Charter breach and the subsequent collection of the evidence requires a case-specific factual inquiry to determine whether the post-breach acquired evidence was “obtained in a manner that infringed or denied” any enumerated Charter right of the person charged : Simon, at para. 69. »

R. c. Mossaddad, [2017] O.J. No. 5122, par. 74 :

« Assuming for the purposes of this discussion that those statements were involuntary and therefore should be excluded, I am of the view that the evidence on this voir dire is such that those statements are sufficiently insulated from the video statement that in this case there was a fresh start rendering the video statement admissible. Specifically, in this case Mr. Mossaddad had his Charter rights and right to counsel repeated to him at the time of his booking. He was provided the opportunity to speak with duty counsel and avail himself of that right. It is clear from the video statement that he understood, from the advice that he was provided by duty counsel, that he had no obligation to respond to any police questioning and that it was his right to remain silent. »

286. R. c. G. (B.), 1999 CanLII 690 (CSC), [1999] 2 R.C.S. 475, par. 23.

287. R. c. M.D., [2012] O.J. No. 5660, par. 56. Sur ce point, le juge Watt cite les décisions suivantes : R. c. Plaha, (2004) 2004 CanLII 21043 (ON CA), 188 C.C.C. (3d) 289 (C.A. Ont.), par. 46 et R. c. Simon, 2008 ONCA 578, 269 O.A.C. 259, par. 69. Voir également R. c. Buttazzoni, [2016] O.J. No. 1689, par. 74 :

« In my view the interaction between Verma and Ramlall that occurred in the police cruiser, although interrupted in time, and although also interrupted by the accused speaking with his lawyer, in reality constituted one interview in that the first statement made represented a substantial factor that contributed to the making of the second statement. Thus, the videotaped statement was causally, temporally and contextually connected with the first statement. None of the words used by Verma or Singh cleansed away the deficiencies associated with the first tainted statement so as to establish beyond a reasonable doubt that the video statement was voluntary. »

288. Voir sur ce point R. c. S.G.T., 2010 CSC 20 (CanLII), [2010] 1 R.C.S. 688, par. 31 et 32 :

« S.G.T. soutient que l’arrêt R. c. G. (B.), 1999 CanLII 690 (CSC), [1999] 2 R.C.S. 475, de la Cour établit qu’il n’est pas nécessaire que la déclaration subséquente soit faite à une personne en autorité pour que l’exclusion joue et qu’il y ait exclusion du moment que les deux déclarations présentent un degré de connexité suffisant. La Cour d’appel, en l’espèce, a elle aussi fait grand cas de G. (B.). Toutefois, l’interprétation proposée par S.G.T. n’a jamais été entérinée. En effet, les juges majoritaires dans G. (B.) ont expressément refusé de statuer sur ce point, fondant plutôt l’exclusion de la seconde déclaration (faite à un psychiatre) sur l’impossibilité de l’admettre sans admettre indirectement la première, car la seconde renfermait effectivement la première, laquelle était inadmissible (par. 22 et 24). De plus, la dissidence formulée par la juge McLachlin (maintenant Juge en chef) et appuyée par les juges L’Heureux-Dubé et Gonthier a explicitement rejeté l’argument qu’une seconde déclaration n’a pas besoin d’être faite à une personne en autorité pour être inadmissible selon cette règle (par. 61).

Soit dit en tout respect, je ne partage pas l’avis du juge Fish que “sur le plan des principes et de la logique”, il est clair que “les confessions dérivées n’ont pas besoin d’être faites à une personne en autorité pour être jugées inadmissibles” (par. 85). Sur le plan des principes, cette affirmation générale ne tient pas compte de la distinction entre confession et aveu exposée précédemment. Quant à la logique, tout dépend des faits de l’espèce. Il est possible que la logique ait contraint la conclusion tirée dans G. (B.), où la déclaration ultérieure – laquelle contient effectivement la confession viciée faite auparavant à la police – a été faite à un psychiatre au cours d’un examen ordonné par la cour de son état mental. Il se peut que la logique ne soit pas aussi contraignante dans le cas où, par exemple, l’accusé répète la teneur de la confession viciée à un ami qui n’a aucun lien avec la poursuite. »

Pour une opinion contraire, voir R. c. G. (B.), 1999 CanLII 690 (CSC), [1999] 2 R.C.S. 475, par. 22 :

« À mon avis, il n’est pas nécessaire d’analyser ici l’arrêt I. (L.R.) et T. (E.) où le juge Sopinka traite d’une situation où deux confessions sont faites à des personnes en autorité. Il suffit de retenir de cet arrêt que la règle des confessions dérivées s’applique lorsqu’il y a connexité des deux déclarations. Ceci découle de la raison d’être de la règle. La Cour d’appel du Québec cite à ce sujet l’arrêt Monette c. The Queen, 1956 CanLII 68 (SCC), [1956] R.C.S. 400, où la Cour dit d’une déclaration irrecevable : “nothing more ought to be heard of it”, c.-à-d. [Traduction] “il n’en sera plus question”. C’est en raison de la contamination qui existe entre la première confession et la seconde déclaration que cette dernière est inadmissible. Par conséquent, il n’y a pas lieu de décider si la deuxième déclaration est une confession faite à une personne en autorité en l’espèce. Cette interprétation est aussi conforme aux exigences de la Charte qui a constitutionnalisé certains éléments de la règle des confessions, à l’art. 7. Une confession jugée inadmissible ne saurait être introduite en preuve indirectement sans mettre en cause le droit au silence et le principe interdisant l’auto-incrimination, ce que l’on se trouverait à faire en admettant une déclaration “contaminée” par une confession inadmissible. »

Voir également R. c. Tom, [2007] B.C.J. No. 1384.

289. R. c. G. (B.), 1999 CanLII 690 (CSC), [1999] 2 R.C.S. 475, par. 61.

290. R. c. Wittwer, 2008 CSC 33 (CanLII), [2008] 2 R.C.S. 235.

291. R. c. Wittwer, 2008 CSC 33 (CanLII), [2008] 2 R.C.S. 235, par. 22.

292. R. c. Wittwer, 2008 CSC 33 (CanLII), [2008] 2 R.C.S. 235, par. 21 et 22 :

« Les tribunaux appelés à décider si une déclaration est viciée par une violation antérieure de la Charte ont privilégié une approche généreuse et fondée sur l’objet visé. Il n’est pas nécessaire d’établir un lien de causalité strict entre la violation et la déclaration subséquente. La déclaration sera viciée s’il est possible d’affirmer que la violation et la déclaration en cause font partie de la même opération ou de la même ligne de conduite : Strachan, p. 1005. Le lien exigé entre la violation et la déclaration subséquente peut être [Traduction] “temporel, contextuel, causal ou un mélange des trois” : R. c. Plaha (2004), 2004 CanLII 21043 (ON CA), 189 O.A.C. 376, par. 45. Un lien qui est simplement “éloigné” ou “ténu” ne sera pas suffisant : R. c. Goldhart, 1996 CanLII 214 (CSC), [1996] 2 R.C.S. 463, par. 40; Plaha, par. 45.

Dans la présente affaire, je suis convaincu que le lien est temporel, au sens où la déclaration de l’appelant au sergent Skrine a suivi immédiatement la mention de la première déclaration irrecevable (la “déclaration Ghadban”). Le lien est également causal, au sens où la déclaration en cause a été obtenue après plus de quatre heures de résistance de l’appelant et – comme s’y attendait l’agent qui menait l’interrogatoire – parce que l’agent a mentionné la déclaration Ghadban. À cet égard, je cite encore une fois l’observation presciente du sergent Skrine : [Traduction] “J’avais le sentiment”, a-t-il dit lors de son témoignage, “que s’il devait faire des aveux au sujet de ces agressions, il le ferait uniquement s’il savait que j’étais au courant de sa conversation avec l’agent Ghadban”. Enfin, je suis convaincu que le lien entre la déclaration en cause et les déclarations irrecevables qui l’ont précédée est jusqu’à un certain point contextuel, dans la mesure où tout écart antérieur entre les deux a été comblé d’une manière intentionnelle et explicite par l’association faite entre les deux par le sergent Skrine lors de l’interrogatoire de l’appelant qu’il a effectué avec le soutien vigilant de l’agent Ghadban. Peu importe la façon dont on envisage la question, le lien exigé par les arrêts Goldhart et Plaha a clairement été établi. »

293. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 56 :

« La technique d’enquête Monsieur Big est une invention canadienne. Bien que sa première ébauche paraisse remonter à 1901, sa version moderne date des années 1990, et la police continue d’y recourir depuis (voir R. c. Todd (1901), 1901 CanLII 92 (MB CA), 4 C.C.C. 514 (B.R. Man.), p. 523). Selon la GRC en Colombie-Britannique, en 2008, la technique avait été utilisée plus de 350 fois au Canada. »

294. Laflamme c. R., [2015] J.Q. No. 8925, par. 9 (C.A.); Perreault c. R., [2015] J.Q. No. 3389, par. 46 (C.A.).

295. Sur les différentes formes que peut revêtir ce type d’opération, voir Bernard c. R., [2019] J.Q. No. 5839, par. 53 et 54 (C.A.) :

« C’est ainsi que, dans le cas qui nous occupe, Vince s’est inquiété du crime sous enquête, a fait sentir à l’appelant qu’il était sur le point d’être incriminé et lui a surtout fait sentir que s’il avouait le crime, il pourrait se mettre à l’abri de la police. Il a offert à l’appelant de le protéger par l’obtention d’un aveu d’une autre personne, “le sidéen”, à condition qu’il avoue son crime, un aveu sur lequel ce dernier a insisté à répétition et qu’il a finalement obtenu puisque “le sidéen” devait être au courant des détails du crime pour que sa confession soit crue.

Nul besoin d’en dire davantage sur les motifs, bien exposés précédemment ainsi que dans l’affaire Hart, pour lesquels ce type d’aveu risque de ne pas être digne de foi, la gratification offerte, soit d’éliminer la possibilité de faire l’objet d’une accusation de meurtre, s’avérant irrésistible. »

296. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 60 :

« Une fois le décor planté, l’opération atteint son point culminant lors de la rencontre – semblable à un entretien d’embauche – du suspect et de Monsieur Big. À chaque fois, Monsieur Big exprime alors son inquiétude au sujet des antécédents criminels du suspect et du crime sous enquête. Puis, progressivement, il devient évident au suspect que, s’il avoue le crime, il pourra entrer dans l’organisation criminelle et se mettre ainsi à l’abri de la police. On peut aussi lui dire que Monsieur Big dispose de preuves concluantes de sa culpabilité et que nier son crime sera interprété comme un manque de confiance. Dans un autre cas de figure, on lui dit que Monsieur Big a appris d’informateurs au sein de la police que des accusations fondées sur de nouveaux éléments de preuve étaient imminentes. L’organisation offre au suspect de le protéger par différents moyens, telles l’élimination d’un témoin ou l’obtention de l’aveu d’une autre personne, à condition qu’il avoue son crime à Monsieur Big. Tout au long de l’interrogatoire, les dénégations de culpabilité sont tenues pour mensongères, et Monsieur Big insiste pour que le suspect avoue (voir, p. ex., le mémoire de la C.L.A., par. 7-8; Keenan et Brockman, p. 19-21). »

297. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 4.

298. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 64 :

« On a tenté en vain d’opposer les garanties juridiques existantes aux aveux issus d’opérations Monsieur Big. La Cour a statué qu’une telle opération ne met pas en jeu le droit de l’accusé de garder le silence car il n’est pas détenu par la police au moment où il avoue (voir R. c. McIntyre, 1994 CanLII 95 (CSC), [1994] 2 R.C.S. 480; R. c. Hebert, 1990 CanLII 118 (CSC), [1990] 2 R.C.S. 151). La règle applicable en la matière, à savoir que le ministère public est tenu de prouver le caractère “volontaire” de la déclaration de l’accusé à une personne en situation d’autorité, ne s’applique pas non plus parce que, lorsqu’il avoue, l’accusé ne sait pas que Monsieur Big est policier (voir R. c. Grandinetti, 2005 CSC 5, [2005] 1 R.C.S. 27). »

Voir également R. c. Earhart, [2011] B.C.J. No. 2286, par. 77 (C.A. C.-B.) :

« This issue was again raised in Osmar. Police suspected Osmar of committing two murders but, for want of evidence, had not arrested or charged him. A “Mr. Big” operation was utilized and challenged at trial and on appeal. Osmar argued that the right to silence was not limited to detention. The Court rejected that submission, concluding at para. 43 that it was bound by the comments in Hebert. I agree with the reasoning of Rosenberg J.A. in Osmar and similarly conclude that the right to silence in the context of the undercover operator situation applies only during detention. See also : R. v. Singh, 2007 SCC 48, [2007] 3 S.C.R. 405 at para. 32. »

299. R. c. Hebert, 1990 CanLII 118 (CSC), [1990] 2 R.C.S. 151, par. 74.

300. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544.

301. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 31.

302. R. c. Mack, 2014 SCC 58 (CanLII), [2014] 3 R.C.S. 3, par. 44 :

« La règle vise essentiellement à déterminer si l’aveu issu d’une opération Monsieur Big doit être admis en preuve ou non. Elle ne permet pas de trancher la question ultime de savoir si l’aveu est fiable ou non et elle ne supprime pas le préjudice infligé par la preuve de moralité dont s’accompagne l’aveu. Ainsi, même lorsque l’aveu issu d’une opération Monsieur Big est admis en preuve, les craintes liées à sa non-fiabilité éventuelle et à son caractère préjudiciable demeurent. Il incombe alors au juge du procès de donner au jury des directives appropriées sur la manière de jauger ces aveux eu égard à ces préoccupations. »

303. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 85.

304. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 99 :

« Pour revenir à l’aveu issu d’une opération Monsieur Big, rappelons que sa valeur probante découle de sa fiabilité. Un aveu constitue une preuve convaincante de culpabilité, à condition qu’il soit avéré. L’aveu dont la fiabilité peut être mise en doute a une valeur probante moindre, et pour déterminer si la valeur probante de l’aveu issu d’une opération Monsieur Big l’emporte sur l’effet préjudiciable de la preuve de moralité dont il se double, le juge du procès doit s’assurer de sa fiabilité. »

305. R. c. Wruck, 2016 ABQB 370 (CanLII), [2016] A.J. No. 725, par. 28 et 29, conf. à [2020] A.J. No. 794 (C.A. Alb.) :

« When examining the circumstances surrounding the making of the statements, factors to be considered include the following :

1. the length of the operation;

2. the number of interactions between the undercover officers and the accused;

3. the nature of the relationship between the officers and the accused;

4. the nature and extent of any inducements offered;

5. the presence of any violence, or threats of violence, against the accused;

6. the overall conduct of any questioning of the accused; and

7. the accused’s personality, including his or her level of sophistication, age, and mental health. Allgood at para 43; Hart at para 102.

In examining the statements for markers of reliability, the Court should consider factors such as :

1. the level of detail contained in the statements;

2. whether the statements result in the discovery of additional evidence;

3. whether the statements identify elements of the crime which were not made public; and

4. whether the statements accurately describe mundane details of the crime the accused would not likely have known had he or she not committed it. Allgood at para 43; Hart at para 105. »

306. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 102.

307. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544 [résumé de l’arrêt].

308. Béliveau c. R., [2016] J.Q. No. 24174, par. 70 (C.A.).

309. Béliveau c. R., [2016] J.Q. No. 24174, par. 58 (C.A.).

310. Laflamme c. R., [2015] J.Q. No. 8925, par. 80 (C.A.).

311. Béliveau c. R., [2016] J.Q. No. 24174, par. 86 (C.A.).

312. R. c. Johnston, 2016 BCCA 3 (CanLII), [2016] B.C.J. No. 3, par. 68-70 (C.A. C.-B.) :

« Of particular significance is Mr. Johnston’s knowledge of aspects of the holdback evidence such as the killer’s use of a bicycle, the stab wounds to Mr. Fraser’s neck, and the broken knife blades. His statement that he kicked the victim in the ribs is consistent with the injuries Mr. Fraser sustained. That Mr. Johnston misstated the number of knives used and the number of stab wounds inflicted together with stating that he killed the victim over an unpaid debt does not render his statements unworthy of consideration by a trier of fact. A finding of threshold reliability is not precluded merely because there are some inaccuracies in an accused’s description of the actual facts : West at para 87; Allgood at para. 64. I note that the trial judge, in finding ultimate reliability, referred to Mr. Johnston having overstated the number of knives as well as the number of stab wounds as “exaggerations” : paras. 146, 149.

Other markers of threshold reliability (i.e., potentially confirmatory evidence) are :

(a) Mr. Johnston’s description of how he was dressed and his statement as to the time at which he rode a bicycle to Ms. Fraser’s house (which is generally consistent with Mr. Barker’s testimony);

(b) his knowledge that Mr. Fraser arrived in a truck;

(c) his knowledge that the knives came from a block in the kitchen; and

(d) his knowledge that video-game and other electrical equipment had been left on the living room floor.

As is readily apparent, Mr. Johnston knew details of Mr. Fraser’s murder that it was likely only the killer would know. This knowledge provides a powerful guarantee of the reliability of his statements during the Mr. Big interview. At the threshold-reliability stage, that guarantee is not diminished by the possibility that Mr. Johnston could have learned those details from Michael Johnston. »

313. R. c. Mack, 2014 SCC 58 (CanLII), [2014] 3 R.C.S. 3, par. 14 et 15 :

« Interrogé par Liam sur la façon dont il avait tué M. Levoir, l’appelant a répondu qu’il s’était servi d’une carabine de calibre .223 pour l’abattre de cinq balles, quatre à la poitrine et une au dos. Il a ajouté qu’on avait fait “un grand feu” chez son père et qu’il ne “rest[ait] plus rien” de M. Levoir.

La semaine suivante, le 21 avril 2004, l’appelant a été arrêté et accusé de meurtre au premier degré. La police a effectué une perquisition chez son père, et les restes de M. Levoir ont été retrouvés là où l’appelant avait dit à Ben avoir fait un feu. Des douilles provenant de la carabine trouvée dans l’appartement de l’appelant y ont également été découvertes. »

314. Perreault c. R., [2015] J.Q. No. 3389, par. 73 (C.A.) :

« Lorsqu’il a fait son aveu à Monsieur Big, l’appelant était en possession d’informations qui n’avaient pas été rendues publiques : 1) le fait que le coffre du véhicule de la victime était plein et 2) le fait qu’il avait été abandonné près du Château Frontenac, les portières déverrouillées. Seul l’assassin pouvait connaître ces faits que les policiers avaient tenus secrets jusqu’à l’arrestation de l’appelant. »

315. Perreault c. R., [2015] J.Q. No. 3389, par. 66-70 (C.A.) :

« L’aveu est truffé de détails et d’explications. Il est difficile d’imaginer qu’une personne n’ayant pas commis le meurtre pourrait les fournir. L’appelant donne une description précise de la manière dont il s’est débarrassé du corps sans se faire voir alors qu’il se trouvait dans un immeuble d’habitation, entouré de voisins. Il a reculé la voiture de la victime devant la fenêtre de son appartement. Il était sous une galerie et des voitures étaient stationnées de chaque côté. Il a enroulé le corps dans une couverture et l’a sorti par la fenêtre de l’appartement.

Le fait qu’il indique avoir stationné le véhicule à reculons constitue un détail fort précis. Il a probablement agi de cette façon dans le dessein de placer le corps dans le coffre arrière. Cela est fort logique. C’est seulement après avoir stationné le véhicule qu’il constate que le coffre est rempli et qu’il décide de placer le corps sur le banc arrière. Il s’agit d’un détail précis, qui est compatible avec la thèse qu’il est l’auteur du crime. Il fournit aussi un autre détail de ce type lorsqu’il parle de la couverture. Il explique qu’il ne peut se souvenir de sa couleur, mais il précise qu’il pourrait vérifier, car il possède une photo avec sa fille sur laquelle on voit la couverture en arrière-plan.

À la demande de Monsieur Big, l’appelant raconte également plusieurs fois la séquence des événements sans se contredire et avec une cohérence parfaite. Par exemple, il répète deux fois qu’il a étranglé la victime d’une seule main alors que Monsieur Big demande s’il l’a étranglée avec les deux mains. Il corrige Monsieur Big lorsque ce dernier résume les éléments dans le mauvais ordre chronologique. Il est catégorique quant au moment où il a déshabillé la victime (après ou pendant l’étranglement et non avant). Il répète aussi qu’il n’a pas réussi à avoir une relation sexuelle, même si Monsieur Big suggère le contraire à de nombreuses reprises.

On peut certes reconnaître que l’appelant a eu le temps de concevoir d’avance une histoire qu’il s’attendait à partager un jour, mais le niveau de détails et la cohérence avec laquelle l’histoire est relatée et répétée en rehaussent la fiabilité. »

Béliveau c. R., [2016] J.Q. No. 24174, par. 94 (C.A.) :

« Cependant, les indices les plus déterminants appuyant la fiabilité des aveux de l’appelant proviennent de sa rencontre avec Vince et chacun des complices présumés. Or, je rappelle que ces rencontres surviennent après celle intervenue avec “Monsieur Big” et contiennent des éléments de preuve que seuls les acteurs directement concernés dans le meurtre d’Alain Bernard pouvaient connaître. »

316. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 106.

317. R. c. Mack, 2014 SCC 58 (CanLII), [2014] 3 R.C.S. 3, par. 35 :

« En revanche, même si les aveux se doublaient d’une preuve de mauvaise moralité, le préjudice était limité. L’appelant n’avait pris part à aucun scénario comportant des actes de violence, et l’opération n’avait révélé, sur son passé, aucun fait qui lui aurait été préjudiciable. »

318. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 109.

319. R. c. Allgood, [2015] S.J. No. 387 (C.A. Sask.); R. c. Randle, [2016] B.C.J. No. 526 (C.A. C.-B.); R. c. Johnston, 2016 BCCA 3 (CanLII), [2016] B.C.J. No. 3, par. 51-55, 58 (C.A. C.-B.) :

« Scenarios involving violence are a common feature of a Mr. Big operation directed at a person suspected of having committed murder. Such scenarios are used, as they were in the case at bar, to give the impression that the fictitious criminal organization tolerates and is prepared to use violence. This is done to create an atmosphere in which the person under investigation will not be reluctant to discuss his or her past involvement in similar violent acts : see R. v. West, 2015 BCCA 379 at para. 99.

In Laflamme, it was not the scenarios involving violence directed at persons outside the criminal organization that took the investigation over the line. Rather, what the Court found unacceptable was the directing of threats at Mr. Laflamme and Vince. Those threats were unacceptable because they amounted to coercion for the purpose of extracting a confession : paras. 77-87.

That Laflamme does not stand for the proposition it is unacceptable for the police to use scenarios involving violence or threats of violence is reflected in R. c. Perreault, 2015 QCCA 694, 19 C.R. (7th) 393 (“Perreault No. 2”), another recent judgment of the Court of Appeal of Quebec. [...]

The Mr. Big operation in Perreault involved a fictitious criminal organization engaged in various illegal activities including the extortion of an escort agency. There were 41 scenarios, the last being the Mr. Big interview. In one scenario the undercover officer who befriended Mr. Perreault simulated beating up an escort. Also, the officer who befriended Mr. Perreault told him that he had approved the murder of a woman : Perreault No. 1 at paras. 5-8; Perreault No. 2, paras. 14-16.

In rejecting Mr. Perreault’s argument that the Mr. Big operation constituted an abuse of process, the Court, in Perreault No. 2, noted no violence or threats of violence had been directed at Mr. Perreault. Having regard to all the circumstances, it held that the admissions Mr. Perreault made during the Mr. Big interview were not the product of coercive police tactics : paras. 87-89.

In the case at bar, the Mr. Big operation directed at Mr. Johnston was, in substance, no different than those described in Allgood and in this Court’s judgment in West. In other words, it was “typical”. Although Mr. Johnston was unemployed, there is no suggestion he was destitute or socially isolated. The police neither preyed on his vulnerabilities, nor directed violence or threats of violence at him or anyone close to him. »

320. R. c. Wruck, 2016 ABQB 370 (CanLII), [2016] A.J. No. 725, par. 21, conf. à [2020] A.J. No. 794 (C.A.) :

« However, it is clear that it is not just violence or threats of violence that constitute police misconduct or abuse of process. Hart and other cases have confirmed that it is unacceptable for those involved in Mr. Big operations to prey on an accused’s vulnerabilities (para 117). These may include : mental health problems, substance addictions, youthfulness, social isolation, poverty and other socio-economic and health related vulnerabilities. »

Subramaniam c. R., [2019] Q.J. No. 8908, par. 28 (C.A.) :

« The judge in the present case specifically concludes that the evidence failed to disclose that in the MBO there was any financial coercion, coercion by the supply of alcohol, emotional entrapment, exploitation of the appellant’s youthfulness, or any threats of violence. Having considered these points, the judge concludes that the appellant was a willing and even enthusiastic participant in a MBO in which there was no coercion by the police. The judge concludes that the appellant chose to participate in this scheme and chose to make the statement on 28 August 2012. Accordingly, he decides to admit the statement. These findings of fact, and the conclusions drawn from them, are entitled to a high degree of deference in this court. »

321. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 115 :

« Il est évidemment impossible de recourir à une formule précise pour déterminer à quel moment une opération Monsieur Big devient abusive. Les opérations menées sont trop différentes les unes des autres pour qu’une frontière nette se dessine, mais une ligne directrice peut être avancée. L’opération vise l’obtention d’aveux. Le seul fait de recourir à des incitations n’est pas condamnable (Oickle, par. 57). Or, le comportement des policiers, y compris leurs incitations et leurs menaces, devient problématique lorsqu’il s’apparente à l’exercice d’une contrainte. Les policiers qui mènent une telle opération ne sauraient être autorisés à venir à bout de la volonté de l’accusé et à contraindre ainsi ce dernier à avouer. Cela équivaudrait presque assurément à un abus de procédure. »

322. Subramaniam c. R., [2019] Q.J. No. 8908, par. 25 (C.A.) :

« It is important to underscore what the principles in Hart permit in an MBO and what they do not permit. They permit the use of stratagems, inducements, tricks and subterfuges to obtain a statement. They permit the police to pursue this strategy even if the suspect is in some way vulnerable. Whether or not a suspect has an identifiable vulnerability, they do not permit the police to obtain a statement by coercion that has the effect of overcoming the will of the suspect. »

Voir également Perreault c. R., [2015] J.Q. No. 3389, par. 89 (C.A.) :

« L’appelant n’a pas établi qu’il a été victime de contrainte telle que l’aveu doit être exclu de la preuve ou que les procédures doivent être arrêtées. Certes, les policiers ont usé d’astuces et de subterfuges pour l’amener à confesser un crime, mais il n’a pas été soumis à des actes de violence, d’une part, et il ne présentait pas un état de vulnérabilité manifeste, d’autre part. Il faut tenir compte de l’état global de l’appelant et notamment de sa personnalité. Il vivait certes de l’aide sociale et, sans être isolé socialement, il avait un mode de vie solitaire, mais il est intelligent, volontaire, déterminé et doté d’une forte personnalité. »

323. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 115.

324. R. c. Bahia, 2020 BCCA 156 (CanLII), [2020] B.C.J. No. 903, par. 181 (C.A. C.-B.) :

« To obtain relief the judge viewed as being tantamount to a stay of proceedings, Baranec was obliged to demonstrate that the police had engaged in conduct so offensive to societal notions of fair play and decency that admitting his confession to murder would, in the eyes of a reasonable and well-informed member of the community, harm the integrity of the justice system. In all the circumstances of this case, the judge concluded that Baranec had failed to meet his onus on this issue. I see no error in principle in the way the judge analyzed Baranec’s abuse of process claim ».

325. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 89.

326. R. c. Keene, [2020] O.J. No. 4299, par. 27 (C.A. Ont.) :

« As a practical matter, the abuse of process issue can be addressed first because if the evidence is excluded on that basis, there is no need to weigh its probative value against its prejudicial effect : Hart, at para. 89. »

327. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 146.

328. Béliveau c. R., [2016] J.Q. No. 24174, par. 128 (C.A.) :

« Je rappelle qu’il revient au jury de décider en dernier ressort de la fiabilité d’un aveu obtenu dans le cadre d’une enquête “Monsieur Big”. L’exercice de ce pouvoir d’appréciation doit reposer sur des directives adéquates de nature à aider le jury à s’acquitter de sa tâche, notamment en se voyant cibler différents facteurs permettant de jauger la fiabilité de l’aveu ».

329. R. c. Mack, 2014 SCC 58 (CanLII), [2014] 3 R.C.S. 3, par. 50.

330. Béliveau c. R., [2016] J.Q. No. 24174, par. 139 (C.A.).

331. Béliveau c. R., [2016] J.Q. No. 24174, par. 140-145 (C.A.) :

« Dans le but d’aider le jury à s’acquitter de sa mission relative à l’appréciation des aveux de l’appelant, le juge devait examiner avec lui les facteurs propres aux faits de l’espèce. Ainsi, il aurait dû s’attarder aux éléments de preuve qui permettaient de mieux cerner la personnalité de l’appelant et sa possible vulnérabilité aux pressions habiles mises de l’avant par l’Organisation. À ce chapitre, les incitations financières faites à l’appelant constituaient un facteur qui méritait l’attention du jury, ne serait-ce que pour décider si celles-ci avaient pu jouer un rôle déterminant sur son choix de se confier à “Monsieur Big”.

Les directives du juge sont également silencieuses sur l’impact qu’ont pu avoir sur l’appelant les différents scénarios auxquels il a été exposé impliquant ou suggérant l’usage de la violence à l’égard des tiers. Elles le sont tout autant en ce qui a trait au niveau d’intimidation subtile que pouvait receler la rencontre avec “Monsieur Big”, notamment en ne pointant pas les éléments de cette rencontre capables de créer cette impression.

Toujours en lien avec la personnalité de l’appelant, l’intensité et la durée de sa relation avec Vince auraient dû être soulignées au jury en vue d’apprécier le poids de ce facteur dans le choix de l’appelant de se confier à “Monsieur Big”.

Bref, le juge n’aborde pas de front avec le jury les différents facteurs susceptibles de toucher à la non-fiabilité éventuelle des aveux de l’appelant et ne l’incite pas en conséquence à les considérer. »

332. R. c. Mack, 2014 SCC 58 (CanLII), [2014] 3 R.C.S. 3, par. 54.

333. R. c. S.G.T., 2010 CSC 20 (CanLII), [2010] 1 R.C.S. 688, par. 20.

334. R. c. S.G.T., 2010 CSC 20 (CanLII), [2010] 1 R.C.S. 688, par. 20 :

« La distinction entre aveu et confession est pertinente en l’espèce. Selon les règles de preuve, les déclarations d’un accusé sont des aveux faits par une partie opposée et, à ce titre, elles relèvent d’une exception à la règle du oui-dire. Elles sont admissibles comme preuve de la véracité de leur contenu. Les déclarations d’un accusé à des personnes ordinaires, tels des amis ou des membres de sa famille, sont présumées admissibles sans voir-dire. C’est seulement lorsque l’accusé fait une déclaration à une “personne en autorité” que le ministère public doit prouver le caractère volontaire de la déclaration pour que celle-ci soit admise en preuve. Il s’agit là, bien sûr, de la règle des confessions. »

R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 63 :

« Dans les affaires où la technique a été utilisée, les aveux obtenus ont généralement été admis en preuve au procès. Selon la jurisprudence actuelle, ils le sont sur le fondement de l’exception à la règle du oui-dire qui s’applique aux déclarations de l’intéressé (voir R. c. Evans, 1993 CanLII 86 (CSC), [1993] 3 R.C.S. 653, p. 664; R. c. Osmar, 2007 ONCA 50, 84 O.R. (3d) 321, par. 53). L’admissibilité des déclarations de l’intéressé découle de la nature contradictoire du débat judiciaire et de la croyance selon laquelle “les déclarations antérieures d’une [personne] peuvent être admises contre [elle, car elle] ne peut se plaindre de la non-fiabilité de ses propres déclarations” (Evans, p. 664). »

R. c. Evans, 1993 CanLII 86 (CSC), [1993] 3 R.C.S. 653, par. 24 :

« L’admission des aveux ne repose pas sur les mêmes motifs que d’autres exceptions à la règle du ouï-dire. En fait, on peut se demander si la preuve constitue réellement du ouï-dire. L’effet pratique de cette distinction doctrinale est qu’au lieu de chercher des garanties circonstancielles indépendantes de fiabilité, il suffit de présenter la preuve contre une partie.

L’admissibilité de cette preuve repose sur la théorie du système contradictoire voulant que les déclarations antérieures d’une partie peuvent être admises contre la partie qui ne peut se plaindre de la non-fiabilité de ses propres déclarations. Comme l’a dit Morgan, [Traduction] “une partie peut difficilement faire valoir qu’elle n’a pas eu l’occasion de se contre-interroger ou qu’elle n’est pas digne de foi sauf lorsqu’elle s’exprime sous serment” (Morgan, “Basic Problems of Evidence” (1963), pp. 265 et 266, cité dans McCormick on Evidence, op. cit., à la p. 140). La règle est la même en matière civile et en matière pénale sous réserve des règles particulières applicables aux confessions en matière pénale. »

335. R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449, par. 30.

336. R. c. Hart, 2014 CSC 52 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 544, par. 88; R. c. Pearce, [2014] M.J. No. 202, par. 61 (C.A. Man.) :

« While not argued in this case, I think it is important to note that the confessions rule is not the only judicial safeguard against false confessions (R. v. Wells (S.W.), 2003 BCCA 242 at paras. 59-64, 181 B.C.A.C. 271). At common law a judge has discretion to exclude relevant and otherwise admissible evidence in two situations (R. v. Buhay, 2003 SCC 30 at para. 40, [2003] 1 S.C.R. 631). First, applying a cost-benefit analysis, a judge may exclude such evidence if its prejudicial effect exceeds its probative value (R. v. Seaboyer; R. v. Gayme, 1991 CanLII 76 (CSC), [1991] 2 S.C.R. 577 at 610-11, and Mohan, 1994 CanLII 80 (CSC), [1994] 2 S.C.R. 9 at pp. 20-21). In such cases the integrity of the jury’s reasoning is preserved by preventing their misuse or overuse of evidence of questionable value. Second, a judge may also exclude evidence if its admission would result in an unfair trial to an accused because of concerns about the process by which the evidence was obtained in the absence of a breach of the Charter (R. v. Harrer, 1995 CanLII 70 (CSC), [1995] 3 S.C.R. 562 at paras. 23-24; R. v. Buric (1996), 1996 CanLII 1525 (ON CA), 28 O.R. (3d) 737 at 749-50 (C.A.), aff’d, 1997 CanLII 380 (CSC), [1997] 1 S.C.R. 535; and R. v. Osmar, 2007 ONCA 50 at para. 48, 84 O.R. (3d) 321, leave to appeal to S.C.C. ref’d, [2007] S.C.C.A. No. 157 (QL)). »

337. R. c. Wells, [2003] B.C.J. No. 927, par. 59 (C.A. C.-B.) :

« In my opinion, Hodgson, supra, does not stand as a bar to the possibility of evidence of a confession being excluded other than through the confessions rule. In that case, Cory J. observed, at para. 26, that “there can be no doubt that there may well be great unfairness suffered by the accused when an involuntary confession obtained as a result of violence or credible threats of imminent violence by a private individual is admitted into evidence”. While Cory J. expressed the opinion that change to the common law confessions rule should be effected by Parliament, rather than judicially, because the change would represent a significant change from the traditional rule, Harrer and Terry indicate that an alternative to the common law confessions rule already exists in the law which would permit exclusion of evidence if required to ensure a fair trial. In other words, Charter guarantees of trial fairness and fundamental justice may prompt exclusion of evidence regardless of whether the traditional common law confessions rule would reach the opposite result. »

338. R. c. McNeil, 2009 CSC 3 (CanLII), [2009] 1 R.C.S. 66, par. 14 :

« L’obligation du ministère public de communiquer à l’accusé tous les renseignements pertinents qui sont en sa possession est bien établie en common law et est maintenant inscrite dans la constitution à l’art. 7 de la Charte canadienne des droits et libertés qui consacre le droit à une défense pleine et entière. »

339. R. c. Stinchcombe, 1991 CanLII 45 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 326.

340. R. c. Chaplin, 1995 CanLII 126 (CSC), [1995] 1 R.C.S. 727, par. 21 :

« Notre Cour a clairement établi que le ministère public a l’obligation générale de divulguer tous renseignements, inculpatoires ou disculpatoires, sauf s’il s’agit d’une preuve qui échappe au contrôle de la poursuite, qui est manifestement sans pertinence ou qui fait l’objet d’un privilège. »

341. R. c. Chaplin, 1995 CanLII 126 (CSC), [1995] 1 R.C.S. 727, par. 20; R. c. Carosella, 1997 CanLII 402 (CSC), [1997] 1 R.C.S. 80, par. 36 :

« Le fondement de l’obligation du ministère public de produire les documents susceptibles d’avoir un effet sur le déroulement de la défense est que l’omission de le faire porterait atteinte au droit constitutionnel de l’accusé de présenter une défense pleine et entière. »

R. c. Egger, 1993 CanLII 98 (CSC), [1993] 2 R.C.S. 451, par. 19 :

« [L]e ministère public est tenu de communiquer à l’accusé tous les renseignements qui sont raisonnablement susceptibles d’avoir un effet sur sa capacité d’avoir une défense pleine et entière, et de le faire assez tôt pour laisser à l’accusé suffisamment de temps pour prendre les mesures qu’il est susceptible de prendre et qui ont un effet sur ce droit ou peuvent en avoir un. Cette obligation a des fondements constitutionnels qui découlent de l’art. 7 de la Charte canadienne des droits et libertés... »

342. R. c. Stinchcombe, 1991 CanLII 45 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 326, par. 17.

343. R. c. Dixon, 1998 CanLII 805 (CSC), [1998] 1 R.C.S. 244, par. 21.

344. Ce droit recouvre autant les renseignements en possession ou contrôle du ministère public (régime Stinchcombe) que de tiers (régime O’connor). R. c. Carosella, 1997 CanLII 402 (CSC), [1997] 1 R.C.S. 80, par. 26 : « Le droit d’un accusé d’obtenir la production de documents par le ministère public ou par des tierces parties est un droit constitutionnel. »

345. R. c. Gubbins, 2018 CSC 44 (CanLII), [2018] 3 R.C.S. 35, par. 18.

346. R. c. Dixon, 1998 CanLII 805 (CSC), [1998] 1 R.C.S. 244, par. 24 :

« Il sera nécessaire plus tard d’examiner plus en profondeur la nature de l’obligation dont il faut s’acquitter pour mériter un nouveau procès. Il suffit, pour l’instant, de faire observer qu’aux fins de cette première étape de l’analyse une cour d’appel peut bien conclure à la violation du droit à la divulgation que la Charte garantit à un accusé, tout en refusant d’accorder un nouveau procès à titre de réparation si elle juge que le procès a été foncièrement équitable et qu’il n’y avait aucune possibilité raisonnable que le résultat du procès aurait été différent si la documentation non communiquée avait été produite. Le droit à la divulgation complète n’est qu’une composante du droit à une défense pleine et entière. Il ne s’ensuit pas automatiquement qu’il y a atteinte au droit à une défense pleine et entière garanti par la Charte, du seul fait qu’il y a eu violation du droit à la divulgation. »

347. Boucher c. The Queen, 1954 CanLII 3 (SCC), [1955] R.C.S. 16, 23 et 24 (cité en français dans R. c. Stinchcombe, 1991 CanLII 45 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 326, par. 11).

348. R. c. Quesnelle, 2014 CSC 46 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 390, par. 18 :

« En qualité d’officier de justice et de ministre de la Justice, le ministère public doit rechercher l’accomplissement de la justice, et non l’obtention de déclarations de culpabilité, et il doit éviter les erreurs judiciaires dans toutes les poursuites. »

349. R. c. Stinchcombe, 1991 CanLII 45 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 326, par. 12.

350. R. c. Stinchcombe, 1991 CanLII 45 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 326, par. 12.

351. R. c. Stinchcombe, 1991 CanLII 45 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 326, par. 29 :

« Quant à savoir ce qu’il convient de divulguer, le principe général précédemment évoqué exige la divulgation de tous les renseignements pertinents. Doivent être divulgués non seulement les renseignements que le ministère public entend produire en preuve, mais aussi ceux qu’il n’a pas l’intention de produire. Aucune distinction ne devrait être faite entre preuve inculpatoire et preuve disculpatoire. D’où l’obligation du ministère public de divulguer tous les renseignements pertinents, qu’ils soient inculpatoires ou disculpatoires. »

352. R. c. Egger, 1993 CanLII 98 (CSC), [1993] 2 R.C.S. 451, par. 20. Voir sur ce point Rodrigues c. Desaulniers, [2015] J.Q. No. 2828, par. 40 :

« Le juge qui effectue le contrôle doit déterminer si l’accusé peut raisonnablement utiliser la communication des renseignements :

1) pour réfuter la preuve et les arguments de la poursuite;

2) pour miner la crédibilité des témoins;

3) pour présenter un moyen de défense;

4) pour parvenir à une décision susceptible d’avoir un effet sur le déroulement de la défense comme :

a) la présentation ou non d’une preuve,

b) permettre la découverte et l’exploration de nouvelles pistes d’enquête. »

353. R. c. McNeil, 2009 CSC 3 (CanLII), [2009] 1 R.C.S. 66, par. 17 :

« Stinchcombe énonce clairement que l’information pertinente devant être communiquée par la partie principale comprend non seulement les renseignements ayant trait aux éléments que le ministère public a l’intention de présenter en preuve contre l’accusé, mais également ceux qui peuvent raisonnablement aider ce dernier à présenter une défense pleine et entière (p. 343-344). L’obligation qui incombe au ministère public subsiste après le procès. Ainsi, dans le contexte d’un appel, les renseignements pertinents englobent tout renseignement qui peut raisonnablement aider l’appelant à faire valoir sa thèse en appel. »

354. R. c. Taillefer; R. c. Duguay, 2003 CSC 70 (CanLII), [2003] 3 R.C.S. 307, par. 29 et 30 :

« Le rapport de la Commission Poitras a révélé que de nombreux éléments de preuve n’ont pas été divulgués à la défense lors du procès. La nouvelle preuve est essentiellement constituée des déclarations verbales et écrites de divers témoins recueillies par la police durant son enquête, de notes d’enquête des policiers au cours des interrogatoires des accusés et de la dénonciation assermentée d’un policier visant à obtenir un mandat de perquisition. Tel que nous le verrons plus loin avec davantage de détails, plusieurs de ces éléments non divulgués étaient pertinents pour la défense. Nombre d’entre eux auraient pu servir à ébranler la crédibilité de certains témoins de la poursuite. D’autres soulevaient des doutes sérieux quant à la crédibilité de la thèse présentée par le ministère public. Enfin, certains auraient permis à la défense d’explorer ou de découvrir de nouvelles pistes d’enquête.

La déclaration de Terris Daye aurait dû elle aussi être divulguée. Daye implique l’appelant dans les voies de fait commises contre Rob Gillis, au sujet desquelles il n’a été ni mis en accusation ni reconnu coupable. Daye a aussi fait, dans sa déclaration, certaines remarques incriminantes au sujet de l’appelant, comme par exemple : [Traduction] “Spencer a frappé cet homme à coups de poing et à coups de pied. Il aime donner des coups de pied.” La déclaration de Daye contredit également le témoignage de Clayton à certains égards et, par conséquent, elle aurait pu être utile pour attaquer la crédibilité de Clayton. Ces aspects de la déclaration de Daye devront être étudiés de plus près en examinant la question de savoir si l’omission du ministère public de divulguer cette déclaration a porté atteinte au droit à une défense pleine et entière que la Charte garantit à l’appelant. Encore une fois, cette déclaration satisfait au critère préliminaire de l’arrêt Stinchcombe et aurait dû être divulguée. Il s’ensuit qu’il y a eu atteinte au droit de l’appelant à la divulgation, du fait que le ministère public a omis par inadvertance de produire ces deux déclarations. »

355. R. c. Dixon, 1998 CanLII 805 (CSC), [1998] 1 R.C.S. 244, par. 28 :

« Pour réduire au minimum le risque de non-divulgation par inadvertance, le ministère public pourrait bien choisir de divulguer même les déclarations de témoins qui ne semblent pas pertinentes au départ. Évidemment, la défense connaît mieux sa preuve que le ministère public, et quelque chose qui semble non pertinent au ministère public pourrait avoir de l’importance pour la défense. »

R. c. Stinchcombe, 1991 CanLII 45 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 326, par. 20 : « Si le ministère public pèche, ce doit être par inclusion. Il n’est toutefois pas tenu de produire ce qui n’a manifestement aucune pertinence. »

Berger c. R., [2012] J.Q. No. 23976, par. 29 et 30 :

« Le point de départ est l’enseignement de la Cour suprême dans l’arrêt O’Connor : lorsque la poursuite est en possession d’un document, il est présumé pertinent. Plus récemment dans l’arrêt McNeil, la Cour suprême a rappelé que “the material in possession of the prosecuting Crown is relevant to the accused’s case. Otherwise, the Crown would not have obtained possession of it (O’Connor, at para. 12).”

En pratique, bien sûr, ce ne sont pas tous les éléments de l’enquête qui seront retenus par le ministère public pour faire partie de la preuve au procès, mais cela ne leur retire pas la pertinence prima facie de ses renseignements au sens de la communication de la preuve. »

R. c. McNeil, 2009 CSC 3 (CanLII), [2009] 1 R.C.S. 66, par. 28 :

« Comme nous l’avons déjà vu, l’obligation présumée qui incombe à l’avocat du ministère public de communiquer les fruits de l’enquête en sa possession établie dans Stinchcombe repose sur l’hypothèse que les renseignements sont pertinents et comprennent probablement la preuve qui sera présentée contre l’accusé. »

356. R. c. Taillefer; R. c. Duguay, 2003 CSC 70 (CanLII), [2003] 3 R.C.S. 307, par. 60 :

« Tel que défini par la jurisprudence, ce concept de pertinence favorise la divulgation de preuve. Peu de renseignements seront soustraits à l’obligation de communication de la preuve imposée à la poursuite. Comme l’affirmait notre Cour dans l’arrêt Dixon, précité, “le critère préliminaire fixé pour la divulgation [de la preuve] est fort peu élevé. [...] L’obligation de divulguer du ministère public est donc déclenchée chaque fois qu’il y a une possibilité raisonnable que le renseignement soit utile à l’accusé pour présenter une défense pleine et entière” (par. 21; voir également R. c. Chaplin, 1995 CanLII 126 (CSC), [1995] 1 R.C.S. 727, par. 26-27). “Si le ministère public pèche, ce doit être par inclusion. Il n’est toutefois pas tenu de produire ce qui n’a manifestement aucune pertinence” (Stinchcombe, précité, p. 339). »

357. R. c. Siemens, [1998] A.J. No. 1, par. 30-32 (C.A. Alb.) :

« While it is clear that Crown counsel has ultimate responsibility for decisions regarding relevance and disclosure of evidence in the possession of the Crown, that in our view does not include a requirement that Crown counsel personally examine and catalogue every item of evidence, every statement, every document, etc., that has been gathered by the police in the course of investigation, or which may be held by other state agencies, to fulfil his or her duty to the accused and the Court.

We recognize that the imposition of such a duty on Crown counsel would create an impossible situation in many cases, such as the present. It is not only in wiretap cases that the Crown must rely on other agencies to make determinations as to relevance of information and provide the Crown with summaries of information which is gathered in the course of an investigation. Police conduct searches, and decide what evidence is to be seized. They provide descriptions of the physical evidence, not the item of evidence itself. In commercial cases, police officers and other staff inspect large volumes of documents and provide resumes to the Crown. They interview witnesses and provide statements, notes or will say outlines. If the current ruling of the trial judge stands and Crown counsel may only make disclosure decisions based on personal inspection and knowledge of all evidence, the system will grind to a halt. All searches, witness interviews and investigations will have to be conducted by Crown lawyers so that they, from their own personal knowledge, can say that all relevant evidence has been disclosed.

We see no need for Crown counsel to personally spend days or weeks listening to lengthy tapes, or inspecting documents and other evidence to fulfil the duty of disclosure. Crown counsel is entitled to rely on information provided to him or her by police officers and other staff members regarding the content of documents, especially those considered to have no relevance to proceedings. While the law regarding disclosure deals with obligations of the Crown and speaks of breaches of ethical duties for failure to disclose relevant materials, nothing which we have found in the authorities requires that the burden of examining and cataloguing evidence be assumed by a Crown lawyer. »

358. R. c. Egger, 1993 CanLII 98 (CSC), [1993] 2 R.C.S. 451, par. 19 :

« L’obligation de divulgation qu’a le ministère public est assujettie à un pouvoir discrétionnaire, dont la justification lui incombe, de retenir les renseignements qui, de toute évidence, ne sont pas pertinents ou dont la non-divulgation est exigée par les règles en matière de privilège, ou de retarder la divulgation de renseignements lorsque cela est nécessaire pour protéger des témoins ou pour terminer une enquête : Stinchcombe, précité, aux pp. 335 et 336, 339 et 340. Ainsi qu’on le souligne dans cet arrêt à la p. 340, “[c]omme la règle générale consiste à divulguer tous les renseignements pertinents, il faut alors que le ministère public invoque l’application d’une exception à cette règle”. »

359. Directive PRE-1, publiée par le Directeur des poursuites criminelles et pénales du Québec à l’intention des procureurs de la poursuite. Parmi les pricipaux privilèges, mentionnons les suivants : Privilège de l’informateur; Privilège de l’avocat-client; Privilège relatif au litige; Privilège relatif aux méthodes d’enquêtes; Privilège relatif aux enquêtes en cours ou à la protection des témoins.

360. R. c. Tshiamala, [2011] J.Q. No. 2103, par. 109 (C.A.).

361. Guide du Service des poursuites pénales du Canada, Ligne directrice du directeur donnée en vertu de l’article 3(3)(c) de la Loi sur le directeur des poursuites pénales, le 1 mars 2014 :

« 4.2. Protection des témoins contre les atteintes à leur vie privée. Si la défense cherche des renseignements concernant l’identité d’un témoin ou le lieu où il se trouve, le procureur de la Couronne doit prendre en considération quatre facteurs : premièrement, le droit de l’accusé à un procès équitable et à la présentation d’une défense pleine et entière; deuxièmement, le principe selon lequel un témoin n’est la propriété d’aucune des parties; troisièmement, le droit du témoin au respect de sa vie privée et de ne pas être importuné jusqu’à ce qu’il soit contraint de témoigner par assignation; quatrièmement, le besoin, pour le système de justice pénale, de prévenir tout harcèlement ou intimidation des témoins ou de membres de leur famille, tout danger pour leur vie ou leur sécurité ou tout autre acte qui pourrait nuire à l’administration de la justice.

4.2.2. Témoins refusant d’être interviewés. Lorsqu’un témoin ne souhaite pas être interviewé par l’accusé ou son représentant, ou que les faits de l’affaire laissent raisonnablement croire à l’existence de circonstances reliées au quatrième facteur décrit à la section 4.2 (le harcèlement ou l’intimidation d’un témoin ou des membres de sa famille), le procureur de la Couronne peut refuser de communiquer les renseignements sur l’identité du témoin ou le lieu où il se trouve à moins d’y être contraint par l’ordonnance d’un tribunal compétent. Toutefois, l’avocat de la défense doit être informé de l’existence du témoin et des renseignements pertinents.

4.2.3. Entrevues contrôlées. Dans le cas où un témoin accepte d’être interviewé, mais qu’il subsiste, tel que décrit plus haut, des motifs raisonnables de croire que la communication de renseignements sur son identité ou le lieu où il se trouve pourrait lui nuire ou nuire à l’administration de la justice, notamment dans le cas où la personne en question participe à un programme de protection des témoins, le procureur de la Couronne peut décider de prendre les dispositions nécessaires pour permettre à l’avocat de la défense d’interviewer le témoin à un endroit et dans des conditions qui assureront en tout temps sa protection. Si la personne participe à un programme de protection des témoins, on doit obtenir le consentement du service de police chargé de l’administration du programme. »

Thébaud c. R., [2019] J.Q. No. 3133, par. 19 (C.A.) :

« Il est vrai que l’arrêt Stinchcombe enseigne que les coordonnées des témoins de la poursuivante peuvent, selon les circonstances, constituer un élément pertinent susceptible de faire l’objet d’une communication. Cependant, une telle information, en raison de la protection de la vie privée et de la sécurité des témoins, nécessite de la part de la poursuivante de faire montre de prudence et d’exercer avec discernement la discrétion que la jurisprudence lui reconnaît en cette matière. Dans les affaires où il est démontré que la communication des coordonnées d’un témoin ne constitue pas une information pertinente aux fins d’assurer l’équité du procès, on ne saurait faire reproche à la poursuivante de s’en tenir à cette règle de précaution et de ne pas inclure ce renseignement parmi les éléments de preuve à communiquer. »

362. R. c. McNeil, 2009 CSC 3 (CanLII), [2009] 1 R.C.S. 66, par. 18 :

« L’obligation de communication des fruits de l’enquête établie dans Stinchcombe n’est certes pas absolue, mais elle admet peu d’exceptions. Sauf si les renseignements n’ont manifestement aucune pertinence ou sont privilégiés, ou si leur communication est autrement régie en droit, le ministère public est tenu de communiquer à l’accusé tous les renseignements qu’il a en sa possession. Il peut toujours exercer son pouvoir discrétionnaire quant à la forme et au moment de la communication de la preuve quand les circonstances sont telles que la communication habituelle peut porter préjudice à quelqu’un ou à l’intérêt public. L’exercice de ce pouvoir discrétionnaire peut faire l’objet d’un examen judiciaire. »

363. R. c. Stinchcombe, 1991 CanLII 45 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 326, par. 20 et 16 :

« Dans certains cas, la personne qui a fourni des éléments de preuve ou des renseignements dans le cadre de l’enquête peut subir, en conséquence, un préjudice grave et même des lésions corporelles. La dure réalité de la justice veut que toute personne disposant d’éléments de preuve pertinents finisse par comparaître pour témoigner, mais le pouvoir discrétionnaire s’exerce en pareil cas pour déterminer le moment et la forme de la divulgation. »

« La question est donc de savoir quand, plutôt que si, il devrait y avoir divulgation. Il faut que le poursuivant conserve un certain pouvoir discrétionnaire en la matière. Ce pouvoir discrétionnaire, qui est d’ailleurs susceptible de contrôle, devrait s’étendre notamment à l’exclusion des éléments qui ne sont manifestement pas pertinents, à la non-divulgation de l’identité de certaines personnes afin de les protéger contre le harcèlement ou des lésions corporelles, ou à l’application du privilège relatif aux indicateurs. Le pouvoir discrétionnaire s’exercerait en outre pour décider du moment de la divulgation afin que l’enquête puisse être menée à bonne fin. »

364. R. c. Stinchcombe, 1991 CanLII 45 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 326, par. 20 :

« Il peut aussi y avoir des situations où la divulgation prématurée pourra peut-être retarder la fin de l’enquête. Pourtant, retarder la communication de la preuve pour ce motif est une pratique qu’il ne faut pas encourager et à laquelle on devrait rarement recourir. Quant à savoir si l’enquête sera terminée avant que ne soient engagées des poursuites concernant un seul ou plusieurs chefs d’accusation, il n’en tient essentiellement qu’au ministère public. Néanmoins, il n’est pas toujours possible de prévoir les événements qui pourront nécessiter la réouverture d’une enquête, de sorte que le ministère public doit avoir un certain pouvoir discrétionnaire de retarder la divulgation en pareilles circonstances. »

365. Directeur des poursuites criminelles et pénales c. Dépanneur RVJ inc., [2017] J.Q. No. 15470, par. 15. Voir également au par. 23 :

« Il est bien établi que la poursuite possède une discrétion quant à la façon dont elle doit divulguer les éléments de preuve pertinents. En l’espèce, le Tribunal est d’avis que la méthode choisie par la poursuite pour protéger un témoin mineur respecte son obligation constitutionnelle. Elle ne cache pas qu’elle est en possession d’une photographie du témoin acheteur. Si on tient pour acquis que la poursuite avise l’accusé, par quelque moyen que ce soit, qu’il lui est possible de consulter la photographie au bureau de la poursuivante dans un délai raisonnable avant le procès, cette façon de procéder est également respectueuse des droits constitutionnels de l’accusée. La photographie est celle d’une personne mineure, qui agit comme agent double. Par conséquent, la protection de son image, et la mesure prise pour éviter que celle-ci circule librement est raisonnable. Si l’accusé est insatisfait ou a besoin d’obtenir une copie aux fins de sa défense, il peut toujours s’adresser au tribunal compétent. »

366. R. c. Stinchcombe, 1991 CanLII 45 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 326, par. 32 et 33.

367. Wood c. Schaeffer, 2013 CSC 71 (CanLII), [2013] 3 R.C.S. 1053, par. 67 :

« Compte tenu de ce qui précède, c’est sans grande difficulté que je conclus que les policiers ont l’obligation de rédiger des notes exactes, détaillées et exhaustives dès que possible après l’enquête. M’inspirant des propos formulés par M. Martin, j’estime que l’obligation de rédiger des notes constitue, à tout le moins, un aspect implicite de l’obligation qu’a tout agent de police de faciliter le dépôt d’accusations et le déroulement des poursuites, une obligation qui est d’ailleurs expressément prévue à l’al. 42(1)e) de la Loi. »

368. R. c. Stinchcombe, 1991 CanLII 45 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 326, par. 33. Voir également au par. 30 :

« Un problème particulier se pose relativement aux déclarations de témoins et c’est précisément le cas en l’espèce. À peu près personne ne conteste que les déclarations que le ministère public a obtenues de témoins qu’il envisage de citer devraient être communiquées. Dans certains cas, il s’agira simplement d’une déclaration consignée dans les notes de l’enquêteur, normalement un agent de police. Ces notes ou des copies devraient être produites. S’il n’existe pas de notes, il faut communiquer un énoncé de ce qu’on “va dire”, lequel énoncé résume la déposition prévue du témoin et est établi à partir des renseignements dont dispose le ministère public. »

Harvey c. R., [2017] J.Q. No. 6675, par. 8 :

« Constatant l’absence de notes prises par les policiers lors des rencontres d’information ou de négociation ayant précédé l’entente de collaboration intervenue entre le Ministère public et monsieur Denis Brassard (ci-après “l’Entente”), le 6 juillet 2010, le juge Gagnon ordonna à la Couronne de transmettre aux requérants des déclarations de type “will say” émanant des agents Pierre Boucher, Patrick Dubé et Roger Vézina. »

369. R. c. Taillefer; R. c. Duguay, 2003 CSC 70 (CanLII), [2003] 3 R.C.S. 307, par. 29-30.

370. R. c. Taillefer; R. c. Duguay, 2003 CSC 70 (CanLII), [2003] 3 R.C.S. 307, par. 29-30, 36.

371. Berger c. R., [2012] J.Q. No. 23976, par. 157 et 158 :

« Le rôle des synthèses a été notamment de permettre aux policiers de confirmer ou non les affirmations “historiques” du témoin Boulanger. Ainsi, lorsque ce dernier affirmait des détails sur un événement passé ou sur autre aspect de sa vie personnelle, ou encore sur l’organisation des Hells Angels ou un de ses membres, les policiers ont recherché dans les banques de données les renseignements qui pouvaient le confirmer (pièce R-14).

Les “synthèses” représentent donc une partie de la “mémoire” policière sur différents aspects des individus ou des organisations. Il est indéniable que les Hells Angels et ses membres ont fait l’objet de plusieurs “synthèses”. Le ministère public doit, il me semble, s’assurer que la fiabilité et la crédibilité d’un témoin délateur puissent être pleinement mises à l’épreuve. Or, les synthèses contiennent des informations utiles à un contre-interrogatoire complet. »

372. R. c. Mercier, 1994 CanLII 5518 (QC CA), [1994] J.Q. No. 240, par. 41 (C.A.). Voir également au par. 42 :

« Suivant les circonstances de chaque affaire, la consultation de la preuve et, le cas échéant, la transmission de copies représenteront la manière formelle de satisfaire à l’obligation de divulgation. Il arrivera, toutefois, que l’ampleur et la sophistication du matériel formant l’objet de la communication de la preuve ne pourront raisonnablement permettre une transmission, par reproduction, à la défense. En ces cas, des moyens raisonnables, s’insérant dans une obligation d’accommodement, devront permettre à la défense la consultation et l’utilisation optimale du matériel assujetti à l’obligation de communication du ministère public. Dans d’autres cas, plus rares, la norme du caractère raisonnable jointe à l’obligation d’accommodement pourra même commander qu’une ordonnance ou un engagement (“trust condition and undertakings”) vienne assortir la communication de la preuve afin de s’assurer qu’elle ne soit pas l’objet, par la défense, d’une dissémination vexatoire et attentatoire à la vie privée (ex : infractions à caractère sexuel) (R. vs. Vokey inédit le 11 mai 1992 Newfoundland. S.C.; R. vs. Smith (inédit, le 17 janvier 1994, Saskatchewan Court of Queen’s Bench). »

373. Jean-Guillaume BLANCHETTE, JCQ Droit pénal – Preuve et procédure pénales, Fascicule 6 Divulgation de la preuve, No. 8.

374. R. c. Stinchcombe, 1995 CanLII 130 (CSC), [1995] 1 R.C.S. 754, par. 2. La production de la copie de la déclaration d’un témoin et de la transcription de l’enregistrement audio de son entrevue au cours de laquelle elle remettait en doute certains éléments de son témoignage antérieur est donc suffisante lorsqu’il est possible d’expliquer l’absence des originaux.

375. R. c. Stinchcombe, 1995 CanLII 130 (CSC), [1995] 1 R.C.S. 754, par. 2 : « Il n’existe pas de droit absolu de faire produire les originaux. »

376. Jean-Guillaume BLANCHETTE, JCQ Droit pénal – Preuve et procédure pénales, Fascicule 6 Divulgation de la preuve, No. 30 . R. c. La, 1997 CanLII 309 (CSC), [1997] 2 R.C.S. 680, par. 20 :

« Cette obligation de justification découle de l’obligation qu’ont le ministère public et la police de conserver les fruits de l’enquête. Le droit à la divulgation serait vide de sens si le ministère public n’était pas tenu de conserver des éléments de preuve qu’on sait pertinents. »

377. R. c. O’Connor, 1995 CanLII 51 (CSC), [1995] 4 R.C.S. 411, par. 82.

378. Cartier c. R., [2015] J.Q. No. 1169, par. 75 (C.A.) :

« L’obligation de communication de la preuve entraîne l’obligation du ministère public de conserver les éléments de preuve pertinents : R. c. Egger, 1993 CanLII 98 (CSC), [1993] 2 R.C.S. 451. Par conséquent, lorsque des éléments de preuve sont perdus ou détruits et que la défense s’en plaint en invoquant son droit à la communication de la preuve, encore faut-il qu’ils soient pertinents, sinon leur conservation n’était pas exigée. Si tel est le cas, et que “les explications du ministère public convainquent le juge du procès que la preuve n’a été ni détruite ni perdue par suite d’une négligence inacceptable, l’obligation de divulgation n’a pas été violée” : R. c. La, précité, paragr. 20. Si le ministère public n’y parvient pas, il y a violation de l’art. 7 de la Charte. »

379. R. c. Fournier, 2000 CanLII 6745 (QC CA), [2000] J.Q. No. 684, par. 55 (C.A.).

380. R. c. La, 1997 CanLII 309 (CSC), [1997] 2 R.C.S. 680, par. 20; R. c. Michaud, [2007] J.Q. No. 4904, par. 11-13 :

« Puisque le ministère public atteste la perte de la photographie de groupe, sur laquelle le témoin Deschambeault identifie une personne ressemblant à 99 % au tireur, il a le fardeau de convaincre le Tribunal que la preuve n’a pas été perdue par suite d’une négligence inacceptable.

Autrement dit, le ministère public doit présenter une explication satisfaisante pour son manquement à la conservation de l’élément de preuve :

“The onus, therefore, falls on the Crown to provide a satisfactory explanation for the failure to preserve the [evidence].”

Si le ministère public ne convainc pas le Tribunal à cet égard, il manque à ses obligations en matière de divulgation ce qui entraine une violation de l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés. »

381. Drouin c. R., [2015] J.Q. No. 18764, par. 49-51 :

« Le Tribunal est d’avis que les policiers ont agi de manière négligente. Même s’ils n’ont pas l’obligation de tout garder ce qui passe dans leurs mains, les dossiers de cette nature qui portent sur le recyclage des produits de la criminalité exigent un haut standard dans le traitement, le suivi et la remise de la preuve non retenue par l’État à un tiers ou au légitime propriétaire.

Ni inventaire ni sommaire n’est rédigé par les policiers, alors que de manière concomitante on recherche via un mandat de perquisition des documents comptables de même nature.

Conséquemment, le Tribunal conclut que la justification des policiers quant à la destruction, la non-conservation ou la non-communication de la preuve est insatisfaisante. »

Lecours c. R., [2013] J.Q. No. 4889, par. 49 et 50 :

« La prise par l’État de mesures raisonnables dans les circonstances pour assurer la conservation de la preuve doit être la considération principale de l’analyse.

Comme cet élément de preuve, le véhicule lourd, est la pièce maîtresse, le degré de diligence de l’État dans sa conservation devait être élevé, ce qui de toute évidence n’a pas été. »

Dumont c. R., [2010] J.Q. No. 9726, par. 31 et 32 (C.A.) :

« Pour apprécier les explications du ministère public, le juge doit considérer les circonstances de la perte et se demander si toutes les mesures nécessaires, afin de la conserver, ont été prises. Plus la preuve est importante, plus on doit s’attendre à un degré élevé de diligence relativement à sa conservation. Je précise que l’obligation de conservation vise autant les agences impliquées dans l’enquête de police que le ministère public.

Ici, il ne fait aucun doute que le ministère public a manqué à son obligation de conservation. En effet, il n’a pris aucune mesure particulière pour s’assurer de la conservation, jusqu’au procès, des échantillons sanguins prélevés sur Nadia Caron, un élément de preuve de première importance. »

382. R. c. G.S., 2010 ONCA 296 (CanLII), [2010] O.J. No. 1666, par. 39 et 40 :

« In this case, the Crown explained that in accordance with its practice at the time the audiotapes were stored in a locked drawer in a filing cabinet. I do not find this practice to be unacceptably negligent. It does not differ in substance from the practice of storing officers’ notebooks in the police division’s basement, which the trial judge found not to be unacceptably negligent – a finding I accept. Indeed, the trial judge offered no reason for the distinction he drew, and I see no basis for that distinction.

Moreover, by the end of 1994, the police had concluded that the respondent would not be charged. There was no prospect that the investigation would be reopened years later. It is a fair inference that the officers reasonably thought that the audiotapes would not be needed in the future. To repeat what Sopinka J. said in La, “[t]he police cannot be expected to preserve everything that comes into their hands on the off-chance that it will be relevant in the future.” »

383. Berger c. R., [2012] J.Q. No. 23976, par. 402 :

« Par conséquent, Il me semble évident que l’on ne peut reprocher à l’État d’avoir éliminé certains dossiers, notamment les dossiers clos. Pourtant, les requérants ne font aucune distinction. Par dossier clos, j’entends des dossiers touchant notamment l’un ou l’autre des accusés et qui ont vu leur aboutissement judiciaire soit par un acquittement ou un verdict de culpabilité, souvent à la suite d’un plaidoyer. Une fois le dossier terminé, comment reprocher à l’État de se débarrasser de cette documentation et ces pièces devenues inutiles après l’accomplissement du but pour lequel elles ont été colligées ? Poser la question c’est y répondre. D’ailleurs, la Cour d’appel du Québec dans l’arrêt Fournier a exposé qu’on ne pouvait, comme l’avait fait le juge de première instance, reprocher à l’État de détruire des dossiers qui n’ont plus d’utilité non plus que de ne pas conserver des items qui n’auront de pertinence que beaucoup plus tard lorsque des liens sont faits avec d’autres dossiers. »

384. R. c. Manno, [2015] J.Q. No. 5105, par. 53 :

« Même s’il n’y a pas eu de mauvaise foi de la part de la poursuite ou des services policiers, les explications pour l’épuisement et/ou l’expiration des échantillons sont vagues et insatisfaisantes. Les lettres adressées aux avocats du requérant, comme les explications fournies devant le Tribunal, sont laconiques et ne démontrent pas une appréciation de l’importance de l’obligation de la divulgation de la preuve. »

Mymryk c. R., [2004] Q.J. No. 10380, par. 40-41 :

« I also find that the explanation offered by the Crown establishes that the tape was destroyed by unacceptable systemic or institutional negligence. I adopt the words of Doherty J.A. in Bero, supra at page 560, which I find apply with equal force in Mr. Mymryk’s case :

... the failure to preserve [the tape] was caused by the failure to look beyond the needs of the prosecution to the wider question of the potential relevance of the [the tape] to the defence. Had anyone directed their mind to the disclosure obligations set out in Stinchcombe, supra, I think [the tape] would have been preserved. The failure to preserve [the tape] reveals an ignorance of, or at least an indifference to, the duty on the Crown and the police to preserve the fruits of their investigation. This indifference or ignorance is difficult to comprehend so many years after the pronouncement of the Supreme Court of Canada in R. v. Stinchcombe, supra, and in my view, is a sufficiently serious departure from the Crown’s duty to preserve evidence that it constitutes an abuse of process.

In the present case, I find that the Montreal police policy for the preservation of security tapes which are relevant to criminal prosecutions is inadequate and reveals systemic negligence. »

Lecours c. R., [2013] J.Q. No. 4889, par. 48 :

« L’intimée n’apporte aucune justification valable sur la destruction du véhicule lourd. Il y a eu négligence ou insouciance de la part de l’intimée à veiller à la conservation du véhicule lourd. D’ailleurs, ce que le tribunal retient c’est qu’il n’y a aucune explication sur la libération du véhicule lourd. »

385. R. c. Thibeault, [2017] J.Q. No. 8398, par. 25 :

« Le Tribunal croit le policier sur le fait qu’il a commis des erreurs de bonne foi compte tenu qu’au moment des événements, il occupait son poste depuis quelques semaines seulement. »

R. c. Fournier, 2000 CanLII 6745 (QC CA), [2000] J.Q. No. 684, par. 64 (C.A.) :

« Le fait que les policiers enquêteurs, expérimentés et de bonne foi, ne réalisent pas sur le coup et dans le cadre de leur enquête qu’un objet, qu’ils considèrent anodin et non pertinent peut établir un lien entre deux meurtres distincts, ni que cet objet puisse un jour lointain paraître utile dans le cadre d’une défense dont on ne peut présumer de la nature, de la part d’un accusé dont on ne peut non plus présumer de l’identité. Ceci peut résulter d’un manque d’imagination et d’une lacune professionnelle, sans cependant constituer une négligence inacceptable. Tel me paraît être le cas des fameuses bottes. »

386. Witharanage c. R., [2019] Q.J. No. 8578, par. 35 et 36 (C.A.) :

« As to the relevant pieces of evidence, the judge accepted the Crown’s explanation that their destruction had been due to “human error”, rather than gross negligence or malicious intent. This was a question of fact. The suggestion of the defence had been that all the objects, which bore the mention “negative result” for DNA testing, had been willfully destroyed by Sargent Talbot, the employee in charge of the police warehouse (Exhibit Room, Centre d’enquête Ouest). Nor did she find that the error amounted to gross negligence. It was the first time in more than 6 years that an object had been mistakenly destroyed by Sargent Talbot (he had once before destroyed an object, but had been misled by the officer in charge of the investigation). Consequently, the judge did not accept the defence’s suggestion, and rather concluded that Sargent Talbot had destroyed the evidence by mistake.

Considering the deference owed by this Court to the trial judge’s findings of fact, I am of the opinion that the appellant did not show us any palpable or overriding error in the trial judge’s characterization of the degree of police negligence that led to the destruction of the material evidence. The explanation offered was sufficient, in my view, to justify her conclusion that the Crown freed itself from the burden it had of establishing either the lack of relevance of the destroyed physical evidence, or the absence of negligence in its destruction, abandonment or loss. »

387. Salame c. R., [2010] J.Q. No. 162, par. 26 (C.A.) :

« Dans R. c. F.C.B., la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse reprend sous la forme de 10 propositions les principes dégagés par la Cour suprême à l’occasion de l’analyse lorsqu’un élément de preuve n’est plus disponible parce que perdu ou détruit :

(1) The Crown has an obligation to disclose all relevant information in its possession.

(2) The Crown’s duty to disclose gives rise to a duty to preserve relevant evidence.

(3) There is no absolute right to have originals of documents produced. If the Crown no longer has original documents in its possession, it must explain their absence.

(4) If the explanation establishes that the evidence has not been destroyed or lost owing to unacceptable negligence, the duty to disclose has not been breached.

(5) In its determination of whether there is a satisfactory explanation by the Crown, the Court should consider the circumstances surrounding its loss, including whether the evidence was perceived to be relevant at the time it was lost and whether the police acted reasonably in attempting to preserve it. The more relevant the evidence, the more care that should be taken to preserve it.

(6) If the Crown does not establish that the file was not lost through unacceptable negligence, there has been a breach of the accused’s s. 7 Charter rights.

(7) In addition to a breach of s. 7 of the Charter, a failure to produce evidence may be found to be an abuse of process, if for example, the conduct leading to the destruction of evidence was deliberately for the purpose of defeating the disclosure obligation.

(8) In either case, a s. 7 breach because of failure to disclose, or an abuse of process, a stay is the appropriate remedy, only if it is one of those rare cases that meets the criteria set out in O’Connor.

(9) Even if the Crown has shown that there was no unacceptable negligence resulting in the loss of evidence, in some extraordinary case, there may still be a s. 7 breach if the loss can be shown to be so prejudicial to the right to make a full answer and defence that it impairs the right to a fair trial. In this case, a stay may be an appropriate remedy.

(10) In order to assess the degree of prejudice resulting from the lost evidence, it is usually preferable to rule on the stay application after hearing all of the evidence. »

388. R. c. Babos, 2014 CSC 16 (CanLII), [2014] 1 R.C.S. 309, par. 32.

389. R. c. Babos, 2014 CSC 16 (CanLII), [2014] 1 R.C.S. 309, par. 32.

390. L.L. c. R., [2016] J.Q. No. 11113, par. 52 (C.A.) :

« Par ailleurs, dans certains cas, même si la destruction ou la perte de l’élément de preuve est expliquée de façon satisfaisante, il peut y avoir atteinte au droit à un procès équitable en privant l’accusé de la possibilité de présenter une défense pleine et entière, une exigence au seuil élevé. Dans cette hypothèse, ce n’est pas tant le droit à la communication de la preuve que le droit de l’accusé de se défendre qui est en cause. »

R. c. La, 1997 CanLII 309 (CSC), [1997] 2 R.C.S. 680, par. 32.

391. Simard c. R., [2015] J.Q. No. 7065, par. 69 (C.A.) :

« Dans les circonstances, il ne suffit pas, comme dans les cas de non-respect de l’obligation de divulgation en application de Stinchcombe, de démontrer une “possibilité raisonnable” que les documents perdus auraient été utiles au soutien de la défense de M. Simard pour conclure à une atteinte à son droit constitutionnel sous l’article 7 de la Charte. Avec égards, la juge se méprend, au paragraphe [48] de ses motifs, lorsqu’elle présente la question en litige ainsi : “[s]uivant R. c. Dixon, [1998 CanLII 805 (CSC), [1998] 1 R.C.S. 244 au paragr. [22]], existe-t-il une possibilité raisonnable que les éléments de preuve manquants aient pu aider la défense ?”. Ce critère ne s’appliquait pas ici. À la lumière de la jurisprudence concernant la perte de documents du fait d’un tiers, la juge aurait dû utiliser un critère plus exigeant, soit la démonstration par l’accusé d’un “préjudice concret à son droit à une défense pleine et entière”. »

392. Simard c. R., [2015] J.Q. No. 7065, par. 68 (C.A.).

393. Witharanage c. R., [2019] Q.J. No. 8578, par. 33 (C.A.) :

« In addition, the prejudice suffered by the defence will be proportional to the probative value and reliability of the evidence destroyed : where the lost or destroyed evidence had a low probative value or reliability, the prejudice to the accused will be proportionately lower. »

394. Witharanage c. R., [2019] Q.J. No. 8578, par. 41 (C.A.) :

« Furthermore, the probative value of the DNA evidence available in this case could not raise a reasonable doubt in favour of the appellant. The absence of the appellant’s DNA on the skipping rope or on the complainant’s clothes would not be sufficient in itself to raise doubt that he was the perpetrator. »

395. Witharanage c. R., [2019] Q.J. No. 8578, par. 37 (C.A.) :

« As for the possibility that there may still be a breach of the right protected by section 7 of the Charter, the appellant did not show that the loss was so prejudicial to his right to make a full answer and defence that it impaired his right to a fair trial and that a stay of proceedings would be the only appropriate remedy. »

396. Witharanage c. R., [2019] Q.J. No. 8578, par. 32, 39 et 40 (C.A.) :

« Indeed, where measures are available to minimize the prejudice caused, the case will not warrant a stay of proceedings. Such measures include the use of “secondary evidence” (if available), which can allow for cross-examination of witnesses.

[...]

Second, prejudice to the appellant’s right to make a full answer and defence was not established. In this case, what is called “secondary evidence” by Vauclair and Desjardins, or evidence in some way derived from an initial piece of evidence, was available. The samples of DNA collected on the objects remained available to the appellant and could have been submitted for a second expert opinion.

As for the skipping rope, the evidence suggests that the biologist collected samples from most, if not all, of the rope. Moreover, pictures of all the relevant objects were produced during the trial. These facts, together with the DNA samples still available for testing, suggest that the prejudice suffered by the accused from the destruction of the objects themselves, for the purpose of DNA sampling and analysis, was low. »

Ratelle c. R., [2011] J.Q. No. 13747, par. 5-7 :

« En deuxième lieu, l’appelant soumet que le juge de première instance n’aurait pas dû permettre la preuve obtenue suite à l’exécution des mandats de perquisition, les originaux des affidavits présentés au juge de paix pour obtenir les mandats ayant été détruits.

Les parties conviennent que cette destruction, par le greffe gardien de ces documents, s’inscrivait à l’intérieur d’une pratique établie d’épuration aux 7 ans et n’a pas été faite à dessein.

Cependant, les copies carbones des mandats étaient disponibles, ainsi que les copies carbones des affidavits utilisés pour les obtenir. Par conséquent, cette preuve répondait aux critères de nécessité et de fiabilité. (R. v. Swartz, 1977 CanLII 1925 (ON CA), 37 C.C.C. (2d) 409 (C.A.O. et R. c. Papalia, 1979 CanLII 38 (CSC), [1979] 2 R.C.S. 256). En outre, cette preuve a été communiquée à l’appelant le 31 août 1998 et l’appelant a eu tout le loisir d’interroger l’affiante. »

R. c. G.S., 2010 ONCA 296 (CanLII), [2010] O.J. No. 1666, par. 46 et 47 (C.A. Ont.) :

« When evidence is lost, assessing prejudice is invariably problematic and, to some degree, speculative. However, the respondent was not entitled to a stay merely because he was deprived of relevant evidence. To justify a stay the respondent had to show that the lost evidence prejudiced him in a substantial or material way. The trial judge concluded that the lost evidence would assist the respondent in a material way :

There is an air of reality to the claim that the lost evidence would assist the accused in a material way. The accused was prejudiced by the loss of the evidence and was prevented from making full answer and defence.

I agree that the lost evidence could have assisted the respondent in attacking the credibility of the complainants. However, I do not agree that the trial judge’s conclusion justifies a stay because, in reaching that conclusion, he does not address the impact of the lost evidence in the light of other evidence available to the defence to challenge the credibility of J.H.(1) and Т.Н. In La, Sopinka J. wrote that the availability of other evidence to attack a complainant’s credibility is a critical consideration in assessing the degree of prejudice from lost evidence. »

397. Cartier c. R., [2015] J.Q. No. 1169, par. 75 (C.A.) :

« L’obligation de communication de la preuve entraîne l’obligation du ministère public de conserver les éléments de preuve pertinents : R. c. Egger, 1993 CanLII 98 (CSC), [1993] 2 R.C.S. 451. Par conséquent, lorsque des éléments de preuve sont perdus ou détruits et que la défense s’en plaint en invoquant son droit à la communication de la preuve, encore faut-il qu’ils soient pertinents, sinon leur conservation n’était pas exigée. Si tel est le cas, et que “les explications du ministère public convainquent le juge du procès que la preuve n’a été ni détruite ni perdue par suite d’une négligence inacceptable, l’obligation de divulgation n’a pas été violée” : R. c. La, précité, paragr.20. Si le ministère public n’y parvient pas, il y a violation de l’art. 7 de la Charte. »

L.L. c. R., [2016] J.Q. No. 11113, par. 51 (C.A.) :

« Dans le cas de Stinchcombe, l’État, qui est en possession d’un élément de preuve pertinent, a l’obligation de le conserver et de le communiquer à la défense (R. c. Cartier, 2015 QCCA 329, paragr. 75), ce qui emporte la nécessité d’expliquer au tribunal les circonstances de sa perte ou de sa destruction. Si la perte ou la destruction s’avère injustifiée, il y a atteinte au droit à la communication de la preuve. Il faut alors s’interroger sur la réparation appropriée. Si elle est justifiée, il n’y a pas de telle atteinte : R. c. Cartier. »

398. Rail c. R., [2015] J.Q. No. 9792, par. 38 (C.A.).

« Rappelons d’abord que les documents sont détruits par Mme Benjamin et non par les autorités policières. La perte des documents est donc le fait de tiers et non de l’État. Contrairement à ce que l’appelant laisse entendre dans son mémoire, il ne s’agit pas d’un cas où la destruction de la preuve découle d’un non-respect de l’obligation de divulguer ou de conserver la preuve qui incombe au ministère public. Cette obligation ne vaut, rappelons-le, que pour les éléments que le ministère public a eus en sa possession. Elle ne s’étend donc pas aux tiers. »

399. R. c. McNeil, 2009 CSC 3 (CanLII), [2009] 1 R.C.S. 66, par. 49 :

« Le ministère public n’est pas une partie comme les autres. En effet, en tant qu’officier de justice, le représentant du ministère public doit œuvrer sans réserve à la bonne administration de la justice. Ainsi, lorsqu’il est informé de l’existence de renseignements pertinents, il ne peut se contenter de n’en faire aucun cas. À moins que l’information ne semble pas fondée, l’avocat du ministère public ne saurait apprécier pleinement le bien-fondé de l’affaire et s’acquitter de son obligation d’officier de justice s’il ne s’informe pas davantage et ne tente pas raisonnablement d’obtenir les renseignements en question. »

400. Simard c. R., [2015] J.Q. No. 7065, par. 68 (C.A.). Compte tenu de la non-fiabilité des documents supprimés et de l’absence de négligence grossière des policiers, la décision de la juge du procès d’écarter l’arrêt des procédures fut confirmée.

401. R. c. Gubbins, 2018 CSC 44 (CanLII), [2018] 3 R.C.S. 35, par. 21 :

« Dans l’arrêt McNeil, notre Cour a précisé que “le ministère public ne peut justifier la non-communication de renseignements pertinents en faisant valoir que le service de police chargé de l’enquête a omis de les lui communiquer” : par. 24. Ainsi, le ministère public a l’obligation de se renseigner suffisamment auprès de la police ou d’autres entités étatiques lorsqu’il est informé de l’existence de renseignements potentiellement pertinents se trouvant en la possession de ces dernières : McNeil, par. 49. Du reste, la police a l’obligation correspondante de divulguer “tous les renseignements se rapportant à son enquête sur l’accusé” : McNeil, par. 23 et 52. Ces renseignements sont souvent appelés “les fruits de l’enquête” : McNeil, par. 14, 22 et 23. En outre, la police peut être tenue de transmettre des renseignements qui ne font pas partie des fruits de l’enquête si ces renseignements “se rapportent manifestement à la poursuite engagée contre l’accusé” (McNeil, par. 59). »

402. Ontario. Report of the Attorney General’s Advisory Committee on Charge Screening, Disclosure, and Resolution Discussions. Toronto : The Committee, 1993, p. 167-168 (cité en français dans R. c. McNeil, 2009 CSC 3 (CanLII), [2009] 1 R.C.S. 66, par. 23).

403. Berger c. R., [2012] J.Q. No. 23976, par. 43 :

« Évidemment, le ou les corps étatiques qui participent à l’enquête menant aux accusations ont l’obligation corollaire de communiquer le fruit de leurs enquêtes. Contrairement à la position du ministère public, je ne crois pas que les fruits de l’enquête soient limités aux éléments de preuve. Je crois que le concept se rapproche davantage des renseignements et informations recueillis au cours d’une enquête dont certains deviendront des éléments de preuve. Ainsi, les policiers ont légalement l’obligation générale d’enquêter sur les crimes et ils doivent communiquer le résultat de leurs enquêtes au ministère public. Comme le souligne la Cour suprême, “[l]a façon dont le ministère public entre en possession des fruits de l’enquête découle de l’obligation corollaire des enquêteurs de communiquer au poursuivant tous les renseignements pertinents en leur possession.” »

404. R. c. Gubbins, 2018 CSC 44 (CanLII), [2018] 3 R.C.S. 35, par. 22.

405. R. c. Gubbins, 2018 CSC 44 (CanLII), [2018] 3 R.C.S. 35, par. 22.

406. Cité en français dans R. c. Gubbins, 2018 CSC 44 (CanLII), [2018] 3 R.C.S. 35, par. 22.

407. R. c. Gubbins, 2018 CSC 44 (CanLII), [2018] 3 R.C.S. 35, par. 23.

408. R. c. Gubbins, 2018 CSC 44 (CanLII), [2018] 3 R.C.S. 35, par. 23 :

« Il ne faut pas considérer que les mots “se rapportent manifestement” ou “manifestement pertinents” dénotent une nouvelle norme ou un nouveau degré de pertinence : Jackson, par. 125, le juge Watt. Cette expression ne fait plutôt que désigner les renseignements qui ne font pas partie du dossier d’enquête, mais qui doivent néanmoins être communiqués selon l’arrêt Stinchcombe parce qu’ils concernent la capacité de l’accusé de réfuter la preuve du ministère public, de présenter un moyen de défense ou d’envisager autrement la conduite qu’adoptera la défense. L’arrêt McNeil oblige la police à transmettre ces renseignements au ministère public. »

409. R. c. McNeil, 2009 CSC 3 (CanLII), [2009] 1 R.C.S. 66.

410. R. c. McNeil, 2009 CSC 3 (CanLII), [2009] 1 R.C.S. 66, par. 54.

411. R. c. McNeil, 2009 CSC 3 (CanLII), [2009] 1 R.C.S. 66, par. 15. Voir également R. c. Moazami, [2020] B.C.J. No. 5, par. 37 (C.A. C.-B.) :

« Even though the materials generated by an investigation into police misconduct are not in the possession of the prosecuting Crown and are not part of the “fruits of the investigation” into the accused, they may nonetheless fall to be produced as first party disclosure in certain circumstances. Justice Charron said, at para. 15 :

[15] ... records relating to findings of serious misconduct by police officers involved in the investigation against the accused properly fall within the scope of the “first party” disclosure package due to the Crown, where the police misconduct is either related to the investigation, or the finding of misconduct could reasonably impact on the case against the accused. »

412. R. c. Gubbins, 2018 CSC 44 (CanLII), [2018] 3 R.C.S. 35, par. 23.

413. York (Regional Municipality) c. McGuigan, [2018] O.J. No. 6916, par. 83 (C.A. Ont.) :

« Although McNeil dealt with police disciplinary records, this disclosure obligation applies to all obviously relevant information or material possessed by the investigating police force, not just obviously relevant police discipline information. This follows not only as a matter of principle. It finds support in direction provided by Karakatsanis J., for the court, in R. v. Quesnelle, 2014 SCC 46, [2014] 2 S.C.R. 390, at para. 12 :

In R. v. McNeil ... [t]his Court ... recognized that police have a duty to disclose, without prompting, “all material pertaining to the investigation of the accused” as well as other information “obviously relevant to the accused’s case”. [Citations omitted.] »

414. R. c. Gubbins, 2018 CSC 44 (CanLII), [2018] 3 R.C.S. 35, par. 25 :

« La communication de dossiers en la possession de tiers est traitée dans l’arrêt O’Connor. Pour obtenir la production de ces dossiers, l’accusé doit en faire la demande à la cour. Premièrement, c’est à lui qu’il incombe de prouver que ces dossiers sont vraisemblablement pertinents. Deuxièmement, une fois que l’accusé se sera acquitté de ce fardeau, le juge examinera les dossiers en question pour décider s’ils devraient être transmis à l’accusé, et si oui, dans quelle mesure. »

Ruest c. R., [2019] J.Q. No. 1320, par. 37 (C.A.) :

« D’abord, comme je l’ai mentionné, le régime applicable ne fait plus l’objet de controverse, la Cour suprême ayant décidé que celui de l’arrêt O’Connor s’applique. Cela signifie que la défense doit adresser sa demande de communication à la Cour et non au ministère public. Le requérant le fera par requête avec, éventuellement, assignation de la partie en possession des renseignements recherchés. Son fardeau est de démontrer que ces renseignements sont vraisemblablement pertinents. Enfin, le cas échéant, le juge doit les examiner et déterminer si les renseignements devraient être communiqués et, si oui, dans quelle mesure. »

415. R. c. O’Connor, 1995 CanLII 51 (CSC), [1995] 4 R.C.S. 411, par. 22.

416. R. c. Gubbins, 2018 CSC 44 (CanLII), [2018] 3 R.C.S. 35, par. 27 :

« Néanmoins, le fardeau qui incombe à l’accusé n’est pas onéreux. Du reste, le critère de “la pertinence vraisemblable” – moins rigoureux que celui de “la pertinence véritable” – a une “portée très large” qui “comprend des renseignements qui seraient raisonnablement susceptibles d’aider l’accusé dans l’exercice de son droit à une défense pleine et entière” : McNeil, par. 44; voir également O’Connor, par. 21. »

Deslauriers c. R., [2020] J.Q. No 2073, par. 63 (C.A.), conf. à 2021 CSC 3 :

« Ce fardeau est important, mais il n’est pas onéreux puisque, à ce stade des procédures, l’accusé n’a toujours pas vu les documents, rapports ou notes recherchés. Il lui suffit d’établir qu’il existe une possibilité raisonnable que les renseignements recherchés aient une valeur probante quant à une question en litige (concernant les événements ou la valeur probante de la preuve) ou à l’inhabileté d’un témoin à témoigner. »

417. Deslauriers c. R., [2020] J.Q. No 2073, par. 71 -73 (C.A.), conf. à 2021 CSC 3 :

« À mon avis, la juge a donc erré en rejetant la requête en divulgation de la preuve de l’appelant dès la première étape du régime applicable à la communication de renseignements en la possession de tiers. Il s’agissait de renseignements vraisemblablement pertinents, “raisonnablement susceptibles d’aider l’accusé dans l’exercice de son droit à une défense pleine et entière”. Il ne s’agissait pas d’une recherche à l’aveuglette de sa part. La juge aurait été mieux avisée, et ceci dit avec égards, de passer à la deuxième étape de l’analyse, ce qui lui aurait alors permis d’examiner les documents en question et de déterminer s’ils ont une pertinence véritable, de pondérer les intérêts de chacun et de décider s’ils devaient être transmis à l’accusé et, si oui, dans quelle mesure et à quelles conditions.

Le fait d’exclure des renseignements à première vue pertinents à la preuve de l’innocence de l’accusé dès la première étape de la procédure établie dans l’arrêt O’Connor, sans avoir vu en quoi consistait cette preuve, n’était pas, selon moi, dans l’intérêt non seulement de l’accusé, mais aussi, vu la présomption d’innocence au cœur de notre système de justice criminelle, de la justice.

L’erreur est importante puisqu’elle risque d’avoir porté atteinte au droit de l’appelant à une défense pleine et entière. »

418. Deslauriers c. R., [2020] J.Q. No 2073 (C.A.), conf. à. 2021 CSC 3.

419. Deslauriers c. R., [2020] J.Q. No 2073, par. 65-67 (C.A.), conf. à 2021 CSC 3 :

« Le comportement de D.H.-L. face au policier qui cherchait à l’interpeller alors qu’il était au volant d’un véhicule volé était au cœur de l’analyse en ce qui a trait à l’évaluation du caractère justifié ou non de l’action posée par le policier, tant sous l’angle de la défense de justification (art. 25 C.cr.) que sous celui de la légitime défense (art. 34 C.cr.). Une preuve de propension à la violence (ou, dans le cas particulier qui nous occupe, à l’insubordination) de la part de D.H.-L. aurait été pertinente afin de donner du poids à la version de l’accusé quant au déroulement de l’intervention, voire de la corroborer, et ce, même s’il ne connaissait pas l’identité du conducteur lors de l’événement.

Il en va de même pour l’accusation de négligence criminelle puisque la preuve de l’intention coupable (la mens rea) requiert de comparer la conduite de l’accusé à celle d’une personne raisonnable, ici un policier, dans les mêmes circonstances, à la recherche d’un écart marqué et important par rapport à celle-ci.

Tout élément de preuve pouvant corroborer la version de l’accusé était donc “vraisemblablement” pertinent. »

420. Deslauriers c. R., [2020] J.Q. No 2073, par. 75 et 76 (C.A.), conf. à 2021 CSC 3 :

« [...] Son analyse de la défense soulevée par l’accusé était intimement liée à la trame factuelle qu’elle retenait. Peut-être aurait-elle évalué cette preuve différemment si elle avait eu le bénéfice des éléments de preuve additionnels que l’accusé cherchait à obtenir ? Peut-être auraient-ils pu susciter dans son esprit, même si elle ne croyait pas l’accusé, un doute raisonnable ?

Cette erreur justifie l’intervention de la Cour et la tenue d’un nouveau procès. »

421. R. c. McNeil, 2009 CSC 3 (CanLII), [2009] 1 R.C.S. 66, par. 34.

422. R. c. McNeil, 2009 CSC 3 (CanLII), [2009] 1 R.C.S. 66, par. 41.

423. R. c. McNeil, 2009 CSC 3 (CanLII), [2009] 1 R.C.S. 66, par. 42.

424. Groupe de la Banque mondiale c. Wallace, 2016 CSC 15 (CanLII), [2016] 1 R.C.S. 207.

425. Groupe de la Banque mondiale c. Wallace, 2016 CSC 15 (CanLII), [2016] 1 R.C.S. 207, par. 120.

426. Groupe de la Banque mondiale c. Wallace, 2016 CSC 15 (CanLII), [2016] 1 R.C.S. 207, par. 124.

427. R. c. Gubbins, 2018 CSC 44 (CanLII), [2018] 3 R.C.S. 35.

428. R. c. Gubbins, 2018 CSC 44 (CanLII), [2018] 3 R.C.S. 35, par. 33.

429. R. c. Gubbins, 2018 CSC 44 (CanLII), [2018] 3 R.C.S. 35, par. 35.

430. R. c. Gubbins, 2018 CSC 44 (CanLII), [2018] 3 R.C.S. 35, par. 47.

431. Sur ce point, voir les commentaires de la Cour d’appel dans Ruest c. R., [2019] J.Q. No. 1320, par. 57 :

« En somme, bien que la preuve puisse théoriquement être différente dans un autre cas, l’avocat responsable ne s’aventurera plus sur cette piste, à moins de posséder une preuve lui permettant d’avancer que, malgré les tests de contrôles normaux, la preuve recherchée est pertinente et utile pour attaquer la fiabilité des résultats lors des prélèvements en cause. »

432. York (Regional Municipality) c. McGuigan, [2018] O.J. No. 6916, par. 5-7 (C.A. Ont.) :

« Where a prosecutor is relying on a speed measuring device to prosecute an offence, it must, on request, disclose the testing and operating procedures set out in the user manual for that device. It is up to the prosecutor to hand such information over on request. The person charged need not bring an application or obtain a court order. This is first party disclosure, not third party disclosure.

The charging police force has a corresponding duty to furnish the pertinent passages from the user manual to the prosecutor to enable the prosecutor to discharge its first party disclosure obligations.

This is not a crushing administrative task. The disclosure at issue here is not case specific information. The disclosure obligation can therefore be discharged by the prosecutor posting the relevant content from the user manual online and providing the ticketed driver with the required URL. »

433. York (Regional Municipality) c. McGuigan, [2018] O.J. No. 6916, par. 113 (C.A. Ont.) :

« Since Gubbins has been released, the appellant agrees with the prosecutor on the former point, conceding that the testing and operating procedures are not the fruits of the investigation. To qualify as the fruits of the investigation, information must be “generated or acquired during or as a result of the specific investigation into the charges against the accused” : Gubbins, at para. 22. The appellant does not contend that the relevant user manual excerpts were generated or acquired during or as a result of the investigation into the charges against the appellant. »

434. York (Regional Municipality) c. McGuigan, [2018] O.J. No. 6916, par. 99 et 100 (C.A. Ont.) :

« We disagree. In our view, a manufacturer’s testing and operating procedures for a speed measuring device are relevant and must be disclosed. By presenting the results obtained by a speed measuring device, the prosecutor is necessarily representing that those results are a reliable measure of vehicle speed. Evidence that has a logical tendency to cast doubt on that claim is therefore relevant. The question is whether information about the manufacturer’s testing and operating procedures is relevant in challenging the prosecutor’s necessary and implicit claim that the speed measurement is reliable.

In our view, this cannot reasonably be contested. Testing and operating procedures are provided precisely so that users can accomplish what the device is designed to accomplish, in this case, to provide an accurate measure of speed. If testing and operating procedures are not complied with, it may cast doubt on the integrity of the results. Naturally, compliance with testing and operating procedures cannot be determined unless those testing and operating procedures are known. Hence, the relevance for disclosure and production purposes of the manufacturer’s testing and operating procedures for a speed measuring device that is relied on in the prosecution of a case. »

435. R. c. Quesnelle, 2014 CSC 46 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 390, par. 11 :

« Pour les besoins de la communication par la “partie principale”, “le ministère public” ne s’entend pas de toutes les composantes de l’État fédéral ou provincial, mais seulement du poursuivant. Toutes les autres composantes de l’État, y compris la police, sont des “tiers”. Exception faite de l’obligation qui incombe à la police de transmettre au ministère public les fruits de l’enquête, les dossiers en la possession de tiers, y compris d’autres composantes de l’État, ne sont habituellement pas assujettis aux règles établies dans l’arrêt Stinchcombe en matière de communication. »

R. c. Gubbins, 2018 CSC 44 (CanLII), [2018] 3 R.C.S. 35, par. 20 :

« Pour l’application de l’arrêt Stinchcombe, le terme “ministère public” ne renvoie pas à l’ensemble des entités étatiques, mais s’entend du seul poursuivant : McNeil, par. 22; R. c. Quesnelle, 2014 CSC 46, [2014] 2 R.C.S. 390, par. 11. Toutes les autres entités du ministère public, y compris la police, sont des tiers pour les besoins de la communication. Elles ne sont pas assujetties au régime de production établi dans Stinchcome. La raison en est que la loi ne saurait imposer au ministère public l’obligation de communiquer des renseignements qu’il n’a pas en sa possession ou qu’il ne peut obtenir : McNeil, par. 22. »

436. R. c. Quesnelle, 2014 CSC 46 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 390, par. 12 :

« Dans l’arrêt R. c. McNeil, 2009 CSC 3, [2009] 1 R.C.S. 66, notre Cour reconnaît que le ministère public ne peut se contenter de recevoir passivement des renseignements. Des vérifications raisonnables lui incombent lorsqu’il apprend que la police ou d’autres composantes de l’État ont en leur possession des éléments susceptibles d’être utiles à la poursuite ou à la défense. Notre Cour reconnaît aussi l’obligation de la police de communiquer, sans qu’il soit nécessaire de lui en faire la demande, “tous les renseignements se rapportant à son enquête sur l’accusé” (par. 14), ainsi que les autres renseignements qui “se rapportent manifestement à la poursuite engagée contre l’accusé” (par. 59). »

Voir également Harvey c. R., [2017] J.Q. No. 6675 et Berger c. R., [2012] J.Q. No. 23976, par. 40 et 41 :

« L’État n’est pas une entité monolithique et les organismes étatiques, autres que le poursuivant, y compris la police, sont en principe des tiers au sens de l’arrêt O’Connor et la procédure énoncée à cet arrêt doit être suivie. La Cour a toutefois précisé que :

... cette réalité ne libère pas le poursuivant de son obligation de se renseigner suffisamment auprès des autres entités étatiques et d’autres tiers, dans les cas appropriés, à propos des dossiers et des renseignements qu’ils détiennent et qui peuvent être utiles pour l’affaire en cours d’instance. Dans une instance criminelle, le ministère public et la défense n’ont pas d’intérêts divergents quant à la découverte de renseignements pertinents pouvant être avantageux pour l’accusé.

La Cour suprême a confirmé que le ministère public a des obligations particulières à l’égard de la bonne marche de l’administration de la justice. En conséquence, notamment lorsqu’il est informé de l’existence chez des tiers de renseignements pertinents dans une affaire, incluant des éléments de preuve potentiellement pertinents quant à la crédibilité ou à la fiabilité des témoins, il lui incombe de faire les enquêtes appropriées, dans la mesure de ce qui est raisonnable. Advenant que le ministère public essuie un refus d’accès, il doit en informer la défense afin qu’elle puisse entreprendre à son tour les démarches nécessaires. »

437. R. c. Quesnelle, 2014 CSC 46 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 390, par. 18.

438. R. c. Gingras (1992), 1992 CanLII 2826 (AB CA), 120 A.R. 300 (C.A. Alb.), par. 14, cité dans R. c. McNeil, 2009 CSC 3 (CanLII), [2009] 1 R.C.S. 66, par. 22 :

« [Traduction] Si ce raisonnement était juste, pour satisfaire aux critères établis dans Stinchcombe, l’avocat du ministère public devrait, quelques mois avant le procès, enquêter auprès de chaque ministère du gouvernement provincial et de chaque ministère du gouvernement fédéral. Il se verrait obligé de leur demander s’ils ont eu en leur possession des dossiers concernant chacune des poursuites devant avoir lieu. Il serait impossible de mener à bien ne serait-ce qu’un pour cent de cette tâche. Si cela était nécessaire, il faudrait plusieurs années pour porter chaque affaire devant les tribunaux. »

439. R. c. Blyth, [1996] N.B.J. No. 107 (C.A. N.-B.); Berger c. R., [2012] J.Q. No. 23976, par. 111 : « Il ne fait pas de doute que le ministère public ne peut se réfugier derrière un aveuglement volontaire et refuser de se renseigner adéquatement sur une opération policière pertinente afin de s’assurer de remplir son obligation constitutionnelle. »

440. R. c. Darwish, 2010 ONCA 124 (CanLII), [2010] O.J. No. 604, par. 29-31 (C.A. Ont.) :

« An accused does not have a freestanding constitutional right to an adequate investigation of the charges against him or her : R. v. Barnes, 2009 ONCA 432, at para. 1. Inadequacies in an investigation may lead to the ultimate failure of the prosecution, to a specific breach of a Charter right or to a civil remedy. Those inadequacies do not, however, in-and-of-themselves constitute a denial of the right to make full answer and defence.

An accused also does not have a constitutional right to direct the conduct of the criminal investigation of which he or she is the target. As Hill J. put it in R. v. West, [2001] O.J. No. 3406 (S.C.), at para. 75, the defence cannot, through a disguised-disclosure demand, “conscript the police to undertake investigatory work for the accused”. See also : R. v. Schmidt (2001), 2001 BCCA 3 (CanLII), 151 C.C.C. (3d) 74 (B.C.C.A.), at para. 19. That is not to say that the police and the Crown should not give serious consideration to investigative requests made on behalf of an accused. Clearly, they must. However, it is the prosecutorial authorities that carry the ultimate responsibility for determining the course of the investigation. Criminal investigations involve the use of public resources and the exercise of intrusive powers in the public interest. Responsibility for the proper use of those resources and powers rests with those in the service of the prosecution, and not with the defence.

Nor does the disclosure right, as broad as that right is, extend so far as to require the police to investigate potential defences. »

Voir également Lafond c. R., [2014] J.Q. No. 23709, par. 21 (C.A.); R. c. Spackman, 2012 ONCA 905 (CanLII), [2012] O.J. No. 6127, par. 108 et 109 (C.A. Ont.).

441. R. c. Stinchcombe, 1995 CanLII 130 (CSC), [1995] 1 R.C.S. 754, par. 28 :

« En ce qui concerne le moment de la divulgation, je souscris à la recommandation de la Commission de réforme du droit du Canada, dans ses deux rapports susmentionnés, que la communication initiale de la preuve devrait avoir lieu avant que l’accusé ne soit appelé à choisir son mode de procès ou à présenter son plaidoyer. Ce sont des mesures cruciales que doit prendre l’accusé et qui influent de façon fondamentale sur ses droits. Il sera d’un grand secours à l’accusé de connaître les points forts et les points faibles de la preuve du ministère public avant d’en venir à une décision à cet égard. Comme je l’ai déjà souligné, le système bénéficiera lui aussi d’une divulgation prématurée, puisque cela facilitera le règlement sans procès de bien des accusations grâce à l’augmentation du nombre d’accusations retirées et de plaidoyers de culpabilité. »

442. Mathieu CHENETTE, La constitutionnalité du par. 515(6) du Code criminel et d’autres sujets touchant la libération provisoire au Canada, Mémoire présenté en vue de l’obtention du grade de maître en droit, 8 mars 2018. Voir également le Guide du Service des poursuites pénales du Canada, Ligne directrice du directeur donnée en vertu de l’article 3(3(c) de la Loi sur le directeur des poursuites pénales, le 1 mars 2014 : « 1. Document d’inculpation; 2. Détails de l’infraction; 3. Déclarations des témoins; 4. Enregistrements électroniques (audio/vidéo) des déclarations des témoins; 5. Déclarations de l’accusé; 6. Casier judiciaire de l’accusé; 7. Rapports des témoins experts; 8. Preuve documentaire et autre; 9. Pièces; 10. Mandats de perquisition; 11. Autorisations d’interception de communications privées; 12. Preuves de faits similaires; 13. Preuves d’identité; 14. Casiers judiciaires des témoins; 15. Renseignements pertinents quant à la preuve principale; 16. Renseignements pertinents quant à la contestation de la crédibilité; 17. Renseignements obtenus lors d’entrevues des témoins; 18. Renseignements obtenus par les coordonnateurs des témoins de la Couronne; 19. Autres renseignements. »

443. R. c. Chaplin, 1995 CanLII 126 (CSC), [1995] 1 R.C.S. 727, par. 21 :

« Du fait de l’obligation lui incombant de divulguer toute preuve pertinente et non privilégiée, qu’elle soit favorable ou défavorable à l’accusé, le ministère public doit faire preuve de la plus grande bonne foi en déterminant quels renseignements communiquer et en veillant à ce que cette communication se fasse de façon suivie. L’omission de s’acquitter de cette obligation initiale et permanente de divulguer toute preuve pertinente et non privilégiée peut aboutir à un arrêt des procédures ou autre réparation, et peut constituer un manquement grave aux normes éthiques. »

Bolduc c. R., [2016] J.Q. No. 493, par. 21 (C.A.) : « Cette exigence s’impose à la poursuite en tout temps et vaut pour tous les renseignements complémentaires recueillis postérieurement à la communication initiale dès leur réception. »; Henry c. Colombie-Britannique (Procureur général), 2015 CSC 24 (CanLII), [2015] 2 R.C.S. 214, par. 60 : « En outre, l’obligation de communication est constante, ce qui oblige les poursuivants à évaluer sans arrêt les renseignements en leur possession. »

444. R. c. McNeil, 2009 CSC 3 (CanLII), [2009] 1 R.C.S. 66, par. 17.

445. Berger c. R., [2012] J.Q. No. 23976, par. 14 :

« Entre les arrestations et le 5 octobre 2009, il y a eu huit divulgations de la preuve. Depuis le 5 octobre 2009, il y a eu vingt (20) nouvelles divulgations de preuve dont la plus récente, au moment des auditions, était le 31 mai 2012. »

446. R. c. McNeil, 2009 CSC 3 (CanLII), [2009] 1 R.C.S. 66, par. 28 :

« Comme nous l’avons déjà vu, l’obligation présumée qui incombe à l’avocat du ministère public de communiquer les fruits de l’enquête en sa possession établie dans Stinchcombe repose sur l’hypothèse que les renseignements sont pertinents et comprennent probablement la preuve qui sera présentée contre l’accusé. »

447. Berger c. R., [2012] J.Q. No. 23976, par. 7 et 49 :

« Le ministère public ne pouvait pas ignorer la jurisprudence qui impose à la défense de signaler et de requérir du poursuivant les éléments de preuve non divulgués dont la trace est visible dans la divulgation au risque d’être forclos de le faire plus tard. »

« L’avocat de la défense doit cependant être diligent et son inaction peut lui être fatale s’il ne demande pas la communication d’éléments dont il a ou aurait dû avoir connaissance à partir de documents pertinents produits par le ministère public. »

448. R. c. Chaplin, 1995 CanLII 126 (CSC), [1995] 1 R.C.S. 727, par. 25 :

« Dans les cas où l’existence de certains renseignements a été établie, le ministère public est tenu de justifier la non-divulgation en démontrant soit qu’il n’en a pas le contrôle soit qu’ils sont manifestement sans pertinence ou privilégiés. Le juge du procès doit accorder au ministère public la possibilité de présenter des éléments de preuve justifiant une telle allégation. »

Berger c. R., [2012] J.Q. No. 23976, par. 50 :

« Lorsque l’existence de la preuve est établie, le ministère public est tenu de justifier la non-divulgation en fonction des exceptions reconnues. Il est en effet le mieux placé pour discuter de la pertinence ou du privilège puisqu’il est le seul à connaître le renseignement demandé. »

449. Larivière c. R., [2016] J.Q. No. 19619, par. 45-47 :

« À la lumière des obligations du ministère public énoncées par la Cour suprême dans l’arrêt McNeil, cette démarche ne doit pas être comprise comme un processus passif pour le ministère public qui n’aurait qu’à déclarer ignorer l’existence du renseignement et attendre que la défense en établisse l’existence.

Une telle approche serait tout à fait inconciliable avec l’obligation pour le ministère public de s’informer de l’existence d’un élément de preuve potentiellement pertinent ou pouvant présenter une certaine utilité pour la défense qui est en la possession de tiers. L’arrêt McNeil impose au ministère public l’obligation de se renseigner et de tenter d’obtenir l’élément de preuve en question.

Par conséquent, le Tribunal tient pour acquis que le ministère public effectuera une telle démarche et confirmera ou non l’existence du renseignement avant le début de la présentation de la preuve sur voir-dire. »

450. Berger c. R., [2012] J.Q. No. 23976, par. 53 :

« La Cour suprême invite les juges à faire preuve d’imagination pour adapter à chaque cas les ordonnances réparatrices. Il appartient au requérant d’établir la pertinence de la réparation demandée et le juge doit d’abord examiner les remèdes les moins extrêmes. »

451. R. c. Dixon, 1998 CanLII 805 (CSC), [1998] 1 R.C.S. 244, par. 22.

452. R. c. Dixon, 1998 CanLII 805 (CSC), [1998] 1 R.C.S. 244, par. 31.

453. Berger c. R., [2012] J.Q. No. 23976, par. 52 :

« Lorsqu’une omission de divulguer est démontrée, l’accusé a le droit à une réparation en vertu du paragraphe 24(1) de la Charte. Le critère pour établir la violation du droit à la divulgation est différent de celui à respecter pour la réparation. En effet, le droit à la divulgation complète est large et vise des documents qui ne sont pas nécessairement déterminants dans un litige. »

454. R. c. Carosella, 1997 CanLII 402 (CSC), [1997] 1 R.C.S. 80, par. 37 :

« Le droit à la communication de documents qui satisfont au critère préliminaire établi dans Stinchcombe est l’un des éléments du droit de présenter une défense pleine et entière qui est lui un principe de justice fondamentale visé à l’art. 7 de la Charte. Le fait de manquer à cette obligation constitue une atteinte aux droits constitutionnels de l’accusé, sans qu’il soit nécessaire de prouver l’existence d’un préjudice additionnel. Pour paraphraser les propos du juge en chef Lamer dans l’arrêt Tran, la violation de ce principe de justice fondamentale est préjudiciable en soi. L’obligation de prouver un préjudice additionnel ou concret concerne la réparation qui doit être déterminée en application du par. 24(1) de la Charte. »

455. R. c. O’Connor, 1995 CanLII 51 (CSC), [1995] 4 R.C.S. 411, par. 76 et 77 :

« Ainsi, lorsqu’il est possible, au moyen d’une ordonnance de divulgation, de pallier l’impact néfaste que peut avoir la non-divulgation sur la possibilité pour l’accusé de présenter une défense pleine et entière, une telle réparation sera généralement appropriée, accompagnée d’un ajournement si nécessaire afin de permettre à l’avocat de la défense d’examiner les renseignements divulgués.

Il peut, cependant, exister des cas exceptionnels où, vu le stade avancé de l’instance, il n’est tout simplement pas possible de remédier par des moyens raisonnables au préjudice causé au droit de l’accusé de présenter une défense pleine et entière. Dans ces cas, la réparation draconienne que constitue l’arrêt des procédures pourra s’imposer. Même si j’entends revenir sur ce point lors de l’examen de la divulgation de dossiers en possession de tiers, nous devons nous rappeler que, dans certaines circonstances, la défense ne sera pas en mesure d’établir les fondements d’une requête visant la divulgation d’un document déterminé tant que le procès ne sera pas vraiment commencé et que les témoins n’auront pas été appelés à la barre. Il sera peut-être alors nécessaire de prendre des mesures telles que de permettre à la défense de rappeler certains témoins à la barre pour les interroger ou les contre-interroger, de consentir à des ajournements pour permettre à la défense d’assigner d’autres témoins ou même, dans des cas extrêmes, de déclarer le procès nul. L’arrêt des procédures est le dernier ressort, auquel on doit avoir recours et uniquement après avoir épuisé tous les autres moyens acceptables pour protéger le droit de l’accusé à une défense pleine et entière. »

R. c. Carosella, 1997 CanLII 402 (CSC), [1997] 1 R.C.S. 80, par. 26 :

« En toute déférence, la cour a mal appliqué le fardeau qui incombait à l’appelant, et elle a confondu l’obligation d’établir la violation du droit avec l’obligation qui incombe à l’appelant lorsqu’il sollicite l’arrêt des procédures. Le droit d’un accusé d’obtenir la production de documents par le ministère public ou par des tierces parties est un droit constitutionnel. Voir les arrêts R. c. Stinchcombe, 1991 CanLII 45 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 326, et R. c. O’Connor, 1995 CanLII 51 (CSC), [1995] 4 R.C.S. 411. En cas de violation de ce droit, l’accusé a le droit d’obtenir une réparation en vertu du par. 24(1) de la Charte. Ces réparations vont de l’ajournement, unique ou multiple, à l’arrêt des procédures. Exiger de l’accusé qu’il prouve qu’il a été lésé dans sa défense vouerait à l’échec toute demande de réparation, même celles sollicitant la plus modeste des réparations, lorsque les documents n’ont pas été produits. Cela aurait pour effet d’obliger l’accusé à démontrer de quelle manière sa défense serait touchée par l’absence de documents qu’il n’a pas vus. »

Directeur des poursuites criminelles et pénales c. Dépanneur RVJ inc., [2017] J.Q. No. 15470, par. 27, 28 et 31 :

« La juge d’instance aurait dû réagir comme se trouvant devant une situation de divulgation tardive.

La jurisprudence constante est à l’effet qu’en cas d’accroc à l’obligation de divulgation, le remède approprié est l’ordonnance de divulgation et, si nécessaire, un ajournement afin de permettre à la défense de prendre connaissance de la nouvelle preuve et d’ajuster sa stratégie en conséquence. La Juge aurait dès lors dû évaluer l’opportunité d’accorder une demande de remise, demande qui aurait pu être refusée.

Le Tribunal est d’avis que la Juge Benoit pouvait réagir mais n’avait pas à prononcer l’arrêt des procédures, d’autres remèdes étaient alors disponibles. »

456. Berger c. R., [2012] J.Q. No. 23976, par. 54.

457. R. c. Bjelland, 2009 CSC 38 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 651, par. 24; Bolduc c. R., [2016] J.Q. No. 493, par. 33 et 34 (C.A.) :

« Il est vrai que l’information devait être communiquée de manière plus diligente par la poursuite. Néanmoins, l’appelant n’explique pas en quoi cette communication survenue quelques jours plus tard, mais complétée avant le témoignage du témoin idoine, nuit à l’équité du procès. Au contraire, l’appelant affirme au procès que les témoignages de ces deux personnes n’ajoutent rien au débat :

... puis ces témoins-là, là, c’est de la poutine, là, parce que ce qu’ils viennent dire, là, ils ne viennent pas dire grand-chose, là, tu sais, ils viennent... certains faits, c’est vraiment mineur, tu sais, ce n’est pas... ce n’est pas comme si c’était la victime dans le dossier, là, puis qui est vraiment... qui est important. Ou l’autre, [...], qui est un acteur... [...] qui est un autre acteur beaucoup plus impliqué. Eux, c’est comme... tu sais, ça ne rajoute pas grand-chose au débat, [...]

La communication tardive des notes concernant ces deux témoins ne porte pas atteinte au droit de l’appelant à une défense pleine et entière. »

458. R. c. Bjelland, 2009 CSC 38 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 651, par. 37 et 38 :

« En l’espèce, même s’il l’a fait tardivement, le ministère public a communiqué la preuve à l’appelant. Comme ce dernier a finalement obtenu cette communication, son droit garanti à l’art. 7 de présenter une défense pleine et entière n’a pas été violé du fait qu’il n’a pas pu contre-interroger les témoins potentiels du ministère public lors de l’enquête préliminaire. L’appelant a reçu la transcription d’une déclaration de type KGB enregistrée sur bande vidéo faite par un de ses complices ainsi qu’un exposé conjoint des faits sur lequel est fondé le plaidoyer de culpabilité et la peine de l’autre complice. Ces documents fournis à l’appelant constituaient une communication suffisante de la preuve que le ministère public entendait présenter contre lui. L’appelant pouvait présenter une défense pleine et entière, comme le garantit l’art. 7 de la Charte, sans avoir besoin de contre-interroger ces témoins à l’enquête préliminaire. Le préjudice causé à l’appelant en raison de la communication tardive de la preuve par le ministère public aurait donc pu être réparé par un ajournement. Une telle mesure aurait permis à l’appelant d’examiner les nouveaux éléments de preuve présentés contre lui.

Contrairement à l’exclusion des éléments de preuve en cause ordonnée par le juge du procès, un ajournement aurait protégé l’intérêt de la société à ce que soit tenu un procès équitable tout en réparant le préjudice causé à l’accusé. Si le juge du procès ne s’était pas fondé sur des considérations erronées, il aurait ordonné cette réparation. »

459. Zagrebaev c. R., [2019] J.Q. No. 9158, par. 101, 103-108 :

« Or, tel que vu précédemment, suite à la suspension de l’audience et à la divulgation des notes manquantes du policier, les parties ont convenu de demander au juge de première instance de ne pas tenir compte d’une des déclarations de l’appelant, selon laquelle il aurait consommé une certaine quantité d’alcool avant de conduire.

Par ailleurs, l’appelant n’a pas fait la preuve d’un préjudice véritable quant à sa possibilité de présenter une défense pleine et entière.

À cet égard, le dossier tel que constitué ne permet pas d’identifier un tel préjudice, puisque le contenu des notes non divulguées n’a pas été porté entièrement à la connaissance du juge de première instance.

Tout au plus, l’on sait qu’il y avait une déclaration de l’appelant selon laquelle il aurait consommé une certaine quantité d’alcool avant de conduire. On peut penser que la demande conjointe des parties, suite à la suspension, d’exclure cette déclaration de la preuve répondait aux préoccupations de la défense puisqu’aucune demande d’ajournement n’a été présentée et que la défense s’est déclarée prête à continuer le procès.

Considérant ce qui précède, le Tribunal ne voit pas en quoi l’équité du procès ait pu être affectée de façon irrémédiable.

Le Tribunal est ici d’avis que le juge de première instance n’a commis aucune erreur révisable en n’ordonnant pas l’arrêt des procédures. »

460. R. c. Taillefer; R. c. Duguay, 2003 CSC 70 (CanLII), [2003] 3 R.C.S. 307, par. 71 :

« Tel que notre Cour l’a précisé dans l’arrêt Dixon, le droit à la divulgation ne représente que l’une des composantes du droit à une défense pleine et entière. Sa violation ne constitue pas toujours une atteinte au droit à une défense pleine et entière. En effet, il arrive que des renseignements non divulgués satisfassent au critère minimal établi dans l’arrêt Stinchcombe tout en ne revêtant qu’une importance secondaire par rapport aux questions en litige (Dixon, précité, par. 23-30). Afin d’établir l’existence d’une atteinte à une défense pleine et entière, l’accusé devra démontrer qu’il existe une possibilité raisonnable que la non-divulgation ait influé sur l’issue ou sur l’équité globale du procès (Dixon, précité, par. 34). »

Thébaud c. R., [2019] J.Q. No. 3133, par. 21 et 22 (C.A.) :

« Par ailleurs, même si je devais accepter la proposition de l’appelant selon laquelle la communication de la preuve était insuffisante sous ce rapport, les circonstances de l’espèce ne font pas voir que ce prétendu manquement a porté atteinte à son droit à une défense pleine et entière. Comme il le souhaitait, son avocat a pu rencontrer le témoin Landry le matin du 10 novembre, et ce, avant que la poursuivante ne déclare sa preuve close. L’avocat de l’appelant s’est aussitôt dit prêt à commencer sa défense avec le témoin Landry. Cette volonté de l’avocat d’enchaîner immédiatement avec sa preuve en défense fait bien ressortir l’absence d’obstacle véritable susceptible de rendre la continuation du procès inéquitable.

Bref, peu importe à quel stade de l’analyse on se situe pour étudier le reproche de l’appelant, ce dernier ne réussit pas à démontrer une possibilité raisonnable que l’information requise à la dernière minute par son avocat ait pu influer de quelque façon sur le bien-fondé des déclarations de culpabilité ni que cette absence de communication ait pu affecter l’équité globale du procès. »

461. R. c. O’Connor, 1995 CanLII 51 (CSC), [1995] 4 R.C.S. 411, par. 74 :

« Lorsque l’accusé tente de prouver que la non-divulgation par le ministère public viole l’art. 7 de la Charte, il doit prouver que la non-divulgation en cause a, selon la balance des probabilités, nui à la possibilité pour l’accusé de présenter une défense pleine et entière ou a eu un effet défavorable sur cette possibilité. Il va sans dire qu’une telle détermination exige une enquête suffisante sur le caractère substantiel des renseignements non divulgués. Lorsque les renseignements sont considérés non substantiels quant à la possibilité pour l’accusé de présenter une défense pleine et entière, il ne saurait y avoir violation de la Charte à cet égard. Je ferai observer, de plus, que les déductions ou conclusions relatives à l’à-propos de la conduite ou de l’intention du ministère public ne sont pas nécessairement pertinentes lorsqu’il s’agit de savoir s’il y a eu violation ou non du droit de l’accusé à un procès équitable. L’accent doit être mis principalement sur l’effet que les actions contestées auront sur l’équité du procès de l’accusé. Une fois la violation prouvée, une réparation juste et convenable s’impose. »

462. R. c. Dixon, 1998 CanLII 805 (CSC), [1998] 1 R.C.S. 244, par. 34. L’Espérance c. R., [2020] J.Q. No. 135, par. 32 (C.A.) :

« Ainsi, lorsque la question de la non-divulgation est soulevée dans le cadre d’un appel contre une déclaration de culpabilité, l’accusé doit commencer par établir l’existence d’une violation du droit à la divulgation. Si telle violation est établie, il lui incombe alors de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que l’omission de divulguer a porté atteinte à son droit à une défense pleine et entière, et cette obligation de démonstration sera satisfaite lorsque l’accusé aura démontré qu’il y a une possibilité raisonnable que la non-divulgation ait influé sur l’issue ou l’équité globale du procès. »

463. R. c. Taillefer; R. c. Duguay, 2003 CSC 70 (CanLII), [2003] 3 R.C.S. 307, par. 81 :

« Premièrement, il incombe à l’accusé de démontrer qu’il existe une possibilité raisonnable que le verdict aurait été différent n’eût été l’omission du ministère public de divulguer l’ensemble de la preuve pertinente. L’accusé n’assume donc pas le lourd fardeau de démontrer qu’il est probable ou certain que la nouvelle preuve aurait influé sur le verdict (Jarema, précité, par. 18 et suiv.; Stinchcombe, précité, p. 348). Tel que notre Cour l’a précisé dans l’arrêt Dixon, “[i]mposer un critère fondé sur une possibilité raisonnable permet d’établir un juste équilibre entre l’intérêt qu’a l’accusé à subir un procès équitable et l’intérêt qu’a le public dans l’administration efficace de la justice. On reconnaît ainsi la difficulté qu’il y a à reconstituer fidèlement le procès et on évite l’effet non souhaitable de miner les obligations de divulgation du ministère public” (par. 34). »

464. R. c. Dixon, 1998 CanLII 805 (CSC), [1998] 1 R.C.S. 244, par. 36.

465. Harvey c. R., [2017] J.Q. No. 6675, par. 85 :

« Par ailleurs, même si les renseignements non divulgués n’influent pas eux-mêmes sur le bien-fondé du verdict, il faut considérer, dans une seconde étape de l’analyse, l’effet de la non-divulgation sur l’équité globale du procès. Pour ce faire, il faut évaluer, sous l’angle d’une possibilité raisonnable, les questions qui auraient pu être posées aux témoins ou les possibilités de recueillir d’autres éléments de preuve que la défense aurait pu avoir si les renseignements pertinents avaient été divulgués. »

466. R. c. Dixon, 1998 CanLII 805 (CSC), [1998] 1 R.C.S. 244, par. 36.

467. R. c. Dixon, 1998 CanLII 805 (CSC), [1998] 1 R.C.S. 244, par. 36 :

« Bref, la possibilité raisonnable que les renseignements non divulgués aient porté atteinte au droit à une défense pleine et entière a trait non seulement au contenu des renseignements eux-mêmes, mais encore aux possibilités réalistes d’examiner les utilisations possibles des renseignements non divulgués aux fins de l’enquête et de la cueillette d’éléments de preuve. »

R. c. Taillefer; R. c. Duguay, 2003 CSC 70 (CanLII), [2003] 3 R.C.S. 307, par. 83 :

« Il ne suffira pas d’apprécier la violation du droit à une défense pleine et entière uniquement en rapport avec la nature des nouveaux éléments de preuve. Il faudra, également, considérer l’utilité potentielle de ceux-ci pour la défense. »

468. R. c. Dixon, 1998 CanLII 805 (CSC), [1998] 1 R.C.S. 244, par. 50.

469. Harvey c. R., [2017] J.Q. No. 6675.

470. R. c. Tossounian, [2017] O.J. No. 3842, par. 31 (C.A. Ont.) :

« I am satisfied there is a reasonable possibility that the failure of disclosure in this case foreclosed lines of inquiry that could have been available to the appellant had disclosure been made, thus impairing her right to make full answer and defence. The only issue at trial was her identification as the woman seen walking away from the fire. The failure of disclosure detrimentally affected her ability to cross-examine and to diminish the reliability of the witnesses who identified her. Hence I am satisfied the inadequate disclosure negatively affected the overall fairness of the appellant’s trial. The remedy for the infringement of the appellant’s right is a new trial. »

471. R. c. Taillefer; R. c. Duguay, 2003 CSC 70 (CanLII), [2003] 3 R.C.S. 307, par. 107 :

« J’estime également que l’appelant a réussi à démontrer qu’il est raisonnablement possible que la nouvelle preuve aurait eu un impact sur l’équité globale du procès. En effet, l’appelant Taillefer a été privé de nombreux éléments de preuve qui lui auraient permis de mettre en doute autant la crédibilité de plusieurs témoins que celle de la thèse de la poursuite. De plus, la connaissance des éléments de preuve non divulgués en temps opportun aurait ouvert de nouvelles pistes d’enquête à la défense. En conséquence, je conclus que le droit constitutionnel de l’appelant à une défense pleine et entière a été gravement violé. »

472. R. c. Taillefer; R. c. Duguay, 2003 CSC 70 (CanLII), [2003] 3 R.C.S. 307, par. 84 :

« La possibilité raisonnable d’influence sur l’équité globale du procès “doit se fonder sur les utilisations raisonnablement possibles de la preuve non divulguée ou sur les moyens d’enquête raisonnablement possibles dont l’accusé a été privé à la suite de la non-divulgation” (Dixon, précité, par. 34 (souligné dans l’original)). Encore une fois, la Cour d’appel ne doit pas évaluer les utilisations possibles des nouveaux éléments de preuve sur la base d’une analyse particularisée de la force probante de chacun d’eux. Elle doit vérifier si la non-divulgation a privé l’accusé de certains moyens de preuve ou d’enquête. Ce serait le cas par exemple si la déclaration non divulguée d’un témoin aurait raisonnablement pu être utilisée afin d’affaiblir la crédibilité d’un témoin de la poursuite. Une même conclusion s’imposerait si la poursuite omet de divulguer à la défense l’existence d’un témoin qui aurait pu, en temps opportun, permettre la découverte d’autres témoins utiles à la défense. »

473. L’Espérance c. R., [2020] J.Q. No. 135 (C.A.).

474. L’Espérance c. R., [2020] J.Q. No. 135, par. 28 (C.A.).

475. L’Espérance c. R., [2020] J.Q. No. 135, par. 39 (C.A.).

476. Auclair c. R., 2016 QCCA 1361 (CanLII), [2016] J.Q. No. 11062, par. 14 (C.A.).

477. R. c. O’Connor, 1995 CanLII 51 (CSC), [1995] 4 R.C.S. 411, par. 82 :

« Il faut toujours se rappeler que l’arrêt des procédures est approprié uniquement “dans les cas les plus manifestes” lorsqu’il serait impossible de remédier au préjudice causé au droit de l’accusé à une défense pleine et entière ou lorsque la continuation de la poursuite causerait à l’intégrité du système judiciaire un préjudice irréparable. »

478. R. c. Babos, 2014 CSC 16 (CanLII), [2014] 1 R.C.S. 309, par. 31 :

« La Cour a néanmoins reconnu qu’il existe de rares cas – les “cas les plus manifestes” – dans lesquels un abus de procédure justifie l’arrêt des procédures (R. c. O’Connor, 1995 CanLII 51 (CSC), [1995] 4 R.C.S. 411, par. 68). Ces cas entrent généralement dans deux catégories : (1) ceux où la conduite de l’État compromet l’équité du procès de l’accusé (la catégorie “principale”); (2) ceux où la conduite de l’État ne présente aucune menace pour l’équité du procès, mais risque de miner l’intégrité du processus judiciaire (la catégorie “résiduelle”) (O’Connor, par. 73). »

479. R. c. Babos, 2014 CSC 16 (CanLII), [2014] 1 R.C.S. 309, par. 32.

480. Harvey c. R., [2017] J.Q. No. 6675, par. 166 :

« Compte tenu du peu de cas fait de cet avertissement et de l’imposition, en janvier 2016, d’une première mesure de réparation en lien avec une violation du droit des requérants à une défense pleine et entière, le Tribunal considère que la conduite répréhensible du Ministère public risque fort de se perpétuer ou de s’aggraver à l’avenir. »

481. R. c. Babos, 2014 CSC 16 (CanLII), [2014] 1 R.C.S. 309, par. 35.

482. Auclair c. R., 2016 QCCA 1361 (CanLII), [2016] J.Q. No. 11062, par. 26 (C.A.) :

« En effet, l’arrêt des procédures est un remède draconien, qui ne peut être accordé que dans les cas les plus manifestes, là où aucune autre mesure n’est concevable. Ces cas seront rares et, comme le souligne la Cour suprême dans Babos, si une réparation moindre que l’arrêt des procédures permet de corriger le préjudice que subit l’accusé tout en permettant au système de justice, le cas échéant, de se dissocier suffisamment de la conduite reprochée à l’État, alors cette réparation moindre doit être envisagée. C’est ainsi qu’une ordonnance de nouveau procès sera parfois de mise. Par ailleurs, si ni l’une ni l’autre de ces mesures n’est appropriée, d’autres remèdes pourront être considérés, dont, comme on l’a vu, la réduction de la peine. »

483. Berger c. R., [2015] J.Q. No. 10113.

484. Berger c. R., [2015] J.Q. No. 10113, par. 44.

485. R. c. Blyth, [1996] N.B.J. No. 107, par. 28 et 29 (C.A. N.B.) :

« Madame la juge L’Heureux-Dubé a de plus ajouté qu’il existe des cas exceptionnels où, vu le stade avancé de l’instance, il n’est tout simplement pas possible de remédier au préjudice. Dans l’affaire Blyth, la fin de l’interrogatoire du plaignant aurait constitué la fin de l’exposé de la poursuite, c’est-à-dire, un stade avancé de l’instance.

La poursuite ne nie pas le caractère pertinent ou substantiel des renseignements en cause ni le préjudice que l’accusé a subi. Les arguments de la poursuite portent sur l’arrêt des procédures. Si on prend en compte le fait que la poursuite avait presque terminé de présenter sa preuve, l’évaluation de la pertinence et du caractère substantiel des renseignements que le juge du procès a faite et sa conclusion quant au préjudice causé aux droits de l’accusé de présenter une défense pleine et entière et du fait que l’arrêt des procédures était la seule réparation convenable, nous ne modifierons pas sa décision. »

486. Harvey c. R., [2017] J.Q. No. 6675, par. 168 :

« Tel que mentionné plus haut, le retrait des plaidoyers de culpabilité ou la simple réouverture d’enquête permettraient, dans un cadre factuel normal, de corriger le préjudice causé aux requérants Hudon, Harvey et Roberge par la transgression de leur droit à un procès équitable. Or, ceux-ci ont comparu au dossier le 16 novembre 2011 et l’accusé Hudon est en détention provisoire depuis cette date. Se pose donc inévitablement la question du droit constitutionnel des accusés d’être jugés dans un délai raisonnable, lequel fera l’objet de la seconde partie de cette décision. »

487. R. c. Babos, 2014 CSC 16 (CanLII), [2014] 1 R.C.S. 309, par. 39.

488. Berger c. R., [2015] J.Q. No. 10113, par. 45.

489. R. c. O’Connor, 1995 CanLII 51 (CSC), [1995] 4 R.C.S. 411, par. 78.

490. Harvey c. R., [2017] J.Q. No. 6675.

491. Harvey c. R., [2017] J.Q. No. 6675, par. 137-139 :

« Contrairement à la situation qui prévalait à l’automne 2015, le soussigné constate maintenant l’existence d’une preuve circonstancielle largement prépondérante démontrant que la Sûreté du Québec a délibérément choisi de préserver, par le camouflage et la ruse, une apparence de crédibilité et de fiabilité chez l’agent civil d’infiltration, et ce, jusqu’à ce que l’ensemble de la preuve sur la peine soit close.

Le laxisme, voire l’aveuglement volontaire, démontré dans le traitement des inconduites de l’agent civil Brassard, de même que la stratégie peu subtile observée dans le cadre du processus de résiliation de l’Entente permettent au soussigné de conclure que la conduite policière a non seulement porté atteinte aux droits des accusés Hudon, Harvey et Roberge à un procès équitable, mais défié au surplus les normes les plus élémentaires de franc-jeu et de décence dont doivent faire preuve les policiers dans l’exercice de leurs fonctions.

En outre, la Poursuite a délibérément choisi de ne pas communiquer aux requérants un élément de preuve pertinent, important et potentiellement déterminant portant directement sur la crédibilité de l’agent civil.

Pour les motifs déjà évoqués, le soussigné estime que les comportements de la police et de la Couronne ayant ici porté atteinte à la probité du système judiciaire sont à ce point choquants que le fait pour le Tribunal d’autoriser la continuation des présentes procédures équivaudrait à homologuer une inqualifiable désinvolture à l’égard des droits et libertés fondamentaux des trois accusés concernés. »

492. Harvey c. R., [2017] J.Q. No. 6675, par. 176-179 :

« Le soussigné considère avoir déjà suffisamment insisté sur la nature et la gravité des comportements répréhensibles de la police et de la Couronne, de même que sur le sérieux des accusations portées.

Quant à la situation des accusés, qu’il suffise de mentionner que Richard Hudon est détenu provisoirement depuis maintenant 60 mois. Simon Harvey et Christian Roberge sont pour leur part soumis à des conditions restrictives de remise en liberté depuis la même période.

La conduite de l’État est particulièrement grave puisqu’elle porte atteinte, de manière insidieuse, au droit des requérants à une défense pleine et entière. Mettant en balance les considérations militant en faveur d’un arrêt des procédures et celles favorisant une adjudication finale sur le fond, le Tribunal juge être en présence de l’un de ces “cas les plus manifestes” le justifiant d’intervenir. La conduite répréhensible choque la conscience de la collectivité et porte préjudice à l’administration régulière de la justice à un point tel qu’il convienne de prononcer un arrêt des procédures à l’égard de Richard Hudon, Simon Harvey et Christian Roberge, et ce, afin de préserver l’intégrité du système judiciaire. »

493. R. c. Babos, 2014 CSC 16 (CanLII), [2014] 1 R.C.S. 309, par. 40.

494. Personne désignée c. Vancouver Sun, 2007 CSC 43 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 253, par. 17 et 18 :

« Dans l’arrêt R. c. Hunter (1987), 1987 CanLII 123 (ON CA), 57 C.R. (3d) 1 (C.A. Ont.), p. 5-6, le juge Cory (plus tard juge de notre Cour) a fait un résumé utile de cette règle et son résumé a été repris par la juge McLachlin (maintenant Juge en chef) dans les motifs qu’elle a rédigés dans l’arrêt R. c. Leipert, 1997 CanLII 367 (CSC), [1997] 1 R.C.S. 281, par. 9 :

[Traduction] La règle interdisant la divulgation de renseignements susceptibles de permettre d’établir l’identité d’un indicateur existe depuis très longtemps. Elle trouve son origine dans l’acceptation de l’importance du rôle des indicateurs dans le dépistage et la répression du crime. On a reconnu que les citoyens ont le devoir de divulguer à la police tout renseignement qu’ils peuvent détenir relativement à la perpétration d’un crime. Les tribunaux ont réalisé très tôt l’importance de dissimuler l’identité des indicateurs, à la fois pour assurer leur propre sécurité et pour encourager les autres à divulguer aux autorités tout renseignement concernant un crime. La règle a été adoptée en vue de réaliser ces objectifs. [Je souligne.]

Ce passage fait utilement ressortir le double objectif sur lequel repose la règle du privilège relatif aux indicateurs de police. L’interdiction de dévoiler l’identité de l’indicateur sert non seulement à protéger l’indicateur de représailles possibles, mais aussi à envoyer aux indicateurs éventuels le message que leur identité sera elle aussi protégée. Sans minimiser l’importance de la protection particulière assurée par la règle à un indicateur donné, il nous faut mettre l’accent sur la protection générale que la règle assure à tous les indicateurs, antérieurs et actuels. »

495. R. c. Barros, 2011 CSC 51 (CanLII), [2011] 3 R.C.S. 368, par. 31.

496. R. c. Basi, 2009 CSC 52 (CanLII), [2009] 3 R.C.S. 389, par. 39. Qu’il s’agisse d’une source anonyme ou connue des policiers, d’un citoyen soucieux de justice ou d’un criminel agissant par avidité, envie ou désir de vengeance importe peu, si la personne qui collabore avec la police a demandé que son identité demeure secrète et que la police a consenti à une telle demande, l’informateur bénéficiera de la protection offerte aux indicateurs de police.

497. Allie c. R., [2013] J.Q. No. 20081, par. 32 :

« La preuve démontre que la source “E” est un informateur codé et contrôlé par [...] depuis [...] Il n’est pas contesté que [...] lui avait d’ailleurs formulé une promesse explicite de confidentialité pour sa collaboration. »

498. Bisaillon c. Keable, 1983 CanLII 26 (CSC), [1983] 2 R.C.S. 60, par. 142 :

« Le principe confère en effet à l’agent de la paix le pouvoir de promettre explicitement ou implicitement le secret à ses indicateurs, avec la garantie sanctionnée par la loi que cette promesse sera tenue même en cour, et de recueillir en contrepartie de cette promesse, des renseignements sans lesquels il lui serait extrêmement difficile d’exercer ses fonctions et de faire respecter le droit criminel. [Je souligne; p. 105.] »

499. R. c. Personne désignée B, 2013 CSC 9 (CanLII), [2013] 1 R.C.S. 405, par. 18.

500. R. c. Barros, 2011 CSC 51 (CanLII), [2011] 3 R.C.S. 368, par. 32.

501. R. c. Gatchalian, [2008] J.Q. No. 15059, par. 43 :

« Les exemples que cite le juge Bastarache permettent de distinguer deux sortes de situations : la première, celle où le privilège ne s’applique pas, c’est-à-dire le cas de l’indicateur de police qui agit comme agent provocateur; la deuxième, les situations d’application de l’exception relative à la démonstration de l’innocence, c’est-à-dire lorsque l’indicateur de police est un témoin essentiel d’un crime et lorsque la perquisition fait l’objet d’une contestation fondée sur l’article 8 de la Charte. »

502. R. c. Barros, 2011 CSC 51 (CanLII), [2011] 3 R.C.S. 368, par. 33 :

« Aucune protection n’est accordée à la “source” dont la conduite va au-delà de la fourniture de renseignements et qui agit comme “agent provocateur” ou est par ailleurs un témoin important du crime. L’agent provocateur et le témoin important ont tous les deux une part active dans toute enquête et procédure criminelles, et leur rôle ne se borne pas au simple fait de donner un “tuyau” à la police. À partir du moment où l’indicateur se rend sur le “terrain” et se met à agir comme un agent de la police, le privilège relatif aux indicateurs de police, qui empêcherait la divulgation de son identité, cesse de s’appliquer à l’égard des événements dans le cadre desquels il agit comme agent : R. c. Broyles, 1991 CanLII 15 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 595, p. 607-609; R. c. Davies (1982), 1982 CanLII 3809 (ON CA), 1 C.C.C. (3d) 299(C.A. Ont.), p. 303; R. c. Babes (2000), 2000 CanLII 16820 (ON CA), 146 C.C.C. (3d) 465 (C.A. Ont.). Bien entendu, cela ne veut pas dire que l’indicateur perd la protection dans les autres cas où il n’a pas outrepassé les limites de son rôle. »

503. R. c. G.B., 2000 CanLII 16820 (ON CA), [2000] O.J. No. 2963 (C.A. Ont.), par. 10 :

« In general terms, the distinction between an informer and an agent is that an informer merely furnishes information to the police and an agent acts on the direction of the police and goes “into the field” to participate in the illegal transaction in some way. The identity of an informer is protected by a strong privilege and, accordingly, is not disclosable, subject to the innocence at stake exception. The identity of an agent is disclosable. »

R. c. Gatchalian, [2008] J.Q. No. 15059, par. 50 et 51 :

« Dans la présente affaire, l’indicateur de police “A” n’a pas agi comme agent provocateur. D’une part, la preuve démontre qu’il n’a joué aucun rôle dans la commission de l’infraction de possession dans le but de trafic du 29 mars 2006, dont il est accusé devant moi. D’autre part, la preuve ne révèle pas le moindre indice de l’existence d’une provocation policière contrairement à la situation dans Davies où l’indicateur était le seul témoin pouvant corroborer le témoignage rendu par l’accusé racontant qu’il devait être payé par l’agent clandestin jouant le rôle d’acheteur, ce qui pouvait l’innocenter puisque la thèse de la poursuite était que l’accusé travaillait pour les vendeurs. En effet dans la présente affaire, appliquant les principes de l’arrêt Mack, rien n’indique que les autorités ont fourni au requérant l’occasion de commettre une infraction sans pouvoir raisonnablement soupçonner qu’il était déjà engagé dans une activité criminelle ou se fonder sur une semblable enquête.

Même lors de l’achat contrôlé le 23 février 2006, les soupçons raisonnables de la police étaient fondés sur les renseignements fournis par l’indicateur “A” qui avait déjà démontré aux policiers qu’il était digne de foi à des occasions antérieures et rien n’indique que les autorités ont fait plus que de simplement fournir une occasion au requérant de commettre l’infraction. »

504. Voir toutefois R. c. Durham Regional Crime Stoppers Inc., 2017 CSC 45 (CanLII), [2017] 2 R.C.S. 157, par. 16 et 17 :

« X.Y. et Échec au crime affirment que tous ceux qui téléphonent à Échec au crime sont des indicateurs confidentiels et ont droit au privilège relatif aux indicateurs de police. Ils affirment que [Traduction] “le privilège s’applique automatiquement, littéralement, dès que le téléphone sonne” : m.a. (Échec au crime), par. 54. Je ne retiens pas cet argument. Comme je vais l’expliquer, le privilège relatif aux indicateurs de police ne s’applique pas lorsqu’une personne communique avec Échec au crime avec l’intention de faciliter une activité criminelle ou d’entraver l’administration de la justice. En pareil cas, à la différence de la revendication de privilège fondée sur la démonstration de l’innocence de l’accusé – laquelle est considérée comme une exception qui s’applique à une communication visée par ailleurs par le champ d’application du privilège relatif aux indicateurs de police –, la communication qui vise à faciliter une activité criminelle est exclue de la portée du privilège relatif aux indicateurs de police.

La raison d’être du privilège relatif aux indicateurs de police en limite la portée. Ainsi que le juge Binnie l’a souligné dans l’arrêt Barros, “il est important de ne pas étendre [la] portée [du privilège] au-delà de ce qui est nécessaire pour qu’il atteigne son objectif de protéger les indicateurs et [d’]inciter les personnes au courant d’activités criminelles [à] en parler aux autorités” : par. 28. En d’autres termes, le privilège relatif aux indicateurs de police ne peut être interprété de manière à ce qu’il s’applique lorsqu’il irait à l’encontre des objectifs mêmes qui en justifient l’existence. Comme je l’ai déjà expliqué, ce privilège est octroyé dans l’intérêt du public, pour aider la police dans les enquêtes qu’elle mène au sujet de crimes et dans l’appréhension des criminels – il sert donc l’intérêt de la justice et favorise le maintien de l’ordre public. Lorsque quelqu’un agit avec l’intention de faciliter une activité criminelle ou d’entraver l’administration de la justice – par exemple, en téléphonant à Échec au crime avec l’intention de lancer la police qui est en train de mener une enquête criminelle sur une fausse piste –, mettre son identité à l’abri grâce à la protection quasi absolue que confère le privilège relatif aux indicateurs de police compromettrait, voire annihilerait, la raison d’être de ce dernier. Le privilège relatif aux indicateurs de police ne s’applique donc pas en pareil cas, même si les forces de l’ordre ont pu promettre la confidentialité à la personne en cause en échange des renseignements communiqués. »

505. R. c. Scott, 1990 CanLII 27 (CSC), [1990] 3 R.C.S. 979, par. 31-33 :

« La valeur des indicateurs pour les enquêtes policières est depuis longtemps reconnue. Depuis que le crime existe, ou du moins depuis qu’il y a des poursuites criminelles, les indicateurs jouent un rôle important dans les enquêtes policières. Peut-être est-il vrai que certains indicateurs agissent contre rémunération ou dans leur propre intérêt. Peu importe leur mobile, les indicateurs sont dans une position précaire et jouent un rôle dangereux. Le rôle des indicateurs dans les affaires de drogues est particulièrement important et dangereux. Ils fournissent souvent à la police le seul moyen d’obtenir des renseignements sur les opérations et le fonctionnement des réseaux de trafiquants. On a estimé qu’aux États-Unis on a eu recours à des indicateurs dans environ quatre-vingt-quinze pour cent de toutes les affaires fédérales concernant des stupéfiants : voir Williams, “The Defense of Entrapment and Related Problems in Criminal Prosecution” (1959), 28 Fordham L. Rev. 399, à la p. 403, et M. S. Bewers, “Comments – Defendant’s Right to a Confidential Informant’s Identity” (1979), 40 La. L. Rev. 146, à la p. 148, note 4. L’enquête repose souvent sur la confiance qui s’établit entre le policier et l’indicateur; or, cette confiance peut être fort longue à obtenir. La sécurité, voire la vie, non seulement des indicateurs mais encore des agents de police clandestins, dépendent de cette confiance.

Le trafic des stupéfiants est payant. Le châtiment infligé aux indicateurs et aux agents de police clandestins qui tentent de réunir des preuves est souvent d’une cruauté répugnante. On ne peut guère s’attendre à ce que les indicateurs prêtent leur assistance si leur identité n’est pas protégée. La police ne pourrait pas établir de rapports de confiance avec les indicateurs s’ils étaient privés de cette protection. Pour que les enquêtes sur la criminalité liée aux drogues continuent, il faut protéger l’identité des indicateurs, dans la mesure du possible. »

506. R. c. Steeves, [2004] N.B.J. No. 549, par. 23 :

« The Court generally does not have the expertise, experience or more importantly, the intimate knowledge of the particular case or parties involved that the investigating officer and Crown counsel would have, and which may be necessary to properly determine what information in a Source Debriefing Report may, or may not, reveal the identity of an informer. Therefore, in most instances, the Court would, and should, accord great deference to the investigating officer and Crown counsel to determine what should be edited and deleted from disclosure to the accused so that the identity of the informant is not disclosed. »

507. R. c. D’Aragon, [2000] J.Q. No. 5199, par. 11 (C.A.) :

« Dans l’arrêt Leipert, précité, la Cour suprême du Canada a indiqué la procédure qui doit être suivie dans le cadre d’une requête d’un inculpé pour la divulgation de renseignements privilégiés lorsqu’il invoque l’exception concernant ce que la Cour décrit comme “la démonstration de l’innocence”, (expression qui mériterait d’être révisée.) Je formulerais comme suit les étapes de cette procédure :

(1) C’est à l’inculpé qu’incombe le fardeau d’établir qu’il existe un motif de conclure que sans la divulgation demandée, son “innocence” sera en jeu.

(2) Si l’existence de ce motif est établie, le tribunal pourra alors examiner l’information en cause pour déterminer si elle est effectivement nécessaire pour l’inculpé : cet examen se tient ex parte.

(3) Si le tribunal conclut que la divulgation est nécessaire, il ne devra révéler que les renseignements essentiels pour assurer une défense pleine et entière.

(4) Avant de divulguer les renseignements à l’inculpé, le tribunal doit donner au ministère public l’opportunité de décider s’il entend ou non permettre que de fait ces renseignements soient divulgués; ce n’est que si le ministère public y consent que les renseignements pourront être communiqués conformément à l’ordonnance. Dans le cas contraire, le tribunal décide du remède approprié. »

Turcotte c. R., [2003] J.Q. No. 7619, par. 11 (C.A.).

508. R. c. Leipert, 1997 CanLII 367 (CSC), [1997] 1 R.C.S. 281, par. 21.

509. R. c. Sheriffe, 2015 ONCA 880 (CanLII), [2015] O.J. No. 6609, par. 134-138 (C.A. Ont.) :

« First, confidential informer privilege is not a matter of judicial discretion. A court is under a duty to protect the informer’s identity. Hence the frequently applied characterization that the privilege is “absolute” : Named Person v. Vancouver Sun, 2007 SCC 43, [2007] 3 S.C.R. 253, at paras. 21, 23. Second, the confidential informer privilege rule is extremely broad in its coverage. It extends beyond a prohibition against disclosure of an informer’s name to include any information that might disclose the identity of the informer : Named Person, at para. 26.

Third, the confidential informer privilege rule admits but a single exception. It can be abridged if necessary to establish the innocence of an accused in a criminal trial. To invoke this exception requires a basis in the evidence adduced at trial for concluding that disclosure of the informer’s identity is necessary to demonstrate the innocence of an accused. Speculation will not suffice : Named Person, at para. 27; R. v. Leipert, 1997 CanLII 367 (CSC), [1997] 1 S.C.R. 281, at para. 21; R. v. Barros, 2011 SCC 51, [2011] 3 S.C.R. 368, at para. 34.

Fourth, the innocence-at-stake exception applies only where disclosure of the informer’s identity is the only way that an accused can establish his or her innocence : Named Person, at para. 27; R. v. Brown, 2002 SCC 32, [2002] 2 S.C.R. 185, at para. 4.

Finally, the confidential informer privilege rule does not allow a balancing of interests or an exception for full answer and defence or disclosure under Stinchcombe : Named Person, at para. 28; Liepert, at para. 12; Barros, at para. 35. »

510. Personne désignée c. Vancouver Sun, 2007 CSC 43 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 253, par. 27.

511. R. c. Leipert, 1997 CanLII 367 (CSC), [1997] 1 R.C.S. 281, par. 33.

512. R. c. Davies, [1982] O.J. No. 146, par. 15 et 16 :

« In the present case Bud was the only witness who could corroborate the testimony of the appellant that any vendors he introduced to Bud would have to make their own deals and that the appellant had no interest in any further participation, wanting only enough money to move to a larger apartment. I am unable to say that, if Bud’s testimony had corroborated the appellant’s in those respects, the jury would not have been left with a reasonable doubt as to whether the appellant had acted as agent for the vendors. Cannot assume that Bud’s testimony would not have supported the appellant. Indeed, the Crown conceded that Bud’s testimony might have been helpful. Fairness required that the full name and whereabouts of Bud should have been made available to defence counsel notwithstanding the delay in making the request. While the Crown may not be faulted for not producing it at an earlier stage in view of their perception of Bud as a police informant, it is my view that the learned trial judge had a duty to enforce his order of disclosure once he had been apprised of all the relevant facts which came out in the voir dire. This information was potentially necessary to the appellant in order to establish his status in the transactions upon which pivoted his guilt or innocence : the failure to provide it had, in my opinion, the result of preventing him from making full answer and defence. »

513. R. c. Leipert, 1997 CanLII 367 (CSC), [1997] 1 R.C.S. 281, par. 26.

514. Personne désignée c. Vancouver Sun, 2007 CSC 43 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 253, par. 30 :

« En conclusion, la justification générale de la règle du privilège relatif aux indicateurs de police exige un privilège extrêmement large et impératif. Une fois que le juge du procès est convaincu de l’existence du privilège, toute divulgation de l’identité de l’indicateur est absolument interdite. Mise à part l’exception relative à la démonstration de l’innocence de l’accusé, la règle jouit d’une protection absolue. La justification du privilège ne peut faire l’objet d’une évaluation au cas par cas. Le privilège assure la protection de tous les renseignements susceptibles de permettre l’identification de l’indicateur de police, et ni le ministère public ni le tribunal n’ont le moindre pouvoir discrétionnaire de communiquer ces renseignements dans une instance, en aucun temps. »

515. Personne désignée c. Vancouver Sun, 2007 CSC 43 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 253, par. 21-23 :

« Ainsi, un tribunal n’a aucun pouvoir discrétionnaire relativement au privilège; il est tenu de protéger l’identité de l’indicateur. En fait, le devoir du tribunal de ne pas enfreindre ce privilège est le même que celui de la police ou du ministère public.

Il faut souligner ici que les raisons qui justifient l’existence du privilège ne permettent pas que l’on évalue au cas par cas le maintien ou la portée du privilège en fonction des risques auxquels pourrait s’exposer l’indicateur. Le privilège relatif aux indicateurs de police est un privilège générique s’appliquant chaque fois que la présence d’un indicateur confidentiel est établie.

Dès lors que l’existence du privilège est démontrée, le tribunal a l’obligation d’appliquer la règle. C’est parce qu’elle revêt un caractère non discrétionnaire que la règle du privilège relatif aux indicateurs de police est qualifiée d’”absolue” : voir R. W. Hubbard, S. Magotiaux et S. M. Duncan, The Law of Privilege in Canada (feuilles mobiles), p. 2-7. Le ministère public a une obligation semblable : le privilège “appartient” tant au ministère public qu’à l’indicateur lui-même, de sorte que le ministère public n’a pas le droit de révéler l’identité de l’indicateur : Leipert, par. 15. »

R. c. Barros, 2011 CSC 51 (CanLII), [2011] 3 R.C.S. 368, par. 1 et 30 :

« Selon la jurisprudence, l’identité des indicateurs de police est protégée par un privilège quasi absolu qui l’emporte sur l’obligation générale de divulgation à la défense qui incombe au ministère public. Ce privilège n’est pas assujetti au pouvoir discrétionnaire judiciaire et il n’invite pas la pondération d’intérêts opposés (sous réserve d’une exception relative à “la démonstration de l’innocence de l’accusé”). »

« Or, l’adoption d’une règle plus souple qui accorderait aux juges du procès le pouvoir discrétionnaire de décider s’il convient ou non de divulguer l’identité des indicateurs de police priverait ces derniers de cette garantie et minerait leur volonté de collaborer. »

516. R. c. Basi, 2009 CSC 52 (CanLII), [2009] 3 R.C.S. 389, par. 37.

517. R. c. Brassington, 2018 CSC 37 (CanLII), [2018] 2 R.C.S. 617.

518. R. c. Brassington, 2018 CSC 37 (CanLII), [2018] 2 R.C.S. 617, par. 33.

519. R. c. McClure, 2001 CSC 14 (CanLII), [2001] 1 R.C.S. 445, par. 47.

520. R. c. Brassington, 2018 CSC 37 (CanLII), [2018] 2 R.C.S. 617, par. 36 (citant R. c. Brown, 2002 CSC 32 (CanLII), [2002] 2 R.C.S. 185, par. 52).

521. R. c. Brassington, 2018 CSC 37 (CanLII), [2018] 2 R.C.S. 617, par. 37. R. c. Brown, 2002 CSC 32 (CanLII), [2002] 2 R.C.S. 185, par. 4.

522. R. c. Brassington, 2018 CSC 37 (CanLII), [2018] 2 R.C.S. 617, par. 38. R. c. Brown, 2002 CSC 32 (CanLII), [2002] 2 R.C.S. 185, par. 4.

523. R. c. Brassington, 2018 CSC 37 (CanLII), [2018] 2 R.C.S. 617, par. 41.

524. R. c. Brassington, 2018 CSC 37 (CanLII), [2018] 2 R.C.S. 617, par. 37. R. c. Brown, 2002 CSC 32 (CanLII), [2002] 2 R.C.S. 185, par. 4.

525. R. c. Brassington, 2018 CSC 37 (CanLII), [2018] 2 R.C.S. 617, par. 48. Voir également au par. 47, les commentaires suivants :

« L’objet premier du droit des avocats et de leurs clients de communiquer librement dans le cadre d’une instance criminelle est de permettre à l’accusé et à l’avocat de discuter des aspects qui se rapportent à une défense pleine et entière. Dans ces circonstances, les “communications avocat-client” n’ont pas de valeur intrinsèque indépendante au-delà de leur rapport avec une défense pleine et entière. Comme c’est le cas pour toute autre personne qui se défend contre des accusations criminelles, s’il devient clair que les policiers risquent véritablement d’être reconnus coupables, et qu’il est nécessaire que les renseignements en question soient divulgués, les policiers peuvent présenter une demande de type McClure. »

526. R. c. Brassington, 2018 CSC 37 (CanLII), [2018] 2 R.C.S. 617, par. 48.

527. R. c. Barros, 2011 CSC 51 (CanLII), [2011] 3 R.C.S. 368, par. 37.

528. R. c. Barros, 2011 CSC 51 (CanLII), [2011] 3 R.C.S. 368, par. 37 et 38 :

« La jurisprudence ne permet pas d’affirmer que, selon la règle de fond en matière de confidentialité, il est interdit aux accusés et à leurs représentants de tenter de découvrir l’identité d’un indicateur par des moyens licites et en vue d’atteindre un objectif légitime. Du point de vue d’un accusé, la découverte de l’identité d’une source et les circonstances dans lesquelles son information a été obtenue par la police peuvent légitimement jouer un rôle dans la préparation d’une défense pleine et entière.

Il existe toutes sortes d’indicateurs, qui vont du voisin inquiet qui communique avec “Échec au crime” à propos d’un enfant qu’il croit maltraité au trafiquant de stupéfiants, en passant par l’employé dénonciateur. Certains indicateurs sont des citoyens exemplaires, d’autres le sont moins; certains agissent dans l’intérêt public alors que d’autres agissent dans des buts répugnants. La défense a le droit de faire tout ce qu’elle peut pour affaiblir la thèse de la poursuite, pourvu que les méthodes qu’elle utilise soient par ailleurs licites. Tout accusé a le droit de recueillir n’importe quel renseignement susceptible de soulever un doute raisonnable quant à sa culpabilité, et ce même si les conditions à remplir pour que s’applique l’exception relative à la “démonstration de l’innocence de l’accusé” ne sont pas réunies. Cette exception a trait à la divulgation par l’État de l’identité de l’indicateur et non pas aux renseignements obtenus par la défense grâce à ses propres moyens. »

529. R. c. Garofoli, 1990 CanLII 52 (CSC), [1990] 2 R.C.S. 1421, par. 79. Voir sur ce point R. c. Rocha, 2012 ONCA 707 (CanLII), [2012] O.J. No. 4991, par. 55 :

« The procedure based on “step six” in Garofoli permits the Crown to apply to have the reviewing judge consider as much of the excised material as is necessary to support the search warrant, which the trial judge may do upon providing the accused with “a judicial summary of the excised material” to attempt to ensure “the accused is sufficiently aware of the nature of the excised material to challenge it in argument or by evidence” : Garofoli, at p. 1461. »

530. R. c. Garofoli, 1990 CanLII 52 (CSC), [1990] 2 R.C.S. 1421, par. 79.

531. R. c. Garofoli, 1990 CanLII 52 (CSC), [1990] 2 R.C.S. 1421, par. 79.

532. Personne désignée c. Vancouver Sun, 2007 CSC 43 (CanLII), [2007] 3 R.C.S. 253, par. 23 et 25 :

« [L]e privilège “appartient” tant au ministère public qu’à l’indicateur lui-même, de sorte que le ministère public n’a pas le droit de révéler l’identité de l’indicateur [...]

De plus, l’indicateur lui-même ne peut décider unilatéralement de “renoncer” au privilège. Selon les auteurs de The Law of Evidence in Canada, à la p. 883, [Traduction] “[l]e privilège appartient à la fois au ministère public et à l’indicateur et, partant, l’indicateur ne peut prendre seul la décision d’y renoncer, ni non plus une partie en matière civile” : J. Sopinka, S. N. Lederman et A. W. Bryant, The Law of Evidence in Canada (2e éd. 1999) (en italique dans l’original). Au Royaume-Uni, les tribunaux ont conclu qu’un juge peut refuser de dévoiler l’identité d’un indicateur, même si ce dernier lui présente une demande expresse en ce sens : voir Powell c. Chief Constable of North Wales Constabulary, [1999] E.W.J. No. 6844 (QL) (C.A.), et Savage c. Chief Constable of Hampshire, [1997] 1 W.L.R. 1061 (C.A.). »

533. R. c. Mills, 1999 CanLII 637 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 668, par. 96 :

« [L]e législateur a voulu préserver l’accès d’un accusé aux dossiers privés susceptibles d’être pertinents quant à une question en litige, tout en protégeant le plus possible le droit à la vie privée des plaignants et des témoins. »

R. c. Quesnelle, 2014 CSC 46 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 390, par. 14 :

« Le régime traduit l’intention du législateur de concilier le droit de l’accusé à une défense pleine et entière et les droits à l’égalité et à la vie privée du plaignant dans les affaires d’infraction à caractère sexuel. »

534. R. c. Quesnelle, 2014 CSC 46 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 390, par. 31 :

« Le rapport de police consigne les renseignements fournis aux policiers par la personne concernée ou par un tiers, ou ceux obtenus au moyen d’une fouille, d’une perquisition, d’une saisie, d’une opération de surveillance ou d’un échange de renseignements. »

535. R. c. Quesnelle, 2014 CSC 46 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 390, par. 41.

536. R. c. Mills, 1999 CanLII 637 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 668, par. 114; R. c. Murray, [2017] O.J. No. 4799, par. 15 :

« In this case, it is clear that the complainant, who is represented by experienced counsel, was fully apprised of the consequences of his decision to release his records to the Crown and Defence. The complainant’s waiver is express and informed, and the Court need not have concerns that it is undermining the complainant’s privacy interests in releasing the records. »

537. R. c. Mills, 1999 CanLII 637 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 668, par. 115.

538. Art. 278.5(1)b) et c) C.cr.. R. c. S.S., [2019] J.Q. No. 22242, par. 54-57 :

« Dans cette analyse, le Tribunal doit se demander dans quelle mesure ce dossier est nécessaire pour permettre une défense pleine et entière, quelle est sa valeur probante et évaluer la nature et la portée de l’attente raisonnable au respect de son caractère privé.

Par ailleurs, le Tribunal doit se demander si la communication repose sur une croyance ou un préjugé discriminatoire, évaluer le préjudice possible à la dignité ou à la vie privée des plaignantes, tenir compte de l’intérêt qu’a la société à ce que les infractions d’ordre sexuel soient signalées et à ce que les plaignantes suivent des traitements tout en jaugeant l’effet de sa décision sur l’intégrité du processus judiciaire.

Pour se décharger de son fardeau d’établir que le dossier est vraisemblablement pertinent, l’accusé doit convaincre le Tribunal qu’il existe “une possibilité raisonnable que les renseignements aient une valeur logiquement probante relativement à une question en litige [...]”.

Il importe de rappeler qu’il ne suffit pas d’affirmer que le dossier existe, qu’il se rapporte à une thérapie suivie par les plaignantes, qu’il porte sur l’évènement qui fait l’objet du litige, qu’il est susceptible de contenir une déclaration antérieure incompatible faite par les plaignantes, qu’il pourrait se rapporter à la crédibilité de celles-ci ou qu’il pourrait se rapporter à la véracité de leurs témoignages étant donné qu’elles ont suivi une thérapie. »

539. R. c. Mills, 1999 CanLII 637 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 668, par. 124 :

« Dans l’arrêt O’Connor de notre Cour, tant les juges majoritaires que les juges dissidents ont conclu que les dossiers doivent être communiqués au juge pour qu’il les examine, si l’accusé peut démontrer que les renseignements en question sont “d’une pertinence probable” : O’Connor, précité, au par. 19, le juge en chef Lamer et le juge Sopinka, et au par. 138, le juge L’Heureux-Dubé. Notre Cour a défini la norme de la pertinence probable comme étant “une possibilité raisonnable que les renseignements aient une valeur logiquement probante relativement à une question en litige ou à l’habilité à témoigner d’un témoin” (par. 22 (souligné dans l’original)). »

Voir par exemple R. c. R.B.P., [2017] B.C.J. No. 891, par. 47 :

« Having regard to the evidentiary information before me that is being presented by the Accused, I am satisfied that for the purposes of this first stage the applicant has met the likely relevance test, and specifically that the information is logically probative to an issue at trial or the competence of a witness to testify. Specifically, I am of the view that it relates to the competence of a witness to testify. »

540. R. c. Bartholomew, [2017] O.J. No. 4422, par. 14 :

« An example of what “something more” might be is provided by the case of R. v. MacIsaac, 2017 ONCA 172 where G.T. Trotter J.A. ruled that the defence in that case ought to have been allowed to explore the issue of a witness experiencing delusions or hallucinations in cross-examination. He found (at para. 59) that whereas credibility is ordinarily considered a collateral issue not subject to the admission of extrinsic evidence, exceptions to this rule are made where “medical evidence may be adduced to prove that, by virtue of a mental or physical condition, the witness is incapable of telling or is unlikely to tell the truth”. In my view, evidence of a nexus or link between the medical condition and the capacity of the complainant or witness to recount truthfully the events in question at trial would be an instance of the sort of “something more” required by s. 278.3(4) of the Criminal Code. »

R. c. Batte, 2000 CanLII 5751 (ON CA), [2000] O.J. No. 2184, par. 70-72 (C.A. Ont.) :

« The appellant’s position with respect to the likely relevance of the records must come down to this. The records contained statements made by D.S.D. that referred to the alleged abuse and to matters affecting her credibility. Anything said by D.S.D. about the abuse or about a matter which could affect her credibility passes the likely relevance threshold, even absent any suggestion that the statements differ from or add anything to the complainant’s statement and testimony at the preliminary hearing.

If the likely relevance bar is that low, it serves no purpose where the records relate to counselling or treatment connected to allegations of sexual abuse. It is impossible to imagine that such records would not contain references to the alleged abuse or matters that could affect the credibility of the complainants’ allegation of abuse. In my view, the mere fact that a complainant has spoken to a counsellor or doctor about the abuse or matters touching on the abuse does not make a record of those conversations likely relevant to a fact in issue or to a complainant’s credibility.

I would hold that where confidential records are shown to contain statements made by a complainant to a therapist on matters potentially relevant to the complainant’s credibility, those records will pass the likely relevance threshold only if there is some basis for concluding that the statements have some potential to provide the accused with some added information not already available to the defence or have some potential impeachment value. To suggest that all statements made by a complainant are likely relevant is to forget the distinction drawn by the majority in O’Connor, between relevance for the purposes of determining the Crown’s disclosure obligation and relevance for the purposes of determining when confidential records in the possession of third parties should be produced to a judge. »

541. R. c. C.L., [2002] O.J. No. 4228, par. 15 :

« This doctor is the family physician of the complainant J.W. This complainant alleges various injuries caused to her by assaults perpetrated by the accused. In particular, she alleges that her back injury was caused by the accused. The x-rays seen by Dr. Myers show a fusion of vertebrae. In my view, Dr. Hopgood’s notes and records are relevant to the assault charges specified in the indictment. »

542. R. c. L.M., [2014] O.J. No. 4343, par. 36 (C.A. Ont.) :

« The purpose of s. 278.3(4) is “to prevent speculative and unmeritorious requests for production”, especially those based on “myths, stereotypes and generalized assumptions about sexual assault victims and classes of records” : Mills, at paras. 118-119. The provision does not, however, entirely prevent an accused from relying on the enumerated factors as a basis for production. Rather, it simply prevents reliance on the bare assertion where there is no other evidence and the bare assertion stands on its own. »

544. R. c. Mills, 1999 CanLII 637 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 668, par. 131.

545. R. c. Mills, 1999 CanLII 637 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 668, par. 132.

546. R. c. Leipert, 1997 CanLII 367 (CSC), [1997] 1 R.C.S. 281, par. 24 : « [N]otre Cour a constamment affirmé que la règle selon laquelle l’innocent ne doit pas être déclaré coupable est un principe de justice fondamentale garanti par la Charte. »

547. R. c. Mills, 1999 CanLII 637 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 668, par. 132.

548. R. c. Mills, 1999 CanLII 637 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 668, par. 137. « S’il y a un risque de violation du droit de l’accusé à une défense pleine et entière, le juge du procès devrait pécher par excès de prudence et ordonner la communication au tribunal. »

549. R. c. Mills, 1999 CanLII 637 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 668, par. 134.

550. R. c. Mills, 1999 CanLII 637 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 668, par. 137.

551. R. c. Mills, 1999 CanLII 637 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 668, par. 137.

552. R. c. Mills, 1999 CanLII 637 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 668, par. 137.

554. R. c. Mills, 1999 CanLII 637 (CSC), [1999] 3 R.C.S. 668, par. 141 :

« Ces préoccupations sont largement dissipées par l’analyse fondée sur le par. 278.5(2), qui a fait l’objet d’un examen plus détaillé précédemment. Le juge du procès n’est pas tenu de se prononcer de façon définitive sur chacun des facteurs, et il n’est pas non plus tenu de décider si les facteurs relatifs au droit à la vie privée et au droit à l’égalité du plaignant ou du témoin “l’emportent” sur ceux concernant le droit de l’accusé à une défense pleine et entière. Là encore, on ne demande au juge du procès que de “tenir compte” des facteurs énumérés au par. 278.5(2) pour décider si la communication à l’accusé de la totalité ou d’une partie du dossier contesté sert les intérêts de la justice (par. 278.7(1)). »

561. Art. 278.7(3)f) C.cr.. R. c. R.N., [2017] O.J. No. 2517, par. 26-28 :

« Section 278.7(3) provides that I may impose conditions on the production of records to protect the interests of justice and, to the greatest extent possible, the privacy and equality interests of the complainant and any other person to whom the records relate. Therefore, I have directed that certain entries be redacted to effect those purposes. I impose the following further conditions :

a. A copy of the records as redacted, rather than the original, shall be produced to the counsel for the applicant and the Crown.

b. Counsel and the accused shall not disclose the contents of the records to any other person except with approval by the court.

c. No copies of the records shall be made unless approved by the court, except for trial use by counsel.

The records as redacted and produced to counsel shall be sealed in the court file.

The unredacted records shall also be kept in a sealed package by the court pursuant to the provisions of section 278.7(6). »

562. R. c. Rothman, 1981 CanLII 23 (CSC), [1981] 1 R.C.S. 640, par. 84.

563. R. c. Horan, 2008 ONCA 589 (CanLII), [2008] O.J. No. 3167, par. 26 (C.A. Ont.) :

« [Traduction] En termes simples, la communication est un moyen de parvenir à une fin. En effet, la communication intégrale par le ministère public sert à garantir que l’accusé subit un procès équitable, qu’il a une chance réelle de répondre à la preuve de la poursuite et que, en définitive, le verdict est fiable. [Cité en français dans R. c. Bjelland, 2009 CSC 38 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 651, par. 20]. »

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La diffusion de l'ouvrage Traité de droit criminel. Tome IV, Les garanties juridiques de Hugues Parent, et publié par Wilson et Lafleur, est rendue possible grâce à une licence accordée au CAIJ par Wilson et Lafleur.

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